CHAPITRE 4 DE LA RECHERCHE CLINIQUE À LA PHARMACIE CLINIQUE
DE LA RECHERCHE CLINIQUE À LA PHARMACIE CLINIQUE
– pharmacocinétiques (modalités de l’absorption, de la distribution, du métabolisme et de l’excrétion du médicament) ;
– pharmacodynamiques (mode d’action du médicament notamment) ;
Les essais cliniques portent sur l’évaluation de nouvelles molécules ou d’associations de médicaments connus. Ils se déroulent en quatre phases (tableau 4.1) :
Ils sont encadrés par des règles méthodologiques et éthiques strictes et suivent les recommandations des Bonnes Pratiques Cliniques (BPC) [1].
La recherche clinique, c’est l’évaluation :
Le pharmacien clinicien va faire appel à sa capacité de jugement pour interpréter les données issues des recherches afin de les utiliser pour optimiser la prise en charge du patient (figure 4.1).
Comme toute discipline universitaire, la pharmacie clinique recouvre trois domaines d’activité : l’enseignement, le soin ou la pratique et la recherche. Ces trois domaines ont pour objectif de développer les connaissances afin d’optimiser la prise en charge thérapeutique des patients et d’améliorer leur condition. C’est un objectif commun avec la recherche clinique, sachant que sur le plan éthique, aucune recherche ne peut être effectuée sur l’être humain, si elle ne vise pas à étendre la connaissance scientifique de l’être humain et les moyens susceptibles d’améliorer sa condition (figure 4.2).
CONTEXTE DE LA RECHERCHE CLINIQUE
Contexte éthique
Plusieurs recommandations émanant de textes fondamentaux tels que la Déclaration d’Helsinki [2] énoncent les principes généraux du respect de l’éthique dans la recherche :
– la primauté de la personne sur la recherche ;
– le rapport bénéfices-risques ;
– la qualité des données précliniques ;
– la soumission du protocole à un comité d’éthique indépendant ;
– l’examen par le comité d’éthique ;
– le consentement libre et éclairé : modalités, révocabilité ;
– le respect de la vie privée et des données personnelles ;
– l’indemnisation des sujets en cas d’accident ;
– le droit au bénéfice de la recherche ;
Plusieurs lois ou textes juridiquement contraignants imposent ces mêmes principes, c’est ainsi que la loi française dans l’article L.1121-2 du Code de la santé publique (CSP) [3] énonce :
– « Aucune recherche biomédicale ne peut être effectuée sur l’être humain :
Contexte réglementaire
Le terme de recherche biomédicale désigne « les recherches organisées et pratiquées sur l’être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales « [4].
On définit par recherches biomédicales ou essais cliniques portant sur un médicament « tout essai clinique d’un ou plusieurs médicaments visant à déterminer ou à confirmer leurs effets cliniques, pharmacologiques et les autres effets pharmacodynamiques ou à mettre en évidence tout effet indésirable, ou à en étudier l’absorption, la distribution, le métabolisme et l’élimination, dans le but de s’assurer de leur innocuité ou de leur efficacité « [5, 6]. Les médicaments à usage humain sont définis dans les articles L5121-1 [7] et L1243 [8] du CSP.
Les essais cliniques portant sur un dispositif médical sont quant à eux décrits « comme tout essai clinique ou investigation clinique d’un ou plusieurs dispositifs médicaux visant à déterminer ou à confirmer leurs performances ou à mettre en évidence leurs effets indésirables et à évaluer si ceux-ci constituent des risques au regard des performances assignées au dispositif « [6].
Ne rentrent pas dans ces définitions les recherches dites « non interventionnelles «, recherches pour lesquelles la stratégie médicale destinée à une personne qui se prête à la recherche n’est pas fixée à l’avance par un protocole et relève de la pratique courante [6], ainsi que les recherches visant à évaluer les soins courants, autres que celles portant sur les médicaments [4].
– La loi Huriet-Serusclat de décembre 1988 relative à la protection des personnes dans la recherche biomédicale [9].
– La directive européenne 2001/20/CE du 4 avril 2001 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des états membres relatives à l’application de bonnes pratiques cliniques dans la conduite d’essais cliniques de médicaments à usage humain [5]. Cette directive fixe notamment : les dispositions spécifiques concernant la conduite des essais cliniques, le respect des bonnes pratiques cliniques (inspections), la fabrication et l’importation des médicaments expérimentaux, la protection des personnes et le rôle du comité d’éthique. Cette directive est actuellement en cours de révision.
– La loi relative à la politique de santé publique nº 2004-806 du 9 août 2004 (partie recherche médicale, articles 88 à 97) [10]. Cette loi et son décret d’application nº 2006-477 du 26 avril 2006 [11], renforcent en les modifiant, les dispositions de la loi Huriet-Serusclat (nº 88-1138) [9] sur la protection des personnes se prêtant à la recherche médicale et prévoient notamment que tout essai clinique doit faire l’objet d’un avis favorable d’un comité de protection des personnes et d’une autorisation de l’autorité compétente (anciennement AFSSAPS, Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé).
– La directive européenne 2005/28/CE du 8 avril 2005 [12] fixant des principes et des lignes directrices détaillées relatifs à l’application de bonnes pratiques cliniques en ce qui concerne les médicaments expérimentaux à usage humain, le dossier de l’essai et son archivage, les qualifications des inspecteurs et les procédures d’inspection ainsi que les exigences pour l’octroi de l’autorisation de fabriquer ou d’importer ces médicaments.
– Eudralex-Volume 10 Clinical Trial Guidelines The rules governing medicinal products in the European Union [13]. Y sont décrits les procédures de demande d’autorisation pour essais cliniques, les règles de monitorage et de pharmacovigilance, les informations sur la qualité des produits expérimentaux, les recommandations sur les inspections ainsi que des renseignements supplémentaires concernant l’éthique, les documents et l’archivage.
Les Bonnes Pratiques Cliniques
En 1996, l’International Conference on Harmonisation (ICH) publie une note explicative ICHE6 (CPMP/ICH/135/95) qui a pour but d’harmoniser les pratiques en terme de recherche biomédicale entre l’Union Européenne, les États-Unis et le Japon [14]. La transposition de ICHE6 et de la directive européenne 2005/28/CE [12] a conduit à la décision du 24 novembre 2006 relative aux règles de Bonnes Pratiques Cliniques pour les recherches biomédicales portant sur des médicaments à usage humain [1].
– la protection des droits, la sécurité et la protection des personnes se prêtant à l’essai ;
– la crédibilité et la confidentialité des données à caractère personnel et des résultats des essais cliniques.
LES DIFFÉRENTS TYPES DE RECHERCHES
La recherche clinique est divisée en deux grandes catégories, les études « non interventionnelles « et les études « interventionnelles « (figure 4.3).
Fig. 4.3 Les différents types de recherches cliniques (AC : autorité compétente ; CPP : comité de protection des personnes).
Les recherches non interventionnelles
Les études non interventionnelles sont définies, en ce qui concerne le médicament, comme : « étude dans le cadre duquel le ou les médicaments sont prescrits de la manière habituelle conformément aux conditions fixées dans l’autorisation de mise sur le marché. L’affectation du patient à une stratégie thérapeutique donnée n’est pas fixée à l’avance par un protocole d’essai, elle relève de la pratique courante et la décision de prescrire le médicament est clairement dissociée de celle d’inclure le patient dans l’étude. Aucune procédure supplémentaire de diagnostic ou de surveillance ne doit être appliquée aux patients et des méthodes épidémiologiques sont utilisées pour analyser les données recueillies « [5]. Ces études regroupent :
– les études observationnelles, qui sont définies comme des « recherches dans lesquelles tous les actes sont pratiqués et les produits utilisés de manière habituelle, sans aucune procédure supplémentaire ou inhabituelle de diagnostic ou de surveillance « [4] ;
– les collections d’échantillons biologiques humains. Ce terme désigne « la réunion, à des fins scientifiques, de prélèvements biologiques effectués sur un groupe de personnes identifiées et sélectionnées en fonction des caractéristiques cliniques ou biologiques d’un ou plusieurs membres du groupe, ainsi que des dérivés de ces prélèvements « [15]. Ces études sont soumises à l’avis d’un CPP et à l’autorisation du ministre chargé de la recherche et le cas échéant, du directeur général de l’agence régionale de santé ;
– les études rétrospectives sur données (sans intervention sur l’être humain).
Les études interventionnelles
– les essais cliniques portant sur un produit de santé et les recherches biomédicales hors produits de santé [16]. Ces études nécessitent l’avis d’un CPP et l’autorisation de l’autorité compétente.
Méthodologie des essais
Selon sa méthodologie, un essai clinique peut être décrit comme suit.
– « Monocentrique « lorsque la recherche ne se déroule que dans un seul centre et « multicentrique « lorsqu’elle se déroule sur plusieurs centres ou lieux de recherche.
– « Randomisé « lorsque le bras de traitement est attribué au hasard par tirage au sort. Cette répartition aléatoire est indépendante du patient, de la maladie, du médecin ou du traitement. La randomisation peut être équilibrée (un pour un), dans ce cas le patient a autant de chance d’être dans l’un des deux bras de traitement, ou non équilibrée (un pour deux.). L’affectation dans un bras de traitement s’effectue à l’aide d’une liste de randomisation. La liste de randomisation est réalisée de telle sorte qu’elle permet une répartition aléatoire des traitements tout en conservant un équilibre entre le nombre de patients inclus dans les différents groupes de traitements. Ceci est rendu possible par la conception de « bloc de randomisation « correspondant en général à l’attribution d’un groupe de traitement pour 4 à 6 patients. Une fois un bloc de randomisation terminé, on est assuré que chaque groupe comporte le même nombre de patients. Les blocs de randomisation peuvent également être « stratifiés «, c’est-à-dire qu’en plus d’un équilibre entre le nombre de patients, il y a une répartition homogène des catégories de patients en terme de sexe (homme/femme), d’âge ou encore de centre d’inclusion entre les groupes de traitement. La randomisation a pour but d’éviter les erreurs d’interprétation ou biais liés à la sélection des patients en permettant la conception de groupes homogènes comparables.
– « Randomisé en cross-over « : dans ce cas, les patients sont inclus aléatoirement dans un groupe de traitement pendant une durée précise puis changent de bras de traitement pour une durée identique. Entre les deux périodes, il peut être prévu une période sans traitement ou « washout «.
– « En ouvert « lorsque le médecin et le patient connaissent le groupe de traitement.
– « En simple aveugle « lorsque le médecin connaît le groupe de traitement mais pas le patient.
– « En double aveugle « lorsque ni le médecin ni le patient ne connaissent le groupe de traitement attribué.
– « Évalué en aveugle « lorsque la personne qui mesure les critères d’évaluation du traitement ne connaît pas le groupe de traitement attribué.
– « Comparatif «, lorsque le traitement à l’étude est comparé à un traitement placebo ou de référence (témoin actif).