Chapitre 37 Endophtalmie et décollement de rétine
L’endophtalmie après chirurgie de la rétine est rare mais dévastatrice, mettant rapidement en jeu le pronostic visuel [1, 8, 13]. La présence d’air ou de silicone dans la cavité vitréenne modifie la physiopathologie, les signes cliniques et la prise en charge thérapeutique. Il n’en demeure pas moins que le traitement doit viser la cavité vitréenne et que l’injection intravitréenne d’antibiotiques doit être faite immédiatement.
Les micro-organismes responsables sont majoritairement des cocci à gram positif [8, 13] : Staphylococcus epidermidis, staphylocoque doré ou streptocoques.
Incidence
L’endophtalmie survient le plus souvent après chirurgie endoculaire du décollement de rétine, les cas après chirurgie extraoculaire étant anecdotiques et probablement liés à une perforation sclérale. L’incidence de l’endophtalmie après vitrectomie varie en fonction des séries, aux alentours de 0,04 % [1, 4, 8, 13, 19, 24, 30].
Physiopathogénie
Comme dans toute chirurgie, la contamination a lieu essentiellement à partir de la flore commensale de la conjonctive [29]. Le risque de pénétration intraoculaire d’un micro-organisme au cours d’une chirurgie endoculaire est variable, en particulier selon la durée, les difficultés rencontrées et la taille des incisions. Dans le cas de la chirurgie intraoculaire du décollement de rétine, le risque d’endophtalmie devrait être logiquement augmenté puisqu’on inocule directement la cavité vitréenne ; mais ceci est contrebalancé par les pressions positives liées à l’irrigation continue et par la petite taille des incisions et leur étanchéité. Si les micro-organismes peuvent pénétrer lors de l’acte opératoire quand les sclérotomies sont largement ouvertes, ils peuvent aussi certainement pénétrer en postopératoire si les sclérotomies sont non étanches avec mèches de vitré : c’est une des hypothèses pour expliquer l’augmentation d’incidence des endophtalmies après vitrectomie en 23 G ou 25 G avec abord transconjonctival non suturé par rapport aux vitrectomies classiques en 20 G trouvée dans certaines séries au début de l’utilisation de ces procédures [20, 26]. Depuis, les séries plus récentes tendent à trouver une incidence d’endophtalmie égale entre le 20 G et le 25 G, peut-être en raison d’une courbe d’apprentissage, d’une meilleure qualité des incisions, plus étanches, et d’un renforcement des précautions d’hygiène, peut-être initialement un peu délaissées en raison de la rapidité du geste avec le 25 G [18, 25, 28, 31].
La chirurgie extraoculaire du décollement de rétine n’entraîne par définition quasiment jamais d’endophtalmie, les seuls gestes à risque étant la ponction du liquide sous-rétinien et les points scléraux. À plus long terme, l’infection du matériel d’indentation induit une infection péri-oculaire, pouvant aboutir à une fonte purulente du globe s’il existe des points perforants ou une fonte de la paroi sclérale par des bacilles à gram négatif ou des streptocoques [12].
Le développement d’une endophtalmie chez un patient donné après pénétration d’une bactérie dans l’œil dépend de plusieurs facteurs, dont les plus importants sont l’inoculum bactérien et la virulence de la bactérie. Dans les endophtalmies post-vitrectomies, les staphylocoques coagulase-négatifs sont les moins virulents, les streptocoques et les bacilles à gram négatif les plus dévastateurs [8, 9, 15]. L’immunité du patient intervient également : elle est diminuée en cas de diabète, de corticothérapie au long cours ou de traitements immunosuppresseurs.
Sur un œil vitrectomisé, les effecteurs de l’immunité et les antibiotiques atteignent plus rapidement le centre de la cavité vitréenne grâce à la rupture des barrières hématorétiniennes, ce qui favorise la pénétration des antibiotiques administrés par voie systémique [23]. En revanche, les antibiotiques s’éliminent plus rapidement, ce qui diminue significativement leur demi-vie d’élimination [22, 27] et certainement leur efficacité puisque le temps de contact entre les molécules actives et les micro-organismes est diminué.
La présence de gaz ou de silicone va aussi modifier les signes cliniques et compliquer la prise en charge de l’endophtalmie. La ponction vitréenne à visée bactériologique a peu de chance d’être positive car les espaces périphériques où se trouvent les microorganismes sont peu accessibles. La présence de gaz ou de silicone réduit l’espace de diffusion des antibiotiques, ce qui doit rendre prudent quant à la tolérance vis-à-vis des injections intravitréennes : en cas d’œil rempli de silicone, il faudrait envisager une diminution du volume injecté pour les antibiotiques à faible index thérapeutique, tels que les aminosides.
Diagnostic
L’examen au biomicroscope note un tyndall de chambre antérieure ou un hypopion, de la fibrine en chambre antérieure avec, parfois, une galette obstruant la pupille, des synéchies iridocristalliniennes (fig. 37-1).
Après chirurgie extraoculaire, l’infection du matériel d’indentation survient dans la majorité des cas très à distance. La douleur et le chémosis dominent ; la vision demeure inchangée parce que le globe oculaire est respecté. L’ablation rapide du matériel d’indentation avec lavage abondant permet d’éviter la survenue de l’endophtalmie [16].

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