Chapitre 35
Rééducation postopératoire des lésions traumatiques des extenseurs en zones VII–VIII
Introduction
La mobilisation protégée postopératoire est devenue la norme après réparation chirurgicale des lésions des tendons extenseurs. La mobilisation protégée consiste à entraîner un glissement contrôlé de la réparation tendineuse de façon à orienter la formation des adhérences en un réseau souple ne bloquant pas l’excursion tendineuse. La mobilisation protégée améliore l’architecture du cal cicatriciel et sa résistance à la traction [1]. Comme l’a défini Tubiana, la mobilisation protégée postopératoire peut s’effectuer de façon passive, semi-active et active [2]. Les protocoles de mobilisation semi-actif et actif sont à l’heure actuelle les plus utilisés. Les deux types de protocoles présentent des avantages et inconvénients et tous, s’ils sont correctement appliqués, peuvent amener de bons résultats. Il est cependant clair à l’instar des tendons fléchisseurs que la mobilisation active protégée notamment sous forme de « placer-tenir » entraîne un glissement proximal de la réparation tendineuse supérieure à la mobilisation passive seule [3].
La mobilisation protégée semi-active
Elle réalise pour les extenseurs la technique de « Kleinert inversé » : extension passive automatique par rappel élastique qui entraîne un glissement proximal de la réparation tendineuse et flexion active limitée qui entraîne un glissement distal de la réparation tendineuse. La mobilisation semi-active nécessite la fabrication d’une orthèse spécifique selon les zones des extenseurs. Cette orthèse est selon la technologie utilisée plus ou moins complexe à réaliser [4]. Elle requiert de l’expérience et une certaine dextérité de la part du rééducateur, conditions que l’on ne retrouve que dans les équipes spécialisées. L’orthèse est portée de 30 à 45 jours, l’autorééducation postopératoire est simple et peu astreignante pour le patient. Bien que le patient soit averti de ne pas tendre activement ses doits et que l’extension soit théoriquement exclusivement passive par rappel élastique, il est certain que les patients porteurs d’une orthèse contractent de façon involontaire, réflexe, leurs muscles extenseurs entraînant ainsi une extension active assistée par le rappel élastique. Même sous orthèse dynamique d’extension, il se produit un glissement « actif » des tendons [5]. La frontière entre extension passive et extension active assistée par le rappel élastique est floue. Actuellement, c’est une approche thérapeutique qu’il faut savoir conseiller à certains patients « cortiqués » et coopérants.
La mobilisation protégée active
Elle consiste à faire effectuer régulièrement dans la journée par le patient des exercices actifs de flexion-extension limitée du poignet et des doigts dans une amplitude limitée. La technique du placer-tenir est couramment utilisée car elle place le minimum de tension sur la réparation tendineuse. Le reste du temps, la main et le poignet sont immobilisés en position de sécurité, extension du poignet d’environ 30°, flexion des MCP d’environ 70° dans une orthèse « statique » d’immobilisation selon le « protocole d’Oxford » [3]. L’orthèse d’immobilisation est plus simple à fabriquer qu’une orthèse dynamique et requiert moins de compétence de la part du rééducateur. Par contre, la mobilisation active périodique dans ou en dehors de l’orthèse est plus contraignante et demande une collaboration totale de la part du patient, au risque de se transformer en immobilisation de la réparation tendineuse.
Les protocoles de mobilisation postopératoire sont variables en fonction des zones des extenseurs et entraînent la fabrication d’orthèses spécifiques [6,7].
Dans ce chapitre, nous envisageons le traitement postopératoire des réparations tendineuses en zones VII et VIII par mobilisation semi-active différentielle, poignet et doigts devant être mobilisés de façon séparée, analytique. Nous décrirons l’orthèse répondant au cahier des charges de cette mobilisation. Pendant les séances de rééducation, l’orthèse est enlevée et quelques exercices de mobilisation active protégée sont effectués dans une position diminuant la pesanteur, dans une amplitude limitée par le patient auquel le rééducateur enseigne la technique du « placer-tenir ».
Les zones VII et VIII
La zone VII correspond au ligament rétinaculaire dorsal du carpe. Le ligament rétinaculaire dorsal du carpe constitue la seule poulie de réflexion de l’appareil extenseur au niveau du poignet. Dans le sens longitudinal, il empêche la mise en corde d’arc des tendons lors de l’extension du poignet. Dans le sens transversal, c’est à partir de lui que les tendons extenseurs des doigts et du pouce s’écartent au dos de la main pour rejoindre leurs métacarpo-phalangiennes (MCP) respectives. Les tendons des doigts et du poignet sont bien individualisés et uniquement à ce niveau sont dotés de gaines synoviales [8]. En zone VII, les extenseurs des doigts et du poignet coulissent dans des gaines ostéo-fibreuses, proches l’une de l’autre. La face dorsale du poignet est divisée en 6 compartiments qui séparent les tendons extenseurs du poignet de ceux des doigts longs et du pouce. Il est rare qu’un traumatisme sectionne tous les éléments tendineux. Pourtant, cette lésion arrive régulièrement en patinage à glace et à ski.
Excursions des tendons extenseurs au niveau du poignet
Les extenseurs du poignet ne sont pas mono-articulaires. Ils croisent les deux rangées du carpe pour s’insérer : l’ECRL sur la base du 2e métacarpien, l’ECRB sur la base du 3e métacarpien, l’ECU sur la base et le bord médial du 5e métacarpien. Leur excursion est cependant moindre que celles des extenseurs des doigts et du pouce, muscles poly-articulaires.
Toutes adhérences au niveau de la zone VII « collent » les tendons extenseurs des doigts et du poignet entre eux et aux coulisses ostéo-fibreuses. Lorsque les tendons extenseurs des doigts et du pouce, dont l’excursion est presque le double de ceux du poignet, adhèrent aux tendons extenseurs du poignet et aux structures adjacentes, ils deviennent extenseurs du poignet et ne peuvent plus assumer l’extension des MCP. Il se produit un effet ténodèse. Le patient peut tendre son poignet mais est incapable de tendre simultanément poignet et doigts longs. La flexion simultanée des doigts et du poignet est également impossible. Si le patient veut tendre ses doigts, il lui faut fléchir le poignet ce qui met en tension les adhérences et permet à l’EDC, au EPL aux EIP et EDM de tendre les MCP (figure 35.1).

Stay updated, free articles. Join our Telegram channel

Full access? Get Clinical Tree

