3: Immobilisations plâtrées du membre supérieur

Chapitre 3 Immobilisations plâtrées du membre supérieur



« Il est de toute nécessité que les médecins arrivent à faire de bons plâtres, car les guérisons parfaites ne peuvent s’obtenir qu’avec des appareils parfaits. » (F. Calot, L’orthopédie indispensable, 1910).


L’immobilisation plâtrée représente le mode de contention thérapeutique le plus utilisé en traumatologie et en orthopédie pédiatrique. Sa relative facilité de mise en œuvre en fait un outil remarquable à condition de bien connaître ses techniques de réalisation, ses indications et ses complications.


Le plâtre peut être circulaire ou sous forme d’attelle. C’est un tuteur externe qui permet d’immobiliser et d’acquérir une stabilité squelettique ou articulaire primaire. Il offre une stabilisation primaire immédiate du foyer de fracture par un exosquelette et est le pendant de l’ostéosynthèse qui crée dans ce cas un endosquelette.


Le plâtre est inextensible et non élastique. Il ne peut par conséquent pas s’adapter au contenu au fil de l’évolution thérapeutique. Il faudra donc savoir le refaire au cours du traitement, ou le réadapter. L’immobilisation plâtrée devient désadaptée dans deux cas : soit le membre continue à augmenter de volume et un risque compressif se crée, soit le membre traumatisé diminue de volume, et il existe alors un risque de déplacement secondaire, d’où la nécessité de contrôles fréquents. En cas d’ostéosynthèse « légère » associée, le plâtre vient pallier la faible rigidité de celle-ci.


Le plâtre est le premier des antalgiques. En supprimant le mouvement, il diminue la douleur. De même devant un épanchement inflammatoire, l’immobilisation diminue la production de liquide articulaire. Le plâtre est aussi le premier des cicatrisants. Par son rôle de « carapace », il protège le membre de toute nouvelle agression extérieure. L’absence de mouvement favorise la cicatrisation en diminuant les tensions cutanées, notamment pour les plaies ou incisions chirurgicales situées à proximité d’une articulation.


Pour immobiliser efficacement un segment de membre ou une articulation, il est nécessaire d’immobiliser les segments sus et sous-jacents. Pour immobiliser une racine d’un membre, il faudra donc prendre appui sur la zone anatomique voisine. Chacune des positions d’immobilisation entraîne un handicap qu’il faut connaître. Lorsqu’on immobilise un membre supérieur, il faut savoir si l’on veut conserver la préhension ou au contraire la limiter ou l’empêcher. Plus l’immobilisation sera distale, plus la préhension sera facilitée, un coude libre permettant l’alimentation. Immobiliser le membre supérieur, c’est limiter la préhension. Immobiliser l’épaule et le segment huméral, c’est empêcher le membre préhenseur de se dégager du tronc. Immobiliser le coude en flexion à 90° empêche de porter la main à la bouche et de s’alimenter seul. Immobiliser le coude en forte flexion entraîne, outre l’inconfort, un risque de compression vasculaire ce qui nécessite une surveillance accrue de l’immobilisation (plâtre de Blount). Pour immobiliser l’avant-bras, si on veut éloigner les deux os l’un de l’autre pour éviter une synostose, il faudra plâtrer en supination. La main ne pourra alors être utilisée qu’en mode plateau. Si on souhaite conserver la préhension, il faudra immobiliser la main en pronation ou en semi-pronation avec le pouce en opposition.


L’immobilisation de l’enfant et de l’adolescent obéit à des principes communs avec celle de l’adulte. Elle s’en différencie :






L’immobilisation conduit à la création d’un handicap temporaire. Quelle que soit l’immobilisation réalisée, celleci limite l’autonomie. La famille doit en être informée. L’immobilisation peut et doit être évolutive. Plus le nombre d’articulations incluses dans le plâtre est important, plus la mobilité est limitée. L’immobilisation injustifiée entraîne l’amyotrophie et le retard de la reprise de l’activité. Initialement étendue au segment sus et sous-jacent à la lésion, lorsque la stabilité primaire est obtenue, on peut la diminuer en étendue (en libérant une articulation) et en temps (c’est la place des orthèses amovibles qui permettent les soins d’hygiène et qui sont légères).



TECHNIQUES DE CONFECTION DES APPAREILS PLÂTRÉS


C’est la pratique régulière de l’opérateur qui fera la bonne qualité du plâtre. Le choix des matériaux utilisables se fait en fonction de la lésion à traiter et de la séquence thérapeutique (plâtre de Paris, résine, plâtre + résine, autres matériaux). Le plâtre de Paris a pour avantage une utilisation simple et un coût faible. Ses inconvénients résident dans sa fragilité, une solidité tardive (48 heures), un entretien difficile et sa non-résistance à l’eau. Les résines ont pour avantage leur légèreté et une solidité précoce hydrophobe. Elles sont onéreuses et difficiles à modeler. Les résines souples sont un complément intéressant aux résines traditionnelles avec les mêmes avantages et inconvénients. Elles permettent d’obtenir des zones semi-rigides. Pour de nombreuses équipes, les résines sont à déconseiller dans le cadre de l’urgence. Si le membre augmente de volume, elles sont difficiles à enlever. Les matériaux thermoformables ont l’avantage de la légèreté et du confort. Leur inconvénient majeur est qu’ils sont amovibles.


Pour confectionner un plâtre, le patient doit être installé confortablement, à demi assis avec des coussins pour soulager la tension musculaire. Le soignant doit être aussi confortablement installé, assis, avec tout le matériel préparé et disponible à proximité (jersey, coton, bandes plâtrées de différentes longueurs adaptées au segment de membre à traiter). Il faut prendre des mesures au mètre ruban en largeur et en longueur si on souhaite réaliser une attelle, en sachant que le plâtre de Paris rétrécit. Les points de compression doivent être rembourrés. Le plâtre de Paris est ensuite trempé dans l’eau. L’immersion de la bande plâtrée doit être prolongée tant qu’elle dégage des bulles. L’eau doit être tiède ou à température ambiante si l’on utilise du plâtre de Paris. En cas d’utilisation de résine, il faut dérouler les bandes autour du segment à immobiliser sans tension, car au séchage, celles-ci se rétractent et le risque de compression est donc grand. En cas d’utilisation de résine, l’eau doit être froide, car la réaction chimique dégage de la chaleur et peut brûler l’enfant si l’eau est chaude. Quelle que soit la technique utilisée, le membre doit être bien positionné, et lorsqu’on a choisi une position, il ne faut plus en changer. Le plâtre de Paris est séché grâce à une bande Velpeau. Il faut contrôler l’absence de points de compression et la sensation de confort du patient. En cas d’attelle, le plâtre doit être largement échancré et le jersey ouvert jusqu’à la peau. La coloration des extrémités doit être surveillée en permanence.



DIFFÉRENTS TYPES D’APPAREILS PLÂTRÉS



Plâtre brachio-antébrachial ou brachiopalmaire


Il s’agit d’un plâtre qui immobilise les articulations du poignet et du coude, laissant libre les doigts en préservant leurs mouvements distaux. L’enfant est installé soit allongé soit semi-assis, un aide soutenant le membre supérieur (figure 3.1). Si l’on met le membre en supination, l’enfant ne pourra pas se servir de son membre supérieur. Cette position est particulièrement indiquée en cas de fracture des deux os de l’avant-bras déplacée, puis réduite de manière à prévenir la synostose (figure 3.2). Le choix d’une position en pronation autorise la préhension et l’utilisation du membre supérieur. Le membre supérieur est protégé avec un premier jersey. Une couche protectrice de coton ou de mousse synthétique est appliquée sur celui-ci au niveau du pli du coude pour créer une chambre d’expansion antérieure (figure 3.3). Un deuxième jersey recouvre le tout, un trou étant percé dans celui-ci pour permettre le passage du pouce. On choisit alors la largeur de la bande à utiliser, puis on détermine la longueur en tenant compte du fait que le plâtre va rétrécir. On prépare alors le plâtre en éven-tail, le nombre d’épaisseurs utilisées conditionnera la future solidité (figure 3.4). La taille de l’extrémité du plâtre se fera en oblique de manière à ne pas gêner le fonctionnement des métacarpophalangienne. Un large trou est percé pour le pouce qui sera ainsi libre de mouvement de circumduction et d’opposition avec les autres doigts. Le plâtre est appliqué à partir de la main. Le pouce est glissé dans la loge préparée à cet effet, les têtes des métacarpiens sont dégagées, l’avant-bras est moulé, ainsi que le coude, deux fentes latérales peuvent être réalisées au niveau du coude pour améliorer l’application du plâtre. On veille à ce que le plâtre ne remonte pas trop haut au niveau du creux axillaire, et il est raccourci si nécessaire à l’aide de ciseaux. L’application définitive se fait à l’aide de bandes Velpeau qui permettent le séchage. Le plâtre terminé, les bandes Velpeau de recouvrement sont enlevées, et le plâtre peut éventuellement être circularisé d’emblée. Si l’on opte pour la réalisation d’un plâtre circulaire d’emblée, la chambre antérieure du coude doit être largement dégagée et lors de la confection, il faut veiller à ne pas réaliser de striction dans cette zone en utilisant des bandes de diamètre plus large. En cas d’œdème fracturaire important, le plâtre peut être immédiatement ouvert sur toute sa longueur et les jerseys de protection ouverts jusqu’à la peau. On vérifie ensuite la liberté totale des mouvements du pouce, l’absence d’arêtes à ce niveau qui provoquerait une striction de celui-ci, l’absence de points de compression médiane et latérale au niveau du coude et l’absence de compression du creux axillaire (figure 3.5). Le plâtre ne doit pas être trop court, car il perdrait son efficacité, ni trop long, car il serait inconfortable et gênant. La solidité de l’immobilisation du coude est un garant d’efficacité. Ce plâtre est le principal pourvoyeur de syndrome de Volkmann ou syndrome de loge. Cette pathologie est provoquée, au moment de la confection du plâtre, par la présence de coins comprimant l’artère humérale et le cercle péri-artériel, au pli du coude. Sa prévention est quadruple : bien rembourrer la surface antérieure et latérale du coude, éviter de créer une striction en passant les bandes plâtrées, ne pas changer l’angulation entre le bras et l’avant-bras et rester à 90° lors de la confection du plâtre, ouvrir largement le plâtre à la face antérieure du coude et vérifier l’absence d’angles compressifs. Le membre plâtré doit être soutenu pour permettre la fin du séchage et les mouvements inconsidérés source de blessures et d’irritation à la partie proximale du bras. L’utilisation d’une écharpe ou d’un système vendu dans le commerce ayant la forme d’un hamac associe confort et stabilité.


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Apr 22, 2017 | Posted by in PÉDIATRIE | Comments Off on 3: Immobilisations plâtrées du membre supérieur

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