Chapitre 20 Syndromes douloureux régionaux complexes
Introduction
Les syndromes douloureux régionaux complexes (SDRC) touchent des patients qui ont subi un traumatisme, une immobilisation prolongée ou une intervention chirurgicale au niveau de l’extrémité d’un membre. Ces patients vont développer des douleurs chroniques, continues, (allodynie ou hyperalgésie) souvent disproportionnées par rapport à la nature du traumatisme initial. Des troubles trophiques et vasomoteurs accompagnent le tableau clinique, la fonction motrice étant elle-même altérée en amplitudes et en force. Cette description correspond à ce que l’on appelait il y a encore quelques années l’algodystophie sympathique réflexe de De Sèze et Richemont (1951), le syndrome de Südek (1900), le syndrome de Leriche (1916) ou le syndrome épaule-main et qui désormais est intitulé : syndrome douloureux régional complexe de type1 (SDRC de type 1).
Le syndrome douloureux régional complexe de type 2 remplace la notion de syndrome causalgique. Ce tableau douloureux continu est fait d’allodynie ou d’hyperalgésie, il est consécutif à une lésion nerveuse (section, contusion, avulsion) et s’accompagne également de troubles de la vascularisation cutanée, de la fonction sudoripare et d’œdème.
Les femmes sont trois fois plus touchées que les hommes à un âge moyen de 42 ans.
Diagnostic et signes cliniques
Interrogatoire
Il permet de préciser les circonstances d’apparition d’un SDRC :
• Il peut survenir quelque soit le traumatisme : fracture du poignet, cure de canal carpien, de maladie de Dupuytren, de rhizarthrose ou après une agression physique. La multiplication des gestes chirurgicaux au cours d’une même intervention favorise également son apparition.
• Cette complication survient le plus souvent chez un patient au profil particulier. C’est un anxieux, hyperémotif, introverti, longiligne. Ne fait pas un SDRC qui veut ! Le vécu de cette situation traumatisante, associé aux problèmes personnels et professionnels secondaires à cet état, déclenche le SDRC et un état dépressif.
• Le traumatisme va permettre au patient d’extérioriser sa souffrance antérieure au traumatisme, il cherche à « lâcher prise» en utilisant son corps pour appeler à l’aide.
• Ce sont parfois des personnes qui ont une vie active dense, avec de grosses responsabilités. À un moment critique de leur existence, le moindre traumatisme va déclencher un SDRC.
• Avec ces patients, la parole de l’équipe soignante a une importance capitale. Il faut de l’empathie. Dès le début du SDRC, il faut expliquer au patient ce dont il souffre, nommer le syndrome par son nom, afin qu’il ait le sentiment que son vécu et son syndrome sont pris en compte par l’équipe soignante, ce qui le conduira à se déculpabiliser. Sa maladie est reconnue et surtout ne pas lui dire que « c’est dans la tête ».
L’erreur à ne pas commettre est d’abandonner le patient.
Diagnostic
Des examens complémentaires seront pratiqués :
• la radiologie par examen comparatif avec le membre sain ne montre pas d’anomalie. Les signes radiologiques de déminéralisation sont tardifs par rapport à la clinique ;
• la scintigraphie est l’examen de référence pour établir un diagnostic précoce. Elle met en évidence une hyperfixation isotopique des os de la main et du carpe ;
• la biologie est normale, notamment la vitesse de sédimentation (VS).
Signes cliniques et évolution
Le SDRC de type 1 évolue classiquement en trois phases successives : chaude, froide et séquellaire (fig. 20-1) :
• la phase aiguë chaude ou pseudo-inflammatoire dure de 3 jours à 3 mois ;
• la phase froide dystrophique dure de 3 à 9, voire 12 mois ;
• la phase séquellaire d’atrophie dure de 9-12, voire 24 mois.
Phase chaude
La douleur est d’intensité variable, elle est le premier signe qui doit faire évoquer le diagnostic.
Tous ces éléments évoquent une participation neuropathique.
L’atteinte peut être parcellaire ne touchant qu’un ou deux rayons de la main.
Ce syndrome douloureux s’accompagne de troubles trophiques, vasomoteurs et moteurs (fig. 20-2A, B, C).
Troubles vasomoteurs
L’œdème et les troubles vasomoteurs aboutissent à cet aspect pseudo-inflammatoire.
Phase froide
Cette phase peut s’étendre de 3 à 9, voire 12 mois.
On constate une atrophie cutanée et graisseuse, les doigts sont effilés, les ongles striés et cassants prennent un aspect en verre de montre. Les poils disparaissent et l’amyotrophie est fréquente (fig. 20-3A, B).
L’évolution peut se faire vers la guérison ou vers des séquelles.