Chapitre 2. Cardiopathie ischémique
Katharina Kiss
Introduction
Cardiopathie ischémique L’IRM cardiovasculaire constitue la modalité de référence (gold standard) pour le diagnostic d’infarctus du myocarde et pour l’évaluation des anomalies de la contractilité globale ou régionale. Ces anomalies de la contractilité peuvent être observées lors d’infarctus du myocarde ou lors de lésions ischémiques. Les anomalies contractiles induites par le stress constituent des marqueurs précoces de la maladie coronarienne et peuvent être mises en évidence avant l’apparition de signes cliniques ou de modifications électrocardiographiques (figure 2.1). L’IRM cardiovasculaire peut également faire le diagnostic de sténose coronaire significative par l’analyse de la perfusion myocardique, même si, dans ce dernier cadre, les données cliniques restent actuellement préliminaires. Le protocole d’imagerie doit être celui qui a été décrit dans le premier chapitre. L’évaluation de la fonction ventriculaire globale et régionale se fait par l’analyse des coupes en mode ciné-IRM. Les trois plans quatre cavités, deux cavités et petit axe sont indispensables; d’autres plans de coupe peuvent être programmés en fonction des résultats des précédents. Les acquisitions dans ces mêmes plans sont répétées après injection de gadolinium.
Figure 2.1 |
Infarctus du myocarde
Infarctus du myocarde La nécrose myocardiquenécrose myocardique est rapidement observée après l’occlusion de l’artère coronaire. Les lésions ischémiques progressent des régions sous-endocardiques aux régions sous-épicardiques. L’évaluation transmurale des modifications ischémiques aiguës ne peut être analysée par les modifications électrocardiographiques, et est au contraire bien évaluée en IRM cardiovasculaire. La démonstration en IRM cardiovasculaire du territoire infarci est utile pour le diagnostic, pour l’évaluation pronostique, afin d’évaluer le risque de survenue d’insuffisance cardiaque et pour le choix des indications de revascularisation coronaire par voie percutanée ou par pontage.
L’association d’un amincissement myocardique et d’une akinésie localisée visibles sur les coupes en mode ciné-IRM fait évoquer le diagnostic d’infarctus du myocarde (figure 2.2). L’analyse topographique précise de l’étendue des lésions ischémiques est réalisée sur les coupes dites de viabilité, réalisées tardivement après injection de gadolinium.
Figure 2.2 |
Les chélates de gadolinium sont des produits de contraste dont la distribution est limitée à l’espace extracellulaire. Le gadolinium s’accumule donc au sein de l’interstitium anormal du myocarde affecté par une lésion ischémique aiguë ou chronique. En cas de lésion ischémique aiguë, le gadolinium diffuse au sein du tissu nécrotique. En cas de lésion ischémique chronique, le gadolinium diffuse au sein des lésions fibreuses cicatricielles.
La prise de gadolinium est à l’origine d’un raccourcissement du temps de relaxation longitudinale T1, elle est donc à l’origine d’une augmentation de signal sur les images pondérées en T1. C’est ce principe qu’on exploite avec les séquences d’inversion-récupération dites «de viabilité».
Avec ces séquences d’inversion-récupération, le temps d’inversion est déterminé par l’opérateur, afin d’optimiser le contraste entre le myocarde normal et le myocarde infarci. Cette sélection d’un temps d’inversion optimal permet de différencier le myocarde normal, qui apparaît en noir, du myocarde infarci, qui apparaît en blanc. C’est ce phénomène qui est à l’origine de l’aphorisme utilisé en cas de lésion ischémique : «Le blanc est mort» (figure 2.3).
Figure 2.3 |
On se sert également de l’IRM cardiovasculaire afin de démontrer des zones d’obstruction microvasculaireobstruction microvasculaire en se servant de séquences réalisées précocement après injection de gadolinium. L’obstruction microvasculaire qui apparaît lors des premières heures après l’infarctus du myocarde constitue un facteur de mauvais pronostic et correspond à ce qu’on appelle le phénomène du no-reflow. La traduction IRM de ces zones de no-reflow se fait sous la forme d’une zone qui apparaît en noir au sein de la région infarcie du fait de l’absence de captation de gadolinium par rapport au tissu ischémique de voisinage normalement perfusé (figure 2.4). Ces images doivent être distinguées des thrombus ventriculaires gauches qui, eux aussi, sont à l’origine d’hyposignal (figure 2.5). Les images de perfusion précoce sont obtenues avec les mêmes séquences que les séquences dites de viabilité, mais elles sont acquises dans les premières 5min qui suivent l’injection de produit de contraste.
Figure 2.4 |
Figure 2.5 |
Au contraire, les séquences dites de viabilitéséquences dites de viabilité réalisées tardivement après injection de produit de contraste sont réalisées au moins 5min après l’injection de produit de contraste. Elles peuvent être réalisées jusqu’à 20min après injection. Pour les séquences réalisées précocement après injection, des coupes deux cavités, quatre cavités, chambre de chasse du ventricule gauche sont réalisées systématiquement. Sur les coupes tardives, dites de viabilité, des coupes petit axe et grand axe sont obtenues de façon systématique. Des plans de coupe supplémentaires peuvent être réalisés en fonction des anomalies détectées sur la première série de coupes. En fonction de la séquence obtenue, on parle respectivement de rehaussement précoce ou de rehaussement tardif.
Ces coupes après injection sont généralement réalisées en une vingtaine de minutes. On débute par l’injection de gadolinium, la réalisation des coupes précoces puis la détermination du temps d’inversion optimal. Les images tardives sont idéalement obtenues durant la diastole afin de minimiser les mouvements cardiaques. Une bande de présaturation couvrant le rachis est utilisée afin de diminuer les artéfacts de répétition du signal intense du liquide cérébrospinal (figure 2.6). Le gadolinium est injecté à la dose de 0,1mmol/kg, lors d’une injection en bolus réalisée à partir d’une veine périphérique. Pour les séquences précoces, on utilise un temps d’inversion de 440 ms qui est réduit à environ 320 ms pour les acquisitions tardives. Lors de la répétition des coupes tardives, le temps d’inversion est progressivement augmenté jusqu’à 440 ms afin de maintenir l’annulation du signal du myocarde normal (figure 2.7). La réalité des anomalies détectées doit être confirmée en inversant la direction du codage de phase afin de s’assurer qu’il ne s’agit pas d’artéfacts (figure 2.8); on parle de «permutation de la phase».