Chapitre 19 Érythème de topographie particulière
Lésions érythémateuses du visage
Les lésions rouges du visage sont fréquentes. L’érythème télangiectasique médiofacial, respectant les zones mobiles des paupières et des lèvres est typique de la rosacée. L’érythème squameux des zones riches en sébum des régions sourcillières, de la glabelle et des sillons nasogéniens est caractéristique de la dermatite séborrhéique. Ces deux affections sont, avec l’acné, les causes les plus fréquentes des dermatoses faciales, avec une prévalence estimée de 2 à 4 %.
Cependant, il existe de nombreuses autres causes qu’il faut savoir diagnostiquer. Les bouffées vasomotrices avec érythème facial doivent être distinguées des érythèmes permanents. Certains érythèmes paroxystiques ont une topographie particulière conférant une orientation étiologique comme l’érythème hémifacial du syndrome Harlequin orientant vers une lésion du 2e ganglion sympathique. D’autres ont également des circonstances d’apparition particulière, comme les repas, et peuvent s’accompagner d’une hyperhidrose comme au cours du syndrome de Frey après lésion du nerf auriculotemporal et régénération aberrante des fibres sympathiques qui innervent les glandes sudorales à la place de la parotide. Parfois, l’horaire est évocateur comme l’érythème post- prandial du dumping syndrome, complication classique de la chirurgie œsophago-gastrique. Certaines circonstances d’apparition sont caractéristiques comme le froid (cryoprotéines) ou le chaud (red ear syndrome, une variante d’érythermalgie) ou encore certaines prises médicamenteuses. Pour les lésions permanentes, non paroxystiques, il faut séparer celles qui sont d’apparition soudaine de celles qui sont apparues de façon progressive, insidieuse. Il est essentiel de déterminer par l’examen physique la présence de lésions cutanées associées : pustules, papules, plaques et de signes extracutanés, notamment fièvre ou frissons, et douleurs articulaires. Parfois, c’est seulement à l’interrogatoire que l’on peut établir l’existence de lésions associées, car elles peuvent être absentes au moment de l’examen. Il faut préciser si les lésions sont photo-induites et/ou photo-exposées (cf. chapitre 10). Une chondrite résulte d’une atteinte inflammatoire du cartilage et elle provoque donc un érythème des zones cartilagineuses comme les ailes narinaires ou le pavillon de l’oreille, en respectant le lobule. Les causes des papules et plaques érythémateuses du visage seront également résumées ici pour des raisons didactiques.
Nature des lésions | Principales causes |
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Érythème paroxystique | Cancer médullaire de la thyroïde Cryoglobulinémie Dengue et autres arboviroses (aspect de coup de soleil) Dumping syndrome Dysautonomie familiale de Ryley-Day Érythème pudique et émotif Flush hémifacial (syndrome Harlequin) par atteinte du 2e ganglion sympathique Frey (syndrome de) Hémopathie Homocystinurie Hyperthyroïdie Hypoglycémie Mastocytose Médicaments : ac. nicotinique, nitrite d’amyle, disulfiramine + alcool, tacrolimus topique, etc. Ménopause Mucinose folliculaire ortiée Phéochromocytome Red ear syndrome Rosacée Syndrome carcinoïde Syndrome du choc staphylococcique (aspect de coup de soleil) Toxique : trichloréthylène, cyanamide calcique, etc. Tumeurs endocriniennes du pancréas |
Érythème permanent | Acrokératose paranéoplasique Angiosarcome « Cellulite bleue » hémifaciale à Haemophilius inflenzae (plus rarement pneumocoque) du nourrisson et de l’enfant Chondrite (toute cause) Cushing (syndrome de) Dermatomyosite Dermatophytose Dermatite périorale Dermatite séborrhéique Eczéma aigu du visage Érythème solaire (« coup de soleil ») Folliculites pustuleuses à éosinophiles Haber (syndrome de) Homocystinurie Intolérance protéique lysinurique (pseudolupus néonatal) Infection de contiguïté : ethmoïdite, sinusite Léiomyome du visage Lèpre Lucite (polymorphe) Lupus érythémateux Lupus tuberculeux Maladies infectieuses : staphylococcie maligne, érysipèle, zona ou herpès, etc. Mégalérythème épidémique (et autres exanthèmes) Mucinose folliculaire ortiée Mycosis fongoïdes Nourrisson : Pellagre, carence en vitamine B2, B6 Pemphigus séborrhéique Polyglobulie Prurigo actinique (surtout chez les Mestizo) Réticulohistiocytose multicentrique à type de dermatomyosite Rosacée Sarcoïdose (« lupus pernio », « angiolupoïde ») Sébopsoriasis Syndrome carcinoïde au stade chronique Syndrome cave supérieur Ulérythème ophriogène |
Papule(s) et/ou plaque(s) érythémateuse(s) | Acné Angiosarcome Dermatomyosite Dermatophytose Dermatite séborrhéique Eczéma (de contact, photoallergique, aéroallergie, atopie, etc.) Érythème annulaire du syndrome de Sjögren Érythème polymorphe Érysipèle et staphylococcie maligne du visage Granulome facial de Lever Hyperplasie angiolymphoïde avec éosinophilie Jessner et Kanof (maladie de) (lupus érythémateux dermique) Kimura, maladie de Leishmaniose Lèpre Lucite polymorphe Lupus engelure de Hutchinson Lupus érythémateux Lupus tuberculeux Lymphome Melkersson-Rosenthal (syndrome de) Mucinose folliculaire ortiée Pemphigus érythémateux Pseudolymphome borrélien Pyodermite froide Réaction du greffon contre l’hôte Rosacée Sarcoïdose (lupus pernio, angiolupoïde, pseudolymphome de Spiegler et Fendt) Syndrome cave supérieur Zona ou herpès prévésiculeux |
Érythème paroxystique
Il peut révéler une tumeur endocrine bénigne (phéochromocytome, carcinoïde) ou maligne (cancer médullaire de la thyroïde). Il peut être le signe d’une hypoglycémie. Il ne faut pas le confondre avec l’érythème facial « en coup de soleil », de survenue brutale qui peut se voir au cours du syndrome du choc staphylococcique, de la dengue et d’autres arboviroses. Fréquent : Bouffées vasomotrices de la rosacée.