CHAPITRE 17 CH. COSTET, G. DEMETZ, N. GAMBARELLI, M.-N. GEORGE, A. GOMEZ, F. OGER-LAVENANT, A. PÉCHEREAU and D. THOUVENIN I ÉQUIPEMENT OPTIQUE, LUNETTES C’est en quelque sorte une lunette sur mesure, dont la précision est directement liée au résultat attendu. C’est le support indispensable, véritable pierre angulaire de la prescription, véritable traitement thérapeutique nécessaire au bon développement visuel de l’enfant. Comme l’a démontré Jean-Pierre Bonnac, alors directeur technique Lissac, dès les années soixante, la monture enfant n’est pas une monture adulte en miniature : elle doit répondre précisément à un ensemble de critères techniques. Il a ainsi, grâce à ses travaux, créé la première collection de montures optiques de six mois à huit ans, véritable innovation exclusive de l’enseigne Lissac (fig. 17-1). Fig. 17-1 Différentes montures adaptées aux besoins visuels et à la morphologie du jeune enfant. (Avec l’aimable autorisation de Lissac Opticien.) Le visage de l’enfant peut se définir par une morphologie particulière, qui n’est pas comparable à un visage adulte en réduction. Pour concevoir et proposer la monture la mieux adaptée aux besoins visuels et à la morphologie du jeune enfant, il faut prendre en compte plusieurs facteurs et les comparer à ceux de l’adulte (fig. 17-2). La surface du champ de regard de l’enfant est sensiblement identique à celle de l’adulte. La différence porte surtout dans le cadran inféro-nasal. En effet, la racine de nez inexistante chez le tout petit, ne vient pas amputer le champ de regard (fig. 17-3). L’absence de racine de nez impose également un appui nasal bas, pour assurer un positionnement correct des verres. Cette particularité entraîne un recouvrement des deux champs de regard. Les ponts des lunettes doivent donc être peu larges afin de ne pas occulter cet espace privilégié du champ binoculaire ou tout le développement de la convergence et de l’accommodation s’établit (fig. 17-3). La position du champ de regard évolue également avec l’âge. La zone la plus employée se situe dans la partie supérieure ; elle correspond au regard vers le haut, c’est-à-dire vers le monde des adultes. Au cours de sa croissance, l’enfant grandit et ce champ bascule vers le bas pour occuper la position inverse, soit un tiers au-dessus de la position primaire du regard et deux tiers au-dessous (fig. 17-4) [1]. Fig. 17-4 Comparaison de l’orientation des champs de regard avec l’âge. (D’après J.-P. Bonnac, 2004 [1].) Il existe deux types de branches adaptables sur la face d’une monture enfant. Nous adaptons des branches plus longues que la normale afin de pouvoir réaliser un ajustage anatomique, dénommé périvistage, c’est-à-dire deux coudes francs qui suivent le sillon rétroauriculaire (fig. 17-5). Ces branches sont systématiquement équipées de ressort, ce qui évite les déformations et la casse en cas de choc ou tout simplement en cas de manipulations vigoureuses de la part de l’enfant. Afin de prévenir tout traumatisme, ces charnières en métal sont recouvertes d’un manchon en caoutchouc non allergique, qui joue le rôle de coussin protecteur en cas de choc (fig. 17-6). Les verres correcteurs destinés aux enfants doivent répondre aux critères suivants : – qualité optique : la qualité d’image donnée par le verre doit être irréprochable sur tout le champ du verre, ce qui correspond à l’une des normes définies par la Communauté européenne ; – sécurité : les risques d’accident ou de chute sont assez fréquents chez les enfants, seule la matière organique répond aux normes de résistance. C’est pour cette raison, la sécurité, que le verre organique ORMA 1000 s’est imposé et a été rendu obligatoire, sur les directives du ministère de la Santé, pour l’équipement des enfants et des adolescents ; – légèreté : on comprend aisément que le confort et la stabilité des lunettes dépendent aussi du poids des verres ; – coût : cette notion est importante car l’enfant change en moyenne tous les douze mois de correction contre trente-six à quarante-huit mois chez l’adulte ; les pouvoirs publics proposent d’ailleurs un remboursement spécial pour les enfants. Le précalibrage est une option qui permet d’optimiser l’épaisseur des verres, en particulier sur les montures d’enfant dont la taille de l’oculaire, ou calibre, est réduite. L’opticien peut donc transmettre au fabricant les cotes de la monture choisie afin d’optimiser le surfaçage des verres correcteurs et, à puissance égale, obtenir un verre plus fin et par conséquent plus léger, ce qui facilite le port des lunettes et améliore l’efficacité des verres correcteurs par une meilleure position sur le visage (fig. 17-7). Pour illustrer l’intérêt du précalibrage pour les enfants, la comparaison poids-épaisseur donne les résultats suivants (tableau 17-I et fig. 17-8). C’est en combinant ce procédé de surfaçage avec l’indice du verre et le choix judicieux de la monture qu’on obtient les meilleurs résultats et, par conséquent, les équipements optiques qui seront portés par les enfants parce qu’acceptés par eux et les parents. Tableau 17-I Intérêt du précalibrage pour les enfants. Comparaison poids-épaisseur. Fig. 17-8 Précalibrage d’un verre pour les enfants. (Avec l’aimable autorisation de Lissac Opticien.) En vision rapprochée, l’enfant abaisse très peu ses lignes de regard mais applique son menton sur la poitrine pour converger en position primaire. Cette attitude réflexe est spécifique à l’enfant et impose dans le cas d’équipements multifocaux un montage particulier (fig. 17-9). Pour les très jeunes (fig. 17-10), il est souhaitable d’utiliser des verres bifocaux « grand champ » à segment courbe qu’on peut basculer dans le secteur inféro-nasal, de façon à recouvrir la zone habituellement utilisée en vision de près. Le décentrement de 10° est insuffisant pour les jeunes porteurs : les mesures effectuées en magasin nous amènent à réaliser des rotations allant de 10° à 20°. Certaines précautions sont à prendre lors du montage des verres. Par le fait de la taille de l’enfant et de son regard vers le haut, dans le monde des adultes, le verre doit se trouver rehaussé de 4 mm par rapport au centrage habituel de l’adulte (fig. 17-11). Un œil sain et adulte possède de nombreuses défenses naturelles qui le protègent contre le soleil : constriction pupillaire, obturation des paupières, filtration des différentes structures transparentes oculaires, etc. (fig. 17-12). Pour le bébé ou le jeune enfant, ces structures sont encore inefficaces, le cristallin ne joue pas son rôle de filtre avant dix à douze ans et l’abus de lumière par absorption ou effet cumulatif peut s’avérer nocif voire destructeur pour certaines structures de l’œil, en particulier la rétine (fig. 17-13). Il est indispensable d’avoir recours à la protection supplémentaire des filtres solaires, qui vont avoir la double tâche de filtrer et donc éliminer les plus courtes longueurs d’ondes, les plus nocives, mais aussi de protéger l’œil contre une forte intensité lumineuse réduisant ainsi l’éblouissement de l’enfant. Fig. 17-13 Transmission de la lumière à travers les différentes structures de l’œil. (Essilor International.) La protection solaire doit être de 3 ou de 4 (échelle de 0 à 4) (cf. infra, tableaux 17-II et 17-III). Les verres doivent être garantis « protection UV normalisée » pour les UVA et UVB, porter le marquage « norme CE », et être supportés par une monture répondant aux critères cités ci-dessus, alliant une bonne tenue sur le visage à des branches plus épaisses afin d’arrêter les rayons lumineux latéraux. Tableau 17-II Description et indications d’usage des différentes catégories de transmission lumineuse (Essilor International). Un service exclusif d’une enseigne d’optique propose aujourd’hui des solutions personnalisées et adaptées à toutes les nécessités. Nous pouvons, par exemple, avoir des cercles déportés pour les cas d’angiomes, un support crânien ou une branche plus longue qui s’appuie sur le rocher pour certains cas d’aplasie, une monture à chambre humide pour des cas de syndrome sec sévère (fig. 17-14). – la protection : des poussières, du vent, des chocs, des infrarouges, des ultraviolets, des embruns, de toutes projections éventuelles… ; – l’amélioration des performances : sécurité, meilleure perception visuelle, filtres de couleur adaptés à l’environnement, adaptation du champ visuel… – pour la plongée avec bouteille, il faut préférer une jupe et un cerclage de masque translucide afin d’augmenter la luminosité et le champ visuel périphérique ; – pour la plongée en apnée et la chasse sous-marine, les masques « petit volume » évitent de gâcher de l’air lors de la compensation de la pression liée à la profondeur. Les jupes en silicone noire atténuent les reflets parasites du soleil à la surface de l’eau. Toutefois, nous conseillons, pour des raisons techniques, de choisir un masque binoculaire. De plus, le milieu dans lequel évoluent les plongeurs (sel marin, humidité, UV) nécessite afin de garantir l’efficacité et la longévité de l’équipement une protection de son matériel par des housses, étuis rigides ou semi-rigides (fig. 17-16). Étanchéité, agression du sel marin ou du chlore, formation de buée, correction visuelle. L’adaptation optique des masques de ski s’établit selon deux procédés : – le masque surlunette : il permet de skier avec ses lunettes de vue sous le masque. Celui-ci possède des décrochements temporaux pour laisser passer les branches et un volume intérieur suffisant pour laisser passer la monture ; – le kit optique Opticob® : qu’il soit avec ventouse ou à lamelle de stabilisation, il permet de pouvoir directement intégrer des verres correcteurs à l’intérieur du masque. Que vous gardiez vos lunettes sous votre masque ou que vous ajoutiez un kit optique, l’utilisation d’un spray antibuée est nécessaire. Afin d’éviter la formation de condensation due à la différence de température entre l’intérieur et l’extérieur du masque, demandez un masque double écran. L’objectif est d’avoir une vision claire en toutes conditions (fig. 17-18). Les lunettes de glacier ou de haute montagne sont équipées de verres en polycarbonate ou minéral sécurisés de catégorie 4 et de teinte marron (bonne vision du relief) avec un flash miroir (meilleure protection aux rayons réfléchis). Un traitement polarisé peut compléter la protection. Les coques latérales et protections nasales sont indispensables pour remédier aux conditions extrêmes de la pratique de ce sport (fig. 17-19). En France, les modèles vendus protègent obligatoirement à 100 % des UV (tableaux 17-II et 17-III). Le filtrage est indiqué selon une échelle allant de 0 à 4 : Les conditions d’utilisation et l’environnement ont un impact fort en termes de design. Les lunettes sont profilées, pour une protection latérale au vent et aux projections et ont des champs visuels adaptés au besoin : – VTT, cyclotourisme : choisir un écran profilé avec un grand champ vers le haut et une monture légère et munie de branches fines pour ne pas gêner sous le casque (fig. 17-20) ; Fig. 17-20 Lunettes pour le vélo, le tennis, le golf et l’équitation. (Avec l’aimable autorisation de la société Demetz). – tennis : un écran bleu turquoise améliore le contraste entre la balle, les lignes et le terrain sur le fond du terrain de couleur terre battue ; – équitation : une monture à branche fine ne gêne pas sous la bombe, profilée pour se protéger du vent et d’éventuelles projections (boue…) ; – golf : un écran panoramique de teinte rose/violet fait ressortir le blanc de la balle sur un fond boisé et augmente le relief, donc le dénivelé sur le green. Il doit aussi avoir une protection latéralement contre le vent. En termes d’éléments à prendre en compte, les lunettes s’apparentent à celles du vélo ; cependant, préférez les montures très légères éventuellement munies de sangle pour un meilleur maintien (fig. 17-21). Dix pour cent des traumatismes oculaires sont d’origine sportive. Il est donc impératif de se protéger durant la pratique de sports de balle, de ballons ou de raquettes (fig. 17-22). Fig. 17-22 Lunettes de basket, football, handball, squash, badminton. (Avec l’aimable autorisation de la société Demetz). 1. Bonnac, J-PDiplôme universitaire de strabologie. Session II. Cahier de Sensori-Motricité. Nantes: Édition FNRO, 2004. 2. Corbé, C, Menu, J-P, Chaine, GTraité d’optique physiologique et clinique. Paris: Doin, 1993. 3. Kovarski, C L’opticien lunetier : guide théorique et pratique. 2e édition, Paris: Lavoisier; 2009. 4. Meslin D. Les cahiers d’optique oculaire. Varilux International. Édition Essilor. 5. Roth, A, Gomez, A, Péchereau, ALa réfraction de l’œil. Du diagnostic à l’équipement optique. Paris: Elsevier, 2007.
Quelques aspects de la thérapeutique
Équipement optique de l’enfant
LES MONTURES
FACE
BRANCHES
Après un an
LES VERRES
LÉGÈRETÉ
Puissance + 3,00 δ
Puissance + 6,00 δ
CR 39
39/10; 5 g
64/10; 8 g
CR 39 Précal.
32/10; 4 g
54/10; 7 g
Polycarbonate Précal.
27/10; 3 g
46/10; 5 g
VERRES MULTIFOCAUX DE TRAITEMENT
PROTECTION SOLAIRE
MONTURES SUR MESURE
Équipement optique du sportif
DISCIPLINES SPORTIVES ET ÉQUIPEMENT
LA PLONGÉE
CONSEILS ET SOLUTIONS
LA NATATION
DÉTERMINATION DES ÉLÉMENTS À PRENDRE EN COMPTE
LE SKI
CONSEILS ET SOLUTIONS
LUNETTES DE GLACIERS
Norme et qualité de filtrage en montagne
VÉLO, TENNIS, GOLF, ÉQUITATION
CONSEILS ET SOLUTIONS
FOOTING
BASKET, FOOTBALL, HANDBALL, SQUASH, BADMINTON…
BIBLIOGRAPHIE
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