14: POUMON EN RÉANIMATION

CHAPITRE 14


POUMON EN RÉANIMATION



14.1


PNEUMOPATHIES AIGUËS GRAVES



Les pneumopathies aiguës graves (PAG) regroupent toutes les détresses respiratoires aiguës d’origine pulmonaire. Elles se caractérisent par l’installation rapide d’une polypnée avec une PaO2 en air ambiant inférieure à 60 mmHg. Il peut s’y associer des signes traduisant la mauvaise tolérance : tirage, cyanose, troubles de la conscience, collapsus cardiovasculaire. Les PAG mettent en jeu le pronostic vital.


L’imagerie thoracique des PAG repose principalement sur la radiographie thoracique de face en décubitus dorsal faite au lit du patient. Une radiographie numérisée est préférable en raison d’une bonne reproductibilité du contraste qui facilite les comparaisons évolutives. La radiographie a un intérêt majeur pour mettre en évidence des foyers pulmonaires ou d’autres anomalies et pour guider des prélèvements bronchiques, pulmonaires ou pleuraux. Elle contribue ainsi à la recherche d’une pathologie infectieuse, initiale ou venant compliquer l’évolution, point capital dans ce contexte. Néanmoins, la radiographie thoracique en décubitus dorsal sous-évalue les foyers infectieux et les épanchements pleuraux [26]. La TDM peut compléter la radiographie dans certains cas. Du fait de l’absence de superposition et de la meilleure résolution en contraste, la TDM apporte des informations complémentaires dans 70 % des cas [21] ; cependant, ces informations ne conduisent à des modifications stratégiques que dans environ 25 % des cas [12]. Il faut donc mettre en balance les bénéfices stratégiques de la TDM [12, 18, 21] et son coût en perturbations fonctionnelles pour le patient et en charge de travail pour l’équipe soignante. Quant à l’échographie au lit du patient, elle serait apte à faire le diagnostic étiologique d’une défaillance respiratoire aiguë dans 90 % des cas [15].


Nous envisagerons les principales présentations des PAG en radiographie et nous discuterons la place de la TDM.


La radiographie thoracique peut : (i) être normale ou ne montrer que des anomalies mineures, (ii) montrer des opacités pulmonaires diffuses ou (iii) des opacités pulmonaires focales.




RADIOGRAPHIE PULMONAIRE ET PNEUMOPATHIES INFILTRANTES DIFFUSES


Les principales causes sont l’infection, les œdèmes pulmonaires, l’inhalation ou les hémorragies alvéolaires diffuses et certaines inhalations.


Le diagnostic positif est clinique, radiographique et évolutif : dyspnée avec polypnée installée en quelques jours, images pulmonaires anormales diffuses dont l’évolution est de courte durée. La stratégie diagnostique dépend de ces critères de gravité :



– une hypothèse diagnostique est d’emblée envisagée sur l’anamnèse et l’examen clinique (par exemple : œdème cardiogénique). Les examens complémentaires confirmeront cette hypothèse. Une difficulté peut être due à l’intrication de plusieurs causes comme une infection bactérienne avec défaillance cardiaque ;


– il n’y a pas de diagnostic évident en première intention ; TDM, électrocardiogramme et échocardiographie sont alors les examens de première intention pour reconnaître ou éliminer un œdème cardiogénique. La TDM a une valeur d’orientation et peut guider le lavage broncho-alvéolaire (LBA), largement pratiqué lorsque l’état respiratoire le permet. Au besoin, le LBA est effectué sous intubation. Il peut faire le diagnostic de diverses infections ou orienter le diagnostic selon le type cytologique prédominant de l’alvéolite :



Si aucune étiologie n’est trouvée, un test thérapeutique (diurétique et/ou antibiotiques et/ou corticoïdes) peut être proposé.


Dans le cas particulier du sujet immunodéprimé, les principales causes d’alvéolite aiguës sont la pneumocystose, le cytomégalovirus (CMV) puis, plus rarement, les hémorragies alvéolaires, les pneumopathies organisées, les pneumopathies médicamenteuses et les pneumopathies interstitielles lymphocytaires [29].



Infections


De nombreuses infections pulmonaires peuvent être responsables de PID aiguës, en particulier les virus de la grippe [2] et de la varicelle (fig. 14-1), les pneumopathies communautaires à mycoplasme (fig. 14-2) ou Chlamydia, la tuberculose miliaire et, chez les patients immunodéprimés, la pneumocystose (fig. 14-3) et le CMV. Elles se manifestent par des opacités interstitielles ou alvéolaires diffuses. Un tel aspect peut être très voisin d’un œdème de surcharge ou d’un SDRA (qui se complique de pneumonie dans 30 % des cas). Le diagnostic d’infection est difficile. Si les opacités disparaissent vite, cela plaide contre l’infection et plutôt en faveur d’un œdème, d’une aspiration ou d’une atélecta-sie. La TDM permet d’évoquer la nature infectieuse d’opacités multifocales lorsque celles-ci n’ont pas de prédominance déclive (fig. 14-4). En effet, les opacités dues à d’autres causes, telles que les atélectasies, l’aspiration ou l’infarctus, sont le plus souvent déclives. Sont également des signes en faveur de l’infection un appui scissural, un bronchogramme aérique, une cavitation et de petits foyers lobulaires le long des axes bronchovasculaires (fig. 14-5).







Certains aspects évoquent des germes particuliers. La pneumonie à Pneumocystis carinii est la plus fréquente des infections opportunistes, en particulier dans le SIDA. L’hyper-densité en verre dépoli diffuse ou multifocale est presque constante (voir fig. 14-3), alors que les autres anomalies ne sont présentes que dans 40 % des cas ou moins. Il s’agit de zones de condensation, de kystes, de nodules, d’adénopathies, d’épanchement pleural et de réticulation septale [11]. Le verre dépoli peut avoir une prédominance topographique centrale assez caractéristique. Il est présent en TDM dans les 15 % de Pneumocystis carinii avec radiographie thoracique normale.


Chez le sujet à immunité normale, la première cause de pneumopathie communautaire grave est l’infection à mycoplasmes. Les zones de verre dépoli sont fréquentes, souvent associées à des zones de condensation lobulaires, des nodules centrolobulaires et un épaississement péribronchovasculaire (voir fig. 14-2) [23].


Des embolies septiques sont en faveur du staphylocoque (fig. 14-6). Une pneumonie nécrotique avec épanchement pleural est en faveur d’une infection à staphylocoques (fig. 14-7) ou à Gram négatif. Une miliaire est en faveur d’une tuberculose (fig. 14-8) ou d’une virose.






Œdèmes


La distinction radiographique entre les œdèmes cardiogé-niques et les œdèmes lésionnels est possible [20] mais difficile en pratique. L’œdème cardiogénique alvéolaire donne un syndrome de comblement alvéolaire étendu en ailes de papillon, c’est-à-dire bilatéral, symétrique et à prédominance centrale périhilaire (fig. 14-9). D’autres arguments sont une cardiomé-galie et des modifications rapides de l’image d’un jour à l’autre. À un stade plus précoce d’œdème interstitiel, les parois vasculaires sont mal définies, les parois bronchiques sont épaissies et floues, il y a des lignes de Kerley et parfois une densification en plages de verre dépoli du parenchyme pulmonaire. À l’inverse, dans l’œdème lésionnel, les condensations alvéolaires non systématisées, bilatérales, diffuses ou multifocales ont une distribution à prédominance périphérique au début. La car-diomégalie et les signes d’hypertension veineuse pulmonaire manquent. En pratique, la distinction n’est pas facile et peut être aidée par l’évolution des images radiographiques sous traitement. Dans l’étude d’Aberle et al. [1] concernant 45 patients avec œdème pulmonaire grave, le diagnostic a été fait sur la radiographie thoracique pour 87 % des œdèmes hydrostatiques et 60 % des œdèmes par augmentation de la perméabilité vasculaire. Les opacités multifocales périphériques ont été le signe le plus discriminant, présentes dans 13 % des œdèmes hydrostatiques mais dans 58 % des œdèmes par augmentation de la perméabilité vasculaire.



La distinction entre œdème et infection peut être très difficile, et ce d’autant que l’infection peut être cause d’œdèmes soit cardiogéniques (pathologie du myocarde ou de l’endocarde), soit lésionnels (état de choc d’origine infectieuse, virose).


En préhospitalier ou dans les services d’urgence, l’écho-graphie pleuropulmonaire peut être utile dans les mains d’un échographiste entraîné. Elle semble aussi performante que la radiographie thoracique pour faire le diagnostic étio-logique d’une dyspnée aiguë et en particulier d’un œdème pulmonaire [31]. L’œdème se caractérise en échographie pulmonaire par de nombreux artéfacts hyperéchogènes linéaires naissant de la ligne pleurale (images « en queue de comète »). L’échographie cardiaque permet le diagnostic d’une insuffisance ventriculaire gauche.



SDRA


L’œdème est lié à une lésion diffuse de l’endothélium vasculaire qui augmente sa perméabilité et laisse fuir les liquides dans l’interstitium périvasculaire. Dans le SDRA, cet œdème est associé à un dommage alvéolaire diffus correspondant à des lésions de l’épithélium respiratoire.


Le SDRA est responsable d’opacités alvéolaires diffuses en radiographie à partir de la 24e ou de la 36e heure.


Le signe TDM principal est une association de condensations alvéolaires et de verre dépoli bilatéral à prédominance déclive.


Le SDRA donne en TDM des condensations alvéolaires multifocales, non systématisées, bilatérales et extensives, plus ou moins confluentes, sans cardiomégalie, ni signe d’hypertension veineuse pulmonaire. Ces condensations sont associées à du verre dépoli. Un bronchogramme aérique est généralement présent et un petit épanchement pleural est parfois associé [28]. Lorsque le SDRA a une cause extrathoracique, le verre dépoli est prédominant avec souvent un gradient de densité croissante antéro-postérieure. Lorsque le SDRA a une cause thoracique, condensation alvéolaire et verre dépoli sont associés [10]. Au cours de l’évolution, les condensations alvéolaires disparaissent alors que le verre dépoli persiste souvent et que les opacités réticulées avec signes de distorsion persistent ou apparaissent.


Contrairement à l’impression radiographique d’atteinte diffuse (fig. 14-10a), la TDM montre que des territoires pulmonaires sont épargnés (fig. 14-10b). Sous l’effet de la pression expiratoire positive, le volume pulmonaire augmente et les opacités radiographiques diminuent. En TDM, les condensations multifocales ne sont pas uniformément réparties. Elles ont une prédominance déclive et se modifient rapidement avec la position du patient. Ainsi, la mise en procubitus opacifie les territoires antérieurs devenus déclives et aère les territoires postérieurs. Des épanchements pleuraux sont fréquemment associés. La TDM permet une quantification des zones condensées et des zones aérées, ce qui est utile pour adapter la ventilation et suivre l’évolution.




Hémorragie alvéolaire


L’hémorragie pulmonaire diffuse est définie par un saignement diffus d’origine capillaire pulmonaire dans les espaces aériens distaux. Un diagnostic rapide s’impose pour traiter au plus vite l’hémorragie et sa cause. Le pronostic vital peut être mis en jeu par l’inondation alvéolaire ou l’étiologie sous-jacente. Le diagnostic est généralement évoqué devant une triade classique qui associe hémoptysie, anémie et syndrome de comblement alvéolaire diffus [3]. L’hémoptysie est d’importance très variable mais souvent peu abondante. L’anémie peut être aiguë, avec une chute rapide de l’hémoglobine, ou chronique hypochrome hyposidérémique. La fibroscopie élimine une hémorragie localisée et montre un saignement distal diffus.


La radiographie thoracique montre un syndrome de comblement alvéolaire bilatéral, périhilaire et basal, comparable à celui observé dans l’œdème pulmonaire. Plus rarement, on peut observer des opacités alvéolaires en plage non systématisée, unilatérales, focales. La régression des opacités est rapide. Les anomalies radiographiques n’étant pas spécifiques, les signes négatifs prennent toute leur importance : absence d’épanchement pleural, d’adénopathie, de cardiomégalie et de signe d’hypertension veineuse pulmonaire. Le diagnostic étiolo-gique peut être facile s’il existe une pathologie connue susceptible d’entraîner une hémorragie alvéolaire, mais plus difficile si l’hémorragie alvéolaire est le signe révélateur de la maladie.


La TDM montre des zones de condensation alvéolaire et/ou de verre dépoli bilatérales, assez souvent à prédominance périhilaires comme dans l’œdème pulmonaire cardiogénique, mais parfois diffuses et associées à des réticulations donnant un aspect de « crazy paving » (fig. 14-11). Plus rarement, l’hémorragie se traduit par de petites opacités centrolobulaires peu denses et mal limitées. Le diagnostic différentiel radiographique se pose avec l’œdème pulmonaire cardiogénique et lésionnel et avec certaines infections diffuses, en particulier la pneumopathie à Pneumocystis carinii chez le sujet immunodéprimé.



Trois groupes principaux de causes peuvent être distingués en fonction des anomalies immunologiques : (i) la maladie des anticorps antimembrane basale glomérulaire ou syndrome de Goodpasture, qui survient généralement chez des hommes jeunes ayant une glomérulonéphrite associée ; (ii) les maladies avec dépôt de complexes immuns sont plus rarement en cause ; la principale d’entre elles est le lupus érythémateux disséminé ; (iii) les maladies sans anticorps antimembrane basale ni dépôt de complexes immuns ; il s’agit de certaines vascularites avec ANCA comme la maladie de Wegener et la polyangéite microscopique. L’atteinte rénale y est fréquente.


De nombreuses maladies non immunitaires de cause connue peuvent être responsables d’hémorragie pulmonaire diffuse : des infections variées survenant chez des sujets immuno-déprimés ou non [24], des maladies cardiovasculaires et principalement le rétrécissement mitral avec hypertension veineuse pulmonaire, des causes toxiques et médicamenteuses, des troubles de l’hémostase, certaines tumeurs comme le sarcome de Kaposi ou des embolies tumorales microscopiques intra-artérielles pulmonaires [9].



Causes plus rares de pneumopathies aiguës graves


Diverses pneumopathies diffuses, le plus souvent chroniques ou subaiguës, peuvent parfois s’exprimer comme une PAG : pneumopathies d’hypersensibilité aux antigènes organiques inhalés, pneumopathies médicamenteuses, pneumonie organisée, pneumopathies radiques. L’ana-mnèse oriente le diagnostic. L’imagerie montre le plus souvent une hyperdensité en verre dépoli ou des condensations alvéolaires étendues. Les pathologies pulmonaires tumorales peuvent s’observer dans un contexte aigu grave. Les métastases donnent des nodules multiples, la lymphangite carcinomateuse des épaississements irréguliers péribronchovasculaires et septaux importants (fig. 14-12), le lymphome et le cancer bronchiolo-alvéolaire des condensations alvéolaires multiples.





Pneumopathie radique


Sa survenue dépend de la dose, de son fractionnement, des chimiothérapies associées, de l’arrêt d’une corticothérapie et du volume irradié. Elle survient 1 à 3 mois après l’irradiation. Les anomalies TDM, verre dépoli et/ou condensation alvéolaire, sont souvent localisées à la zone irradiée [17], mais peuvent la déborder lorsque des drogues potentialisantes sont utilisées. À distance, la pneumopathie radique évolue vers une fibrose dans le même territoire. Des PO sont parfois observées à distance des zones irradiées.



Pneumopathies médicamenteuses aiguës


Différentes lésions anatomopathologiques peuvent être responsables d’une pneumopathie médicamenteuse aiguë. L’œdème pulmonaire non cardiogénique se présente comme une insuffisance respiratoire aiguë qui survient dans les quelques jours qui suivent le début de la prise médicamenteuse. Les médicaments les plus fréquemment impliqués sont l’acide acétylsalicylique, les opiacés, les anti-inflammatoires non stéroïdiens, l’hydrochlorothiazide, les antidépresseurs tricycliques et les bêtamimétiques tocolytiques. Les agents cytotoxiques en cause sont la cytarabine, le méthotrexate, le cyclophosphamide, l’association vinblastine et mitomycine et la bléomycine associée à une oxygénothérapie. L’interleukine-2 est un bon exemple de traitement provoquant un œdème pulmonaire. L’évolution est généralement rapidement favorable [7]. Le SDRA est une manifestation non exceptionnelle des pneumopathies médicamenteuses. Les médicaments les plus incriminés sont la bléomycine, le busulfan, la carmustine, le cyclophosphamide, le melphalan, la mitomycine et les sels d’or. Il n’y a pas de signe radioclinique permettant de distinguer le SDRA de cause médicamenteuse du SDRA d’une autre origine, mais le pronostic serait meilleur pour le SDRA d’origine médicamenteuse. Son pronostic est lié à la sévérité des lésions pulmonaires [22]. L’hémorragie pulmonaire diffuse est une complication rare des pneumopathies médicamenteuses. La morbidité et la mortalité y sont élevées. Les médicaments les plus fréquemment en cause sont les anticoagulants, l’amphotéricine B, les fortes doses de cyclophosphamide, la mitomycine, la cytarabine et la pénicillamine [25].




OPACITÉS PULMONAIRES FOCALES À LA RADIOGRAPHIE [19]


Ce type d’atteinte peut être grave soit parce qu’elle marque le début d’une pneumopathie extensive, soit en raison d’un terrain particulier. Les causes les plus fréquentes sont la pneumonie, l’atélectasie, l’aspiration et l’infarctus pulmonaire.



Pneumonie


Les infections communautaires sont de diagnostic généralement facile grâce au contexte clinique et aux clichés évolutifs. La radiographie est alors sensible et spécifique. Chez le patient hospitalisé en réanimation, le problème est plus complexe et une condensation parenchymateuse d’apparition récente peut correspondre à une infection nosocomiale [8, 16], mais aussi à une atélectasie, une hémorragie, un infarctus et parfois à une aspiration ou à un œdème localisé. Les performances de la radiographie sont médiocres. Elle aurait une sensibilité de 62 % et une spécificité de 28 % dans le diagnostic d’infection nosocomiale [14]. Certains signes radiographiques plaident en faveur de l’infection : une opacité alvéolaire à limite scissurale nette (fig. 14-13), un bronchogramme aérique ou une cavitation [30] souvent mieux observée en TDM. En revanche, les aspects radiographiques sont rarement évocateurs d’un germe précis. Lorsque la pneumonie atteint tout un lobe, le germe responsable est souvent le pneumocoque mais il peut également s’agir du mycoplasme, de Chlamydia ou de légionelles. Lorsque le lobe atteint est augmenté de volume avec bombement des scissures, il faut évoquer une infection à klebsielles. Un aspect de bronchopneumonie est souvent en rapport avec un staphylocoque ou des germes à Gram négatif. Une cavitation fait évoquer une infection par le staphylocoque, les Gram négatif, les anaérobies ou les mycobactéries. Une cavitation est également présente dans certaines formes particulières d’infection comme l’embolie septique ou la gangrène pulmonaire, qui ont des aspects sémiologiques caractéristiques.



La TDM avec injection de produit de contraste rend possible, dans les cas difficiles, la distinction entre une opacité parenchymateuse et une opacité pleurale. Elle permet de guider d’éventuels prélèvements (brossage bronchique distal protégé, lavage broncho-alvéolaire, biopsies transbronchique ou transthoracique) avec plus de précision que la radiographie. Elle identifie également une zone de nécrose précavitaire.




Aspiration


Elle est généralement responsable d’opacités déclives (fig. 14-14) : segments postérieurs des lobes supérieurs et inférieurs et segment apical des lobes inférieurs chez un malade en décubitus dorsal. Dans la majorité des cas, ces opacités se nettoient rapidement en 1 à 2 jours. Parfois, l’aspiration peut se compliquer de pneumonie, d’atélectasie ou de SDRA.





Autres aspects


Un nodule ou une masse unique fait discuter une pneumonie ronde, une mycose ou une tuberculose.


Des nodules multiples font discuter des métastases, des embolies septiques [5], des mycoses chez les patients immunodéprimés (surtout aspergillose et cryptococcose), une vascularite de type Wegener ou un syndrome lympho-prolifératif chez le transplanté [6].



EXAMEN TDM


La TDM a divers intérêts en pathologie pulmonaire aiguë : dépister une embolie pulmonaire grave et proximale ou segmentaire venant alors décompenser une pathologie préexistante, identifier une cavitation au sein de condensations ou de nodules (voir fig. 14-6), un infarctus pulmonaire ou une atélectasie et guider d’éventuels prélèvements. Elle est aussi utile pour analyser les lésions thoraciques extrapulmonaires éventuellement associées aux PAG. Elle permet :



– de dépister un épanchement pleural ou péricardique liquidien, un pneumothorax (voir fig. 14-7) et des adénopathies médiastinales ; la TDM détecte et localise les épanchements et les collections pleurales ;


– de différencier l’abcès de l’empyème en présence d’une cavité périphérique avec niveau hydroaérique [27] et d’identifier une fistule bronchopleurale ; le drainage d’un empyème sous guidage TDM augmente les chances de succès du geste ;


– d’analyser les pathologies médiastinales et pariétales tels une perforation œsophagienne, un abcès ou un hématome.


En présence d’hyperdensités étendues, condensation alvéolaire ou hyperdensité en verre dépoli, certains éléments sémiologiques TDM permettent d’orienter le diagnostic étio-logique. Ainsi :



– le caractère localisé (pneumonie, atélectasie, aspiration et infarctus pulmonaire), multifocal ou diffus des opacités (pneumonie, œdème, hémorragie) ;


– leur topographie centrale (œdème, hémorragie, pneumocys-tose), déclive (toutes pathologies) ou non déclive (infection) ;


– un gradient de densité croissante antéro-postérieur (SDRA) ;


– des lobules denses péribronchovasculaires (infection) ;


– un appui scissural des opacités (infection) ;


– un bronchogramme aérique (infection, SDRA) ;


– un bronchogramme liquide en faveur d’une obstruction (pneumonie obstructive) ;


– une absence de rehaussement après injection de produit de contraste correspondant à une zone d’ischémie ou de nécrose (infection) qui précède généralement de peu une cavitation.



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14.2


APPRÉCIATION DU MATÉRIEL



Les circonstances de la mise en place de cathéters, de drains et de sondes au niveau du thorax sont variées. Certaines sont en rapport avec une pathologie locorégionale (monitorage respiratoire, drainage pleural et monitorage cardiaque), d’autres avec une pathologie générale nécessitant une réanimation par voie parentérale, un monitorage central ou une chimiothérapie. Dans le premier cas, la voie d’abord ne peut être que locorégionale. Dans le second cas, c’est la facilité et la multiplicité du choix des voies d’accès qui font que les abords thoraciques sont privilégiés, sans oublier que ceux-ci sont un plus pour le confort des patients.


La mise en place de tous ces matériaux peut être source de complications locales ou régionales identifiables sur une simple radiographie thoracique. À distance, la radiographie thoracique aura pour but d’apprécier le bon positionnement du matériel mis en place et de reconnaître d’éventuelles complications. L’appréciation de certaines de ces complications nécessitera parfois d’avoir recours à la tomodensitométrie (TDM).



CATHÉTERS VEINEUX CENTRAUX


La mise en place de ces cathéters (cathéters simples ou chambres implantables) entre le plus souvent dans la mise en œuvre d’une chimiothérapie, d’une antibiothérapie au long cours, d’une nutrition parentérale ou encore d’une transfusion sanguine. Les cathéters veineux centraux peuvent par ailleurs être utilisés pour le monitorage de la pression veineuse centrale dans le cadre de l’urgence, pour une hémodialyse d’urgence ou dans le cas d’une attente de la mise en place d’une fistule artérioveineuse [2, 72, 85]. Il existe quatre voies d’abord, correspondant aux veines jugulaires internes droite et gauche et sous-clavières droite et gauche.


À côté de ces cathéters centraux classiques, il existe des cathéters veineux centraux à insertion périphérique qui constituent une alternative intéressante et prometteuse, dans la mesure où la mise en place semble plus simple et plus confortable pour le patient. Les séries récentes concluent à une efficacité et une sûreté identiques, pour les plus favorables [14, 28, 90], mais le plus souvent elles mettent en évidence un taux de complications (nombre d’essais, malposition, dysfonctionnement et thromboses veineuses) plus important [57, 69, 77], à l’exception des complications infectieuses qui semblent identiques.


Dans certains cas, des voies d’abord inhabituelles peuvent être utilisées en fonction de l’existence de thrombose de certains axes vasculaires normalement utilisés. Ces voies d’abord inhabituelles sont constitués par le système azygos, les veines intercostales et la recanalisation de vaisseaux thrombosés [30]. Dans tous les cas, les complications de ces voies sont celles des cathéters centraux.



Position normale


Le cathéter doit se trouver dans la veine cave supérieure, avec un trajet parallèle à l’axe du vaisseau, et son extrémité distale à la jonction veine cave supérieure-oreillette droite [21, 61, 72, 97]. Sur une radiographie thoracique, cette position correspond en moyenne à la projection de la clarté du tronc bronchique intermédiaire (fig. 14-15). Pour Metge et al. [66], l’extrémité du drain doit se situer environ 25 mm après la jonction des deux troncs veineux brachiocéphaliques (en dedans de l’extrémité antérieure de la première côte droite sur une radiographie thoracique de face).


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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 14: POUMON EN RÉANIMATION

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