13: Épanchements

Chapitre 13


Épanchements



13.1


Conduite à tenir devant une anasarque non immune






Physiopathologie et étiologies [3, 4]


L’anasarque n’est qu’un symptôme témoin d’une cause. Elle est avant tout le reflet d’une insuffisance cardiaque fœtale. Des phénomènes d’augmentation de la perméabilité capillaire, et de diminution de la pression oncotique par hypoprotidémie, peuvent s’y associer, ou exceptionnellement être reconnus comme la seule cause. À partir de cette constatation, il est facile de retrouver les causes extrêmement nombreuses des anasarques en les classant de la façon suivante : causes cardiogéniques primitives, anémie fœtale, compression, effet shunt, hypoprotidémie.









Complications


L’anasarque reflète un désordre hémodynamique profond, souvent associé à une anémie et à la prématurité. Le tout correspond à une situation de souffrance fœtale des plus graves. Les conséquences sont la souffrance fœtale, la mort in utero ou, chez des fœtus survivants, des anomalies cérébrales à titre de porencéphalie ou atrophie cérébrales.


La prématurité spontanée peut être consécutive à l’hydramnios, mais aussi parfois secondaire à un geste invasif (diagnostic ou thérapeutique).


La prématurité induite est souvent un moindre mal, conséquence d’une décision d’extraction sur une souffrance fœtale débutante, après maturation pulmonaire.


Les difficultés de la réanimation néonatale sont très importantes : les difficultés d’intubation liées à l’œdème s’ajoutent à la prématurité, à la souffrance fœtale, aux problèmes respiratoires, aux désordres hémodynamiques importants et à l’anémie. L’ensemble en fait une des situations les plus graves en période néonatale même si la cause de départ paraît de bon pronostic.


Le pronostic maternel peut être aussi compromis en raison de la surdistension utérine : pré-éclampsie, embolie pulmonaire, hémorragie de la délivrance.



Bilan diagnostique



Diagnostic positif


Le diagnostic d’anasarque repose sur la présence d’un œdème préfrontal supérieur à 5 millimètres (figure 13.1) et à la présence d’une ascite, d’un épanchement pleural uni- ou bilatéral, ou d’un épanchement péricardique (figure 13.2). Le placenta est souvent épais. L’hydramnios est fréquent mais inconstant. L’oligoamnios n’est pas exceptionnel et facteur de gravité supplémentaire.





Diagnostic étiologique


Il repose sur une réflexion physiopathologique. Elle suffit à prendre en urgence les grandes décisions : extraction, traitement in utero, voire abandon et IMG. Elle s’inscrit dans l’urgence, car la survenue d’une anasarque précipite les complications graves.


En urgence, il faut répondre à six grandes questions :



Le bilan en un temps doit à la fois être simple, rapide et complet à la fois [3].


Pour cela, il faut d’abord se focaliser sur les six réflexions précédentes et conserver des échantillons (congélation et/ou cultures), afin de répondre secondairement aux questions moins urgentes, pour des causes plus exceptionnelles, sans solution thérapeutique :




Bilan lésionnel


La première interrogation concerne la souffrance fœtale. La surveillance du RCF est fondamentale.


La seconde concerne le cerveau. La surveillance Doppler des artères cérébrales, de l’écho-anatomie cérébrale, allant jusqu’à l’IRM si la situation évolue correctement, est indispensable. Le bilan des éventuelles lésions cérébrales ne devra être fait qu’après un délai d’au moins trois semaines après l’amélioration des signes d’anasarque. En effet, les séquelles cérébrales apparaissent le plus souvent à distance de l’épisode aigu. Il faut attendre trois semaines pour être rassurant en l’absence de lésion.


Si l’évolution est favorable, la surveillance échographique doit vérifier le retour à la normale ainsi que la bonne fonction myocardique.



Prise en charge thérapeutique


Parmi les très nombreuses causes d’anasarque, on doit isoler celles qui peuvent être traitée in utero.


Parmi les anomalies primitivement cardiaques, seules les tachycardies supraventriculaires peuvent être traitées efficacement.


Les anémies fœtales peuvent être compensées par la transfusion in utero.


Les compressions par des masses liquidiennes, épanchements ou formations kystiques peuvent faire l’objet de dérivations in utero [5, 6].


La pathologie transfuseur-transfusé peut faire l’objet d’un traitement in utero par laser ou amniodrainage.


Une coagulation du cordon d’un fœtus acardiaque peut être réalisée.


Certaines anomalies vasculaires avec fistule artério-veineuse ont pu être obturées.


Plusieurs cas de figure peuvent être identifiés.



• La lésion est curable en post-natal, un traitement in utero est possible, le terme est inférieur à 34 semaines : il faut traiter in utero.


• La lésion est curable en post-natal, un traitement in utero est possible, le terme est supérieur à 34 semaines : il peut paraître logique d’extraire l’enfant. En réalité, les difficultés attendues pour réanimer ces enfants, ajoutées à celles pour réaliser un accouchement voie basse, font préférer le traitement in utero même à un terme tardif. La réanimation sera plus facile sur un enfant moins œdématié.


• La lésion est curable après la naissance, sans possibilité de traitement in utero : l’arrivée ou l’évolution vers l’anasarque est un facteur de mauvais pronostic et fait prendre une décision d’extraction après corticothérapie quel que soit le terme. Quand une naissance est envisagée sans traitement préalable, une ponction pré partum d’un épanchement pleural peut diminuer le risque de détresse respiratoire à la naissance.


    Dans tous les cas, ces thérapeutiques in utero s’inscrivent dans l’urgence en raison du risque de souffrance fœtale, de mort in utero et de lésion cérébrale. La règle est donc de mener de front le diagnostic et le traitement. S’il est facile d’identifier un trouble du rythme cardiaque, des jumeaux, une tumeur, une fistule artério-veineuse, il est plus difficile d’identifier le rôle d’un épanchement pleural éventuellement compressif. Dans ces cas, le bilan et la mise en place de drains pleuro-amniotiques sont réalisés dans le même temps. C’est secondairement que le diagnostic sera rectifié.


• Quand aucune cause curable n’a été identifiée, le pronostic est généralement mauvais, une interruption de grossesse est souvent proposée. Il s’agit généralement d’une IMG du troisième trimestre. Il faut encore souligner les difficultés d’un accouchement voie basse de ces enfants gros et œdématiés. Les dystocies sont fréquentes, les lésions des parties molles et l’hémorragie de la délivrance sont à craindre.


Après l’IMG ou la mort périnatale, l’autopsie est fondamentale. Des signes parfois mineurs, voire de découverte histologique, peuvent mettre sur la voie d’une maladie hématologique, métabolique ou génétique rare [7]. L’ADN doit être conservé, car parfois ce n’est qu’une récidive qui mettra finalement sur la voie. Il faut savoir aussi refaire un bilan parental à la recherche d’une anomalie de l’hémoglobine, ou du métabolisme du globule rouge, voire une échographie du cœur qui sont des investigations inutiles dans le cadre de l’urgence.

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Aug 1, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 13: Épanchements

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