Chapitre 12 Fractures supra-condyliennes
Les fractures supra-condyliennes (FSC) de l’humérus représentent plus de la moitié des fractures du coude chez l’enfant et sont à traiter en urgence. Elles inquiètent souvent de manière excessive, l’orthopédiste non spécialisé en pédiatrie. Leur traitement découle de la compréhension du mécanisme de la fracture et de sa physiopathologie. Elles peuvent être prises en charge de manière raisonnée et souvent sans abord chirurgical. Comme dans toute fracture, la première étape consiste à obtenir une réduction la plus anatomique possible. De la stabilité dépend la méthode de contention (tableau 12.1).
PHYSIOPATHOLOGIE
Les circonstances de l’accident sont essentielles à préciser, car elles orientent vers un type de fracture. Lorsque l’enfant tombe sur son poignet, coude en extension, la fracture se fait avec une extension du fragment distal par rapport au fragment proximal (90 % des FSC) ; le déplacement est alors postérieur. Lors d’un choc direct, le coude étant en flexion, le fragment distal se déplace en avant par rapport au fragment proximal ; la fracture est dite en flexion (figure 12.1). Les conséquences thérapeutiques dependent du sens du déplacement, en raison de la rupture ou non du périoste.
Nous allons prendre comme modèle de description les fractures supra-condyliennes en extension.
Lorsque le déplacement est faible (par exemple, bascule postérieure, avec un contact osseux persistant et sans déplacement en rotation), le périoste antérieur est rompu mais le périoste postérieur reste intact. Lors des grands déplacements, le périoste postérieur peut également être intact, représentant l’équivalent d’un « dégantage » de l’extrémité distale de l’humérus. Lorsque se produit également un mouvement de rotation du fragment distal en association au déplacement postérieur, le risque de rupture partielle du périoste est réel, et il est fondamental de parfaitement analyser cet effet rotatoire afin d’adapter la manœuvre de réduction. En effet, si cette manœuvre est inadaptée, il est possible de rompre complètement le reliquat périosté, rendant alors la fracture totalement instable. C’est sur le cliché de profil que ce déplacement va pouvoir être analysé (figure 12.2) :
RÉDUCTION ORTHOPÉDIQUE
Première étape
On débute par un abaissement du fragment distal. Il est indispensable de commencer par cette étape, et tant que l’épiphyse n’est pas correctement descendue, aucune autre manœuvre ne doit être faite, car elle risquerait de rompre le périoste encore intact. Cet abaissement se fait en très légère hyperextension du coude, en supination quand le déplacement est en rotation interne (ce qui est le cas le plus fréquent), en pronation quand le déplacement est en rotation externe (figure 12.3). Parfois, plusieurs minutes de traction douce et continue sont nécessaires. L’aide exerce un contre-appui au niveau de l’épaule. Un contrôle à l’amplificateur est fait. Si le fragment distal est descendu de manière excessive, il est alors probable que le périoste postérieur est rompu. Il n’y aura alors pas de possibilité de stabilisation par celui-ci.
Deuxième étape
La correction de la translation se fait par mobilisation dans le plan frontal de l’avant-bras par rapport à l’humérus, tout en poursuivant la traction (figure 12.4).
Quatrième étape
La correction de la bascule postérieure est réalisée par la mise en flexion du coude. Les pouces de l’opérateur appuient sur l’olécrane, et les autres doigts font contre appui sur la face antérieure de la diaphyse humérale (figure 12.5). Lorsque le périoste postérieur est intact, on sent une résistance en fin de flexion. Si cette résistance se fait sentir plus précocement lors de la flexion, cela signifie une insuffisance de réduction du fragment distal, ou l’incarcération d’un fragment de partie molle dans la partie antérieure du foyer fracturaire. Un contrôle radiologique ou scopique apprécie la qualité de la réduction (figure 12.6). Les critères de réduction sont la restitution de la continuité des deux colonnes de face. En cas de mauvaise visibilité, on peut s’aider des incidences de trois quarts qui permettent de visualiser au mieux chaque colonne. De profil, il faut s’assurer de retrouver l’aspect en sablier de l’extrémité inférieure de l’humérus, ainsi que l’antéposition normale de l’épiphyse. Une hyperflexion de l’épiphyse signe la rupture du périoste postérieur.