Chapitre 12
États kératoséborrhéiques
Hyperkératose nasodigitée idiopathique
Parakératose nasale héréditaire du Labrador Retriever
Hyperkératose nasale parasympathique (truffe parasympathique)
Dermatose répondant à l’administration de vitamine A
Syndrome comédoneux du Schnauzer
Hyperkératose marginale auriculaire
Dermatose répondant à l’administration de zinc
Hyperplasie de la glande supracaudale
Dysplasie épidermique du West Highland White Terrier
Syndrome hépatocutané (dermatite nécrolytique superficielle, érythème nécrolytique migrant superficiel, nécrose épidermique métabolique, dermatopathie diabétique)
Hyperkératose familiale des coussinets
Cals
Caractéristiques
Un cal apparaît comme une réaction cutanée hyperplasique localisée, faisant suite à un traumatisme par pression ou par friction. Les cals sont fréquents chez le chien, l’incidence la plus élevée étant rapportée chez les chiens de grandes races et de races géantes.
Principaux diagnostics différentiels
Le diagnostic différentiel inclut dermatophytose, démodécie, pyodermite et néoplasme.
Diagnostic
1. Généralement fondé sur l’historique et les signes cliniques.
2. Cytologie (exsudat) : débris de kératine ; inflammation purulente ou pyogranulomateuse, mise en évidence possible de tiges de poil libres et de bactéries.
3. Dermatohistopathologie : hyperplasie épidermique marquée, hyperkératose orthokératosique à parakératosique, kératose folliculaire et kystes folliculaires dilatés.
Traitement et pronostic
1. L’observation sans traitement est acceptable en cas de lésions non infectées.
2. Administrer des antibiotiques systémiques pendant une longue période (au minimum 4 à 6 semaines) en cas d’infection secondaire. Alternativement, il est possible d’appliquer une solution topique de diméthylsulfoxyde (DMSO) associée à de l’enrofloxacine (pour obtenir une solution à 10 mg/kg) toutes les 12 à 72 heures jusqu’à guérison des lésions.
3. Un effort particulier doit être entrepris quant au retrait des « poils incarnés » du cal, ces derniers pouvant à terme être à l’origine d’une furonculose et d’une infection. Extraire régulièrement les poils en frottant la zone (tous les 2 à 7 jours) en direction de la pousse du poil, à l’aide d’un tissu, d’une brosse ou d’une éponge. Appliquer de la cellophane très adhésive pour retirer les poils ; typiquement, seuls les poils incarnés peuvent être retirés, laissant intacts les poils actifs et normaux.
4. Rembourrer les lieux de couchage, les zones de repos et placer des bandages rembourrés afin de prévenir les traumatismes sur les zones affectées.
5. Appliquer des émollients, des pommades antibiotiques (mupirocine), du gel de peroxyde de benzoyle à 2,5 % ou un gel à base d’urée, d’acide salicylique et de lactate de sodium sur les zones affectées toutes les 12 à 24 heures, afin de ramollir la peau. Toutefois, les infections secondaires sont possibles si les hydratants sont utilisés sans la mise en place de rembourrages protecteurs.
6. L’excision chirurgicale est généralement déconseillée, la déhiscence de plaie étant une complication postopératoire possible.
7. Le pronostic est bon pour les lésions non infectées. Il s’agit d’un problème esthétique qui n’affecte pas la qualité de vie du chien.
Figure 12.1 Cals. Épaississement de la peau en regard du coude d’un chien. Les poils sont agglutinés avec une peau partiellement alopécique, ce qui est typique d’un cal.
Figure 12.2 Cals. Vue rapprochée de la lésion de la figure 12.1. La grande zone alopécique sur peau épaissie en regard du coude est typique de ce syndrome. Chez les chiens à poil court, les poils sont souvent impactés au sein des follicules et du cal.
Figure 12.3 Cals. Vue rapprochée de la lésion de la figure 12.1. Le clinicien exerce une légère pression sur le cal afin d’extraire les poils qui apparaissent alors à la surface de la peau. Ces poils sont une source favorisant les infections récidivantes.
Figure 12.4 Cals. Vue rapprochée de la lésion de la figure 12.1. Les poils extraits sont visibles. Cette technique est déconseillée car l’extraction forcée des poils peut entraîner une rupture interne de ces derniers et provoquer une cellulite et des cicatrices.
Figure 12.5 Cals. Zone focale d’alopécie et d’épaississement cutanés en regard du coude. Ces structures kystiques de grande taille sont des follicules pileux obstrués et remplis de débris de kératine.
Figure 12.6 Cals. Alopécie et épaississement sévères de la peau avec ulcérations en regard du jarret d’un chien. La pression chronique induisant la formation du cal peut également être à l’origine d’ulcères de décubitus.
Figure 12.7 Cals. Plaque sternale montrant une zone focale d’alopécie et de comédons en formation due à une pression et à des frictions chroniques chez les chiens à poitrail profond. Ce type de lésion est plus généralement observé chez les Teckels.
Figure 12.8 Cals. Matériel kératinisé extrait des comédons de la plaque sternale d’un Teckel. Noter les gros bouchons de kératine formés par une pression persistante lorsque le chien se tient en position sternale.
Figure 12.9 Cals. Les poils morts incarnés ont été retirés. Noter la longueur insoupçonnée de la tige qui était emprisonnée au sein du cal.
Figure 12.11 Cals. Cal focal favec ulcération résultant d’une pression focale extrême et d’une infection secondaire. Les poils emprisonnés ont été retirés.
Figure 12.13 Cals. Retrait de poils emprisonnés dans un cal chronique. Noter la faible proportion de la tige pilaire qui est exposée à la surface du cal.
Figure 12.14 Cals. Cal chronique mettant en évidence des follicules kystiques dilatés s’étant développés secondairement à une pression chronique et à une obstruction consécutive de l’entrée des follicules. Noter l’absence d’infection active malgré la présence de follicules kystiques de grande taille.
Figure 12.15 Cals. Cal chronique mettant en évidence des follicules kystiques dilatés s’étant développés secondairement à une pression chronique et à une obstruction consécutive de l’entrée des follicules. Noter l’absence d’infection active malgré la présence de follicules kystiques de grande taille.
Figure 12.16 Cals. Les comédons forment des follicules dilatés souvent secondairement infectés pouvant se rompre et donner naissance à une furonculose. Les follicules sont obstrués (comédons) à cause de la pression permanente appliquée lorsque les chiens au poitrail profond se reposent en position sternale.
Acné du chat
Caractéristiques
L’acné du chat est un trouble de la kératinisation folliculaire associée à une hyperplasie glandulaire. Elle est fréquente dans cette espèce.
Diagnostic
1. Historique, signes cliniques et exclusion des autres hypothèses diagnostiques.
2. Dermatohistopathologie : kératose, obstruction et dilatation folliculaires. Hyperplasie glandulaire, périfolliculite, folliculite, furonculose et cellulite sont possibles lors d’une d’infection bactérienne secondaire.
Traitement et pronostic
1. Traiter toute infection bactérienne secondaire à l’aide d’une antibiothérapie systémique appropriée pendant au moins 2 ou 3 semaines. Traiter les infections à Malassezia à l’aide de fluconazole administré à la posologie de 10 mg/kg par jour pendant 30 jours.
2. Tondre les poils autour des lésions, appliquer des compresses humides et nettoyer les zones affectées avec des lingettes destinées au traitement de l’acné humaine (sans alcool) ou avec des shampoings à base de peroxyde de benzoyle, d’acide salicylique et de soufre, ou de lactate d’éthyle, tous les 1 à 2 jours jusqu’à guérison des lésions, puis à la demande pour le traitement d’entretien. Un nettoyage régulier du menton (tous les 2 à 3 jours) est généralement nécessaire pour prévenir les rechutes.
3. Les traitements topiques alternatifs pouvant être efficaces lorsqu’ils sont utilisés tous les 1 à 3 jours, ou à la demande, incluent :
– pommade ou crème de mupirocine (l’acide fusidique peut être intéressant en première intention [NdT]) ;
– gel de peroxyde de benzoyle à 2,5 % (note : peut être irritant chez certains chats) ;
– crème ou lotion de trétinoïne à 0,01 % ou 0,025 % ;
– gel de métronidazole à 0,75 % ;
– topiques à base de clindamycine, d’érythromycine ou de tétracycline.
4. Pour les cas réfractaires graves, un traitement systémique à base de vitamine A ou d’isotrétinoïne peut être efficace.
5. Le pronostic est bon, mais un traitement symptomatique à vie est généralement nécessaire pour maintenant la rémission. En l’absence d’infection secondaire, il ne s’agit que d’une affection esthétique qui n’affecte en rien la qualité de vie de l’animal.
Figure 12.17 Acné du chat. Lésions papuleuses suintantes et humides sur le menton d’un chat adulte. La furonculose et la cellulite ont entraîné une tuméfaction tissulaire et la formation d’un exsudat.
Figure 12.18 Acné du chat. Les poils ont été tondus afin de mieux mettre en évidence l’érythème, l’hyperpigmentation et les comédons.
Figure 12.19 Acné du chat. L’alopécie et les cicatrices sont des séquelles après un traitement topique avec une pommade à base de mupirocine.
Figure 12.20 Acné du chat. Les poils ont été tondus afin de mieux visualiser les comédons, les papules et les lésions suintantes dans ce cas sévère d’acné du chat qui se limite généralement au menton.
Figure 12.21 Acné du chat. Une décoloration brune est typique de la formation de comédons associée à l’acné du chat.
Figure 12.22 Acné du chat. Vue rapprochée du chat de la figure 12.21. Les lésions se sont étendues le long de la face latérale de la lèvre. C’est inhabituel dans l’acné du chat.
Hyperkératose nasodigitée idiopathique
Caractéristiques
L’hyperkératose nasodigitée idiopathique est un état idiopathique caractérisé par la formation excessive de kératine sur la truffe et les coussinets. Elle est fréquente chez les chiens âgés, en particulier chez le Cocker Spaniel.
Traitement et pronostic
1. L’intensité du traitement dépend de la sévérité des lésions.
2. Désencombrer les conduits nasolacrymaux.
3. Pour les cas mineurs, asymptomatiques et bénins, il peut être raisonnable de se contenter d’une simple observation sans traitement.
4. Pour les cas modérés à sévères, hydrater les zones atteintes à l’aide de rinçages à l’eau tiède ou mettre en place des compresses d’eau chaude pendant 5 à 10 minutes. Puis appliquer un émollient toutes les 24 heures jusqu’à l’élimination complète de l’excès de kératine (environ 7 à 10 jours). Poursuivre le traitement à la demande pour maintenir la rémission. Les agents émollients efficaces incluent :
– pommade à base de vitamine A et vitamine D ;
– gel d’acide salicylique, de lactate de sodium et d’urée ;
5. Pour les excroissances cornées, parer l’excès de kératine avant de commencer le traitement hydratant et émollient.
6. En cas de lésions fissurées, il est possible d’appliquer une pommade associant un antibiotique et des glucocorticoïdes toutes les 8 à 12 heures jusqu’à guérison.
7. Le pronostic est bon. Bien qu’incurable, il s’agit d’une maladie esthétique pouvant généralement être prise en charge par un traitement symptomatique.
Figure 12.23 Hyperkératose nasodigitée idiopathique. Projections hyperkératosiques sévères en feuilles de fougère avec formation de croûtes sur la truffe d’un Boxer âgé.
Figure 12.24 Hyperkératose nasodigitée idiopathique. Croûtes et projections en feuille de fougère sévères sur la truffe.
Figure 12.25 Hyperkératose nasodigitée idiopathique. Croûtes épaisses et adhérentes couvrant presque toute la truffe de ce chien.
Figure 12.26 Hyperkératose nasodigitée idiopathique. Légère hyperkératose des coussinets sans autre lésion (ce qui serait plus typique d’une dermatose auto-immune ou d’un syndrome hépatocutané).
Figure 12.27 Hyperkératose nasodigitée idiopathique. Hyperkératose et croûtes sur le coussinet métacarpien.
Figure 12.28 Hyperkératose nasodigitée idiopathique. Zone focale d’hyperkératose sur le coussinet central chez un Greyhound (cornes du Greyhound).
Parakératose nasale héréditaire du Labrador Retriever
Caractéristiques
La parakératose nasale héréditaire du Labrador Retriever est une dermatite familiale cliniquement contrôlable mais incurable qui apparaît entre 6 et 12 mois. On suspecte une transmission héréditaire sur un mode autosomique récessif. Cette affection est peu fréquente chez le Labrador Retriever et chez les chiens issus des croisements avec cette race.
Diagnostic
1. Exclure les autres hypothèses diagnostiques.
2. Dermatohistopathologie (truffe) : parakératose modérée à marquée, accumulations multifocales d’un liquide protéinique entre les kératinocytes au sein de la couche cornée et de la couche épineuse superficielle, dermatite interstitielle superficielle à lymphoplasmocytaire d’interface légère à modérée, exocytose lymphocytaire et neutrophilique avec incontinence pigmentaire légère à modérée.
Traitement et pronostic
1. On ne connaît aucun traitement spécifique, mais les traitements indiqués pour l’hyperkératose nasodigitée idiopathique peuvent être efficaces (voir la partie précédente).
2. Alternativement, on obtient généralement une amélioration avec un traitement topique au propylène glycol (dilué à 50 % dans l’eau), à la vaseline, ou à la vitamine E. Au début, appliquer le traitement sur les lésions toutes les 12 heures jusqu’à obtenir une réponse satisfaisante, puis renouveler à la demande pour maintenir la rémission.
3. Des doses orales immunosuppressives de prednisone (2 mg/kg toutes les 24 heures) peuvent être efficaces, mais une administration quotidienne au long cours est nécessaire pour maintenir la rémission. Ainsi, cette stratégie thérapeutique est inadéquate pour la plupart des cas en raison des effets indésirables inacceptables à la corticothérapie.
4. Le pronostic de guérison est sombre, mais les chiens atteints peuvent profiter d’une bonne qualité de vie grâce à un traitement symptomatique de routine. Les chiens atteints doivent être écartés de la reproduction.
Figure 12.31 Parakératose nasale héréditaire du Labrador Retriever. Hyperkératose et croûtes sur la truffe d’un jeune Labrador adulte. (Remerciements à M. Paradis.)
Hyperkératose nasale parasympathique (truffe parasympathique)
Caractéristiques
Un dysfonctionnement parasympathique peut entraîner une perte du fonctionnement normal de la glande nasale située sur la muqueuse latérale du nez. La glande possède une innervation parasympathique par le nerf facial. Lors de kératoconjonctivite sèche (KCS), il est possible qu’il y ait eu une atteinte des fibres parasympathiques préganglionnaires proximales au ganglion ptérygopalatin associée à une otite concomitante, endommageant ainsi les fibres nerveuses lors de leurs trajets dans l’os temporal.
Traitement et pronostic
1. L’intensité du traitement dépend de la sévérité des lésions.
3. Utiliser les traitements adaptés à l’hyperkératose nasale idiopathique.
a. Désencombrer les conduits nasolacrymaux.
b. Pour les cas modérés, asymptomatiques et bénins, il peut être raisonnable de se contenter d’une simple observation sans traitement.
c. Pour les cas modérés à sévères, hydrater les zones affectées à l’aide de rinçages à l’eau tiède ou mettre en place des compresses d’eau chaude pendant 5 à 10 minutes. Puis appliquer un émollient toutes les 24 heures jusqu’à l’élimination complète de l’excès de kératine (environ 7 à 10 jours). Poursuivre le traitement à la demande pour maintenir la rémission. Les agents émollients efficaces incluent :
Figure 12.33 Hyperkératose nasale parasympathique. Hyperkératose et croûtes asymétriques sur la truffe.
Figure 12.34 Hyperkératose nasale parasympathique. Vue rapprochée du chien figure 12.33. La topographie asymétrique des croûtes (affectant uniquement la moitié de la truffe) est apparente.
Séborrhée primaire du chien
Caractéristiques
La séborrhée primaire du chien est un trouble héréditaire de la kératinisation. Elle est fréquente chez le chien, l’incidence la plus élevée étant rapportée chez le Cocker Spaniel américain, le Springer Spaniel anglais, le Westie et le Basset Hound. Les symptômes cliniques débutent chez le chiot, ils peuvent être discrets au début puis s’aggraver avec l’âge. Les symptômes peuvent apparaître ou s’aggraver à l’âge adulte en cas de développement d’une maladie concomitante sous-jacente.