Généralités
N. Delvaux, I. Merckaert, D. Razavi and A. Liénard
Introduction189
Aspects généraux190
Aspects spécifiques193
Objectifs de la communication194
Stratégies de communication206
Évaluation de la communication216
Conclusion219
INTRODUCTION
La communication est donc devenue depuis les deux dernières décennies l’objet d’un intérêt grandissant à la fois pour les chercheurs de disciplines diverses mais aussi pour les citoyens. Les mots «communiquer» et «communication» apparaissent dans la langue française lors de la seconde moitié du Xe siècle. À partir du sens général de ces termes qui renvoie au «partage à deux ou plusieurs», à la fin du XVIe siècle, «communiquer» commence aussi à signifier «transmettre». C’est alors que les transports, les téléphones et les médias deviennent des «moyens de communication». En 1949, Claude Shannon, un ingénieur des laboratoires de la Bell Telephone, formule une théorie mathématique qu’il ne songeait sans doute appliquer qu’à la communication par télégraphe (Winkin, 1996). Cette théorie admet un schéma de base où la communication consiste en la transmission par un émetteur d’un signal à un récepteur, transmettant à son tour le signal reçu sous forme de message à un destinataire. Mais la vulgarisation de cette théorie généralisa très vite le modèle à toute situation bipolaire (entre deux individus, deux machines ou un homme et une machine). Moins de trente ans plus tard, la notion de communication, répandue par l’emploi qu’en ont fait la psychologie, la sociologie, l’anthropologie, se retrouve définie de plus de cent façons différentes et étudiée dans une vingtaine de disciplines. En effet, le verbe «communiquer» et le nom commun qui en est dérivé sont l’un et l’autre polysémiques (Baylon et Mignot, 1994).
Il est hors de propos de cerner ici ce vaste champ d’investigation. L’objectif de ce chapitre est de prendre en compte l’aspect pluridimensionnel – cognitif, émotionnel, comportemental – de la communication entre les professionnels de la santé et les malades présentant une affection cancéreuse. La psychologie sociale fournit le point de repère qui semble le plus pertinent pour l’étude de ce type de communication. Cette approche définit généralement la communication comme le fondement des phénomènes qui régissent l’élaboration et la pérennité des relations sociales et de leurs produits (attitudes, représentations, idéologies, performances de groupe, changements sociaux, etc.) (Winkin, 1996). Qu’elle soit interpersonnelle ou de masse, elle est un moyen destiné à produire un effet. Une action de communication peut être définie en répondant aux questions suivantes : qui dit quoi, par quel canal, à qui, avec quel effet? La communication interpersonnelle peut donc être définie comme le mécanisme médiateur entre deux individus en interaction. En d’autres termes, il s’agit de l’ensemble des processus par lesquels s’effectuent les échanges d’informations et de significations entre des personnes dans une situation sociale donnée. Les termes «communication» et «interaction» seront ici utilisés dans ce sens. Le terme «relation» sera quant à lui repris dans un sens élargi pour signifier tout type de lien entre des personnes.
ASPECTS GÉNÉRAUX
La communication dans les soins peut être appréhendée à partir des éléments généraux de la communication : un émetteur (ou locuteur) transmet un message à un récepteur (ou destinataire) par un canal en utilisant un code dans un certain contexte. L’étude de la communication passe donc par l’étude des caractéristiques de chacun de ces éléments. C’est un processus interactif, influencé par des variables inhérentes aux interlocuteurs (émetteurs et récepteurs). Celles-ci sont psychologiques (état émotionnel, mécanismes de défense), cognitives (fonctionnement intellectuel, système de représentation) et sociales (culture, rôle et statut social, préjugés et stéréotypes) (Abric, 1996).
Il faut rappeler en premier lieu que tout individu qui communique est, aussi bien sur le plan psychologique que cognitif, directement impliqué dans une situation relationnelle. En effet, il est tout entier engagé avec sa personnalité et ses motivations. Celles-ci peuvent être explicites ou implicites, conscientes ou inconscientes – et donc pas toujours facilement repérables. En communication, les comportements de l’individu ont été conceptualisés comme les résultantes de forces qui s’exercent sur lui à un moment donné. Dans cette perspective dynamique, ces forces, parfois contradictoires, qui engendrent des tensions, peuvent être de nature positive – correspondant aux besoins d’accomplissement et déterminant le comportement d’approche – ou de nature négative – correspondant aux besoins de fuite et déterminant le comportement d’évitement. Un individu qui émet un message peut donc à la fois viser un objectif explicite de la communication et en même temps éviter des éléments qui lui posent problème. Cette formulation mobilise des phénomènes étudiés précédemment sous l’angle de la psychanalyse, comme les mécanismes de défense. Ces mécanismes visent à protéger le système de fonctionnement personnel. Les formes les plus courantes en sont la projection, la scotomisation, la mémorisation sélective, l’interprétation défensive, la négation de l’autorité de la source d’information.
En second lieu, rappelons que parmi les variables socio-cognitives, la notion de représentation sociale élaborée par Moscovici dès 1961 a permis de mieux comprendre la façon dont les croyances sont socialement construites et leur importance dans la communication (Rouquette, 1998). La représentation sociale est le produit d’une activité mentale par laquelle un individu reconstitue le réel auquel il est confronté et lui attribue une signification spécifique. Il s’agit de l’ensemble organisé des informations, croyances, attitudes et opinions qu’un individu élabore à propos d’un objet donné. Dans la situation de communication, trois éléments de la représentation de la situation vont jouer un rôle essentiel : la représentation de soi, la représentation de l’autre et la représentation de la tâche à réaliser, de la rencontre ou du contexte. En effet, la relation interpersonnelle se réfère à l’identité que se donne le locuteur et à celle que l’autre lui prête, mais également à l’identité qu’il prête à l’autre. Les personnes établissent aussi des rapports affectifs. Ainsi, nous verrons que la communication soignantsoigné peut être significativement influencée par le désir du soignant d’informer et le besoin du malade d’être informé. Or le projet du soignant ne correspond pas toujours à l’attente des malades. En effet, la quasi totalité des malades souhaitent être informés mais ce désir est souvent sous-estimé ou assez mal compris par les soignants. Un autre type de situation extrême est celle du malade déniant la gravité de son état et du soignant souhaitant l’informer. Les caractéristiques personnelles des malades dans l’interaction, leur degré d’expression et d’extraversion influencent certainement les soignants dans leur communication en oncologie (Street, 1991).
Ainsi, la communication est un processus complexe influencé par les différentes facteurs passés en revue ci-dessus. La figure 10-1 illustre cela.
Fig. 10-1 |
Il faut retenir aussi que la communication entre deux interlocuteurs se fait par message. Ce terme désigne un signal, ou un ensemble de signaux porteurs d’informations et transmis au cours d’un acte de communication. Fondée sur l’interaction, la communication est toujours une «transaction entre les locuteurs» (Abric, 1996). Des approches globales amènent ainsi à concevoir la communication comme un processus où chaque message d’un protagoniste produit en réaction un message qui, à son tour, entraîne un nouveau message (Baylon et Mignot, 1994). L’émission et la réception sont simultanées : l’émetteur est en même temps émetteur et récepteur, et non pas émetteur puis récepteur. Pour ce faire, certains phénomènes de coordination, de synchronisation, d’harmonisation des comportements respectifs des individus en interaction doivent intervenir en permanence, et à tous les niveaux. En effet, toute interaction communicative comporte des signaux coordinateurs qui permettent de régler les tours de prise de parole et de maintenir les interlocuteurs en «synchronie» en posant en permanence quatre questions : «M’entends-tu?», « M’écoutes-tu? », «Me comprendstu? », « Qu’en penses-tu? ».
Le message peut emprunter de multiples canaux qui peuvent être verbaux ou non verbaux. C’est pourquoi, l’approche systémique développée par un groupe de psychiatres travaillant à Palo Alto donne une définition très large de la communication où sont incluses toutes les relations, à la fois verbales et non verbales, entre un émetteur et un récepteur (Watzlawick, Helmick Beavin et coll., 1972). Le message verbal peut se présenter sous la forme d’énoncés caractérisés par une forme et une fonction. La forme grammaticale rend compte du «comment» et comprend principalement des affirmations et des questions. La fonction vise à saisir l’objectif de chaque énoncé, le pourquoi de l’énoncé. Les principales fonctions sont l’évaluation, l’information et le soutien. Le message peut également passer par le canal du non verbal, canal complémentaire à celui du verbal. La communication non verbale, appelée aussi analogique, est un moyen privilégié d’échanges de nature émotionnelle. Même lorsque deux individus ne disent rien, ils émettent des signifiants corporels qui témoignent de la nature du lien social existant ou souhaité. Dès lors, il est impossible de ne pas communiquer. En médecine, le corps – objet de relations et de soins – intervient à la fois dans le contenu des échanges mais aussi par les supports que sont le toucher et la palpation. En cela, la plupart des conventions concernant la distance qualifiée d’intime dans la vie courante, sont transgressées dans la relation clinique. La communication ne peut donc se résumer à la simple transmission d’informations, ni à ses aspects verbaux. Celle-ci ne prend son sens que dans l’intégration du verbal et du non verbal. Toutefois, la fonction non verbale des interactions n’a pas été aussi bien étudiée que celle du langage verbal (Barrier, 1996). En effet, l’analyse qui est faite des situations de communication, telles que l’entretien ou l’interaction en jeu de rôle, se focalise davantage sur les aspects verbaux que non verbaux. Cette tendance résulte probablement de la difficulté d’opérationaliser le non verbal en indicateurs spécifiques (Ghiglione, 1986; Rime, 1984).
La communication implique aussi un code commun aux deux interlocuteurs. Le code est l’ensemble des règles qui énoncent les possibilités du système (langagier, gestuel, interactionnel, social) (Winkin, 1996). Dans la relation «soignant-soigné», cela pose le problème de l’hermétisme des jargons. Ainsi, des termes familiers ou rendus familiers par un usage habituel ne sont pas également maîtrisés par l’ensemble des interlocuteurs soignant-soignéfamille. D’une part, les mots ne recouvrent pas les mêmes significations pour tous. Des termes pour d’aucuns techniques sont pour d’autres dotés d’une forte charge émotionnelle. Des adjectifs communs pour tout un chacun tendent même à changer de sens : pensons aux mots «positif» ou «négatif» dans un contexte non scientifique et à la valeur accordée à ces mêmes termes en médecine (par exemple, radiographie «négative», ganglions «positifs»). D’autre part, l’attitude posturale, les gestes, les mimiques, les regards, les intonations sont porteurs aussi de significations diverses. De plus, les perceptions réciproques des interlocuteurs, mais aussi leur intention, interfèrent au niveau de la signification attribuée au message émis. Dans une enquête comparant un groupe de médecins, d’infirmier(ère)s et de patients, les réponses montrent que l’utilisation du langage médical mène fréquemment à des difficultés entre soignants et soignés, ce qui est rarement le cas avec le langage courant (Bourhis, Roth et coll., 1989). La profession infirmière est perçue comme plus «bilingue» que ne l’est le corps médical. Par ailleurs, concernant les aspects psychosociaux, il est à noter que les soignants semblent particulièrement démunis dans leurs échanges. Des termes courants, souvent dépréciateurs, sont utilisés pour décrire des patients posant des problèmes relationnels.
La communication ne peut être interprétée qu’en rapport avec le contexte (Norton et Smith, 1994). Celui-ci comprend quatre éléments, à savoir le cadre (aménagement spatial et temporel), les caractéristiques personnelles des partenaires (variables psychologiques, cognitives, professionnelles et sociales), la nature de la relation (type de service) et son ancienneté (premier contact, suivi). Le contexte se définit ainsi comme l’ensemble des informations permettant de restreindre le nombre de significations possibles d’un mot, d’un acte, d’un événement. Les mots peuvent être chargés de sens différents. Un mot peut être reçu par le destinataire avec un autre sens que celui qu’entendait lui donner le locuteur. Par exemple, le mot maladie distingue plusieurs réalités. Ceci est particulièrement évident quand on compare deux langues pour un même concept. En anglais, lorsque le soignant parle d’une affection médicale avec son tableau clinique, son diagnostic et son pronostic, il emploie le mot «disease». Lorsque le malade parle de son vécu, il emploie le mot «illness». Enfin le concept de maladie, tel qu’il est vécu par l’entourage du patient, renvoie au terme «sickness» (Lambrichs, 1996). Il apparaît ainsi clairement dans la langue anglaise que le mot «maladie» en français recouvre en fait plusieurs significations. De plus, à ce contexte sont associés l’arrière-fond culturel et les images sociales. En effet, chacun parle et entend à partir de certaines bases : à savoir en fonction de sa culture et de son origine sociale.
En conclusion, les différentes théories de la communication offrent des perspectives pour identifier les éléments essentiels de l’interaction soignant-soigné et en esquisser une première définition (Wasserman et Inui, 1983). Tout d’abord, l’interaction soignant-soigné est déterminée par les caractéristiques des partenaires, leurs rôles et leurs attentes spécifiques. Ensuite, l’échange d’informations c’est-à-dire le message s’opère par différents canaux, à savoir des comportements verbaux et non verbaux. Elle inclut les éléments linguistiques (syntaxe), paralinguistiques (ton de voix, regard, etc.), kinesthésiques (geste, mimique faciale). La séquence de ces comportements est aussi un élément essentiel de l’interaction : un dialogue est plus que la somme de monologues. Les fonctions principales de la communication verbale sont l’évaluation, l’information et le soutien. Enfin, le contexte contribue à déterminer l’interaction, tant au niveau du contenu de ce qui est transmis que des aspects relationnels de l’échange. La communication interpersonnelle peut donc être caractérisée par trois dimensions fondamentales résumées dans le Tableau 10-1: la multicanalité, la plurifonctionnalité et la contextualisation.
Canaux | Fonctions | Contextes |
---|---|---|
Verbaux – Formes affirmatives – Formes interrogatives Non verbaux – Mimiques – Gestes – Regards | Évaluation Information Soutien | Aménagement du cadre – Spatial – Temporel Histoire de la relation – Premier contact – Suivi Type de service hospitalier |
ASPECTS SPÉCIFIQUES
L’intérêt croissant pour la communication en oncologie est associé aux évolutions de la médecine. D’une part, les soignants ont le défi de conjuguer une technicité croissante à la singularité des individus. Les intervenants qui exercent une activité clinique soumise aux contraintes techniques, économiques et administratives doivent en permanence particulariser leurs comportements face à des patients dont les réactions ne sont pas souvent compatibles avec une planification rigide. D’autre part, une évolution importante s’observe ces vingt dernières années dans l’attitude des soignants. Ces derniers se mobilisent de plus en plus en faveur de l’information des malades et du droit de ceux-ci. L’engagement de l’équipe médicale fait partie explicitement du contrat passé avec le malade. Ces changements de conceptions et de pratiques dans les soins se sont inscrits dans des évolutions sociales plus générales. La fin d’une «société d’obéissance et de discipline» se marque ainsi, depuis quelques années, par une exigence accrue d’autonomie des patients. Toutefois, la nature même des affections cancéreuses, au décours incertain, nécessitant des traitements longs et souvent inconfortables, rend cette autonomie pratiquement difficile. Ceci est d’autant plus vrai que soignants et patients occupent des statuts spécifiques qui peuvent avoir un impact sur la communication. En effet, la communication soignant-soigné en oncologie implique tout d’abord une interaction entre deux personnes dans une position non égalitaire. Elle est initiée non par la volonté des partenaires mais par la nécessité de faire face à la maladie et à ses conséquences. Ensuite, elle touche à des questions d’une importance vitale et est en conséquence très chargée en émotions. Elle est à la fois source de stress, de frustration, d’agression, mais également, de satisfaction et de gratification. Enfin, elle entretient et facilite entre le soignant et le soigné le lien relationnel nécessaire au bon déroulement des soins. Dans cette communication soignant-soigné se poursuivent trois dialogues superposés : un dialogue social avec des interlocuteurs en situation inégale utilisant le langage ordinaire, un dialogue médical à propos des symptômes et des traitements, un dialogue souterrain où se rencontrent le non-dit, le présupposé, l’implicite et l’affectif (Ong, de Haes et coll., 1995). Ces trois dialogues fonctionnent simultanément; le soignant peut seulement choisir de privilégier l’un d’eux en fonction de ce qu’exige la relation avec le malade. Le malade est quant à lui porteur de deux types de demandes : une demande explicite de soins qui s’adresse à la médecine organiciste et au professionnel, et une demande implicite de secours qui est d’ordre psychologique et s’adresse à l’homme.
La communication en médecine est ainsi socioaffective et/ou instrumentale (Hall, Roter et coll., 1987), visant toujours l’établissement d’une relation thérapeutique, l’échange d’informations et la prise de décisions (Ong, de Haes et coll., 1995). Ces trois objectifs seront discutés plus loin.
OBJECTIFS DE LA COMMUNICATION
Relation thérapeutique
La qualité de la relation est le premier objectif de la communication qui peut être comprise comme un prérequis d’une qualité des soins. La relation thérapeutique est nécessaire pour obtenir la confiance du patient et le soutenir. Le deuxième objectif de la communication en oncologie est l’échange d’informations incluant l’apport et la prise d’informations. L’enjeu pour le soignant en général, et le médecin en particulier dans cette démarche, est d’établir un diagnostic et un plan thérapeutique corrects. L’enjeu pour le malade est double : d’une part, connaître et comprendre la situation, d’autre part, se sentir reconnu et compris par le soignant. Chacun des partenaires participe à la fois à l’apport et à la prise d’informations. Le troisième objectif de la communication concerne plus spécifiquement la prise de décision relative au traitement. La recherche en médecine a fait progresser le nombre d’informations concernant les effets des traitements tant médicaux que psychosociaux. Ces informations impliquent un choix faisant intervenir le point de vue du patient qui est influencé notamment par son expérience des symptômes, par ses préoccupations et par ses préférences. La mise en œuvre de ces trois objectifs fait appel à des stratégies spécifiques qui seront présentées plus loin.
La relation médecin-malade conditionne l’ensemble des échanges d’informations entre les protagonistes de la relation médicale. Il est donc essentiel pour le médecin de créer une relation interpersonnelle de qualité, c’est-à-dire d’établir un cadre clair, chaleureux et rassurant dans lequel le patient se voit offrir une place en tant que personne dont les difficultés et les émotions sont prises en compte (Fallowfield et Jenkins, 2004; Wright, Holcombe et coll., 2004). Idéalement, cette relation interpersonnelle implique compassion, respect et confiance afin que le patient puisse s’exprimer et se sentir rassuré sur la légitimité et la normalité de ses réactions, émotions et difficultés face au cancer (Beckman et Frankel, 2003). Tenir compte des difficultés vécues par le patient et de ses attentes concernant l’information et la prise de décision constitue la base d’une communication centrée sur le patient (Lewin, Skea et coll., 2001).
La communication en clinique inclut un nombre important de contacts avec les patients et leurs proches : au cours d’une carrière, un clinicien peut en accumuler une centaine de mille! La communication associe une proximité psychologique (incluant des échanges verbaux par exemple) et une proximité physique (incluant un toucher par exemple) avec un tiers nécessitant à la fois un engagement social et une empathie. Une bonne communication soignant-soigné apparaît aujourd’hui comme un facteur déterminant de la qualité de la relation thérapeutique (Chaitchik, Kreitler et coll., 1992). Il s’agit en théorie d’un processus complexe qui est influencé par des caractéristiques inhérentes à la fois au patient, au soignant, au contexte de la relation, au cadre de l’entretien et au code utilisé. Une série d’entretiens cliniques bien menés peut constituer une relation d’aide aux patients sans que le soignant ne puisse prétendre pour autant au statut de psychothérapeute (Egan, 1992; Poussin, 1992).
Écoute
L’écoute est un des fondements de la relation thérapeutique. L’écoute, comme le mot «disponibilité», est un terme qui a été et reste fort utilisé aujourd’hui. Le monde de la santé a redécouvert l’intérêt de l’écoute (Gordon et Edwards, 1997). C’est la caractéristique fondamentale de la communication visant l’expression d’autrui. L’écoutant doit respecter deux impératifs : manifester une attitude de compréhension et contrôler ses réactions spontanées qui vont beaucoup plus dans le sens du jugement, de l’interprétation, du conseil ou du questionnement. Définie de façon optimale, l’écoute repose donc plus sur des principes attitudinaux que sur des techniques de communication (Artaud, 1997). L’écoute correspond à l’orientation non directive et à la notion de thérapie centrée sur le client, développées en psychologie par C. Rogers (Rogers 1967).
Physiologiquement, écouter est un acte moteur qui nécessite une mise en tension des muscles de l’oreille moyenne et une focalisation de l’attention visuelle. Comme l’ont montré les recherches en psychologie de la communication, écouter, acte qu’on pourrait croire facile et naturel – il suffirait de laisser parler et de poser en retour les bonnes questions – est de fait difficile. L’écoute active demande une formation solide car tout s’y oppose. Tout d’abord, la formation médicale de type scientifique traite souvent la parole comme une fonction parasitaire. Le progrès des techniques diagnostiques va même parfois jusqu’à se substituer à l’examen clinique. Ensuite, une certaine (dé)formation hospitalière traite la parole comme un bavardage encombrant, une perte de temps aussi bien auprès du malade qu’entre soignants. Durant la formation de base, très peu de futurs soignants ont eu l’occasion d’être acceptés par des seniors dans l’intimité d’une relation thérapeutique telle qu’elle est pratiquée dans l’entretien. De plus, un autre obstacle à l’écoute est aussi le besoin qu’a le soignant d’intervenir dans des situations où il croit savoir et comprendre avant même que le patient ne formule son vécu ou ses besoins. Accepter que le malade parle de lui et pas seulement de la maladie nécessite que le soignant accepte d’être placé non pas tant sur un plan technique qui lui assure une position haute, mais sur un plan relationnel plus égalitaire où il peut être interpellé et mis en cause par son patient. L’écoute ne suffit pas; il faut encore que le soignant puisse se décentrer et comprendre que le patient ressente cela. Ce n’est pas chose facile car la position du soignant le presse tout à la fois à s’affirmer et à se protéger. Finalement, écouter nécessite un engagement social qui requiert d’abandonner la vigilance et la méfiance engendrée par la rencontre avec une personne pas ou peu connue. Écouter nécessite donc de se sentir en sécurité. Ce sentiment de sécurité est déterminé par des facteurs conscients et inconscients. Cette sécurisation est obtenue en recherchant souvent inconsciemment un contexte connu, familier et prévisible.
L’écoute est donc une tâche très difficile pour le soignant. Mais, indispensable point de référence, elle permet tout d’abord au soignant un repérage et une évaluation des problèmes, du vécu, des besoins et des ressources personnelles du patient. L’activité d’écoute est une activité de diagnostic (Blanchet, Bezille et coll., 1985). L’écoute est facilitée par l’utilisation de techniques encourageant le patient à s’exprimer (attitude de calme, possibilité de silence, disponibilité, etc.). Elle s’intègre utilement dans le processus d’évaluation des besoins du patient à être informé. L’écoute nécessite l’installation d’une empathie qui permet l’établissement d’une confiance réciproque entre le malade et son médecin, l’obtention d’informations concernant les émotions et les perceptions du malade.
Communication centrée sur le patient
Des techniques psychothérapeutiques particulières peuvent être à la base de la relation thérapeutique. En bien des points, celle-ci peut s’inscrire dans la perspective rogérienne d’entretien non directif et de «thérapie centrée sur le client» (Blanchet, Bezille et coll., 1985). Cette orientation non directive, d’abord élaborée dans un contexte thérapeutique, a connu un grand succès en psychologie sociale appliquée : elle a inspiré de nombreuses pratiques d’intervention comme l’entretien non directif. Pour Rogers, dans la communication interindividuelle, comme dans la relation thérapeutique, l’essentiel est la création d’un climat relationnel particulier fondé sur quatre composantes : l’acceptation inconditionnelle de l’autre, la neutralité bienveillante, l’authenticité et l’empathie. Des recherches confirment que le climat ainsi créé favorise la capacité du sujet à se comprendre lui-même et donc à résoudre ses problèmes (Rogers 1967). Plutôt que non directive, l’approche proposée par Rogers est, selon ses propres termes, «centrée sur le client». Pour être aidante, elle repose nécessairement durant l’entretien sur une écoute active, une présence chaleureuse et une acceptation du vécu tel qu’exprimé par le patient. Cependant l’état de détresse dans lequel se trouvent souvent le malade et ses proches amène le soignant à dépasser la position de non directivité et à adopter une position de soutien actif incluant souvent un soutien informationnel et instrumental. Il est le fait d’une attitude positive de respect et d’authenticité. Le respect peut se définir comme l’estime de l’autre tout simplement parce qu’il est un être humain. Le respect que le soignant éprouve envers le patient peut se manifester de façon suivante : par une présence physique attentive et une écoute active (le soignant se dit que ça vaut la peine de consacrer du temps et de l’énergie à travailler avec le patient), par un évitement des jugements critiques, par la manifestation d’une compréhension empathique de la situation du patient (le soignant considère chaque patient comme un être unique plutôt que comme un cas), par la manifestation d’une chaleur et d’une cordialité appropriées, par une aide au patient à découvrir ses ressources (le soignant considère que le patient possède les ressources nécessaires pour mener plus efficacement sa vie). L’authenticité consiste à rester soi-même dans ses échanges avec le patient. Il y a authenticité si le soignant évite de surestimer son rôle lié à sa profession, s’il garde une conduite spontanée (non pour autant laissée au hasard), s’il montre une cohérence entre ses valeurs et son comportement, entre ses pensées et ses paroles. L’utilisation de ces techniques psychothérapeutiques par d’autres professionnels de la santé qui y seraient formés est possible. Toutefois, de nombreux efforts doivent être encore consentis pour adapter certaines techniques psychothérapeutiques à l’oncologie et pour évaluer leur efficacité (Kaufman et Micha, 1987). De plus, pour le soignant soumis au stress du travail en oncologie, il est probable que cette fonction supportive de l’interaction soit une des plus difficiles à préserver face aux mécanismes défensifs de distanciation.
Communication non verbale
La communication comprend toutes les interactions verbales et non verbales entre un émetteur et un récepteur. Le message peut donc passer par le canal du non verbal. La relation thérapeutique s’appuie en grande partie sur la communication non verbale. La communication non verbale, appelée aussi analogique, est un moyen privilégié d’échanges de nature émotionnelle. Le mode non verbal est dû principalement à l’activité émotive, intéroceptive, posturale et motrice (Rime, 1984). Elle interagit avec la communication verbale, appelée aussi digitale, en la renforçant ou en l’infirmant. Elle utilise les mouvements corporels, faciaux, oculaires, la position du corps, la distance spatiale, le toucher, les odeurs, le paralangage (dimension vocale mais non verbale de la parole) et des artefacts (vêtements, couleurs) qui sont des actes de communication car ils véhiculent une signification (De Vito, 1993).
La communication est initiée par une phase d’engagement social qui permet ensuite l’établissement d’un lien empathique. C’est une phase d’échanges avec des mimiques, des vocalisations et des contacts visuels. Le comportement affectif et en particulier le comportement non verbal (contact visuel, attitude d’intérêt) est le meilleur prédicteur de la qualité de la prise en charge (Bensing, 1991). Il faut savoir que les émotions primaires ou fondamentales (joie, colère, tristesse, dégoût, peur, surprise) sont acquises très tôt au cours du développement : quelques mois après la naissance. Les émotions secondaires (honte, embarras, fierté, mépris) sont acquises à partir de la seconde année de la vie. La capacité à inférer un état émotionnel à partir d’une expression faciale apparaît quant à elle à partir de 3 ans et se développe jusqu’à l’adolescence et même au delà de celle-ci. Cette capacité permet l’identification des états internes d’autrui, la compréhension d’autrui, et donc la communication avec autrui. Les perceptions d’autrui ont un impact tantôt positif tantôt négatif sur le sujet en fonction du contexte. Les expressions non verbales apportent donc à la communication des valences diverses qui enrichissent ou complexifient la communication verbale. Il faut savoir ainsi que l’absence d’expressions faciales est souvent perçue négativement et peut entraîner une réaction émotionnelle négative.
Relié aux attitudes, le mode non verbal est souvent utilisé dans la stratégie de soutien. Le soignant montre au patient qu’il est présent par différents comportements non verbaux : en adoptant une posture qui indique l’intérêt et l’ouverture (par exemple, faire face au patient, être légèrement de côté, s’asseoir plus bas que lui, éviter le croisement systématique des bras et des jambes, se pencher légèrement vers le patient, etc.), en ayant un contact visuel, en souriant légèrement, en manifestant des signes de tête, en étant détendu, en acceptant des moments de silence (Buckman, 1998; Cohen-Cole, 1991). Le toucher occupe naturellement une place importante parmi les stratégies non verbales d’interaction, dans les situations de soins médicaux en général et infirmiers en particulier. Le toucher comprend une dimension instrumentale et une dimension sociorelationnelle. Ces dimensions mériteraient d’être étudiées de façon plus approfondie en oncologie (Bottorff, 1993). Parmi les stratégies non verbales, le regard du soignant a été étudié aussi pour son utilité dans la détection des problèmes psychosociaux des patients en médecine générale (Bensing, Kerssens et coll., 1995). Le soignant doit donc être attentif au message que son corps livre dans les interactions et se demander si le patient sent sa présence ou si son comportement non verbal exprime ses attitudes intérieures. Il doit aussi prendre conscience de ce qui l’empêche de fixer son attention au patient (maladie, fatigue, préoccupations personnelles, vécu de problèmes similaires, etc.). Quant au malade, il donne aussi au soignant par son comportement non verbal (expression faciale, posture, mouvements, ton de la voix, etc.) des indications de son état émotionnel. L’étude des stratégies non verbales reste à développer. Il est utile que le soignant prenne conscience et soit attentif à son comportement verbal et non verbal pour offrir une qualité de présence à ses patients.
Transmission d’informations
Qu’il s’agisse de l’annonce de la maladie ou de son évolution, de la nécessité d’un traitement et/ou de ses effets secondaires ou encore de structurer une relation ou de «métacommuniquer» à son propos, l’information est toujours centrale en oncologie. Il s’agit pourtant d’un objectif complexe parce que la médecine en général, et l’oncologie en particulier, doit faire face à une croissance exponentielle des connaissances scientifiques, qui engendre des difficultés croissantes dans le processus de prise de décision (Forrow, Wartman et coll., 1988). En outre, en Belgique par exemple, la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient, entrée en vigueur le 6 octobre 2002, précise de manière claire les droits de celui-ci dans le cadre de la relation individuelle qu’il engage avec un professionnel. Ces droits sont réciproques aux devoirs des soignants qui deviennent plus transparents. Ils promeuvent la qualité de la relation de confiance entre le patient et le professionnel. Cette loi comprend notamment le droit à l’information du patient concernant son état de santé. En effet, le soignant doit communiquer au patient toutes les informations nécessaires pour comprendre son état de santé (il s’agit du diagnostic, même s’il est négatif) et son évolution probable. Il doit aussi indiquer le comportement à adopter en conséquence. Cette exigence implique une communication concernant les décisions, ainsi que la prise en compte des besoins et des attentes du malade. Suite à cette loi, silences et mensonges sont devenus plus rares et/ou moins absolus. Ce contexte et les changements d’attitude des soignants en général, et des médecins en particulier, en faveur d’une information plus complète des malades, requièrent une meilleure connaissance des réactions des patients et de leur besoin en soutien. Les situations de transmission du diagnostic et du pronostic représentent certainement un des aspects les plus délicats de la fonction soignante en oncologie. Cependant, d’une façon générale, les praticiens consacrent encore peu de temps à informer les malades et sous-estiment leur désir d’en savoir plus.
L’information s’inscrit dans le processus complexe de la relation médecin-malade. Elle résulte de la rencontre entre un émetteur «soignant» et un récepteur «patient». Toute discussion concernant la transmission d’informations doit inclure une discussion concernant d’une part la transmission d’informations par l’émetteur, et d’autre part son intégration par le récepteur (McIntosh 1974). Malgré le développement de la littérature à ce propos, de nombreuses questions restent encore aujourd’hui sans réponse, notamment celles concernant le contenu de l’information et la manière de la transmettre. Les informations à transmettre sont nombreuses. Elles incluent des données concernant le diagnostic, le pronostic, les traitements et leurs effets secondaires ainsi que la qualité de vie des patients. Comme l’indique le Tableau 10-2, la transmission d’informations est influencée par de nombreuses dimensions et variables.
FACTEURS CONTEXTUELS – quand? – où? – relation avec le soignant? FACTEURS INHÉRENTS AUX ÉMETTEURS – qu’est-ce qui est connu? – qu’est-ce qui est estimé devant être transmis? – qu’est-ce qui est dit – non dit? – comment cela a-t-il été dit? FACTEURS INHÉRENTS AUX RÉCEPTEURS – qu’est-ce qui est préconnu? – qu’est-ce qui est demandé? – qu’est-ce qui a été entendu? – qu’est-ce qui a été retenu? – qu’est-ce qui a été intégré? FACTEURS INHÉRENTS AUX CONTENUS – nature de la maladie – pronostic et évolution – traitements/effets secondaires – conséquences psychosociales |
Contenus de l’information
On sait actuellement qu’une grande majorité des patients atteints d’un cancer désirent recevoir des informations détaillées sur des éléments comme le pronostic, les options thérapeutiques, leurs effets secondaires et les risques ou bénéfices que l’on peut en escompter (Blanchard, Labrecque et coll., 1988; Jenkins, Fallowfield et coll., 2001; Parker, Baile et coll., 2001). De plus, la majorité d’entre eux disent attendre ces informations principalement de leur médecin (Jenkins, Fallowfield et coll., 2001; Schlich-Bakker, ten Kroode et coll., 2006). S’il apparaît dans la littérature que la plupart des patients souhaitent recevoir le plus possible d’informations (Fallowfield, Ford et coll., 1994), ceci n’implique pas que l’information qui leur est donnée doive être exhaustive. Certaines études montrent que les patients ne souhaitent pas toujours une information complète et que, s’ils l’obtiennent, ils ne sont pas toujours à même de se la rappeler. Une autre recherche a montré que des patients atteints d’un cancer et hospitalisés pour un traitement par chirurgie, se plaignent de difficultés à obtenir des informations (Chaitchik, Kreitler et coll., 1992). Leur désir d’informations ne diminue pas après une interaction avec un professionnel de la santé. Par ailleurs, le sens attribué à l’information par les malades et les médecins diffère. Les premiers perçoivent celle-ci en termes de conséquences personnelles, les seconds la perçoivent en relation avec un type de maladie et l’indication d’un traitement.
Que faut-il communiquer au malade? Il existe, en effet, une variété de contenus qu’il faut différencier : il est ainsi possible d’informer le malade de la nature de son affection et de l’indication d’un traitement, de décrire de manière détaillée les procédures médicales qui devront être subies, les sensations qui seront expérimentées et les éventuels effets secondaires. Les possibilités et la diversité des modes d’adaptation peuvent également faire l’objet d’une communication médecinmalade (Cohen et Lazarus 1973). Dans la pratique, il existe une somme d’informations à transmettre concernant les possibilités de réhabilitation (prévention des effets secondaires; traitement des conséquences réversibles; compensation; gestion et contrôle des conséquences irréversibles). En cancérologie, la situation est compliquée par le fait que les traitements peuvent avoir des effets différents sur la durée et la qualité de survie. Les informations sont le plus souvent complexes. La figure 10-2 illustre la situation extrême d’une information complexe où une alternative thérapeutique inclut un risque à court terme de décès (p) contre– balancé par une probabilité de guérison (1-p), et où l’autre alternative inclut une rémission d’une durée significative (plusieurs années) associée à une faible probabilité de pouvoir traiter efficacement la récidive lorsqu’elle surviendra ensuite. Cet exemple pose le problème du contenu de l’information à transmettre, notamment celui du risque de décès à court terme secondaire à une thérapeutique et introduit aussi la notion rarement discutée de «choix impossible».
Fig. 10-2 |
Par ailleurs, sans entrer dans les différentes positions éthiques prises par chacun, il convient de discuter du type d’information qui serait susceptible de favoriser l’adaptation des malades. Une étude de laboratoire comparant des informations différentes par leur nature et contenu met en évidence qu’une information, concernant les sensations qui seront expérimentées et la procédure subie, se révèle plus efficace pour diminuer la détresse associée à l’expérience qu’une information sur les conséquences subjectives et l’intensité de la douleur éventuelle qui sera éprouvée (Leventhal, Brown et coll., 1979). Les auteurs font l’hypothèse que les informations favorisant une objectivation des stimuli permettent plus facilement une expérience désaffectisée, à l’opposé d’informations qui mènent le sujet à se focaliser sur des perceptions émotionnelles qui sont plus difficilement contrôlables. L’application de ces données à la médecine en général et à la cancérologie en particulier reste à préciser et à démontrer. Si les contenus d’une information du malade sont variables et complexes, les formes de transmission le sont aussi. Un même contenu peut engendrer des réactions différentes selon la forme utilisée pour transmettre l’information. Les phrases courtes semblent avoir plus d’impact que les phrases longues. Le «climat» de l’entretien (chaleur, réserve, distance, etc.) influence également la transmission de l’information et ses conséquences futures. De plus, l’évaluation du malade par le médecin va sans doute influencer la séquence de ses comportements face à l’information qu’il va transmettre (Jones, 1986). Les informations émises se différencient en outre par les caractéristiques tant de celui qui les transmet (personnalité, âge, statut professionnel, attitude, motivation) que par la manière dont il les transmet (contenu, quantité, rythme, tonalité).
Attitudes des médecins
Tous les soignants travaillant en oncologie sont amenés à fournir des informations aux patients. Cependant, les médecins ont la responsabilité d’annoncer les nouvelles et de discuter des options de traitements. Ils sont donc confrontés très fréquemment à la transmission d’informations à contenu négatif ou non. Les comportements des médecins quand il s’agit de transmettre des informations varient et se nuancent en fonction de nombreux facteurs (Razavi, Delvaux et coll., 1997). Trois types d’attitudes par rapport à l’information ont pu être mis en évidence (Broclain, Alach et coll., 1988). La première se caractérise par une tendance à rechercher activement l’occasion d’informer le malade, la deuxième par une tendance active à dissimuler toute information et la troisième, enfin, regroupe des attitudes intermédiaires associant dissimulation passive et transmission d’informations distillée selon les circonstances. Lorsque l’on interroge un professionnel de la santé sur ses comportements en matière de transmission d’informations, il est malaisé d’évaluer précisément ce qu’il transmet réellement dans sa pratique quotidienne, surtout si la réponse est nuancée. Dans le cas d’une réponse non nuancée, par exemple lorsqu’un médecin affirme ne «jamais» informer ses malades, il est fort probable que cette réponse indique réellement que ce médecin n’informe pas ses malades dans sa pratique quotidienne. Le pourcentage de médecins rapportant ne «jamais» informer leurs patients du diagnostic peut être ainsi un bon indicateur des comportements médicaux en rapport avec la transmission de l’information à une période donnée. Ajoutons que ces chiffres ne seraient interprétables que dans la mesure où l’opinion du soignant en matière d’information influence ses attitudes et ses comportements.
Aux États-Unis, le pourcentage de médecins rapportant ne jamais informer leurs malades de la nature de leur affection est passé de 69 % dans les années cinquante (Fitts et Ravdin 1953) à 9 % dans les années soixante (Friedman 1970). En 1974, 78 % des médecins estimaient que les patients devaient être mis au courant de la nature de leur affection (Mount, Jones et coll., 1974) et en 1979, ce pourcentage augmente à 97 % des médecins (Novack, Plumer et coll., 1979). Ce changement d’attitude s’est confirmé ces dernières années, notamment sous l’influence des progrès de la médecine mais aussi par l’action des médias, les mouvements de défense des droits des malades et le développement du mouvement des soins palliatifs en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Les opinions émises sont devenues plus favorables à l’information complète du patient et de sa famille. Les opinions exprimées restent cependant extrêmement variables et influencées par de nombreux autres facteurs que nous allons discuter maintenant, tels le pronostic de l’affection, l’expérience clinique, le statut professionnel, la peur des conséquences psychologiques pour le patient et aussi les influences culturelles.
Lorsque le soignant est interrogé sur ses opinions, le pronostic vient en effet rapidement se mêler à la discussion. Il existe une différence importante entre le fait d’informer le patient qu’il a un cancer, c’est-à-dire lui communiquer un diagnostic, et le fait de l’informer de sa mort prochaine, c’est-à-dire lui annoncer un pronostic défavorable. Il y a une vingtaine d’années, différents travaux rapportaient que 45 % à 95 % des professionnels de la santé interrogés n’étaient pas favorables à communiquer un pronostic défavorable ou fatal (Anderson, 1982; Blumenfield, Levy et coll., 1979; Razavi, Farvacques et coll., 1988). Une étude récente indique que, de nos jours encore, les médecins restent réticents à transmettre un pronostic défavorable et tendent à transmettre des informations surestimant la durée de survie probable de leurs patients (Fallowfield, Jenkins et coll., 2002). Ceci est d’autant plus vrai quand le médecin connaît bien le patient (Lamont et Christakis, 2001). Une revue récente de la littérature a montré que, de manière générale, la majorité des médecins en hôpital estiment actuellement qu’il est important de dire la vérité au patient et à ses proches. En pratique, cependant, nombre d’entre eux évitent encore d’en discuter voire ne transmettent qu’une partie des informations (Wenzel, Dogan-Ates et coll., 2005). Cette réticence s’explique, selon eux, par un manque de formation, le stress lié à la transmission de telles informations, le manque de temps pour s’occuper des besoins émotionnels des patients, la peur de l’impact psychologique que la nouvelle pourrait avoir sur le patient, l’incertitude liée à l’établissement d’un pronostic, les demandes de la famille pour que le patient ne soit pas informé ainsi que les sentiments d’impuissance et d’échec des médecins concernant l’absence d’un traitement curatif. Cette réticence peut aussi s’expliquer par le fait que les soignants en général et les médecins en particulier évaluent mal les préoccupations des malades dans le sens d’une sous-estimation (Bernheim, Ledure et coll., 1987) ou d’une surestimation.
Par ailleurs, l’expérience clinique amène à être plus favorable à la transmission du diagnostic (Blumenfield, Levy et coll., 1979; Anderson, 1982). Les oncologues semblent aussi plus adhérer à cette tendance que les autres professionnels (Razavi, Berger et coll., 1982). Néanmoins, le niveau d’expérience semble peu influencer la transmission d’un pronostic défavorable. Une réticence face à la transmission de l’information fut notée également avec l’accroissement du niveau de responsabilités. L’accroissement de la responsabilité lié au changement de statut professionnel a généralement tendance à rendre les relations plus chargées émotionnellement. Le mode et le contenu de l’information seraient en outre influencés par des expériences vécues personnellement, la lecture de travaux comme ceux de E. Kübler-Ross ou encore des attitudes culturelles et/ou institutionnelles (Blumenfield, Levy et coll., 1979).
Une réticence à informer peut aussi s’observer suite à des expériences de réactions psychologiques aigües chez un patient (réactions anxieuses, dépressives, agressives ou suicidaires) suite à l’information. La fréquence de ces réactions étant peu élevée, c’est probablement l’amplitude de l’impact sur le personnel soignant de ces expériences – impact d’autant plus important que les soignants y sont soumis sans y avoir été préparés – qui peut expliquer que certains médecins se réfugient dans des positions de prudence pour éviter de voir se répéter de telles expériences.
Enfin, il y a quelques décennies, il existait d’importantes différences culturelles au niveau de l’attitude des médecins concernant la transmission du diagnostic au patient (Manos et Christakis, 1980). De nos jours, bien qu’il semble que l’attitude favorable à la transmission du diagnostic tende à être plus répandue tant du côté des soignants (Ozdogan, Samur et coll., 2006) que des patients (Miyata, Takahashi et coll., 2005), de nombreux patients restent encore non informés de leur diagnostic (Surbone, 1997; Zylicz, Krajnik et coll., 2003). Les problèmes posés par les pressions culturelles – tantôt dans le sens d’une information complète, tantôt dans le sens d’une absence d’information – doivent être analysés aussi en termes de bénéfices individuels pour le malade, sa famille et de la possibilité d’un choix personnel pour le soignant. Dans ce domaine insuffisamment étudié conceptuellement et empiriquement, il serait trop simple de considérer l’une ou l’autre attitude comme critiquable, chacune ayant leurs avantages et leurs inconvénients, tant à court qu’à long terme. Le Tableau 10-3 détaille les principaux facteurs intervenant dans la décision médicale d’informer les malades cancéreux et leur famille.
FACTEURS LIÉS AUX MÉDECINS – Âge – Expérience clinique – Responsabilité/statut – Facteurs personnels-émotionnels FACTEURS LIÉS AUX MALADES – Âge – Niveau intellectuel – Facteurs personnels-émotionnels FACTEURS LIÉS AUX FAMILLES – Présence ou non d’une famille – Facteurs personnels-émotionnels – Relations familiales FACTEURS CULTURELS – Pays-continents – Zones citadines-zones rurales FACTEURS LIÉS À L’AFFECTION CANCÉREUSE |
La concordance ou la discordance entre les aspirations individuelles et certaines normes culturelles peuvent déterminer en partie les avantages et les inconvénients à transmettre l’information. Des discordances persistent ainsi entre le désir des soignants de transmettre des informations et celui des malades d’être informés (Gill et Scott, 1986).
Le changement d’attitude des soignants en général et des médecins en particulier en faveur d’une information plus complète nécessite une connaissance plus détaillée des réactions et des besoins de soutien des patients. Plus le soignant informe, plus le patient réagit sur un mode verbal ou non verbal, réactions qui requièrent du soignant plus de vigilance aux différents besoins du malade et une plus grande aptitude à lui apporter un soutien émotionnel.
Gestion de l’incertitude
Pour la plupart des malades, guérir est une priorité. Contrôler le cours d’une affection, expression qui est fréquemment utilisée en médecine, implique l’idée d’une non-guérison. Cette perception est anxiogène pour les malades et peu motivante pour poursuivre des traitements lourds. Il apparaît en effet que beaucoup de patients perçoivent une différence symbolique entre «contrôler une maladie» et «guérir d’une maladie», même si contrôler une affection médicale durant une période prolongée peut être théoriquement assimilé à une guérison. Ceci a une implication pour le choix des mots qui seront employés dans l’interaction avec les malades. Cela pourrait indiquer par exemple qu’il conviendrait d’éviter d’utiliser des terminologies médicales dans des contextes où la perception de la maladie n’a pas été suffisamment investiguée.
Généralement, l’espoir est associé à une part d’ignorance. La connaissance peut ainsi mener au désespoir. La maladie cancéreuse génère chez celui qui en est atteint la perception qu’il n’a rien à perdre excepté la vie. Cette perception pose la question de l’espoir, du désir de vivre et du sens qu’il est possible de donner à son existence. Il y a donc, dans l’information et la prise en charge globale des malades, une nécessité de reconnaître et d’accompagner les malades dans leur recherche de sens. Les professionnels de la santé sont très mal préparés à cela. Les malades sont aussi très mal préparés à la gestion psychique de leur affection médicochirurgicale. Ce qui surgit avec la perte d’espoir, c’est l’incertitude. Être confronté à une maladie implique une nécessité de se guérir de ses certitudes et de devoir gérer l’incertitude. C’est dans ce contexte que s’impose la nécessité d’apprendre à vivre avec une perception réaliste des risques qui peuvent modifier le cours d’une existence. L’incertitude est douloureuse car il est souvent pire d’imaginer que de savoir. Face à l’inconnu, le sujet n’a souvent comme possibilité que de laisser ou faire passer le temps. Une façon de gérer les incertitudes consiste en effet à les écarter de soi, à vivre à côté de celles-ci, à les minimiser ou encore à les nier. La fragmentation du temps et l’échelonnement des projets peuvent permettre de réduire artificiellement le nombre d’incertitudes et de ressentir de manière moins aigüe l’impuissance et le désespoir. La confusion générée par l’incertitude est, pour ne citer qu’un exemple, fréquente après un diagnostic de cancer quand se pose la question de la détection précoce des rechutes. Cette confusion est bien compréhensible face aux différentes attitudes que tiennent les cancérologues par rapport aux symptômes qui surviendront et aux choix extrêmes possibles : rassurer ou programmer une série d’investigations paracliniques. Les attitudes des malades oscillent aussi par rapport à ces extrêmes d’une manière pas toujours symétrique. Les malades peuvent en effet éprouver des sentiments contrastés : d’une part, celui d’une sécurité totale et le désir associé de ne pas souhaiter des investigations complémentaires génératrices d’inconfort psychologique et physique, et d’autre part, celui d’une peur et d’une anxiété, et le désir associé de souhaiter des investigations rapides pour lever le plus rapidement possible les inconnues.
Il faut rappeler que l’incertitude, qui est associée à des situations inédites et à des contextes nouveaux, génère une éthique professionnelle. Cette éthique est une tentative de restaurer ou d’instaurer un ordre pour échapper au précaire d’une pratique professionnelle associée à un haut niveau d’incertitude. L’incertitude mène en effet à des réflexions et discussions qui incluent des jugements moraux. Ces jugements influencent bien sûr la pratique clinique. Ainsi, les contextes à haut niveau d’incertitude mènent les cliniciens à élaborer des normes sous forme de consensus ou de directives. Ces consensus et directives permettent de réduire la fréquence des conflits à propos de jugements naturellement variés. L’incertitude, dans le contexte d’une situation professionnelle, génère en effet fréquemment chez les cliniciens un malaise qui peut s’exprimer par des inhibitions, des indécisions et des jugements critiques divers (critique de collègues ou de responsables administratifs ou politiques).
Si spontanément l’incertitude ne peut souvent être vécue que passivement, une sensibilisation des professionnels de la santé à cette réalité pourrait en permettre une gestion plus active. Le but de cette sensibilisation est de faire percevoir aux soignants les complexités inhérentes aux prises de décision et les influences de leur subjectivité et de leur histoire personnelle. Ceci ne s’acquiert généralement qu’avec le temps et les expériences. Les jeunes cliniciens se sentent souvent coupables de ne pas savoir et évitent de discuter de leurs incertitudes avec leurs collègues. Des discussions collégiales peuvent minimiser les incertitudes et faciliter les décisions. Partager l’incertitude et l’ignorance, et dialoguer à leurs propos avec les malades, est à la portée de tous les cliniciens; cette recommandation part du postulat, qui n’est bien sûr pas toujours vérifié, que dénier l’incertitude peut entraîner plus d’inconfort que d’y faire face. Pour s’en assurer, les cliniciens doivent apprendre à évaluer les capacités de leurs malades à faire face aux incertitudes. Une démarche consistant à réévaluer régulièrement les conséquences des décisions prises peut faciliter la gestion de ces contextes. Le Tableau 10-4 reprend quelques stratégies d’accompagnement de l’incertitude et des peurs qui peuvent lui être associées. Proposer que les cliniciens travaillent au pôle de l’incertitude, c’est délibérément choisir une voie difficile car des certitudes simplistes et irréalistes sont régulièrement véhiculées par les médias, par certains groupes professionnels ou paraprofessionnels et par certains collègues optant pour une attitude paternaliste.
– Percevoir les incertitudes et complexités associées aux prises de décision. – Apprendre à tolérer-accepter les incertitudes. – Prendre conscience de l’influence de la subjectivité dans les décisions. – Savoir que les malades et les familles gèrent parfois plus facilement l’incertitude que les soignants. – Savoir que l’incertitude entraîne souvent plus d’inconfort que la gestion d’une menace. – Apprendre à évaluer les capacités d’un malade à faire face à l’incertitude. – Apprendre à dialoguer à propos de l’incertitude. – Apprendre à partager son ignorance. – Prendre des décisions malgré l’incertitude. – Réévaluer de manière régulière les conséquences des décisions prises. – Réduire et minimiser les incertitudes par des discussions avec des collègues. |
Prise de décision
Le droit des patients d’être informés et de participer activement au processus de décision concernant les traitements est aujourd’hui de plus en plus reconnu. La reconnaissance de ce droit est importante dans la mesure où la participation du patient peut avoir une influence bénéfique sur son bien-être (Davison, Goldenberg et coll., 2003; Fallowfield, 1990) et plus particulièrement sur sa satisfaction par rapport à la consultation et par rapport à l’information et au soutien émotionnel reçus (Gattellari, Butow et coll., 2001).
Prise de décision partagée
La corrélation entre le désir d’information des malades et celui d’une participation au processus de décision n’est pas totale. Dans une étude menée sur 439 séquences d’interactions entre des patients atteints d’un cancer hospitalisés (n = 89) et des oncologues (n = 34), 92 % des malades interrogés après l’interaction rapportent souhaiter recevoir une information complète (bonne ou mauvaise) et seulement 69 % d’entre eux souhaitent participer au processus de décision (Blanchard, Labrecque et coll., 1988). Ces données suggèrent donc que si la majorité des malades préfèrent recevoir une information complète, presque un quart d’entre eux souhaitent une relation plutôt paternaliste que participative avec leur oncologue. D’autres études confirment ces résultats (Sutherland, Llewellyn-Thomas et coll., 1989).
Préférences des patients et processus de décision
Enfin, pour illustrer le rôle déterminant de la communication médecin-malade, il faut souligner que plusieurs études ont mis en évidence que 25 à 40 % des patients souhaitent que leur médecin prenne finalement la décision (Blanchard, Labrecque et coll., 1988; Liu, Franssen et coll., 1997). Ceci illustre la difficulté pour les malades de décider et l’aspiration de certains d’entre eux à voir les médecins décider à leur place après avoir été informés et invités à prendre une décision dans le contexte d’une alternative. Une décision prise par un malade en pleine connaissance de la situation n’est souvent pas facile à obtenir dans la pratique, en raison d’une mauvaise information, d’un déni, d’une méfiance ou d’une confusion. Il est fréquent d’observer des jugements et des décisions qui peuvent poser problème pour participer à la prise de décision : refus ou idéalisation d’un traitement par exemple. Les mécanismes psychologiques à la base des processus de pensée qui mènent aux décisions peuvent expliquer une partie du caractère problématique de la prise de décision en médecine (Redelmeier, Rozin et coll., 1993). Ainsi, une des caractéristiques du jugement est de catégoriser sans nuance les dangers d’une part et la sécurité de l’autre : il existe donc une difficulté de percevoir les relations dose-réponse, ou les risques cumulés. Dans les prises de décision, il existe de plus une tendance à favoriser une mesure qui mène à une annulation d’un risque (même si la réduction n’est que limitée) plutôt que celle qui la réduit significativement sans l’annuler. Le jugement est également difficile en raison du caractère abstrait des chiffres illustrant les risques. Une tendance à préférer le statu quo à un gain éventuel – si une telle alternative existe – en vue d’éviter une perte, a en outre été observée. Choisir est également difficile car cela implique d’imaginer et d’anticiper les alternatives possibles. Un changement, au cours du temps, de la valeur et donc de l’appréciation du choix réalisé, est une dimension qui est souvent peu élaborée. Le fait que l’anticipation de ce changement éventuel au moment du choix est pratiquement et psychologiquement difficile complique les processus de décision. Il faut également noter que l’évaluation qui sera faite du choix réalisé est directement liée au résultat. En cas d’échec, la décision sera évaluée négativement, même si le processus qui a mené à la décision ne peut être critiqué dans l’absolu. La mémoire d’un événement similaire ou équivalent à celui qui va être vécu influence aussi les décisions. La mémoire est cependant souvent peu précise et fait intervenir des attributions pas toujours réalistes. Cet état de fait est compliqué par l’existence d’une tendance à choisir des situations d’inconfort limité dans le temps – même d’intensité majeure – de préférence à des expériences d’inconfort d’intensité modérée s’étalant sur une plus longue période. Cependant, en ce qui concerne le reliquat mnésique, il convient de rappeler que les premières situations sont les plus sensibilisantes et qu’elles peuvent dès lors conduire ultérieurement à des évitements.