25. Un domaine d’application privilégié
la douleur
Depuis longtemps, nous savons que l’imagination a une action sur la douleur. Si, à l’époque des guérisseurs, cette action était attribuée au pouvoir de certains, nous commençons maintenant à avoir une certaine idée des mécanismes neurophysiologiques mis en jeu dans ce cadre du contrôle de la douleur par l’imagination.
De ces travaux, il faut retenir que l’imagination – l’hypnose – ne supprime pas la douleur, mais qu’elle supprime la possibilité d’irruption de la douleur dans la conscience par l’activation de zones inhibitrices de notre cerveau avant que ces influx nerveux n’arrivent dans les lobes frontaux qui semblent avoir un rôle prépondérant dans la genèse de la conscience.
Dans la réalité, comment faisons-nous avec nos patients ?
Douleur aiguë
Expliquer et faire découvrir les ressources
Le plus souvent, nos patients ont besoin de savoir ce que nous allons faire avec eux. Par ailleurs, de la même façon que le médecin distrait un enfant en attirant son attention sur autre chose, il sera facile d’utiliser les capacités de l’hypnose à créer l’absorption dans une expérience imaginaire pour supprimer la souffrance, voire la douleur elle-même.
De cette façon, le patient pourra imaginer que le crayon avec lequel le médecin touche sa main est une seringue pleine d’un anesthésique puissant. Il pourra alors ressentir le fourmillement ou l’engourdissement provoqué par la diffusion du produit. De proche en proche, toute sa main se trouvera engourdie. Il sera alors très simple, en comparaison aux sensations antérieures, de lui permettre de se rendre compte qu’il a été capable ainsi d’analgésier sa main et qu’il dispose d’une ressource jusque-là inconnue par lui.
Explorer les capacités du patient : observer
L’observation est un des maîtres mots de notre discipline. Très rapidement après l’entrée du patient dans le cabinet, nous pouvons savoir en partie quelles sont les ressources sur lesquelles nous pourrons nous appuyer. Les personnes qui nous rencontrent ont déjà des ressources spontanées, comme nous pouvons nous en rendre compte lorsqu’elles se montrent distraites, dissociées, qu’elles manifestent des oublis ou autres ressources qui pourront tout à fait être utilisables.
Malheureusement, ces ressources ne sont pas toujours suffisantes ; il faudra en apporter, en créer d’autres jusqu’à ce que la personne les éprouve comme une nouvelle compétence. Il ne s’agit pas de convaincre : il s’agit de permettre à la personne de vivre la découverte de la nouvelle ressource comme irréfutable.
Apporter des ressources jusque-là non disponibles
PLACE SÛRE
Quelquefois, la personne se trouve totalement démunie lorsque la crise de douleur survient, par exemple en cas de névralgies faciales. Elle ressent alors un profond affect de détresse. Si le thérapeute lui apprend à retrouver immédiatement une sensation de sécurité s’appuyant sur le souvenir d’un moment de sécurité dont le retour automatique aura été ancré sur la crispation de la mâchoire qu’elle présente à ce moment-là, la personne craindra beaucoup moins le retour de la crise.
TRANSFERT D’ANALGÉSIE
L’expérience hypnotique permet de déplacer les sensations. C’est ainsi que l’analgésie de la main pourra se transférer à la mâchoire dans le fauteuil du dentiste, ou bien que le souvenir de la dernière analgésie chimique dentaire pourra être très utile pour calmer une algie du trijumeau.
RÉGRESSION EN ÂGE
Il existe des ressources d’apprentissage et de résilience.
– Ressources d’apprentissage. Il s’agit de permettre à une personne de retrouver un contexte d’apprentissage tel que celui de la marche ou celui de la lecture afin qu’elle accepte le travail qui lui est proposé par rapport à sa douleur comme un nouvel apprentissage, c’est-à-dire le passage de quelque chose qu’elle ne maîtrise pas et qui l’effraie à quelque chose qu’elle va finir par maîtriser.
– Ressources de résilience.
• Àla douleur. Quel garçon ne se souvient pas d’avoir pris un coup violent en faisant du sport et d’avoir continué à jouer sans autre forme de procès malgré l’intensité de la douleur ? Retrouver ces souvenirs dans un contexte hypnotique permettra de transférer cette ressource à l’adulte que la personne est devenue.
• Générales. Tous les souvenirs de résilience à la souffrance, à la perte, etc. pourront être utilisés comme des ressources permettant de diminuer la souffrance provoquée par une douleur.
ANTICIPATION (PROGRESSION EN ÂGE)
L’anticipation est une ressource très importante. Toutes les mères le savent, qui promettent à leur enfant une sucrerie ou une autre gratification dès qu’il sera sorti du cabinet du médecin.
• Le futur sans douleur
À un simple niveau de conversation, il peut être très utile de parler de ses prochaines vacances avec son patient, en insistant un peu sur l’usage agréable qu’il pourra faire des zones actuellement douloureuses.
• « Emprunter » des ressources
Quelquefois, malgré leur bonne volonté, il arrive aux patients de ne pas trouver de ressources suffisantes dans leur passé. Qu’à cela ne tienne : il sera facile au cours de la transe hypnotique de leur permettre d’emprunter cette ressource à une autre personne, réelle ou imaginaire, et de voir leur comportement présent et futur une fois qu’ils disposent de cette nouvelle compétence.
Toutes ces techniques vont être très utiles pour permettre à un grand nombre de patients de surmonter les douleurs de la vie quotidienne, tout particulièrement celles qui sont provoquées par les soins médicaux. L’infirmière, le kinésithérapeute, le chirurgien-dentiste, le médecin généraliste, l’anesthésiste, la plupart des médecins spécialistes pourront avoir un intérêt à disposer de ces savoir-faire hypnotiques pour augmenter le confort de leurs patients, mais aussi le leur, retrouvant ainsi bien souvent un nouvel intérêt à leur travail.
Dans ce contexte de l’analgésie, les indications de l’hypnose sont très larges puisque celle-ci permet de rendre confortables des actes aussi simples qu’une injection, mais aussi des extractions dentaires, des coloscopies, des ablations de la glande thyroïde, voire des chirurgies pouvant durer plusieurs heures.
Douleur chronique
Généralités
Pour certaines personnes, la douleur dure des mois, voire des années. Avec elle, croissent l’impuissance, la détresse et le désespoir, d’autant plus difficiles à accepter que le mythe que la médecine moderne peut tout résoudre est de plus en plus puissant et crée de ce fait des attentes toujours plus importantes. Actuellement, les équipes d’algologie utilisent de plus en plus les techniques d’hypnose.