11. Sang et système immunitaire
– la fraction solide constituée par les cellules sanguines : globules rouges, globules blancs et plaquettes ;
– la fraction liquide appelé plasma dont le rôle ne se limite pas à faire circuler les cellules sanguines ; ce plasma contient en effet des gaz respiratoires (O2 et CO2), des solutés minéraux (calcium, sodium…), des solutés organiques tels que les nutriments, différents déchets, les particules de LDL, HDL, des hormones, des protéines plasmatiques assurant des fonctions diverses.
Le sang assure plusieurs fonctions :
– il assure la distribution des nutriments et du dioxygène vers les tissus ;
– il est chargé de transporter les déchets vers les sites d’élimination (reins ou poumon) ;
– il permet la diffusion des hormones produites par les glandes endocrines ;
– il joue également un rôle dans la défense de l’organisme.
Ce chapitre sera partagé en deux parties : la première présentera la composition du sang ainsi que les fonctions exercées par les globules rouges et les plaquettes. Dans un second temps, seront abordés les mécanismes de défense immunitaire impliquant les globules blancs et autres molécules contenus dans le sang.
Le sang
Données anatomiques
On distingue trois ensembles principaux.
■ TISSU MYÉLOÏDE
Comme son nom l’indique, le tissu myéloïde se rattache principalement à la moelle osseuse où sont produits la plupart des globules sanguins. La moelle est contenue au sein des os de l’ensemble du squelette chez le jeune, avant de se concentrer, sous forme de moelle rouge, dans les os plats et les extrémités des os longs chez l’adulte, laissant la place à une moelle jaune, faite principalement de tissu adipeux, dans le fût des os longs.
Cette moelle hématopoïétique – qui fabrique les cellules du sang – occupe des logettes situées au sein de l’os compact, comme on peut l’observer par exemple sur une biopsie ostéomédullaire qui permet de retirer une « carotte » contenant en général 10 à 20 logettes (figure 11.1). Son examen au microscope a lieu après décalcification pour pouvoir découper en tranches fines le prélèvement.
Fig. 11.1 |
C’est là que sont produites les cellules sanguines qui se partagent en trois catégories (figure 11.2) :
Fig. 11.2 |
– les globules rouges ou hématies ou érythrocytes, cellules qui ont perdu leur noyau et renferment principalement l’hémoglobine ;
– les globules blancs ou leucocytes ; ces cellules jouent un rôle dans les défenses de l’organisme; cette fonction sera détaillée dans la 2e partie de ce chapitre ;
– les plaquettes ou trombocyte qui sont en réalité des fragments venant d’une grosse cellule médullaire éclatée, le mégacaryocyte, et jouent un rôle dans l’hémostase.
■ SYSTÈME RÉTICULO-HISTIOCYTAIRE
Il est également constitué de cellules réparties dans tous les tissus. Celles-ci ont des caractères de macrophages et prennent le nom d’histiocytes dans les tissus, de monocytes dans le sang. Selon les tissus, elles se présentent comme des cellules dendritiques dans les ganglions, des cellules de Langerhans dans la peau, des cellules de Kupffer dans le foie, des macrophages alvéolaires dans les poumons, des cellules microgliales dans le cerveau, etc.
Données physiologiques
■ NAISSANCE, VIE ET MORT DES CELLULES SANGUINES
Hématopoïèse
La fabrication des globules du sang permet de distinguer des lignées sanguines et les facteurs conditionnant leur différenciation et leur croissance.
Toutes les cellules ont leur origine dans une cellule pluripotente qui donne des cellules souches pour les lignées myéloïde et lymphoïde.
Fig. 11.3. |
L’origine des cellules sanguines. |
La lignée myéloïde va ensuite se subdiviser pour donner, par différenciation et maturation, les globules rouges, les plaquettes, les granulocytes ainsi que les monocytes. La lignée lymphoïde se subdivisera pour donner les lymphocytes B et les lymphocytes T.
L’orientation et la maturation de ces cellules sont influencées par des cytokines, produites principalement par ces cellules elles-mêmes :
– des interleukines désignées par un numéro (IL1, IL2, etc.) ;
– des facteurs de croissance désignés par un sigle anglais (CSF pour Colony Stimulating Factor) précédé d’une lettre désignant les cellules stimulées (G pour les granulocytes, M pour les monocytes).
La maturation des hématies se caractérise par la perte de leur noyau, mais surtout par leur charge en hémoglobine qui dépend surtout du fer qui en est l’élément prépondérant.
Le métabolisme du fer est pratiquement fermé, avec peu d’apports alimentaires et peu de pertes, sauf chez la femme en période d’activité génitale du fait des règles (figure 11.4). Cela explique que toute hémorragie entraînera volontiers une anémie ferriprive (hypochrome, microcytaire) et, à l’inverse, que tout apport de fer accru, comme lors de transfusions répétées et nombreuses, entraînera une surcharge de fer ou hémochromatose.
Fig. 11.4 |
La fabrication des hématies est aussi dépendante des facteurs vitaminiques, en particulier de la vitamine B12 (figure 11.5). Son absorption dépend d’un facteur intrinsèque gastrique qui peut être déficient après gastrectomie ou dans la maladie de Biermer, ce qui entraîne une anémie mégaloblastique qui se corrige par l’administration paren térale de vitamine B12. La synthèse de l’hémoglobine dépend aussi de la bonne fabrication des chaînes protéiques qui entourent l’atome de fer, deux chaînes alpha et deux chaînes bêta. Ces chaînes peuvent être malformées à la suite d’un défaut génétique donnant une hémoglobinopathie et, en général, une anémie hémo lytique congénitale.
Fig. 11.5 |
Vie des cellules sanguines
Les globules rouges ont pour principale fonction de porter l’hémoglobine et par elle de transporter l’oxygène récolté dans les poumons aux différents tissus de l’organisme pour lesquels il a une fonction vitale.
Les plaquettes jouent un rôle dans l’hémostase.
Les leucocytes interviennent dans les défenses de l’organisme.
■ HÉMOSTASE
À l’état normal, le sang circule librement dans les vaisseaux bordés par les cellules endothéliales. Ces dernières forment une barrière entre les plaquettes circulant le long de la paroi, les facteurs plasmatiques de la coagulation et le tissu conjonctif sous-endothélial (figure 11.6). De plus, elles sécrètent de nombreuses substances qui inhibent l’agrégation plaquettaire, la coagulation (action analogue à celle de l’héparine ou du système de la protéine C), ou qui activent la fibrinolyse. Ces mécanismes permettent au sang de circuler librement dans les vaisseaux, au contact de l’endothélium vasculaire, sans qu’il y ait formation de caillot.
Fig. 11.6 |
Lors de la rupture d’un vaisseau, un saignement survient. Son arrêt sera assuré par les mécanismes de l’hémostase qui vont aboutir à la formation d’un caillot puis à son élimination et à la cicatrisation du tissu lésé. Tous ces mécanismes sont intriqués entre eux, mettant en jeu des activateurs et des inhibiteurs qui vont limiter les réactions au site de la plaie.
On distingue schématiquement trois temps principaux interdépendants.
Hémostase primaire
– une vasoconstriction immédiate du vaisseau;
– une adhésion des plaquettes au sous-endothélium lésé, par l’intermédiaire du facteur Willebrand sécrété par les plaquettes et les cellules endothéliales; ce facteur établit un pont entre la paroi vasculaire, les plaquettes et certains facteurs plasmatiques de la coagulation;
– une activation plaquettaire qui lie les plaquettes entre elles (agrégation); les plaquettes changent de forme et sécrètent à leur surface des substances procoagulantes.
Le clou plaquettaire ainsi formé (figure 11.7) va être consolidé par la coagulation qui a déjà commencé par fixation locale de plusieurs facteurs (V, VIII, fibrinogène).
Fig. 11.7 |
L’hémostase primaire est explorée globalement par le temps de saignement (méthode d’Ivy) et la numération plaquettaire (avec les automates de comptage globulaire).
Coagulation sanguine
Voie exogène (extrinsèque)
Elle est déclenchée par le facteur tissulaire (FT) qui est une glycoprotéine du sous-endothélium. Il fixe le facteur VII en présence de calcium, et le complexe formé va exercer son activité catalytique vis-à-vis du facteur X; la cascade enzymatique poursuit son action ainsi de suite (figure 11.8) pour aboutir à la formation de fibrine.
Fig. 11.8 |
Cette voie est explorée au laboratoire par le temps de Quick qui mesure la vitesse de coagulation d’un plasma en présence de thromboplastine (FT + phospholipides) et de calcium.
Voie endogène (intrinsèque)
Elle est explorée par le temps de céphaline avec activateur (TCA) qui mesure la vitesse de coagulation du plasma en présence d’un activateur de la phase contact (kaolin…), de céphaline (équi valent des phospholipides plaquettaires) et de calcium.
Fibrine
– La fibrine formée par les deux voies est d’abord soluble et devient ensuite insoluble par l’action du facteur XIII qui crée des ponts entre les différents monomères de fibrine. Le caillot de fibrine est devenu solide.
Inhibiteurs de la coagulation
Ce sont des protéines plasmatiques qui empêchent l’extension du processus de coagulation à distance de la plaie en contrôlant étroitement les réactions enzymatiques de la coagulation. Ils sont nombreux. Les plus importants sont:
– l’antithrombine III qui neutralise l’activité enzymatique de la thrombine et de nombreux autres facteurs de la coagulation dont le Xa et le IIa de façon rapide;
– les systèmes protéine C-protéine S qui dégradent les cofacteurs Va et VIIIa, ralentissant la coagulation;
– l’inhibiteur de la voie exogène.
Fibrinolyse
Elle détruit le caillot (en 7 à 10 jours), entraînant une reperméabilisation vasculaire. La régulation de ce système est aussi complexe que la cascade enzymatique de la coagulation, mettant en jeu un système d’activateurs et d’inhibiteurs.
On distingue deux étapes:
Transformation du plasminogène
Protéine plasmatique inactive synthétisée par le foie, il est transformé en plasmine active sous l’influence d’activateurs:
– l’activateur tissulaire du plasminogène ou TPA synthétisé par les cellules endothéliales;