Le questionnement thérapeutique

27. Le questionnement thérapeutique


Le questionnement en thérapie stratégique de type Palo Alto est au centre du processus de changement, particulièrement lorsque la plainte est permanente, à cause d’un problème récurent. Il permet de simplifier la complexité apparente d’une situation a priori inextricable, par l’utilisation de questions spécifiques intégrant à la fois la dimension interactive (entre deux sujets) et contextuelle (dans une situation donnée). Cette simplification a pour but de délier les fils du nœud dans lequel est pris le client, pour qu’il retrouve un espace de liberté où il pourra atteindre les objectifs qu’il souhaite mettre en place, afin de se sentir mieux.

Au terme de l’entretien, le thérapeute doit pouvoir répondre lui-même à un certain nombre de questions (la « grille » de Palo Alto) qui permettront de cerner le problème et de proposer une prescription.


Quel est le problème ?


Un des points essentiels de cette approche est de trouver le problème qui entretient la souffrance et les symptômes. Ce problème, qui enferme le sujet dans une spirale négative, n’est pas donné directement. Il va s’agir, par un certain nombre de questions, centrées sur les interactions du sujet, de le mettre en évidence, afin de pouvoir intervenir de manière appropriée.

La force de ce questionnement est d’agir comme un réducteur de complexité, en amenant le patient à donner des informations concrètes, relationnelles, et contextualisées, en relation avec un objectif précis. Les informations recueillies vont permettre au thérapeute de mieux comprendre la plainte du sujet, en repérant la personne qui souffre le plus, celle qui est la plus active dans les tentatives pour modifier la situation, et en mettant au jour le lien entre l’émergence du problème et les tentatives de solution pour le résoudre.

Parallèlement, ce questionnement va redonner de l’espoir au patient sur sa capacité à reprendre pied sur son environnement, en l’amenant à percevoir la dimension de construction du problème qui le fait souffrir, et en ressentant que quelqu’un d’extérieur à son problème peut le comprendre, l’aider.

Cette perception va être favorisée par l’utilisation, par le thérapeute, du langage du patient, en intégrant certains mots investis émotionnellement, des métaphores, et des figures de rhétorique, reflets de la conception du monde du sujet. L’utilisation de ce langage dans les questions favorise une meilleure coopération, et des réponses précises et concrètes permettant de saisir les comportements problématiques qui provoquent la souffrance et entretiennent la plainte.

Ce type de questionnement stratégique, visant à mettre en évidence un comportement dans un contexte interactif, est particulièrement utile lorsque le sujet perçoit son problème comme omniprésent. En effet, si le client répond aux questions du thérapeute, qu’il perçoit des exceptions à son problème, c’est-à-dire des moments où la plainte est moins importante voire absente, cela signifie qu’il a déjà la possibilité d’utiliser ses ressources, et de réaliser en partie son objectif. Dans cette occurrence où certaines solutions sont déjà présentes, même de manière minime, il est recommandé de poser des questions solutionnistes visant à décrire les exceptions, et les conditions qui les favorisent, permettant ainsi au problème de se dissoudre.

À l’opposé, si le sujet raconte sa plainte à travers une histoire dans laquelle il n’a aucun pouvoir pour agir soit sur un de ses comportements, soit sur le comportement d’autrui, le questionnement stratégique est indispensable.

Par exemple, si un sujet se plaint du comportement d’un membre de son entourage, il est important de saisir que la nature du problème est dans l’interprétation qu’en fait le sujet et non dans la norme sociale. Ainsi, un homme peut se plaindre d’une relation insatisfaisante avec son épouse suite à certaines réflexions qu’elle lui a fait sur sa consommation d’alcool qu’il ne trouve pas excessive. Le problème peut être pour lui d’avoir une épouse trop contrôlante, alors que, pour elle, il s’agira de la consommation d’alcool de son mari. Dans cette configuration relationnelle, le questionnement visant à mettre en évidence le problème de cet homme sera centré sur la réaction de son épouse le voyant rentrer du bar du coin, et non pas directement sur la quantité d’alcool ingérée, puisque pour le sujet ce comportement relève de la normalité. À l’inverse, si sa femme est la cliente, l’absorption importante d’alcool devient un problème, et le questionnement partira précisément de ce point, pour élucider les facteurs maintenant la situation inchangée. À chaque fois, les informations recherchées par le questionnement visent à mettre en lumière des informations comportementales concrètes, précises et interactionnelles.

Trouver quel est le problème principal sur lequel doivent porter les efforts thérapeutiques n’est pas toujours chose aisée ; la personne cliente, celle qui est vraiment encline au changement, apporte souvent de nombreux problèmes qui, pour la plupart, ne sont pas exploitables car reliés à des abstractions et à des généralités qui font système entre eux et sèment le trouble autour du problème à traiter. Illustrons notre propos par une image : il ne s’agit pas de faire grossir un chou-fleur de problèmes par un questionnement inadapté, mais d’enlever les feuilles d’un artichaut pour mettre en évidence le « cœur » de l’interaction problématique.

En pratique, le thérapeute peut avoir besoin de plusieurs séances pour déceler le cœur de l’artichaut. Il doit avancer lentement, au rythme du patient, en évitant de se précipiter sur la première « feuille » venue. Chaque patient amène plusieurs problèmes, et le rôle du thérapeute après avoir permis une exploration détaillée par le questionnement, sera d’amener le sujet à déterminer le problème prioritaire sur lequel il veut travailler, celui qui l’empêche de réaliser son objectif. Par exemple, le thérapeute pourra poser les types de questions suivants.

Jun 20, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Le questionnement thérapeutique

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