29 Greffes de peau totale et composées
La greffe de peau totale
Introduction et historique
La greffe de peau totale est une technique de base et une option de reconstruction importante très utilisée en chirurgie dermatologique [1, 2]. Les premières greffes cutanées ont été réalisées en Inde il y a environ 3 000 ans, avant que le concept ne migre progressivement vers l’Ouest. En 1823, Buenger rapporte la première intervention réussie sur l’homme transférant de la peau de la fesse sur le nez. En 1869, Reverdin décrit les greffes en pastilles pour accélérer la cicatrisation et quelques années plus tard Ollie rapporte la première greffe d’épaisseur variable, avant que Wolfe ne publie la première greffe de peau totale en 1875.
Classification des greffes cutanées
Selon l’épaisseur (Figure 29.1)
Greffes d’épaisseur variable
Elles sont constituées par l’épiderme et l’épaisseur de derme est variable :
Greffes composées
Elles sont constituées de deux structures tissulaires différentes, le plus souvent faites de peau et de cartilage. La greffe chondrocutanée est utile dans les reconstructions des pertes de substance transfixiantes du bord libre narinaire. La taille du greffon ne peut excéder 1,5 cm pour des raisons de viabilité. La zone donneuse de greffe se situe au niveau de la racine antérieure de l’anthélix ou sur le bord de l’hélix qui est le plus souvent refermée par suture directe ou par une autoplastie locale. C’est une greffe à haut risque de nécrose, de technique très délicate.
Biologie de la prise de greffe
Les facteurs de la prise de greffe
Ils découlent de la compréhension de la physiologie de la prise de greffe.
Facteurs dépendants de la technique
Qualité du lit receveur
Il doit être bien vascularisé mais il convient de pratiquer une hémostase rigoureuse sans carbonisation. Si le site receveur n’apparaît pas favorable à la mise en place immédiate de la greffe, on peut la différer pour stimuler le bourgeonnement du lit receveur par des pansements pro-inflammatoires. Les effets des facteurs de croissance endothéliaux ont été récemment démontrés. Ils améliorent la viabilité du greffon qu’ils soient administrés au moment de l’intervention ou 24 heures avant. Il existerait une suppression sélective de cytokines et une modulation de l’expression de l’oxyde nitrique-synthétase. L’utilisation de ces facteurs vasculaires de croissance pourrait permettre une meilleure prédictibilité de résultat [4]. Ainsi une GPT est favorablement envisageable sur le tissu cellulaire sous-cutané, l’aponévrose, le muscle, le périchondre, le périoste et le péritendon.
Facteurs compromettant la prise de greffe
La survenue d’un saignement retardé sous la GPT est le principal, en particulier chez les patients sous anticoagulants. L’hématome est source d’infection et de nécrose. Une mauvaise congruence entre le greffon et le lit et les mouvements du greffon sont les autres éléments défavorables.
Facteurs liés au terrain
Facteurs locaux
Les tissus dévitalisés, irradiés, une fibrose excessive empêchent la revascularisation. Une greffe de peau totale inférieure à 1 cm de diamètre peut survivre en « passant en pont » au-dessus de surfaces avasculaires car les réanastomoses proviennent des berges [5]. Il est contre-indiqué de greffer en cas de site receveur surinfecté [2].
Facteurs généraux
Technique
Prélèvement
Régions les plus utilisées (Figure 29.2)
Greffes à partir des triangles de Burow
Elles sont fréquemment aussi appelées greffes adjacentes car jouxtant la perte de substance qui est le plus souvent suturée partiellement selon les lignes de moindre tension cutanée. La proximité tissulaire permet une similarité de couleur et texture (Figure 29.13). Il convient de souligner l’importance et la logique de prélever dans une région indemne de toute lésion pour pouvoir s’autoriser à utiliser ce procédé [8].
Prélèvement de la GPT
À l’aide d’une compresse, de préférence non tissée, on confectionne un patron en appliquant la compresse sur le fond de la perte de substance (Figure 29.3). Il ne faut pas simplement mesurer le diamètre car la greffe serait sous-dimensionnée.
L’anesthésie locale permet de séparer en partie le plan hypodermique par « hydrodissection ». L’épiderme est incisé à la lame de 15. Le greffon est manipulé avec les crochets de Gillis plutôt que des pinces. Il est préférentiellement prélevé d’emblée dégraissé sous tension quand la greffe est encore retenue, le dégraissage au bistouri étant plus aisé (Figure 29.4). Ce dégraissage est poursuivi à l’aide de petits ciseaux courbes après avoir retourné le greffon sur l’index (Figure 29.5).