Burrhus Frederic Skinner – Un scientifique au service de l’humain
J. Van Rillaer
Les thérapies comportementales sont des psychothérapies qui se spécifient par le souci de scientificité de leurs praticiens. Leur élaboration se fonde sur des résultats de la psychologie scientifique. Elles se pratiquent, comme la médecine universitaire, avec le souci de la vérification méthodique des hypothèses ; leurs effets sont soigneusement évalués par des chercheurs et des praticiens. Contrairement à la majorité des autres psychothérapies, elles n’apparaissent pas comme un savoir irréfutable, constitué par le fondateur d’une École et consigné, pour l’essentiel, dans les écrits d’un ou de quelques maîtres à penser.
Les thérapies comportementales sont nées au cours des années 1950 et 1960, en différents endroits de la planète : Harvard (B.F. Skinner et al.), Londres (H. Eysenck, H.G. Jones, W. Meyer, M.B. Shapiro), New York (A. Ellis), Afrique du Sud (J. Wolpe, A. Lazarus), Australie (A.J. Yates). À cette époque, ces novateurs n’avaient presque pas de contacts entre eux, mais partageaient la même volonté de développer une psychothérapie d’orientation scientifique. Parmi ces personnages, une place de choix revient à Skinner, le premier à avoir utilisé le terme « behavior therapy », en 1953, dans un article.
B.F. Skinner (1904 – 1990) a fait ses études à Harvard et y est devenu un professeur renommé. Au terme d’une analyse statistique des noms des psychologues du xxe siècle cités dans les publications universitaires de psychologie (revues et manuels), Steven Haggbloom (2002) et une équipe de dix chercheurs ont constaté que Skinner occupe la première place (suivi, dans l’ordre, par Piaget, Freud et Bandura). Le plus cité dans le monde académique ne veut pas dire le plus souvent lu dans le texte : parmi les psychologues scientifiques, Skinner a probablement le record des présentations déformées et des fausses citations, souvent malveillantes (voir Van Rillaer, 2007).
Une des contributions les plus importantes de Skinner est la démonstration de la fécondité de ce qu’il a appelé l’« analyse expérimentale du comportement ». Skinner n’avait pas l’ambition de dévoiler les causes ultimes des comportements. Il a observé minutieusement des conduites et leurs contextes ; il a quantifié et systématiquement modifié des éléments de l’environnement, et a ainsi mis en évidence des variables dont les comportements sont fonction. À l’instar de ses procédures expérimentales, les thérapeutes comportementalistes font des analyses « fonctionnelles » en tenant compte de quatre types d’observations :
– les comportements comme tels, leurs fréquences, leurs durées, leurs intensités ;
– les antécédents qui incitent à produire les comportements (appelés « stimuli discriminatifs ») ;
– des conséquences antérieurement vécues des types de comportement (conséquences appelées « renforçateurs » lorsqu’elles rendent plus « fortes » la probabilité de répétitions d’un type de comportement) ;