Cutanée Suite à une Prise Médicamenteuse

Chapitre 24 Éruption Cutanée Suite à une Prise Médicamenteuse





La survenue d’une éruption cutanée suite à une prise médicamenteuse est le plus souvent en rapport avec le médicament. Il s’agit alors d’une toxidermie.


Plus rarement, dans le cas de viroses, il peut s’agir de l’histoire naturelle de l’infection. La prise médicamenteuse ne peut avoir soit alors jouer aucun rôle dans la survenue de l’éruption (simple coïncidence) ou soit déclencher l’éruption par un mécanisme immunologique mal compris (cas de l’éruption sous ampicilline en cas de mononucléose infectieuse). Dans ce dernier cas, il n’y a pas lieu de considérer qu’il s’agit d’une toxidermie. La prise ultérieure du médicament n’est pas contre-indiquée, une fois l’infection actuelle guérie.


Les toxidermies sont les réactions cutanées des médicaments données par usage interne. Les voies d’administration peuvent donc être per os (entérale), intraveineuse, sous-cutanée ou intramusculaire.


Elles touchent la peau et parfois les muqueuses.


Elles sont polymorphes dans leur expression clinique et leur gravité. Le diagnostic est posé le plus souvent sur un faisceau d’arguments, l’interrogatoire avec la chronologie des différentes prises médicamenteuses étant fondamental.


Un petit nombre de situations (syndromes de Stevens-Johnson, de Lyell, érythème pigmenté fixe) oriente en priorité vers une cause médicamenteuse. Les lésions cutanées ne sont pas spécifiques dans la majorité des cas.


Elles sont le plus souvent bénignes, guérissant avec l’arrêt du médicament en cause.


La fréquence des toxidermies est plus grande chez la femme et chez le sujet âgé.


Les médicaments le plus souvent en cause sont les antibiotiques et les anticonvulsivants (Tableau I).


Tableau I Principaux médicaments à risque élevé de toxidermie.
























Classe thérapeutique Molécules (DCI)
Antibiotiques Amoxicilline
Ampicilline
Isoniazide
Rifampicine
Sulfadiazine
Triméthoprimesulfaméthoxazole
Anticonvulsivants Carbamazépine
Lamotrigine
Phénytoïne
Hypouricémiants Allopurinol
Antiviraux Névirapine
Produits de contraste Produits de contraste iodés
hyperosmolaires
Divers D-Pénicillamide

Rappelons le rôle de la pharmacovigilance et l’obligation légale faite à tout professionnel de santé de signaler tout effet médicamenteux grave ou inattendu d’un médicament.


Les principales toxidermies sont décrites selon leur aspect clinique.


Les lésions cutanées sont décrites, la lésion élémentaire (macule, papule, vésicule, bulle) précisée. Des photographies (intérêt du numérique) pourront être effectuées. L’atteinte muqueuse doit être précisée, ainsi que la surface cutanée atteinte.


Les signes de gravité (Tableau II) sont recherchés. La présence d’un de ces signes et le terrain sur lequel survient la toxidermie (état général, comorbidités, isolement social) conduisent à l’hospitalisation.


Tableau II Signes de gravité.


















Signes de gravité Orientation étiologique
Dyspnée
Asthme
Hypotension
Œdème de Quincke
Choc anaphylactique
Atteinte supérieure à 60 %
Fièvre supérieure à 38°6 C
Adénopathies
Évolution vers une toxidermie grave (Lyell, DRESS)
Lésions muqueuses
Décollement cutané
Signe de Nikolsky
Purpura
Lyell
Hépatosplénomégalie
OEdème du visage
DRESS

Le bilan biologique n’est pas standardisé. On réalise le plus souvent une NFS à la recherche d’une éosinophilie ou d’une lymphocytose, une créatininémie afin de détecter une éventuelle insuffisance rénale, un ionogramme sanguin en cas de suspicion de désordres hydroélectrolytiques et notamment une déshydratation, et un bilan hépatique.



EXANTHÈME MACULOPAPULEUX


Il s’agit de la toxidermie la plus fréquente. Elle survient entre le 4e et le 14e jour après le début de la prise médicamenteuse (pic au 9e jour).


L’éruption peut être plus précoce en cas de sensibilisation préalable.


L’éruption débute sur le tronc, la racine des membres, les coudes et les genoux puis s’étend. Il existe un polymorphisme des lésions avec macules isolées, un aspect morbilliforme, des nappes scarlatiniformes par endroits ainsi que la possibilité de papules ou plaques oedémateuses, ainsi que d’un purpura pétéchial sur les jambes.


Le prurit est le plus souvent modéré.


Les signes généraux, s’ils sont présents, sont discrets : fièvre le plus souvent légère ou absente, asthénie, prurit. L’hyperéosinophilie est inconstante.


L’évolution est le plus souvent favorable en une semaine après l’arrêt du médicament. Une desquamation post-inflammatoire peut survenir.


Il n’y a pas d’atteinte muqueuse, de décollement cutané (signe de Nikolsky), de bulle, d’oedème du visage, de fièvre élevée, d’adénopathies, de purpura ou de nécrose. L’altération de l’état général, des lésions cutanées étendues, la sévérité des signes fonctionnels (prurit, brûlures cutanées) sont également des signaux d’alarme. Ces signes, s’ils sont présents, doivent faire craindre la survenue d’une toxidermie plus grave (par exemple, syndrome de Lyell, syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse…)


Le diagnostic est clinique, basé sur la chronologie de survenue par rapport à la prise médicamenteuse, l’aspect clinique de l’éruption.


Le principal diagnostic différentiel est un exanthème survenant lors d’une infection virale (cf. infra, chapitre Érythème). Celle-ci est plus fréquente chez l’enfant que chez l’adulte, il n’y a pas de polymorphisme des lésions, un énanthème, il existe une notion de contage et un syndrome pseudogrippal. Les érythèmes d’origine staphylococcique et streptococcique sont à écarter (cf. infra, chapitre Érythème).


La biopsie pour analyse histologique est le plus souvent inutile.


Les médicaments en cause sont fréquemment les aminopénicillines, les sulfamides, les antituberculeux, les anticomitiaux, le captopril, les AINS et anciennement les sels d’or.


Le traitement repose sur l’arrêt du médicament imputable dans la mesure du possible. Les mesures symptomatiques sont essentielles : antihistaminique type Clarytine® 1 cp/j ou Atarax® 25 mg le soir en cas de gêne au sommeil, application d’émollients ou de dermocorticoïdes à doses dégressives.


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May 26, 2020 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on Cutanée Suite à une Prise Médicamenteuse

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