19 Chirurgie des lèvres
Introduction
La chirurgie d’exérèse tumorale au niveau des lèvres comporte la chirurgie reconstructrice traumatologique et malformative mais également la chirurgie réparatrice tumorale qui elle aussi devient très souvent reconstructrice du fait des liens anatomiques structurels entre la peau, le muscle et la muqueuse.
Sur le plan carcinologique il existe une opposition topographique carcinologique. En effet la lèvre blanche supérieure est la localisation préférentielle des carcinomes basocellulaires alors que la lèvre rouge inférieure est un site préférentiel des carcinomes épidermoïdes de pronostic plus réservé du fait de la possibilité d’essaimage lymphatique [1].
Lecture anatomique
Macroscopiquement les lèvres sont formées de deux zones distinctes : la lèvre blanche et la lèvre rouge séparées par une ligne remarquable de démarcation cutanéo-muqueuse encore appelée arc de Cupidon pour la lèvre supérieure [2].
La lèvre blanche est recouverte d’une peau épaisse et pileuse, adhérente dans sa partie médiane au muscle orbiculaire sous-jacent.
Dans sa partie supérieure, elle est divisée en deux sous-unités anatomiques par le philtrum au centre, lui-même délimité par les crêtes philtrales. Cette hémilèvre forme un cadre trapézoïdal, délimité par le sillon labiogénien, les crêtes philtrales, la jonction cutanéomuqueuse (JCM) et l’orifice narinaire (Figure 19.1).
La lèvre rouge est constituée de deux régions :
la partie externe, semi-muqueuse sèche ou vermillon, adhérant au muscle, formant une protubérance médiane pour la lèvre supérieure appelée le tubercule,
la partie interne, muqueuse humide, qui se prolonge jusqu’au fond des vestibules en formant le sillon gingivolabial dont la projection externe pour la lèvre inférieure est le sillon labiomentonnier. Elle est séparée du plan musculaire par une sous-muqueuse, qui est le siège des glandes salivaires accessoires.
Les lèvres supérieures et inférieures se réunissent pour former les commissures. Elles constituent la zone de convergence des muscles peauciers, antagonistes de l’orbiculaire, responsables de la mimique, en un carrefour musculaire, le modiolus.Vascularisation
La vascularisation artérielle est principalement assurée par les artères labiales coronaires supérieures et inférieures, branches de l’artère faciale. Ces artères sont situées au niveau du versant endobuccal, sus-musculaire (Figure 19.2). Il existe de nombreuses variantes anatomiques de l’artère coronaire inférieure qui a un trajet en T le plus souvent. Une vascularisation accessoire est assurée par les terminales des artères infraorbitaire, transversale, buccale, mentonnière et submentale.
La vascularisation veineuse se fait vers la veine faciale satellite de l’artère.
La lèvre est le siège d’un double réseau lymphatique, le premier drainant la muqueuse et le second la peau. Ces deux réseaux s’anastomosent sur le bord libre des lèvres. Le drainage lymphatique de la lèvre supérieure et de la partie latérale de la lèvre inférieure se fait vers les nœuds submandibulaire et jugulodigastrique. Le drainage lymphatique de la partie médiane de la lèvre inférieure se fait de façon bilatérale vers les nœuds submentaux et la chaîne jugulaire antérieure. La connaissance du drainage lymphatique conditionne la prise en charge des CEC (Figure 19.3).
L’innervation motrice est assurée par les branches du nerf facial (Figure 19.4) :
la branche temporofaciale donnant les rameaux buccaux supérieurs pour les muscles buccinateur et orbiculaire, en longeant le bord inférieur du conduit parotidien;
la branche cervicofaciale donnant le rameau buccal inférieur qui croise la face externe du masséter et innerve les muscles risorius, buccinateur et orbiculaire.L’innervation sensitive autorise la réalisation des blocs infraorbitaires et mentonniers [3], particulièrement utiles dans cette chirurgie. Elle est assurée par les branches du nerf trijumeau (V) (Figure 19.5).
La lèvre supérieure est innervée par le nerf infraorbitaire, branche terminale du V2 qui sort par le foramen infraorbitaire.
La lèvre inférieure fait partie du territoire du nerf maxillaire (V3) et est innervée par le nerf mentonnier, branche terminale de l’alvéolaire inférieur, qui sort par le foramen mentonnier.Lecture chirurgicale
Contraintes chirurgicales
Il est indispensable de placer les incisions dans les lignes de moindre tension cutanée, dans les plis radiés, perpendiculaires au muscle orbiculaire et au bord libre.
Il est tout aussi nécessaire de reconstituer la continuité de la ligne cutanéomuqueuse en prenant des points de repère avant infiltration par des micro-incisions. Il faut éviter, à son niveau, tout excès tissulaire qui sera corrigé en prolongeant le trait d’incision dans le vermillon (Figure 19.6).
Contraintes anesthésiques
L’anesthésie locale utilisant la lidocaïne adrénalinée 1 % semble idéale au premier abord car elle permet de diminuer le saignement, mais elle reste douloureuse et déforme les repères fondamentaux notamment au niveau de la JCM. L’anesthésie locorégionale tronculaire apparaît de ce fait préférable (cf. Chapitre 5).
Réparations en unité
Les techniques utilisant la réserve cutanée réparatrice au sein de l’unité fonctionnelle et esthétique doivent être privilégiées [4].
Shaving
Au niveau de la muqueuse il peut être utile pour l’ablation de granulome télangiectasique, de lentigo ou de diapneusies (Figure 19.7).
Exérèse cutanée simple
Ses capacités réparatrices sont très vite limitées à des PDS de 5 à 6 mm du fait de l’adhérence cutanée au plan musculaire et de l’allongement de la hauteur labiale généré par le rapprochement et déformant la JCM [5].
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