9: Hystérectomie

Chapitre 9 imageHystérectomie




L’hystérectomie est l’une des interventions les plus fréquentes en chirurgie : 600 000 sont réalisées chaque année aux États-Unis [6], 100 000 au Royaume-Uni [16] et 60 000 en France [4] ; elle est essentiellement réalisée pour des pathologies bénignes.


Si l’abord abdominal n’est plus la référence en pathologie bénigne, les discussions sur les deux autres voies d’abord demeurent sources de polémique. Aux États-Unis, la voie mini-invasive est encore peu utilisée : une étude publiée en 2010 [1] et étudiant les hystérectomies réalisées de 2001 à 2006 retrouvait que plus de 70 % des hystérectomies étaient réalisées par laparotomie, 18 % par voie vaginale et seulement 11 % par voie cœlioscopique ! En 2004, une enquête dans douze CHU de la Région Ile-de-France a montré que la laparotomie était de moins en moins utilisée [5] : 24,4 % des hystérectomies étaient réalisées par voie abdominale, 48,3 % par voie vaginale, 8,2 % par voie vaginale cœlio-assistée, 19,1 % par voie cœlioscopique. Les chiffres les plus récents (2010) concernant les différentes pratiques chirurgicales sont ceux du PMSI (Programme de médicalisation du système d’information) qui rapportent des taux relativement proches avec 36 % des hystérectomies réalisées par voie laparotomique, 46 % par voie vaginale et 18 % par voie cœlioscopique ou voie vaginale cœlio-assistée.


Dans notre service, avec plus de 20 ans de recul, plus de 90 % des hystérectomies sont réalisées par voie cœlioscopique. Nous sommes persuadés que seule la diffusion de la technique laparoscopique permettra d’augmenter durablement et sensiblement le taux d’hystérectomies par voie mini-invasive. C’est en effet la seule voie d’abord mini-invasive permettant de s’adapter à l’immense majorité (plus de 90 %) des cas d’hystérectomie de notre pratique courante. Une technique raisonnée et codifiée comme nous allons la décrire devrait permettre une plus large diffusion de la technique.



Définition


Selon les équipes et les chirurgiens, la définition de l’hystérectomie vaginale cœlioscopique peut varier et plusieurs classifications ont été décrites [3, 15]. Trois types principaux d’hystérectomie cœlioscopique pour pathologie bénigne sont actuellement décrits : l’hystérectomie cœlioscopique, l’hystérectomie vaginale cœlio-assistée et l’hystérectomie cœlioscopique subtotale.


Dans notre service, l’immense majorité des hystérectomies sont des hystérectomies totales cœlioscopiques pure (qu’il y ait conservation annexielle ou non) : l’intervention est réalisée du début à la fin par cœlioscopie. Nous utilisons la technique de l’hystérectomie subtotale essentiellement lors de la réalisation d’une promonto-fixation (où l’ouverture vaginale expose à des risques importants d’érosion de prothèse). L’hystérectomie vaginale cœlio-assistée nous semble combiner les désavantages des deux voies d’abord en augmentant les temps d’installation sans la maîtrise parfaite d’une des voies mini-invasives. De plus, même si cet argument n’a pas de valeur scientifique mais uniquement pratique, la réalisation des sutures par cœlioscopie lors d’une hystérectomie simple permet à l’opérateur l’apprentissage puis la maîtrise du geste dans de bonnes conditions (chirurgie réglée, codifiée, relativement courte…). Cela lui permettra ensuite la réalisation de sutures plus complexes, dans des conditions plus difficiles et non réalisables par voie vaginale, comme lors de la promonto-fixation, lors de la myomectomie cœlioscopique ou lors de la survenue d’une complication nécessitant une suture cœlioscopique.



Indications


L’utérus fibromateux symptomatique reste l’indication principale de l’hystérectomie (30 à 40 % des cas environ) [22]. Les autres indications sont l’endométriose, puis viennent les troubles du cycle après échecs des traitements conservateurs médicaux (hémostatiques, progestatifs, etc.) et chirurgicaux (thermocoagulation, endométrectomie, myomectomie, voire embolisation) [11].



Historique


En 1984, Semm a été le premier à décrire une assistance cœlioscopique lors de la réalisation d’une hystérectomie par voie vaginale [20]. Le 1er janvier 1988, Reich réalisa la première hystérectomie entièrement par laparoscopie [19]. En novembre 1989, notre équipe effectua la première hystérectomie totale élargie par cœlioscopie [2]. Au cours des années 1990, l’hystérectomie cœlioscopique va connaître une évolution notable, imputable à l’amélioration de l’ensemble du matériel et à la systématisation des différents temps opératoires conduisant à l’établissement d’un véritable manuel opératoire [23].


Actuellement, l’hystérectomie par cœlioscopie est une technique chirurgicale arrivée à maturation, elle est reproductible et validée. La technique décrite ci-dessous est celle habituellement réalisée dans le service.



Technique



Préparation et installation (image vidéo 9.1)




Nous n’utilisons pas de préparation digestive systématique ; dans certains cas l’utilisation d’un lavement au Normacol® peut favoriser la vidange rectale et faciliter l’accès postérieur et l’exposition chez certaines patientes (notamment en cas d’obésité). La cœlioscopie est effectuée sous anesthésie générale endotrachéale, en décubitus dorsal modifié, jambes écartées en légère flexion à 30°, les deux bras le long du corps, les fesses débordant du bord de la table. Une sonde urinaire à demeure est mise en place. Toutes les patientes reçoivent une antibiothérapie préventive (cefazoline 2 g en IV, en cas d’allergie : association dalacine et gentamicine) au début de l’intervention et un traitement anticoagulant prophylactique par héparine à bas poids moléculaire depuis la veille de l’intervention jusqu’au 14e jour postopératoire.


Matériel : le matériel et l’instrumentation endoscopiques sont classiques à la voie d’abord laparoscopique et ont été décrits dans le chapitre 1. À côté de cette instrumentation de base et non spécifique de l’hystérectomie, la canulation utérine revêt une importance capitale. Nous utilisons un instrument spécifique que nous avons développé (uterine manipulator de Karl Storz®, Model ref. 26168D) (fig. 9.1). Cet appareil triaxial a trois intérêts principaux :






Les dix étapes opératoires



Étape 1 – Coagulation et section du ligament rond


L’intervention débute par la réalisation d’éventuelles adhésiolyses et le refoulement des anses digestives en extrapelvien. À gauche, si une annexectomie est envisagée, il est conseillé de libérer l’accolement très fréquent de la boucle sigmoïdienne sur la racine du ligament infundibulo-pelvien afin de bien l’isoler et de pouvoir rattraper une coagulation incomplète de ce ligament par un complément d’hémostase.


Grâce au canulateur, l’aide situé entre les jambes de la patiente (deuxième assistant, en position assise) mobilise et maintient l’utérus crânialement latéralement à droite (si l’opérateur débute du côté gauche) et avec une légère antéversion. Le premier assistant saisit le ligament rond gauche et le tire médialement. Un triangle est ainsi formé, délimité par : le ligament rond en haut, les vaisseaux iliaques en dehors et l’annexe en dedans. Le centre de ce triangle est formé par la juxtaposition des deux feuillets antérieur et postérieur du ligament large ; c’est ici qu’aura lieu fenestration. Le premier geste de l’hystérectomie est la coagulation bipolaire puis la section du ligament rond en son centre. L’ensemble du ligament rond ainsi que son artère doivent être sectionnés de façon complète réalisant ainsi une ouverture presque spontanée des plans sous-péritonéaux antérieur et extérieur (fig. 9.2 et 9.3) (image vidéo 9.2).








Étape 4 – Coagulation et section du ligament infundibulo-pelvien (fig. 9.7)




Hystérectomie inter-annexielle


La coagulation-section est réalisée sur la trompe puis sur le ligament utéro-ovarien, légèrement en dessous et en arrière de la trompe. Cette section doit être réalisée en laissant un « moignon de sûreté » du côté utérin permettant ainsi de reprendre la coagulation si l’hémostase s’avère imparfaite. Une Endo GIA® peut également assurer une hémostase en bloc de la trompe et de l’annexe en restant au-dessus du pédicule utérin (fig. 9.8 et 9.9). Deux chargeurs sont parfois nécessaires d’un même côté dans le cas d’utérus augmenté de volume. Pour éviter tout échec avec difficultés d’hémostase liées à la présence des agrafes, il faut rester à distance du bord utérin et relâcher la tension sur le ligament large.



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Apr 23, 2017 | Posted by in GYNÉCOLOGIE-OBSTÉTRIQUE | Comments Off on 9: Hystérectomie

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