CHAPITRE 7 TRAITEMENT DE L’INFARCTUS DU MYOCARDE AVEC SUS-DÉCALAGE DU SEGMENT ST
PHYSIOPATHOLOGIE
L’infarctus du myocarde (IDM) survient quand le myocarde est sujet à une carence prolongée en oxygène, conduisant à une nécrose cellulaire irréversible (à la différence de l’angor instable). Cette carence s’observe le plus souvent suite à la constitution d’un thrombus au niveau de l’artère coronaire après rupture d’une plaque d’athérome (figure 7.1). Ce mécanisme représente la grande majorité des causes d’IDM. Un infarctus est possible dans certaines situations cliniques où se présente un « mismath « transitoire entre les besoins métaboliques myocytaires et les apports, ceci dans des situations créant une ischémie dite fonctionnelle telles que l’hypotention (choc septique), l’anémie, la tachycardie et biens d’autres. Dans un petit nombre de cas, un IDM peut être déclenché par un vasospasme dont la cause peut être variée (effort physique excessif, exposition violente au froid intense, cocaïne, etc.). Seul le premier mécanisme athéro-thrombotique sera traité. La rupture d’une plaque provoque la formation d’un thrombus qui interrompt le flux sanguin et provoque un déséquilibre entre apport et besoin en oxygène qui, s’il est important et persistant, entraîne une nécrose myocardique. La conséquence de cette rupture et de ses complications constitue « les syndromes coronaires aigus « de gravité croissante : angor instable, IDM sans sus-décalage du segment ST, avec sus-décalage du segment ST. En cas d’obstruction totale par le thrombus, une élévation du segment ST est observée au niveau de l’électrocardiogramme ainsi qu’une nécrose totale ou partielle de l’épaisseur de la paroi ventriculaire (IDM avec sus-décalage du segment ST).
Globalement, l’IDM peut donc se diviser en deux types de pathologies :
– infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST qui correspond habituellement à une occlusion coronaire brutale et complète, aboutissant à terme à une nécrose transmurale ;
– infarctus du myocarde sans sus-décalage du segment ST qui regroupe l’infarctus du myocarde rudimentaire et l’infarctus du myocarde sous-endocardique et qui correspond :
DIAGNOSTIC
Le diagnostic est posé en cas :
– de douleur d’allure angineuse typique : rétrosternale, constrictive, en barre, irradiant dans le cou et le bras gauche, évoluant depuis plus de 30 minutes et résistante à la trinitrine sublinguale (comprimé ou pulvérisation). Il est important de noter qu’une absence de douleur peut être observée dans 15 à 25 % des cas (fréquente chez les diabétiques) ;
– et de sus-décalage du segment ST à l’électrocardiogramme (au moins 1 à 2 mm) sur au moins deux dérivations. Une onde Q significative est parfois observée précocement et signe l’infarctus.
TRAITEMENT DE L’IDM AVEC SUS-DÉCALAGE DU SEGMENT ST
Le schéma général de prise en charge de l’IDM est présenté dans la figure 7.2.
Traitement des 24 premières heures
Le traitement de l’infarctus du myocarde dans sa phase aiguë comprend [1–4] :
– la reperfusion myocardique :
– la limitation de l’évolution de la nécrose :
– le traitement de la douleur, de l’essouflement et de l’anxiété.
Reperfusion myocardique
Interventions coronaires percutanées (ICP)
Description
Les ICP se réfèrent à un ensemble de procédures invasives dont l’objectif est d’améliorer le flux sanguin du myocarde par l’intermédiaire d’une recanalisation des artères coronaires lésées [5]. La première d’entre elles est la technique d’angioplastie coronaire transluminale percutanée (ACTP), réalisée pour la première fois en 1977. Cette technique est maintenant fréquemment pratiquée en cas d’angors stable ou instable et d’infarctus du myocarde [6]. L’ACTP nécessite une hospitalisation de l’ordre d’1 à 3 jours.
À côté de cette technique d’ACTP simple, d’autres méthodes existent.
– Pose de stents (endoprothèses vasculaires) : ces endoprothèses vasculaires sont des petits ressorts métalliques et semblent diminuer le taux de resténose en agissant à la fois en phase aiguë mais aussi en phase chronique en diminuant le remodelage constrictif de l’artère. Les stents sont actuellement d’usage très courant et ont transformé la sécurité des procédures d’angioplastie. Malheureusement, ils constituent un formidable stimulant de la prolifération des cellules musculaires lisses. C’est pour cette raison que des prothèses enrobées de médicaments (antimitotiques utilisés en pathologie cancéreuse) inhibant cette prolifération cellulaires ont été conçues. Quatre stents pharma-coactifs sont actuellement disponibles :
– Techniques chirurgicales : La chirurgie cardiaque est rarement utilisée en phase aiguë de l’infarctus sauf en cas de :
Recommandations
Le choix entre les agents thrombolytiques et les techniques d’angioplastie transluminale doit bien souvent se faire en période préhospitalière. Les études comparatives ont montré que l’ICP était plus efficace que la thrombolyse en termes de reperfusion. Une ICP est préférée quand elle est réalisable dans des délais et des conditions raisonnables [11].
l’ICP est considérée comme l’option thérapeutique de choix quand la procédure peut être réalisée dans les 90 minutes après le premier contact médical. L’ICP reste supérieure à la fibrinolyse jusqu’à 110 minutes [12]. En pratique, lorsqu’un geste invasif (angioplastie ou pontage aorto-coronarien) est décidé, il doit être réalisé dans les 120 minutes suivant l’infarctus ou, si le pronostic vital n’est pas immédiatement en jeu, dans les 24 à 72 heures. Un traitement médicamenteux est systématiquement associé.
Par ailleurs, la Société Européenne de Cardiologie considère qu’une ICP est l’option de choix :
– en cas de choc cardiogénique ;
– chez les patients présentant une contre-indication à l’utilisation des agents thrombolytiques.
Elle précise également que seuls les hôpitaux spécialement équipés et entraînés à cette technique peuvent l’utiliser en routine. Le taux de mortalité des patients bénéficiant d’une ICP est en effet plus bas dans les centres où des procédures sont réalisées en grand nombre [13].
À efficacité équivalente, l’étude CAPTIM révèle que le coût global d’une angioplastie est inférieur à celui d’une prise en charge par thrombolyse préhospitalière [14, 15].
En cas de procédure d’ICP retardée, l’utilisation de ténec-téplase avant l’ICP n’est pas associée à un meilleur résultat et est responsable d’une majoration des effets indésirables par rapport à l’ICP seule [16].
Parmi les procédures d’ICP, plusieurs études ont comparé l’ACTP à la pose de stent. L’étude pilote STENT PAMI a montré que l’implantation de stent en routine était associée à un taux de survie sans resténose favorable [17]. D’autres études ont montré l’avantage de la pose de stent sur ballonnet par rapport à l’angioplastie, notamment en termes de diminution des complications [5]. Quant à la technique de pose directe de stent, des essais comparatifs versus pose conventionnelle ont montré un avantage en faveur de cette nouvelle technique en termes d’efficacité de la reperfusion myocardique [18].
Certains auteurs recommandent fortement la pose de stent pour la reperfusion myocardique et si possible la pose directe de stent [5].
Agents thrombolytiques
Mode d’action
Les agents thrombolytiques dissolvent les thrombi pathologiques ainsi que les dépôts de fibrine :
– le TNK-PA ou ténectéplase (Métalyse) présentant une modification de 3 acides aminés (thréonine, asparagine et lysine ; TNK étant les initiales internationales de ces 3 acides aminés) par rapport au t-PA endogène. Cette modification entraîne un allongement de la demi-vie permettant une administration unique en bolus ;
– le rt-PA (recombinent tissue plasminogen activator) ou altéplase (Actilyse) est une protéase qui se lie à la fibrine sur un reste lysine du site aminé terminal et active ainsi le plasminogène ;
– le r-PA (recombinent plasminogen activator) ou retéplase (Rapilysin) est produit à partir de souches d’Escherichia coli et présente un mécanisme d’action similaire au t-PA ;
– la streptokinase (Streptase) (obtenue à partir de souches de Streptococcus) forme un complexe avec le plasminogène et active ainsi la formation de plasmine. Cette molécule est aujourd’hui pratiquement abandonnée en raison de sa forte immunogénicité.
Recommandations
Si la décision est d’entreprendre une thrombolyse médicamenteuse, celle-ci doit être faite le plus tôt possible avant le transfert en hôpital [19].
Actuellement, il est reconnu que les thrombolytiques doivent être utilisés chez les patients présentant un IDM avec une élévation du segment ST et dont le délai entre l’intervention et la survenue de l’IDM est inférieur à 12 heures. Le bénéfice d’une thérapeutique par les thrombolytiques est réel en cas d’IDM peu grave tant que les facteurs de risque d’hémorragie intracrânienne sont absents [20].
Les critères de choix entre les différents antithrombolytiques reposent sur un grand nombre d’études comparatives [21] (tableau 7.1).
Les essais GISSI-2 [22] et ISIS-3 [23] n’avaient pas montré de différences en termes de mortalité entre streptokinase et t-PA. Cependant, l’essai comparant rt-PA accéléré et streptokinase a montré une supériorité en termes de mortalité au prix cependant de chocs hémorragiques plus fréquent. Le double bolus de retéplase n’offre pas d’avantage sur rt-PA accéléré excepté en termes de facilité d’administration. La ténectéplase présente une efficacité identique par rapport à rt-PA accéléré en termes de mortalité. En revanche, la tolérance hémorragique semble meilleure avec la ténectéplase [24]. De la même, la ténecté-plase a l’avantage d’être administrable en bolus unique.
En cas de signes de réocclusion avec persistence d’une élévation du segment ST, un agent fibrinolytique peut être réadministré dans la mesure où il n’est pas possible de réaliser une ACTP [25]. Le risque hémorragique doit être cependant pris en compte. La streptokinase ne peut pas être utilisée en raison de la formation d’anticorps pouvant diminuer son activité.
Antiagrégants plaquettaires et agents antithrombotiques
Antiagrégants plaquettaires
Antagonistes de récepteurs GPIIb/IIIa
Ils se fixent sur les récepteurs plaquettaires GPIIb/IIIa, récepteurs de la famille des intégrines et empêchent ainsi la fixation des macromolécules adhésives circulantes (comme le fibrinogène et le facteur Willebrand). Ils inhibent ainsi l’agrégation plaquettaire et donc la formation du thrombus d’origine plaquettaire. Les anti-GPIIb/IIa sont présentés dans le tableau 7.2.
Ticagrélor (Brilique)
Il s’agit d’un antiagrégant plaquettaire actif par voie orale d’une nouvelle classe chimique, la famille des cyclo-pentyl-triazolo-pyrimidines. Sa structure chimique a des similitudes avec celle de l’adénosine. C’est un antagoniste réversible sélectif du récepteur plaquettaire P2Y12 de l’ADP (adénosine diphosphate) qui empêche l’activation et l’agrégation plaquettaire déclenchée par l’ADP. Contrairement aux thieno-pyridines, il ne nécessite pas d’activation pour être actif [26].
Agents antithrombotiques
Recommandations
Utilisation des antiagrégants plaquettaires
L’efficacité de l’aspirine dans l’IDM n’est plus discutée et a été mise en évidence par l’étude ISIS-2 (17 000 patients) [27]. Le bénéfice a été estimé à 20 vies gagnées sur 1 000 patients traités et ce bénéfice s’ajoute à celui obtenu par la thrombolyse.
L’aspirine doit être utilisée en première intention chez tous les patients à l’exception de ceux présentant une fibrillation atriale chez lesquels les dérivés coumariniques semblent apporter une meilleure protection [28].
Concernant clopidogrel, l’étude CLARITY a inclus plus de 3 400 patients se présentant dans les 12 premières heures d’un IDM avec sus-décalage du segment ST et pour lesquels un traitement thrombolytique était programmé [29]. Les patients ont reçu du clopidogrel ou un placebo en association pour les deux groupes à l’aspirine à un agent fibrinolytique et, si indiqué, une héparine. Il a été observé une réduction du risque absolu (décès ou récidive d’IDM) de 6,7 % et du risque relatif de 36 % en faveur du clopidogrel. Le clopidogrel dispose à ce jour d’une autorisation de mise sur le marché dans cette situation, la durée de traitement doit être au minimum de 4 semaines. En pratique, en cas de prise en charge invasive (coronarographie et éventuellement geste de reperfusion) en urgence ou dans les 72 heures après la survenue des premiers symptômes, une double antiagrégation par aspirine et Palvix ou aspirine et Efient est instaurée pour 12 mois. Le prasugrel (Efient), alternative au clopidogrel (Plavix et génériques), pourrait être plus actif que le clopidogrel, mais au prix d’un sur-risque hémorragique. Concernant les antagonistes des récepteurs GPIIb/IIIa, les résultats de l’étude GUSTO-IV ACS, réalisée chez des patients à faible risque, indiquent qu’un traitement par l’abciximab n’apporte pas de bénéfice par rapport au traitement standard chez les patients en syndrome coronaire aigu non candidat à la revascularisation coronaire précoce [30].
Le ticagrélor a été comparé au clopidogrel lors d’un essai de phase III PLATO [26]. Il s’agit d’un essai randomisé en double aveugle qui a inclus 18 624 patients. Selon une estimation d’incidence à 12 mois, par rapport au groupe traité par clopidogrel, la mortalité globale a été statistiquement réduite dans le groupe ticagrélor (4,5 versus 5,9 %), ainsi que la mortalité cadiovasculaire (4,0 versus 5,1 %). Toutefois, plus d’hémorragie ont été observées dans le groupe ticagrélor [31]. L’avantage en termes de bénéfice/risque de ce médicament reste à préciser. Le ticagrélor ne doit pas être utilisé avec des doses d’aspirine > 300 mg par jour. En décembre 2011, la HAS dans une synthèse d’avis a précisé que associé à l’aspirine, le ticagrélor apporte une amélioration du service médical rendu mineure (ASMR IV) par rapport au clopidogrel dans les syndromes coronaires aigus.
Utilisation d’agents antithrombotiques
– Héparine de bas poids moléculaire (HBPM)
Association antiagrégants + antithrombotique
L’ACTP nécessite une prémédication : l’héparine standard est administrée en intracoronaire à la dose de 30 à 100 UI/kg afin d’éviter une thrombose artérielle. L’abciximab peut être également associé à l’aspirine et l’héparine (cette dernière étant alors administrée à raison de 70 UI/kg). L’association aspirine-héparine-abciximab est indiquée dans la prévention des complications cardiaques ischémiques chez des patients à haut risque subissant une ACTP. Un inhibiteur direct de la thrombine, bivalirudine, a été évalué comme anticoagulant dans les interventions coronaires percutanées en comparaison de l’héparine non fractionnée [38]. Un antiGpIIbIIIa était éventuellement associé dans les deux bras. L’efficacité a été identique dans les deux études mais l’incidence des saignements a été inférieure dans le bras bevalirudine. Cependant, les conditions expérimentales de cette étude américaine ne semblent pas transposables à la pratique française. Ce médicament peut constituer une alternative à l’héparine standard en cas d’antécédents de trombopénie induite par l’héparine.
Association fibrinolytique + antagoniste des récepteurs GPIIb/IIIa
Plusieurs études ont montré l’avantage d’une association fibrinolytique + antagoniste des récepteurs gpIIb/IIIa avec une augmentation d’efficacité sans augmentation des complications hémorragiques [39–41]. Les résultats de l’essai GUSTO V [42] suggèrent cependant une augmentation du risque d’hémorragies non cérébrales chez les patients âgés en cas d’association d’agent fibrinolytique avec un antiGPIIbIIIa. En l’absence de données complémentaires, la Société Européenne de Cardiologie ne recommande pas ce type d’association.
Traitements pharmacologiques utilisés pour limiter l’évolution de la nécrose
Bêtabloquants
– 1. réduction de la consommation d’oxygène par le myocarde ;
– 2. diminution de la fréquence cardiaque ; réduction du taux de catécholamines et de leurs effets arythmogènes ;
– 3. diminution du risque de fibrillation ventriculaire. D’autres effets pourraient intervenir comme une inhibition des plaquettes et une activité antithrombotique directe.
Les différents bêtabloquants indiqués dans le traitement de l’IDM figurent dans le tableau 7.3.
En phase hospitalière, les bêtabloquants utilisés par voie orlale dans la phase aiguë de l’IDM ont montré une efficacité certaine. Il est préférable d’utiliser un bêtabloquant dénué d’activité sympathomimétique intrinsèque (ASI) (aténolol, métoprolol), bien que des études aient montré l’efficacité de bêtabloquants à activité sympathomimétique intrinsèque, comme l’acébutolol [43]. Toutefois, dans le cas d’infarctus à risque faible, le bénéfice est moins net.
Dans certains cas, on utilise des formes IV comme l’aténolol (Ténormine) ou l’esmolol (Brévibloc), ce dernier bénéficiant d’une demi-vie courte, il est initié en bolus (0,5 mg/kg) suivi éventuellement d’une perfusion [44].
Inhibiteurs de l’enzyme de conversion
Les différents inhibiteurs de l’enzyme de conversion indiqués dans le traitement de l’IDM figurent dans le tableau 8.4.
Les IEC ont été étudiés très récemment chez des patients bénéficiant de la meilleure stratégie thérapeutique connue à ce jour et dans les 24 à 36 heures suivants les symptômes. Ces agents ont montré une efficacité en réduisant le taux de mortalité, en particulier dans les tout premiers jours suivant la survenue des symptômes [45]. Plusieurs études ont montré un bénéfice avec des traitements par les IEC durant de 4 semaines à 5 ans [46–51].
L’efficacité des IEC réside vraisemblablement dans l’amélioration de la fonction ventriculaire gauche. Si l’efficacité des IEC dans la phase aiguë de l’IDM semble maintenant admise, la question du type de patients à traiter et de la durée de ce traitement par les IEC reste encore posée. Compte tenu des résultats obtenus lors de ces études, deux stratégies raisonnables sont possibles : donner systématiquement des IEC à tous les patients en phase aiguë de l’IDM sur une courte période (4 à 5 semaines), ou ne traiter à long terme (3 à 5 ans) que les patients en phase aiguë d’IDM présentant un dysfonctionnement ventriculaire gauche ou une insuffisance cardiaque [52].
Antagonistes des récepteurs à l’angiotensine II (ARA-II)
Les ARA-II sont des alternatives valables en cas d’intolérance aux IEC. Les deux molécules ayant cette indication sont le valsartan [3, 53] et le telmisartan [54].
Statines
L’effet cardioprotecteur précoce des statines a été montré sur des modèles expérimentaux d’ischémie et de reperfusion. Des données issues de registres nationaux ont montré que l’utilisation d’une statine dans les 24 premières heures d’un IDM était associée à un diminution des complications précoces et de la mortalité hospitalière [55]. En pratique, les statines doivent être proposées dès la phase aiguë de l’IDM. L’utilisation des statines sera abordée de façon plus détailllée dans la partie « prévention secondaire de l’IDM «.
Traitement de la douleur, de l’essoufflement et de l’anxiété
La douleur doit être traitée, le plus tôt possible, pour :
– éviter la réponse adrénergique qu’elle provoque ;
– éviter l’augmentation de consommation d’oxygène par le myocarde qui est délétère dans le cas de l’IDM.
Les différents niveaux d’action des médicaments précités sont exposés sur la figure 7.3.
Situations particulières
Survenue de troubles du rythme
Lidocaïne
Il a été montré que la lidocaïne réduisait l’incidence des fibrillations ventriuclaires dans la phase aiguë de l’IDM. Cependant, ce médicament augmente de façon significative le risque d’asystolie [4]. Une méta-analyse de 14 essais cliniques a montré une mortalité plus élevée, mais non significative, chez les patients ayant reçu la lidocaïne par rapport au contrôle [56]. L’usage prophylactique de ce médicament n’est pas aujourd’hui recommandé.
Amiodarone (antiarythmique de classe III)
Les études AMIAT et CAMIAT ont montré que l’amiodarone était efficace sur les arythmies ventriculaires post-infarctus du fait des propriétés anticalciques et bêtabloquantes [57–59].
Bêtabloquants
Les bêtabloquants sont efficaces également du fait de leurs propriétés antiarythmiques.
IDM compliqué d’un choc cardiogénique
La thrombolyse ne semble pas recommandée en raison d’une baisse d’activité des thrombolytiques du fait du choc cardiogénique et de la baisse de perfusion coronaire consécutive [60]. Dans ce cas, l’angioplastie est préférentiellement indiquée et la thrombolyse ne doit être envisagée qu’en cas de délai de réalisation d’angioplastie excédant 1 heure et comme solution d’attente. Les endoprothèses sont également conseillées ainsi que la prescription d’antiGPIIb/IIIa pour prévenir les phénomènes microemboliques et les complications thrombotiques. Globalement, le pronostic reste mauvais [61]. Enfin, il peut être envisagé l’utilisation d’assistance circulatoire mécanique légère comme le ballon de contre-pulsion intra-aortique (CPIA), l’Impella (pompe rotative), ou plus lourde en cas de choc réfractaire ECMO (ExtraCorporeal Membrane Oxygenation).
Cas du patient diabétique
Un quart des patients atteints d’un IDM est diabétique. Les patients diabétiques sont susceptibles de présenter des symptômes atypiques et des complications à type d’insuffisance cardiaque. En comparaison de la population non diabétique, la mortalité suite à un IDM est doublée [4]. Il n’y a pas de contre-indication à la fibrinolyse même en présence d’une rétinopathie diabétique. Par ailleurs, l’efficacité d’un traitement par bêtablo-quants et IEC semble plus marquée par rapport aux patients non diabétiques [62]. La phase aiguë de l’IDM est souvent caractérisée par une détérioration du contrôle métabolique et l’hyperglycémie est un facteur prédictif de taux de mortalité plus élevé. L’étude DIGAMI a montré qu’un contrôle étroit de la glycémie par insulinothérapie administrée en perfusion durant l’hospitalisation puis par plusieurs injections sous-cutanées quotidiennes en ambulatoire, réduisait la mortalité à long terme chez les patients présentant un DNID [63].
Cas de la femme enceinte
– la diminution de la libération de t-PA physiologique ;
– l’augmentation du taux d’inhibiteur physiologique de t-PA ;
Le traitement est semblable au traitement classique en respectant certaines considérations [64].
Cas de la personne âgée
En termes de reperfusion myocardique, la technique d’ACTP et les thrombolytiques sont utilisables. Toutefois, les techniques d’ACTP, quand elles peuvent être réalisées dans un délai raisonnable, semblent entraîner moins de chocs hémorragiques que la thrombolyse médicamenteuse [65].
Concernant l’aspirine, l’étude ISIS-2 a montré son efficacité quel que soit l’âge du patient. Le bénéfice obtenu avec les bêtabloquants semble plus important chez la personne âgée que chez le sujet plus jeune [65].
Traitement de l’infarctus du myocarde au-delà de 12 heures
Pour un infarctus dont les symptômes ont plus de 12 heures, il n’y a plus d’indication à la revascularisation en urgence car la nécrose myocardique est constituée, sauf en cas d’atteinte antérieure ou d’infarctus étendu où le bénéfice du traitement a été observé jusqu’à 24 heures [1]. Seul un traitement médical est mis en place comprenant l’aspirine, les bêtabloquants et les IEC. L’héparine et les dérivés nitrés peuvent également être envisagés. À distance de l’infarctus du myocarde, une ischémie résiduelle est recherchée par épreuve d’effort ou par exploration angiographique des coronaires.