Chapitre 7. Éléments de radiologie thoracique
Renaud Menten
PLAN DU CHAPITRE
Pour aller plus loin
Introduction
Le poumon et, dans un sens plus large, le thorax restent, malgré l’arrivée régulière de nouvelles techniques d’imagerie, l’un des bastions privilégiés de la radiographie conventionnelle.
La connaissance de la sémiologie de base du bilan radiographique standard (cliché de face et de profil) reste indispensable.
Bases de l’imagerie thoracique
Principes de formation de l’image
Le cliché de thorax standard va reproduire, en deux dimensions, une réalité thoracique tridimensionnelle. Elle va traduire en chaque point d’une surface plane (le film, la plaque phosphore…) le cumul des densités rencontrées (fonction de la masse atomique du milieu rencontré).
Rappel de l’échelle des densités radiographiques
On distingue quatre densités « biologiques » fondamentales : le calcium, l’eau, la graisse et l’air. Elles opposent, dans cet ordre, une résistance décroissante aux rayons X (tableau 7.1).
Nature | Correspondance anatomique | Densité relative | Aspect | Terminologie |
---|---|---|---|---|
Métal | Matériel (prothèses, fils de sternotomie, stents…) | + ++ + | Blanc | Opacité |
Calcium | Os (côtes sternum, clavicules, omoplates) | +++ | ||
Eau | Cœur, vaisseaux | ++ | ||
Graisse | Graisse médiastinale, sous-pleurale, thymus | + | ||
Air | Air | – | Noir | Clarté |
On retiendra que la notion d’opacité qualifie une structure apparaissant blanche et qu’une clarté, traduisant une plus grande transparence, apparaîtra noire : ces notions peuvent sembler paradoxales mais se comprennent aisément si on se rappelle qu’elles se rapportent à un cliché de type « négatif ».
Critères de qualité technique d’une image radiologique
Technique
Sans entrer dans des détails de pure technique radiologique, les clichés réalisés en routine sont des clichés de type haute tension permettant des temps de pose plus courts (réduction du flou cinétique) et une moindre densité apparente des structures pariétales (structures osseuses, ombres mammaires).
Le cliché de face de base, chez l’adulte ou le grand enfant, est réalisé debout, en postéroantérieur (face contre la plaque radiologique). Cette position permet, en projection, de réduire l’agrandissement du cœur. Pour la même raison, le cliché de profil est réalisé côté gauche contre la plaque.
Incidence
La projection des têtes claviculaires symétrique par rapport au rachis est un bon indicateur de la qualité de l’incidence de face (beaucoup plus fiable que la position de la trachée). De profil, l’indicateur est le rachis dorsal dont les apophyses articulaires droites et gauches doivent se superposer et ne former qu’un seul alignement (les arcs costaux postérieurs ne peuvent réaliser une superposition parfaite du fait de l’importante différence d’agrandissement faisant apparaître les arcs gauches, plus éloignés du plan film, plus grands que les arcs droits).
Inspiration
Sauf indication spéciale (recherche de petits pneumothorax ou d’un piégeage aérien sur obstacle bronchique partiel, situations où le cliché en expiration apporte un important complément d’information), les clichés de base doivent être réalisés en fin d’inspiration. Cinq côtes au moins doivent être entièrement visibles, jusqu’à leur extrémité antérieure, la coupole diaphragmatique « coupant » la sixième côte.
Thorax normal
Anatomie radiologique du cliché de thorax normal
Médiastin
C’est dans cette région que se situent l’essentiel des interfaces entre les densités aériques et hydriques, dont la connaissance est indispensable à l’interprétation du cliché de thorax standard. Ces interfaces déterminent les lignes et bords médiastinaux (figure 7.1).
Figure 7.1 |
Bords
Le médiastin est bordé, à droite, de haut en bas, par la veine cave supérieure, la crosse azygos, l’oreillette droite, la veine cave inférieure. À gauche, de haut en bas : le bouton aortique, l’arc moyen gauche (comprend le tronc commun de l’artère pulmonaire et l’auricule gauche), le ventricule gauche.
Lignes
Les lignes médiastinales sont visibles au sein de la silhouette cardiomédiastinale. On note : la ligne paraaortique, les lignes paraspinales, la ligne para-azygoœsophagienne, les lignes médiastinales antérieure et postérieure.
Plèvre
Sur le cliché de thorax normal, les seuls éléments pleuraux visibles sont les accolements des feuillets de plèvre viscérale constitués au sein des scissures. Les grandes scissures droite et gauche ne sont usuellement visibles que sur les clichés de profil. La petite scissure, séparant le lobe supérieur droit du lobe moyen, peut également être visible de face si elle offre une tangence suffisante à l’axe des rayons. Toutes apparaissent comme de fines opacités linéaires.
Il existe également des scissures accessoires, dont la plus fréquente est la pseudo-scissure azygos (située au sommet droit). Un exemple est visible en figure 7.4.
Paroi
Les structures limitant le thorax sont, au contact des plèvres, le sternum, le rachis, les côtes, les structures musculaires intercostales, les clavicules et le diaphragme. Sans contact pleural : les omoplates, les muscles dorsaux et pectoraux, les glandes mammaires, la peau.
Clés d’interprétation du cliché de thorax standard
Par contraste avec l’air pulmonaire, la plupart des pathologies vont se traduire par des opacités anormales.
Le premier travail avant la localisation, en termes de lobe et de segment, est d’établir la topographie intra- ou extrathoracique d’une opacité. Il importe, pour cela, d’avoir une bonne connaissance des diverses images que peuvent présenter les multiples projections possibles de toutes les structures pariétales (mamelons, lésions cutanées, omoplates). Le cliché de profil et une éventuelle scopie seront des adjuvants utiles.
Une fois déterminé le caractère intrapulmonaire d’une anomalie, il faut se rappeler l’anatomie élémentaire de projection radiographique des lobes pulmonaires pour donner une première localisation en termes de lobe (figure 7.2).
Figure 7.2 |
Ce schéma quelque peu simpliste rappelle la projection très crâniale du segment apical des lobes inférieurs droit et gauche, et la projection très caudale, paracardiaque gauche, de la lingula (partie intégrante du lobe supérieur gauche).
Les grands syndromes de la radiologie thoracique
L’ensemble de la pathologie pulmonaire peut, sur le plan radiologique, se décomposer en grands syndromes.
Syndrome médiastinal
Ses signes traduisent la présence d’anomalies de la silhouette médiastinale : présence d’air libre, de liquide ou de tissus anormal.
Opacités médiastinales
Dans cette entité, l’analyse par tomodensitométrie est quasi incontournable. Il importe néanmoins toujours de les reconnaître sur les clichés de routine.
Ces anomalies vont se présenter sous forme d’effacement ou de déplacement de lignes et bords du médiastin décrits en début de chapitre à la figure 7.1. Plusieurs critères renforcent le caractère médiastinal de ces anomalies : une limite nette présentant une convexité vers l’un des poumons, l’absence de limite médiastinale bien définie, des raccords en pente douce, sans angle aigu, avec le médiastin.
Le cliché de profil aide à la localisation en médiastin antérieur (en avant d’un axe crâniocaudal défini par le bord antérieur de la trachée et le bord postérieur du cœur), moyen (jusqu’à 1cm en arrière de la limite antérieure des corps vertébraux) ou postérieur (en arrière du précédent).
Le pneumomédiastin
Se présente sous forme de clartés linéaires bordant les contours cardiaques fusant fréquemment en cervical, réalisant un emphysème sous-cutané à ce niveau.
Le syndrome alvéolaire ou syndrome de comblement alvéolaire
On l’a vu, globalement, les poumons apparaissent comme des clartés séparées par le médiastin, parcourues par les opacités vasculaires de densité hydrique et de bronches dont les branches de division ne sont pas visibles à l’état normal.
Le remplacement de l’air alvéolaire par du liquide ou par des cellules va générer des opacités anormales responsables du syndrome de comblement alvéolaire.
Caractéristiques radiologiques
Opacité à contours flous
L’aspect flou des limites tient à la physiopathologie de la lésion. Le comblement des alvéoles pulmonaires se propage par les multiples communications existant au niveau des structures aériennes distales entre autres entre les alvéoles et entre celles-ci et les bronchioles terminales.