7: Bases de l’échographie mammaire: Techniques, le lexique BI-RADS pour l’échographie et les principales indications

Chapitre 7 Bases de l’échographie mammaire


Techniques, le lexique BI-RADS pour l’échographie et les principales indications



Depuis l’indication initiale de l’échographie mammaire dans la différenciation liquide et solide, les progrès techniques développés depuis plus d’une trentaine d’années ont élargi le champ d’application initiale de cette technique d’imagerie. Nous envisagerons successivement la classification des lésions mammaires à partir de leur sémiologie, leurs indications ainsi que les nouvelles techniques d’imagerie mammaire.



Appareillage et méthodes d’examen


L’échographie mammaire a largement bénéficié des progrès techniques représentés par les sondes électroniques de haute fréquence à focale variable permettant une résolution spatiale optimale avec une pénétration en profondeur satisfaisante ainsi qu’une résolution en contraste suffisante.


Actuellement sont utilisées des sondes en temps réel large bande dont la fréquence est comprise entre 7,5 et 20 MHz permettant une adaptation de la fréquence à l’épaisseur du sein et à la région explorée, l’exploration standard s’effectue en échelle de gris et en 2D. D’autres techniques sont utilisées : le doppler couleur et plus récemment l’élastographie, le mode 3D et le balayage automatisé. Sur les appareillages, deux technologies sont implémentées : l’imagerie d’harmonique et l’imagerie compound. Dans la première, la fréquence de réception est un multiple de la fréquence d’émission et dans la seconde les signaux sont recueillis sous différents angles par rapport au faisceau ultrasonore conventionnel. L’imagerie d’harmonique améliore la résolution spatiale et, en contraste, réduit les artéfacts tels les échos de réverbération situés en arrière de la paroi antérieure des kystes et les artéfacts de paroi en améliorant la résolution latérale, les modifications postérieures du faisceau sont ainsi mieux identifiés. L’imagerie compound améliore le rapport signal/bruit et donc la détection des lésions, l’analyse des marges et de l’échostructure interne des lésions est optimisée mais l’exploration des lésions profondes est pénalisée et les modifications du faisceau postérieur sont atténuées.


L’examen échographique s’effectue patiente en décubitus dorsal, les bras au-dessus de la tête de façon à dégager le quadrant supéro-externe, le prolongement axillaire du sein et le sillon sous-mammaire. Quand les seins sont volumineux, il y a intérêt à positionner la patiente en décubitus légèrement hétérolatéral pour examiner les quadrants externes et en décubitus légèrement homolatéral pour examiner les quadrants internes. La région rétro-aréolaire nécessite quelquefois l’utilisation d’une couche plus épaisse de gel sans qu’il soit nécessaire d’y adjoindre un matériel d’interposition. Des coupes longitudinales et transversales sont couplées autour de l’aréole à des coupes radiées « en rayon de roue » selon l’axe des galactophores et à des coupes antiradiaires perpendiculaires aux précédentes aidant à la caractérisation des processus endocanalaires.


Des mouvements de rotation de la sonde doivent être réalisés pour différencier les anomalies des structures normales et analyser précisément les modifications du tissu environnant d’une tumeur (refoulement ou infiltration) et sa taille. La compression est utile permettant d’éliminer de faux cônes d’ombre et le comportement d’une lésion (mobilité, déformation d’une masse, mobilité des échos internes). Le réglage du gain et des zones focales adaptées à la profondeur est fondamental.


L’examen des aires ganglionnaires axillaires, sus- et sous-claviculaire est complémentaire de l’exploration ultrasonore du sein. Il s’effectue par des coupes axiales transverses et longitudinales le long des axes vasculaires.



Aspects normaux


En échographie, on peut différencier les différentes couches suivantes : la peau et le mamelon, la graisse sous-cutanée et préglandulaire, le tissu glandulaire, la graisse prépectorale, le muscle pectoral, les côtes et les muscles intercostaux.


Le revêtement cutané présente un aspect en double ligne de 1 à 2 mm d’épaisseur et peu échogène ; l’aréole a un aspect nodulaire ovalaire contenant des échos dispersés ; en arrière d’elle, le faisceau ultrasonore est atténué du fait de la fibrose périgalactophorique.


La graisse périmammaire est faiblement échogène en opposition avec le tissu fibroglandulaire très échogène. En décubitus dorsal, l’épaisseur de l’espace rétroglandulaire et celle du muscle pectoral sont réduites contrairement à l’aspect mammographique. En arrière, les plans musculaires réalisent des structures lamellaires échogènes et les côtes sont responsables d’une importante atténuation du faisceau ultrasonore.


Le parenchyme glandulaire présente une échogénicité variant avec l’âge et la composition individuelle. Chez la femme jeune et pendant la grossesse et la lactation, l’aspect est le plus souvent hypoéchogène et homogène ; en période d’activité génitale, le tissu glandulaire présente un aspect hyperéchogène et homogène d’épaisseur variable selon l’âge et les patientes. Avec l’âge, le parenchyme devient inhomogène du fait de l’involution graisseuse créant des structures lobulaires hypoéchogènes pseudo-nodulaires dont le diagnostic avec une lésion organique peut être aisément effectué par le raccordement aux structures graisseuses environnantes, l’absence de vascularisation en doppler couleur et par l’élasticité sous la pression de la sonde. Avec l’involution lipomateuse l’échostructure est hypoéchogène entrecoupée de structures hyperéchogènes en rapport avec les fibres conjonctives et le parenchyme résiduel. Lorsque le mode d’involution fibreux prédomine, l’échostructure est hyperéchogène et hétérogène. La classification BI-RADS de l’ACR décrit quatre types d’échostructures de base :



En effet, en échographie mammaire, certains aspects sont trompeurs : lobule graisseux isoéchogène et pseudo-nodulaire, ombre acoustique isolée générée par l’entrecroisement des structures fibreuses du ligament de Cooper, placard d’échostructure hétérogène mal limité atténuant le faisceau ultrasonore lié à des zones de fibrose non pathologique difficilement analysable lorsque l’échostructure mammaire est hétérogène plus particulièrement dans les seins jeunes et dans ceux dont le parenchyme est dense et hétérogène en mammographie (grade 3 et grade 4 du lexique descriptif échographique de l’ACR).



Analyse sémiologique des lésions mammaires


L’analyse séméiologique prend en compte plusieurs aspects, certains sont spécifiques à l’échographie, telles l’échostructure ou l’orientation, d’autres sont communs avec la mammographie et l’IRM, tels la forme ou le contour des masses. Sont ainsi décrits dans le lexique de l’ACR :



la forme : elle peut être ronde, ovale ou irrégulière lorsqu’elle n’est ni ronde, ni ovale (fig. 7.1 et 7.2) ;


l’orientation parallèle ou non au revêtement cutané. L’orientation horizontale (plus large que haute) caractérise certaines masses bénignes notamment les fibroadénomes, cependant de nombreux cancers ont une telle orientation ; à l’inverse, les fibroadénomes ne présentent pratiquement jamais un développement sagittal ;


les contours : circonscrits (nets au moins sur 75 % des bords), plus souvent le fait des formes rondes ou ovales, ou non circonscrits (Fig. 7.1 à 7.4). Ces derniers sont décrits comme : indistincts lorsque la limite avec le tissu environnant n’est pas définie, anguleux formant des angles le plus souvent aigus, microlobulés lorsque les lobulations sont très petites (1–2 mm) et nombreuses (> 3), spiculés. Le terme irrégulier concerne uniquement la forme ;


les limites ou la zone de transition : présence ou non d’une ligne échogène fine (capsule) ou d’un halo échogène épais retrouvé dans certains cancers et abcès (fig. 7.2 et 7.5) ;


l’échostructure qui doit s’apprécier comparativement à celle de la graisse : elle peut être anéchogène, hypo-, iso- ou hyperéchogène, solide (homogène ou hétérogène), complexe avec une composante liquidienne ou des calcifications (Fig. 7.5 à 7.7) ;


le faisceau acoustique postérieur qui peut être non modifié, renforcé ou atténué de manière totale ou partielle (calcification d’un fibroadénome). Si le renforcement est associé au kyste, l’atténuation est liée à la fibrose néoplasique ou non (cicatrice, mastopathie fibreuse) ; les deux (renforcement et atténuation) peuvent être associés : évolution fibreuse d’une collection postopératoire (fig. 7.8) ;


les tissus environnants :







l’existence de calcifications visualisées sous forme de foyers échogènes. Elles sont d’autant mieux visibles et suspectes qu’elles sont contenues dans une masse hypoéchogène. Du fait de leur taille, les microcalcifications peuvent ne pas engendrer d’atténuation du faisceau ultrasonore (voir fig. 7.7 et 7.8) ;


la vascularisation : l’appréciation de la vascularisation est, lorsqu’elle existe, décrite selon son siège intra- ou périlésionnel ou globalement majorée dans le parenchyme environnant (voir fig. 7.6).











Classification des anomalies échographiques


Les lésions visualisées en échographie sont répertoriées selon la classification BI-RADS échographique de l’ACR, publiée en France en 2004 d’après la première édition américaine. Elle est l’aboutissement de multiples séries de la littérature qui ont évalué la valeur des différents signes échographiques dont les plus puissants sont la forme et les contours des lésions et leur rapport avec le tissu environnant.


La valeur prédictive positive est la plus élevée pour l’irrégularité de la forme et des contours. La forme ovalaire, la capsule fine échogène, la faible lobulation, l’hyperéchogénicité (lorsqu’elle est homogène) sont des signes qui ont chacun une valeur prédictive négative de plus de 90 % ; en revanche, l’échostructure iso- ou hypoéchogène, le renforcement ou l’atténuation du faisceau acoustique ne sont pas significatifs.


La classification BI-RADS échographique réduit les variations interobservateurs par l’apprentissage rigoureux de cette séméiologie. Les discordances intéressent moins l’appréciation de l’axe facile à mesurer que l’échostructure, l’échogénicité ou la capsule. Il est important de toujours corréler les anomalies échographiques aux images mammographiques (le plus souvent par un marquage plombé à la peau) et dans aucun cas l’échographie ne doit pallier aux insuffisances techniques de la mammographie. Ainsi, les tumeurs sont classées selon le lexique BI-RADS de l’ACR en quatre catégories décrites ci-dessous.


En catégorie ACR 2 constamment bénins :



Toutes ces lésions sont bénignes et ne nécessitent ni surveillance, ni procédure complémentaire.


En catégorie ACR 3, les lésions probablement bénignes dont la probabilité de malignité est inférieure à 2 % :



les kystes compliqués : on décrit ainsi les kystes faiblement échogènes pour lesquels tous les autres signes de kyste sont présents. Quand existe un niveau liquide ou des échos internes mobiles liés à la présence de débris la lésion est classée BI-RADS 2, de même lorsque les kystes compliqués sont multiples uni- ou bilatéraux. Pour Berg, parmi 7 473 échographies de dépistage 12 % des 517 kystes compliqués rapportés sont des lésions solides avec 0,42 % de malignité chez deux patientes à risque (cancer controlatéral) (fig. 7.4 et 7.9). De ce fait, de tels kystes sont classés ACR 3 et doivent faire l’objet d’une surveillance rapprochée, toute modification (> 20 % du diamètre en 6 mois) devant conduire à la pratique d’une aspiration et d’un examen cytologique et histologique, en cas de produit sanglant en raison du risque exceptionnel de papillome (avec mise en place d’un clip), d’un examen bactériologique en cas de pus et si la lésion n’est pas liquide, d’une histologie. Lorsque la lésion est palpable, le taux de malignité est identique et ce caractère ne justifie donc pas la réalisation d’un prélèvement ;


les nodules de métaplasie cylindrique des mastopathies fibrokystiques (fig. 7.10) : ils sont constitués de microkystes groupés anéchogènes de taille individuelle < 3 mm. Ces lésions sont bénignes mais la surveillance est recommandée si elles surviennent en postménopause, sont de petite taille et de siège profond. Si les marges ne sont pas circonscrites, si l’axe est vertical, si la composante solide est prédominante ou si la lésion se majore, ces lésions sont classées BI-RADS 4 et doivent être biopsiées [1,2] ;


les nodules solides probablement bénins : de forme régulière et d’axe horizontal dont la zone de transition est fine et lisse, et les contours nets ou faiblement lobulés. En l’absence de facteurs de risque, lorsque l’imagerie mammographique est concordante (opacité ACR 3 ou à contours masqués ACR 4 en mammographie) compte tenu de la probabilité faible de cancer, la surveillance à 4 mois puis à 1 an permet le diagnostic des faux négatifs variant entre 0,7 et 0,1 % selon leur caractère unique ou multiple ; les cancers surviennent dans les trois quarts des cas dans la première année et sont de bon pronostic [3].




En catégorie ACR 4 : les lésions indéterminées dont la VPP est comprise entre 2 et 94 %. Elles sont représentées par :



les kystes complexes : il s’agit de kystes qui présentent des masses solides internes, des nodules pariétaux, des septa épais ou des parois épaisses irrégulières (≥ 5 mm) faisant suspecter une lésion solide de nature néoplasique présente dans des un tiers des cas. Il s’agit le plus souvent de cancers papillaires non invasifs ou canalaires invasifs de haut grade dont la composante liquidienne est en rapport avec la nécrose ; les cancers médullaires peuvent également présenter un tel aspect. Parmi les lésions bénignes, les lésions kystiques dont les parois sont épaisses avec ou sans cloisonnement correspondent à des lésions fibrokystiques (souvent avec métaplasie apocrine), des kystes inflammatoires ou rompus, des abcès, des nodules de cytostéatonécrose, des hématomes. Les masses intrakystiques correspondent le plus souvent à des lésions papillomateuses. Des microkystes sont rarement présents dans les fibroadénomes plus fréquents dans les adénomes lactants ou les tumeurs phyllodes. Les kystes complexes doivent être biopsiés, la macrobiopsie peut être utile pour un échantillonnage correct lorsque la partie solide est de petite taille et difficile à cibler d’autant que la composante liquidienne risque de disparaître lors de la microbiopsie. Un clip doit être laissé en place si la lésion n’est plus visible après la biopsie ou si elle doit être corrélée à d’autres imageries (fig. 7.6, 7.11 et 7.12) ;


les nodules solides qui n’ont pas tous les caractères échographiques de bénignité présentant un critère de suspicion : forme et/ou contours irréguliers, axe non parallèle au plan cutané, hétérogénéité de l’échostructure (fig. 7.13) ;


les distorsions de l’échostructure de diagnostic échographique difficile, identifiées le plus souvent lors d’examen de deuxième intention post-IRM (fig. 7.14).


Stay updated, free articles. Join our Telegram channel

Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 7: Bases de l’échographie mammaire: Techniques, le lexique BI-RADS pour l’échographie et les principales indications

Full access? Get Clinical Tree

Get Clinical Tree app for offline access