15: L’interventionnel: Pierre angulaire de la prise en charge mammaire

Chapitre 15 L’interventionnel


Pierre angulaire de la prise en charge mammaire



Les progrès de l’imagerie mammaire ont entraîné la découverte fortuite de nombreuses images infracliniques et une augmentation des biopsies chirurgicales pour des lésions souvent bénignes.


Le développement de la sénologie interventionnelle a permis de limiter les interventions chirurgicales en agissant à trois niveaux :



La sémiologie interventionnelle fait l’objet de recommandations des sociétés savantes, en particulier de la société européenne d’imagerie du sein (EUSOBI). EUSOBI (annexe 15.1).



Bilan préalable


Le geste interventionnel est au mieux décidé lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). La CNAM en a d’ailleurs fait une condition pour la prise en charge des macrobiopsies (1er avril 2004). Cette décision collégiale est suivie d’un entretien avec la patiente permettant de :



Toutefois, pour les gestes les plus légers effectués aux décours d’un bilan sénologique diagnostique, un simple interrogatoire pourrait suffire.




Communication


La communication avec les différents acteurs est indispensable et elle doit être réciproque, avant, pendant et après le geste interventionnel.



Il faut apporter aux médecins traitants (médecin référent, gynécologue…) toutes les informations pratiques sur les techniques nouvelles, les résultats obtenus et les conclusions des RCP afin de les faire participer à l’information, à la prise en charge et au suivi ultérieur de leur patiente.


La collaboration avec le pathologiste et le chirurgien doit être étroite. Le radiologue doit parfaitement connaître leurs besoins et les techniques qu’ils utilisent.


Il doit leur fournir des renseignements complets et concis grâce à un compte rendu détaillé.


Il doit ainsi préciser au pathologiste les différents éléments suivants :



Le pathologiste doit fournir un compte rendu simple et intelligible en utilisant une nomenclature reconnue (Tavassoli, Rosen), préciser si les prélèvements sont contributifs et représentatifs de l’image radiologique et ses éventuels doutes diagnostiques [1].


Enfin, la communication avec la patiente est indispensable au bon déroulement de l’examen. En effet, le contexte d’anxiété largement présent en sénologie est exacerbé lors des gestes interventionnels. La consultation pré-interventionnelle permet de rencontrer la patiente, d’expliquer et de répondre à ses interrogations, sans fournir un excès de détails qui pourraient nuire à la compréhension et en évitant certains termes inquiétants (harpon, tir…). Le consentement libre et éclairé indispensable à toute recherche biomédicale (article L.-209-2, 209-4,209-9 du Code de la santé publique, 1988) a été étendu à tout acte thérapeutique (article 35 du Code de déontologie, 1995). L’information doit être simple, intelligible et loyale.


Au moment du geste, l’ambiance doit être détendue et la patiente prévenue juste avant tout événement désagréable ou pouvant la surprendre (piqûre, injection anesthésique, tir…). En ne montrant pas le matériel utilisé et en travaillant rapidement, on évite les malaises et les mouvements intempestifs, et on limite ainsi les complications et les échecs.



Conditions de réalisation




Anesthésie


Les anesthésiques locaux sont systématiquement utilisés pour les biopsies, mais rarement pour les ponctions ou les repérages. Ils entraînent un blocage réversible de l’influx nerveux par action sur la perméabilité au sodium des membranes excitables.


L’injection doit être lente avec des tests d’aspiration répétés. L’action est instantanée mais, pour les macrobiopsies avec radiofréquence, il est nécessaire d’attendre quelques minutes avant de déclencher la progression du panier. Elle dure de 1 à 5 heures.


La Xylocaïne®, habituellement utilisée par les radiologues, existe en plusieurs solutions : pure ou adrénalinée ; concentration à 0,5 %, 1 % et 2 %.


Les effets secondaires sont cardiovasculaires (hypotension, bradycardie, trouble du rythme, fibrillation auriculaire), respiratoires (dépression, apnée) et neurologiques (acouphènes, dysphonie, surdité, convulsions). Les allergies sont rares mais on peut utiliser de l’Articaïne® en cas d’allergie aux aminosamides (Xylocaïne®…), et de la Xylocaïne® pure en cas d’allergie au conservateur.


Il faut respecter les contre-indications et les doses (tableau 15.1), surtout quand elles sont cumulées. La concentration est augmentée par l’hypovolémie ou l’insuffisance cardiaque et les formes concentrées majorent le bloc moteur. En cas de surdosage (risque de convulsions généralisées et d’arrêt cardiorespiratoire), seul un traitement symptomatique existe.






Hygiène (fig. 15.1)


Le nettoyage et la désinfection de la salle et des systèmes de guidage (échographe, table dédiée…) doivent être quotidiens, tandis que le matériel non jetable (sonde, potter, pistolet de biopsie…) est désinfecté avant chaque patiente. Le matériel jetable est privilégié, dans la mesure du possible. La désinfection cutanée est effectuée largement du centre vers la périphérie. Les antiseptiques halogénés iodés (Bétadine®, alcool iodé…) provoquant de rares allergies liées au conservateur (povidone) peuvent être suppléés par d’autres familles d’antiseptiques (chlorhexidine, Dakin®…).



Après s’être soigneusement lavé les mains, le radiologue met des gants, éventuellement stériles. En cas d’allergie au latex, il existe des gants sans latex, plus chers et moins souples, parfois moins efficaces comme barrière contre les germes (Vinyl).


L’utilisation d’une poche d’interposition stérile pour l’échographie n’est pas indispensable. Un circuit d’élimination des déchets doit être mis en place : le matériel souillé est jeté dans des conteneurs de taille adaptée, afin que les aiguilles soient introduites facilement et ne dépassent pas. Ces collecteurs de déchets médicaux sont très régulièrement remplacés et traités par des entreprises spécialisées.







Suivi et organisation


Quel que soit le geste effectué, il sera nécessaire de suivre la patiente afin de connaître les résultats d’une éventuelle intervention chirurgicale, traquer les sous-évaluations lésionnelles, discordances, cancers manqués ou complications, et apprécier la tolérance.


Si la RCP préprocédure est parfois difficile à suivre en pratique, la RCP postinterventionnel permet de discuter des dossiers complexes et de proposer une prise en charge collégiale en se référant aux recommandations officielles [5, 6]. Ces différentes RCP doivent être composées au minimum d’un radiologue, d’un anatomopathologiste et d’un chirurgien [7] et faire l’objet d’un compte rendu où figurent les noms des participants et la signature du médecin responsable. Les directives de la circulaire DHOS/SDO/2005/101 de février 2005 relative à l’organisation des soins en cancérologie précisent que « chaque établissement de santé exerçant l’activité de traitement du cancer doit garantir une organisation appuyée sur la pluridisciplinarité, l’utilisation des référentiels validés et surtout un travail en réseau ». L’enregistrement des différentes données de l’examen (indications, procédure, résultats et suivi) est souhaitable, permettant d’analyser et éventuellement publier ses résultats, évaluer ses pratiques, corriger les dérives et les erreurs, améliorer ainsi la qualité de la prise en charge et si possible participer à la démarche d’accréditation des médecins dans la pratique des activités à risque mise en place par la HAS depuis 2007.



Les différents types de prélèvements




Prélèvement anatomopathologique (tableau 15.2)




Histologie


Il s’agit d’échantillons tissulaires, souvent multiples, obtenus par biopsie à partir du tissu cutané (recherche de lymphangite carcinomateuse), ganglionnaire ou le plus souvent mammaire. Leur poids varie de quelques milligrammes à grammes selon le calibre de la sonde (fig. 15.2).



Les manipulations doivent être limitées et délicates. Les prélèvements sont au mieux placés dans des cassettes séparées pour être fixés (formol) puis inclus en paraffine à 60 °C. Après refroidissement, on dispose de blocs compacts qui peuvent alors être découpés au microtome. Les coupes sont étalées, colorées et l’étude portera sur plusieurs niveaux, permettant de fournir tous les renseignements nécessaires à la prise en charge d’une tumeur : caractère infiltrant, différenciation, grade, récepteurs hormonaux, Ki67, HER2.


Les faux positifs sont exceptionnels. Les limites sont liées à l’absence d’analyse de toute l’image radiologique (exérèse incomplète) ou du tissu environnant (lésion périphérique sans traduction radiologique). Les performances diagnostiques s’améliorent avec le nombre d’échantillons cytologiques ou histologiques. Ainsi pour les foyers de microcalcifications, un nombre suffisant de prélèvements (≥ 6) avec un calibre minimal (≥ 14 G) est nécessaire.


La biopsie chirurgicale, elle-même, présente un taux de faux négatifs de 0,5 à 22 % avec une moyenne de 2,5 % et cela malgré le repérage et la radiographie de la pièce opératoire. Ses indications diagnostiques sont actuellement limitées (20 %) : lésion inférieure à 5 mm, désorganisation architecturale, galactorragie, impossibilité technique de biopsie ou après biopsie (échec, discordance ou lésion frontière).


L’analyse extemporanée n’est pas recommandée [5, 810] pour :


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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 15: L’interventionnel: Pierre angulaire de la prise en charge mammaire

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