5: Les éléments à assembler dans le soutien

Chapitre 5 Les éléments à assembler dans le soutien



L. Schmitt


Dans le cadre d’une psychothérapie de soutien figurent des pièces importantes, comparables aux rouages d’une montre. L’assemblage de ces pièces, variable d’une situation à une autre, permet au processus de se structurer, de fonctionner.


Il est étonnant de remarquer combien ces rouages font si peu l’objet de descriptions. Leur connaissance semble implicite et ils paraissent acquis, comme si la psychothérapie de soutien représentait une donnée bien connue dans la pratique de la psychothérapie. Or, décrire ces rouages semble indispensable ; ils concernent trois secteurs différents que sont la compréhension générale du cas du patient, l’amélioration du soutien et la restauration de mécanismes de défense. Bien sûr, ces rouages ne sont pas les seuls. Leur abord en tant qu’outils techniques de thérapie de soutien, de façon analytique, permet ensuite de les intégrer dans une stratégie plus élaborée se déployant sur plusieurs entretiens.



Les outils de la compréhension



Nommer le problème


Lorsqu’un patient éprouve une souffrance, il peut être utile de lui indiquer s’il s’agit d’une situation de crise, d’un débordement de ses défenses cognitives ou émotionnelles ou si une affection mentale peut être suspectée. Dans le premier cas, le soutien se déploiera sur quelques jours ou quelques semaines. Dans le second, la crainte d’une rechute ou d’une récidive existe, on se trouve dans le contexte d’une maladie. Nommer le problème indique une hiérarchisation dans les difficultés : attitude ou comportement inadaptés, difficultés de choix entre plusieurs solutions, problèmes pour gérer ses émotions ou affronter une tristesse. On peut évoquer aussi des entraves à l’autonomie, à l’indépendance et à la réciprocité relationnelle. Affronter un problème identifié revient à améliorer le sentiment de contrôle du patient pour lui permettre d’exercer une action et une emprise. Le sujet peut se montrer actif dans la résolution. Donner un nom, formuler un diagnostic s’inscrivent dans la démarche médicale. On a longtemps hésité, par crainte de blesser ou de meurtrir un patient, à lui annoncer le diagnostic de schizophrénie – on parlait de psychose ou de trouble très grave de la personnalité. Un vrai soutien consiste à expliquer, lors de l’annonce, ce qu’est la maladie schizophrénique : elle peut connaître des rémissions et des améliorations. Les symptômes peuvent se réduire au point, dans certains pays, de remettre en question le diagnostic même de schizophrénie.




La confrontation


Elle vise à mettre en lumière, à expliciter des sentiments, des idées ou des comportements que le patient n’exprime pas au premier abord ou qu’il évite. Il existe différents types de confrontation. Le premier a lieu quand le sujet est confronté à ses propres sentiments, qu’il laisse transparaître de façon assez manifeste sans toutefois les nommer. L’envie, la jalousie, la rancœur, l’agressivité, la haine, etc., peuvent ainsi infiltrer le discours du patient sans que ses sentiments soient reconnus ou nommés. La possibilité de les évoquer, d’en discuter, de façon symbolique ou dans le contexte, permet une désescalade ou les rend moins honteux.


Une autre forme de confrontation se déroule lorsque le thérapeute donne son opinion.



Dans ce cas, le thérapeute ne s’est pas arrêté sur l’aspect de dépression mais a rendu visible une stratégie d’évitement et d’immobilité. Une autre forme de confrontation, de l’ordre du déplacement, invite le patient à se mettre à la place de son conjoint, d’un proche, en lui demandant d’imaginer les réactions de ce dernier : « Comment réagirait votre épouse si elle écoutait ce que vous venez de dire… ? » Cette confrontation amène le sujet à prendre en compte, pour l’approfondir, le point de vue d’autrui.



L’interprétation


Elle se manie avec prudence, de façon limitée, dans la psychothérapie de soutien. Alors que la confrontation met en lumière des sentiments, des idées ou des comportements, l’interprétation donne une explication, un sens aux mêmes éléments. Elle effectue un lien entre des pensées, des sentiments ou des comportements actuels avec des événements du passé, des connexions avec les parents ou avec le processus thérapeutique actuel. Dans la psychothérapie de soutien, l’interprétation est plus proposée ou testée que réellement affirmée : « Ne pourrait-on imaginer que la signification soit celle-ci… Une explication parmi d’autres ne pourrait-elle être… Que penseriez-vous de l’expliquer de cette façon… ? » Cette prudence, on a pu la résumer ainsi : « On bat le fer quand il est froid. » Alors que les thérapeutes psychodynamiques utiliseront l’interprétation sur du matériel récent, en thérapie de soutien on attend, parfois en reprenant la thématique lors de l’entretien suivant, que le patient ait refroidi son niveau émotionnel. Une interprétation peut être préparée, annoncée : « Dans vos propos s’exprime toute une série de sentiments difficiles à l’égard de votre mère qu’il n’est pas facile d’aborder maintenant. Peut-être faudra-t-il en reparler un peu plus tard quand vous vous sentirez plus prêt… »


Certaines interprétations concernent des mécanismes de défense. Leur repérage peut être long et nécessite plusieurs rencontres. Ce type d’interprétation, en psychothérapie de soutien, doit être soigneusement pesé afin de connaître son caractère bénéfique ou néfaste pour le patient. Certaines interprétations trop rapides, rejetées par le patient ou incompréhensibles pour lui, sont bien sûr à éviter. Évoquer une homosexualité latente, une haine vis-à-vis d’un enfant… confronte le patient à des explications qu’il peut rejeter de façon absolue. Cette déstabilisation l’éloigne du soutien. Cependant, une forme prudente revient à questionner : « Est-ce qu’il n’y a pas d’autres émotions, d’autres pensées moins avouables… ou inavouables ? »

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Apr 23, 2017 | Posted by in MÉDECINE COMPLÉMENTAIRE ET PROFESSIONNELLE | Comments Off on 5: Les éléments à assembler dans le soutien

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