Chapitre 5 Les éléments à assembler dans le soutien
Dans le cadre d’une psychothérapie de soutien figurent des pièces importantes, comparables aux rouages d’une montre. L’assemblage de ces pièces, variable d’une situation à une autre, permet au processus de se structurer, de fonctionner.
Les outils de la compréhension
Nommer le problème
Lorsqu’un patient éprouve une souffrance, il peut être utile de lui indiquer s’il s’agit d’une situation de crise, d’un débordement de ses défenses cognitives ou émotionnelles ou si une affection mentale peut être suspectée. Dans le premier cas, le soutien se déploiera sur quelques jours ou quelques semaines. Dans le second, la crainte d’une rechute ou d’une récidive existe, on se trouve dans le contexte d’une maladie. Nommer le problème indique une hiérarchisation dans les difficultés : attitude ou comportement inadaptés, difficultés de choix entre plusieurs solutions, problèmes pour gérer ses émotions ou affronter une tristesse. On peut évoquer aussi des entraves à l’autonomie, à l’indépendance et à la réciprocité relationnelle. Affronter un problème identifié revient à améliorer le sentiment de contrôle du patient pour lui permettre d’exercer une action et une emprise. Le sujet peut se montrer actif dans la résolution. Donner un nom, formuler un diagnostic s’inscrivent dans la démarche médicale. On a longtemps hésité, par crainte de blesser ou de meurtrir un patient, à lui annoncer le diagnostic de schizophrénie – on parlait de psychose ou de trouble très grave de la personnalité. Un vrai soutien consiste à expliquer, lors de l’annonce, ce qu’est la maladie schizophrénique : elle peut connaître des rémissions et des améliorations. Les symptômes peuvent se réduire au point, dans certains pays, de remettre en question le diagnostic même de schizophrénie.
Clarifier
La clarification consiste à organiser les pensées et les propos du patient, à vérifier que l’on partage bien une compréhension similaire des faits ou à préciser quelques points pour s’assurer que l’on a correctement perçu l’intention du patient. Elle atteste de la concentration du thérapeute sur les propos de l’entretien et de leur utilisation dans le processus de soins. Lorsqu’un patient signale tout une série de faits du quotidien – avoir des factures en retard, ne pas avoir réglé sa pension alimentaire, ne pas avoir réparé sa voiture, avoir oublié l’anniversaire de ses enfants –, le thérapeute peut clarifier cet ensemble de données par un constat qui peut être : « Vous avez des difficultés d’organisation ou vous avez été surchargé au point de ne plus pouvoir vous organiser… » De façon analogue, à l’évocation des difficultés au niveau du travail – surcharge d’activité, conflit entre les employés, tensions vis-à-vis du supérieur hiérarchique –, la clarification amenera les questions suivantes : « Est-ce le climat de l’entreprise qui se détériore, ou percevez-vous les situations autrement, ou bien pensez-vous que quelque chose est dirigé contre vous ? » La clarification met d’autres mots et permet une meilleure orientation dans un ensemble de difficultés.
La confrontation
Elle vise à mettre en lumière, à expliciter des sentiments, des idées ou des comportements que le patient n’exprime pas au premier abord ou qu’il évite. Il existe différents types de confrontation. Le premier a lieu quand le sujet est confronté à ses propres sentiments, qu’il laisse transparaître de façon assez manifeste sans toutefois les nommer. L’envie, la jalousie, la rancœur, l’agressivité, la haine, etc., peuvent ainsi infiltrer le discours du patient sans que ses sentiments soient reconnus ou nommés. La possibilité de les évoquer, d’en discuter, de façon symbolique ou dans le contexte, permet une désescalade ou les rend moins honteux.
Une autre forme de confrontation se déroule lorsque le thérapeute donne son opinion.
L’interprétation
Certaines interprétations concernent des mécanismes de défense. Leur repérage peut être long et nécessite plusieurs rencontres. Ce type d’interprétation, en psychothérapie de soutien, doit être soigneusement pesé afin de connaître son caractère bénéfique ou néfaste pour le patient. Certaines interprétations trop rapides, rejetées par le patient ou incompréhensibles pour lui, sont bien sûr à éviter. Évoquer une homosexualité latente, une haine vis-à-vis d’un enfant… confronte le patient à des explications qu’il peut rejeter de façon absolue. Cette déstabilisation l’éloigne du soutien. Cependant, une forme prudente revient à questionner : « Est-ce qu’il n’y a pas d’autres émotions, d’autres pensées moins avouables… ou inavouables ? »