Chapitre 4 Techniques particulières
Les nouvelles technologies ont contribué à l’amélioration du diagnostic des agents infectieux et des tumeurs ainsi qu’à la classification des tumeurs, surtout les lymphomes non hodgkiniens, les tumeurs de l’enfant et les sarcomes. L’utilisation d’un panel plus étendu d’anticorps monoclonaux actifs sur des coupes en paraffine ; les études cytogénétiques en biologie moléculaire, incluant l’étude cytogénétique standard ; l’hybridation in situ en fluorescence multicolore (fluorescence in situ hybridization [FISH] ; la réaction de polymérisation en chaîne (polymerase chain reaction [PCR]) et ses nombreuses variantes ; la FISH spécifique d’un locus ; et le développement des techniques de haute résolution, incluant les profils d’expression génomiques par puces à ADN, la protéomique et les puces d’hybridation génomique comparative (comparative genomic hybrization [CGH]) permettent un diagnostic plus précis et une définition plus précise des biomarqueurs intéressants pour évaluer le risque et déterminer le pronostic. Le chirurgien ophtalmologique est responsable de l’obtention d’un fragment de tissu suffisant et de son acheminement correct vers l’anatomopathologiste (avec une pièce orientée et si nécessaire du tissu frais ou congelé). Voir le tableau 4-1 pour la liste des points importants pour soumettre un prélèvement à l’examen anatomopathologique.
1. Remplir un imprimé de demande d’examen
2. Soumettre le spécimen dans un container fermé avec :
3. Un dessin du site exact de la biopsie pour l’orientation des berges (marges d’exérèse pour les lésions palpébrales, résections en bloc de la conjonctive, tumeurs de l’iris, du corps ciliaire, de la sclère)
Coupes congelées
1. Si possible, prévenir l’anatomopathologiste en amont
2. Remplir un formulaire spécifique pour les études en congélation en spécifiant les demandes particulières telles que :
3. Schéma de la lésion indiquant ses limites et son orientation
4. Marquage du tissu (encre ou suture) pour l’orienter selon le schéma (pour les berges)
Biopsie-aspiration à l’aiguille fine et cytologie
1. Communication préalable avec l’anatomopathologiste pour discuter
Étude en cytométrie de flux
Techniques de biologie moléculaire et de microscopie électronique
Immunohistochimie
Les anatomopathologistes qui font un diagnostic profitent de la propriété qu’a une cellule donnée d’exprimer des antigènes spécifiques. La coloration immunohistochimique habituellement utilisée en anatomie pathologique ophtalmique est obtenue parce qu’un premier anticorps se fixe sur un antigène spécifique situé en surface ou à l’intérieur de la cellule et parce que cet anticorps est lié à un colorant, habituellement par l’intermédiaire d’un second anticorps (fig. 4-1). La couleur produite par les colorants généralement utilisés est brune ou rouge sur les coupes, en fonction du colorant utilisé (fig. 4-2). Le colorant rouge est particulièrement utile quand on travaille sur des tissus oculaires pigmentés et des mélanomes, car il diffère du pigment mélanique brun (voir fig. 4-7).
Figure 4-1 Représentation shématique de la méthode immunohistochimique. 1. L’antigène cellulaire est reconnu par l’anticorps primaire spécifique. 2. Un anticorps secondaire, 3, dirigé contre l’anticorps primaire, réagit avec le complexe enzymatique pour créer le chromogène. 4. Le produit final permet la visualisation des cellules qui contiennent l’antigène.
(Remerciements au Dr Patricia Chévez-Barrios.)
Figure 4-2 Un carcinome métastatique à l’orbite visualisé par H&E (A) montre de discrètes caractéristiques épithéliales. B. L’anticorps lié à la chromogranine met en évidence la nature neuroendocrine des cellules.
(Remerciements au Dr Patricia Chévez-Barrios.)
• la cytokératine pour les lésions composées de cellules épithéliales (adénome, carcinome) ;
• la desmine, la myoglobine ou l’actine pour les lésions avec des muscles lisses ou des muscles striés (léiomyome, rhabdomyosarcome) ;
• la protéine S 100 pour les lésions d’origine neuroectodermique (schwannome, neurofibrome, mélanome) ;
• l’anticorps HMB-45 et le Melan-A pour les lésions mélanocytaires (nævus, mélanome).
• la chromogranine et la synaptophysine pour les lésions neuroendocrines (métastase de tumeur carcinoïde [voir fig. 4-2], carcinome à petites cellules) ;
• l’antigène commun aux leucocytes pour les lésions d’origine hématopoïétique (leucémie, lymphome) ;
• les antigènes CD pour sous-typer les cellules blanches du sang ;
• Her2Neu et c-Kit pour le pronostic et le traitement (cancer du sein métastatique, mastocytose).
Ces antigènes varient dans leur spécificité et leur sensibilité. Les spécificités et sensibilités de nouveaux anticorps sont constamment évaluées (pour des exemples, consulter le site Internet d’immunohistochimie www.immunoquery.com). Des machines automatisées et des techniques de purification des antigènes sont utilisées pour améliorer la spécificité et le renouvellement des antigènes.
Cytométrie de flux, biologie moléculaire et microscopie électronique
Cytométrie de flux
La cytométrie de flux est utilisée pour étudier les propriétés physiques et chimiques de particules ou de cellules se déplaçant en file simple dans un courant liquide (fig. 4-3, a). Un exemple de cytométrie de flux est le phénotypage immunologique des leucocytes. Il faut que le prélèvement soit à l’état frais (non fixé). Des anticorps spécifiques marqués au fluorochrome se lient à la surface des cellules lymphoïdes, et une suspension de cellules marquées est exposée de façon séquentielle à une source lumineuse (habituellement un laser argon) pendant approximativement 10–6 secondes (fig. 4-3, b). Au moment où le fluorochrome excité revient à son énergie de repos, une lumière de longueur d’onde spécifique est émise (fig. 4-3, c) qui est sélectionnée en fonction de sa longueur d’onde (fig. 4-3, d) et reçue par un photorécepteur (fig. 4-3, e). Ce signal est ensuite converti en impulsions électroniques qui sont à leur tour analysées par un ordinateur. Le résultat peut être représenté par un histogramme multicolore avec taches et points (fig. 4-4). L’utilisation la plus courante de la cytométrie de flux en pratique clinique est l’immunophénotypage des proliférations hématopoïétiques. Cette procédure peut être utilisée sur le vitré, l’humeur aqueuse ou les annexes oculaires.
Figure 4-3 Analyse par cytométrie de flux de particules ou de cellules se déplaçant en file dans un courant (a). Anticorps spécifiques marqués au fluorochrome liés à la surface de cellules et dans une suspension de cellules marquées illuminées au laser (b). Lors de l’excitation, le fluorochrome retourne à son état de repos, émettant une lumière de longueur d’onde spécifique (c), qui est trié par longueur d’ondes (d) et enregistrée par un photodétecteur (e). Ce signal est ensuite converti en impulsions électroniques, qui sont à leur tour analysées par un ordinateur.
(Remerciements au Dr Patricia Chévez-Barrios.)