Chapitre 4 Mammographie
le sein normal et les variantes du normal
Aspects normaux en mammographie
Bases embryologiques
Du point de vue embryologique, les seins ont la même origine que les glandes cutanées sudoripares. Ils se développent dès la 5e semaine de gestation, à partir de la crête mammaire s’étendant depuis la racine des membres supérieurs, le long de la surface ventrale de l’embryon, jusqu’à la racine des membres inférieurs. Normalement, seule la partie médiane du tiers supérieur de cette crête persiste et entraîne le développement du bourgeon mammaire. Toute anomalie de l’involution de la crête mammaire entraîne la persistance de tissu glandulaire n’importe où le long de la « ligne lactée », de l’aisselle à la région inguinale. Les anomalies du développement embryonnaire sont relativement fréquentes. Il s’agit habituellement d’anomalie en excès avec présence de seins accessoires – polymasties – ou de mamelons surnuméraires – polythélies (fig. 4.1). L’aisselle est le siège le plus fréquent de la présence de tissu glandulaire accessoire. Cette glande accessoire uni- ou bilatérale peut être en contiguïté ou séparée de la glande principale (fig. 4.2). Les mamelons accessoires peuvent être occasionnellement fonctionnels au cours de la lactation. Les amasties (absence de développement mammaire) et amasies (mamelon présent mais absence de développement mammaire) sont rarissimes de même que les inversions congénitales du mamelon. Le syndrome de Poland associe communément de façon unilatérale : une hypoplasie mammaire du muscle grand pectoral. Les asymétries constitutionnelles sont de cause inconnue (fig. 4.3) [1].
Bases anatomiques et corrélations en imagerie
Anatomie descriptive
La glande mammaire se situe en avant de la paroi thoracique entre la clavicule et la 6e ou 8e côte, latéralement elle s’étend du sternum à la ligne axillaire moyenne. Elle se développe dans le dédoublement du fascia superficiel dont le feuillet antérieur, ou fascia préglandulaire, est sous-cutané et dont le feuillet profond forme le fascia rétroglandulaire. Ce dernier siège en avant du fascia qui enveloppe le muscle pectoral et permet donc des mouvements de la glande par rapport à la paroi thoracique. Des vaisseaux et des lymphatiques traversent ces feuillets (fig. 4.4). La peau représente le plan le plus superficiel mesurant de 0,5 à 2 mm d’épaisseur. La glande mammaire est divisée incomplètement en compartiments par du tissu conjonctif. Elle est soutenue principalement à sa partie interne par son attache à la paroi thoracique au niveau du sternum et à sa partie supérieure à la clavicule.
Structures musculaires adjacentes
Les rapports de la glande mammaire avec le bord libre du muscle grand pectoral sont importants. Les fibres libres de ce muscle cheminent transversalement de la partie médiane du thorax jusqu’à l’humérus (fig. 4.5). Le muscle grand pectoral doit être inclus dans les incidences mammographiques afin de visualiser la partie la plus profonde de la glande proche du muscle, de même, lors d’une échographie, la visualisation du pectoral en profondeur permet de s’assurer que la totalité du tissu mammaire a été explorée. L’attache du muscle pectoral à la paroi thoracique en regard du sternum est variable. Chez 1 % des patientes, la zone d’attache au sternum peut être étirée et visualisée sur l’incidence craniocaudale en situation interne. Cette portion variable du muscle peut prendre des aspects variés (rond, triangulaire) et ne doit pas être confondue avec un syndrome de masse (fig. 4.6).
Une image triangulaire mimant parfois un processus malin peut être repérée en interne sur l’incidence craniocaudale liée à la projection du muscle sternal (prolongement du muscle grand droit de l’abdomen) courant parallèlement au sternum. Il est vu chez 10 % des individus (fig. 4.7).
Le petit pectoral chemine derrière le grand pectoral et s’étend des 2e, 3e, 5e côtes au processus coracoïde de l’omoplate. Il peut être vu sous la forme d’un second triangle en situation haute axillaire sous le muscle pectoral (fig. 4.5 et 4.8) [1, 2].
Vascularisation
La partie supéro-externe de la glande est vascularisée par des branches de l’artère axillaire, la partie centrale et interne par des branches perforantes de l’artère mammaire interne ; la partie externe de la glande reçoit principalement des branches des artères intercostales (fig. 4.9). Les veines sont habituellement plus grosses que les artères. Ces dernières peuvent être repérées en mammographie par les calcifications pariétales athéromateuses. Le drainage veineux est plus variable que le drainage artériel. Les artères sont habituellement accompagnées de veines profondes.
L’innervation est assurée par des branches cutanées antérieures et latérales des nerfs intercostaux.
Drainage lymphatique
Le drainage lymphatique s’effectue de la partie profonde du tissu glandulaire vers des plexus lymphatiques péri-aréolaires. Les trois quarts du drainage s’effectuent à partir de troncs latéraux et médians s’étendant de l’aréole vers l’aisselle, le reste est assuré par la chaîne mammaire interne. Des anastomoses existent avec le sein controlatéral.
Les ganglions sont répartis en trois niveaux dénommés niveaux de Berg :
• le niveau I correspond aux ganglions qui sont en position latérale par rapport à la limite externe du muscle petit pectoral et s’étendent vers le prolongement latéral extrême de la glande incluant des ganglions du groupe scapulaire, de la veine axillaire ou pectoral ;
• les ganglions du niveau II sont profonds et postérieurs par rapport au muscle petit pectoral incluant des ganglions du groupe central ou interpectoral (groupe de Rotter) et certains ganglions du groupe sous-claviculaire ;
• les ganglions du niveau III sont de siège médian et supérieur par rapport au muscle petit pectoral près de la clavicule incluant des ganglions du groupe sous-claviculaire (fig. 4.10) [1, 2].
Lors d’une exploration chirurgicale du ganglion sentinelle, seuls quelques ganglions du niveau I sont analysés, lors d’un curage ganglionnaire sont disséqués des ganglions des niveaux I et II. Les lymphatiques ne sont pas visibles en mammographie. Des ganglions sont détectés en intraglandulaire dans 25 % des mammographies normales, ils sont habituellement rencontrés dans le quadrant supéro-externe sous l’aspect d’une structure réniforme à hile graisseux au contact d’un vaisseau (fig. 4.11). Des ganglions intramammaires peuvent être rencontrés en situation plus inhabituelle, interne, très latéralisée ou inférieure [3]. Les ganglions de la chaîne mammaire interne ne sont pas visibles en mammographie.