Chapitre 4. Lésions secondaires
Engagements cérébraux
Fistule artérioveineuseThromboseThromboseveineuseAnévrismeAnévrismeintracrânienLes engagements résultent d’un processus occupant expansif intracérébral au sein d’une voûte crânienne inextensible, les structures encéphaliques vont donc se déplacer vers les orifices de communication des différents secteurs intracrâniens, c’est-à-dire les citernes, les foramens (foramen magnum, incisure tentorielle) voire en extra- cérébral s’il existe une perte de substance osseuse.
Il n’existe pas de diagnostic différentiel et le pronostic est lié à la rapidité de la prise en charge des lésions causales.
On décrit quatre grands types d’engagements (tableau 4-1). Les engagements vermiens supérieursengagementsengagementsvermiens supérieurs peuvent être exclus des lésions post-traumatiques. Ils correspondent à une saillie du vermis supérieur à travers l’incisure de la tente du cervelet, de manière ascendante, liée à une lésion expansive isolée de la fosse postérieure. Or dans le cadre d’un traumatisme, il existe rarement des lésions isolées de la fosse postérieure, les lésions sus-tentorielles étant constantes.
1) Sous-falcique = sous-falcoriel, le plus fréquent. 2) Transtentoriel = temporal interne. 3) Central = diencéphalique. 4) Amygdalien = tonsillaire. |
Engagement sous-falcique
EngagementEngagementsous-falcique C’est le type d’engagement le plus fréquent. Il est secondaire à une lésion frontale et/ou pariétale unilatérale ou asymétrique, et correspond à une hernie du gyrus cingulairegyrus cingulaire (sillons frontaux internes) sous le bord libre de la faux du cerveau.
Déplacement du septum interventriculaire par rapport à la ligne joignant les insertions antérieures et postérieures de la faux (fig. 4-1).
Fig. 4-1 |
Fig. 4-2 |
Fig. 4-3 |
• compression et déplacement du ventricule latéral homolatéral;
• puis compression du gyrus cingulairegyrus cingulaire controlatéral;
• et hydrocéphalie d’exclusion controlatérale (par obstruction mécanique des foramens de Monroe).
Ce type d’engagement peut entraîner des complications vasculaires (fig. 4-4) qui sont :
Fig. 4-4 |
• soit locales par compression artériolaire et nécrose calleuse ou cingulaire;
• soit régionales par déplacement et étirement des structures vasculaires cheminant dans la scissure interhémisphérique (artère péricalleuseartère péricalleuseartèrepéricalleuse++) avec risque d’ischémie dans le territoire de l’artère cérébrale antérieure.
Engagement temporal interne
EngagementEngagementtemporal interne C’est le plus redouté. Il correspond à une hernie des sillons temporaux internes à travers l’incisure tentorielle. Cette hernie peut ne concerner que l’ uncus de l’hippocampeuncus de l’hippocampe à la phase précoce ou en cas de lésion temporale antérieure.
Effacement de la citerne suprasellaireciterneciternesuprasellaire avec élargissement paradoxal de la citerne ambianteciterneciterneambiante homolatérale (fig. 4-5).
Fig. 4-5 |
Ce type d’engagement engendre une compression du pédoncule latéral homolatéral avec compression du nerf moteur oculaire commun (III) responsable d’une mydriase homolatérale.
Puis, en fonction de l’importance de l’engagement, il se développe différents stades de gravité croissante. Tout d’abord, le mésencéphale est refoulé contre la tente du cervelet controlatérale. Le pédoncule controlatéral vient donc s’impacter contre la tente entraînant une compression et une ischémie des faisceaux cortico-spinaux et cortico-bulbaires controlatéraux (paralysie motrice ipsilatérale à la lésion causale) connue sous le nom d’«encoche de Kernohanencoche de Kernohan» (fig. 4-6).
Fig. 4-6 |
Ce type d’engagement entraîne une compression des structures artérielles homolatérales cheminant autour du mésencéphale avec en priorité l’ artère cérébrale postérieureartèreartèrecérébrale postérieure (fig. 4-7), cérébelleuse supérieureartèrecérébelleuse supérieure et les branches postérieures de la terminaison carotidienne interne (choroïdienne antérieureartèrechoroïdienne antérieure). Le risque ultime est celui d’une ischémie hémisphérique totale homolatérale si aucun traitement n’est mis en place (fig. 4-8).
Fig. 4-7 |
Fig. 4-8 |
Enfin, une hydrocéphaliehydrocéphalie peut apparaître par compression de l’aqueduc de Sylvius.
Engagement central
EngagementEngagementcentral Il est secondaire à des lésions supratentorielles bilatérales ou à un œdème cérébralœdèmeœdèmecérébral diffus. Il correspond à un déplacement vertical du diencéphale (les deux hémisphères cérébraux) à travers l’incisure tentorielle avec hernie des deux lobes temporaux et refoulement du tronc cérébral vers le bas.
Effacement symétrique des citernes périmésencéphaliquesciternesciternespérimésencéphaliques (fig. 4-9).
Fig. 4-9 |
Déformation du mésencéphale qui s’allonge dans un axe antéro-postérieur (diamètre antéro-postérieur > diamètre transverse).
Effacement du V3.
Il existe un risque d’ hydrocéphaliehydrocéphalie par compression de l’aqueduc et d’ par compression de l’aqueduc et d’ischémieischémie par compression des artères périmésencéphaliques (artère cérébrale postérieure +++).
La migration du tronc cérébral vers le bas peut entraîner dans les cas extrêmes des lésions vasculaires des artérioles perforantes du tronc basilaire qui sont étirées, engendrant des ischémies/hémorragies étagées médiomésencéphaliques, tegmentales et de la partie supérieure du pont, connues sous le nom d’«hémorragie de Durethémorragiehémorragiede Duret». Le pronostic est très sombre par atteinte des centres respiratoires et cardiaques centraux (substance réticulée).
Engagement amygdalien
EngagementEngagementamygdalien Il est secondaire à des lésions de la fosse postérieure ou concomitant d’un engagement diencéphalique. Il correspond à une hernie des amygdales cérébelleuses à travers le foramen magnumamygdales cérébelleusesforamenforamenmagnum.
Verticalisation des tonsilles oblitérant le foramen magnum sur les coupes axiales, avec une protrusion sur une hauteur supérieure ou égale à 5mm sur les coupes sagittales (fig. 4-10).
Fig. 4-10 |
Ce type d’engagement peut engendrer une hydrocéphaliehydrocéphalie par compression du 4e ventricule ou un infarctus par compression vasculaire (artère cérébelleuse postéro-inférieureartèreartèrecérébelleuse postéro-inférieure = PICA +++) (fig. 4-11).
Fig. 4-11 |
• Analyse systématique de la topographie:
– du septum interventriculaire;
– des uncus hippocampiques;
– des amygdales cérébelleuses.
• Analyse systématique de la morphologie des citernes périmésencéphaliques.
• Recherche de complications associées (tableau 4-2).
Type d’engagement | Complications |
---|---|
Sous-falcique | Ischémie locale calleuse et cingulaire par compression. Ischémie territoire cérébral antérieur (péricalleux++). Hydrocéphalie controlatérale d’exclusion. |
Temporal interne | Ischémie locale de l’uncus par compression. Ischémie territoire cérébral postérieur, cérébelleux supérieur et choroïdien antérieur. Hydrocéphalie. Encoche de Kernohan controlatérale. |
Central | Hydrocéphalie. Ischémie médiomésencéphalique/hémorragie de Duret. |
Amygdalien | Ischémie territoire PICA. Hydrocéphalie. |
Un bâillement asymétrique de la citerne ambianteciterneciterneambiante signe la présence d’un engagement temporal interne.
Œdème cérébral
ŒdèmeŒdèmecérébral C’est la plus redoutée des complications précoces car elle entraîne une augmentation de la pression intracrânienne (PIC) avec risque d’engagement et de lésions ischémiques associées. Sa présence aggrave considérablement le pronostic.
Classiquement, il était admis que cet œdème était dû à une augmentation de la perfusion sanguine intracérébrale avec œdème vasogénique œdèmeœdèmevasogénique mais de nombreuses études récentes menées grâce aux nouvelles performances de l’IRM (imagerie de diffusion), tendent à démontrer que cet œdème résulterait principalement d’un œdème cytotoxiqueœdème cytotoxiqueœdèmecytotoxique. Il existerait une rupture de la barrière hémato-encéphaliquebarrière hémato-encéphalique (BHE) de manière précoce et fugace dans les quelques heures suivant le traumatisme avec œdème vasogénique, rapidement relayé par un œdème cytotoxique engendré par une réaction inflammatoire diffuse, secondaire aux lésions axonales et endothéliales.
Son étendue est maximale dans les 24–48 premières heures et perdure 1 à 2 semaines.
Image typique
Plusieurs signes permettent d’évoquer ce diagnostic en TDM (fig. 4-12) :
Fig. 4-12 |
• un effacement des sillons corticauxsillons corticaux;
• une petite taille des ventriculesventricules voire des ventricules «fantomatiques»;
• une dédifférenciation substance blanche-substance grise avec hypodensité globale du parenchyme encéphalique;
• un engagementengagement.
Ces signes d’ œdème cérébralœdèmeœdèmecérébral peuvent être soit visibles d’emblée sur la TDM surtout chez les enfants (pronostic réservé 40 à 50 % de mortalité), soit apparaître secondairement selon l’évolution des lésions intracérébrales (lésions hémorragiques ou ischémiques).
Pièges et difficultés diagnostiques
Le piège principal est la «fausse» disparition des sillons corticaux due à la présence d’une hémorragiehémorragiesous-arachnoïdienne HSA qui efface le contraste habituel entre les espaces péricérébraux et le parenchyme adjacent. Inversement l’œdème peut mimer une pseudo-HSApseudo-HSA (fig. 4-13 et cf. chapitre dédié).
Fig. 4-13 |
Il faut également se méfier d’une dédifférenciation SB-SG qui peut être due à une lésion ischémique précoce. Dans ce cas, la plage hypodense dédifférenciée sera localisée dans un territoire vasculaire précis et sera en général unilatérale à l’inverse de l’œdème cérébral qui est plus souvent diffus. Ces deux entités sont cependant souvent associées, une lésion ischémique étendue pouvant entraîner secondairement un œdème cérébral, et un œdème cérébral diffus pouvant engendrer des lésions ischémiques secondaires par compression des structures artérielles lors des engagements.
Les ventricules sont de petite taille de manière normale chez les enfants et les adolescents donc attention aux diagnostics abusifs d’œdème cérébral chez les jeunes patients.
Impact thérapeutique
Le diagnostic positif est posé par la mesure directe de la PIC (pression intracrânienne). Il n’existe pas de parallélisme entre l’importance et l’étendue de l’œdème en TDM et la valeur de la PIC, en revanche, cette dernière est bien corrélée au taux de mortalité des traumatisés crâniens.