39: TRAITEMENT DE LA SCLÉROSE EN PLAQUES

CHAPITRE 39 TRAITEMENT DE LA SCLÉROSE EN PLAQUES







ÉPIDÉMIOLOGIE


La sclérose en plaques (SEP) est une maladie inflammatoire démyélinisante du système nerveux central (SNC), débutant généralement entre 20 et 40 ans, avec une nette prédominance féminine (2 à 3 femmes atteintes pour 1 homme). Il s’agit de la première cause non traumatique de handicap sévère acquis chez le sujet jeune [1, 2]. La prévalence de la SEP est d’environ 1 pour 1 000. Elle affecte environ 2 millions de personnes dans le monde dont 70 000 à 90 000 en France. Le taux d’incidence en France est évalué entre 4,1 à 8,2 pour 100 000 habitants par an, avec des variations selon les régions [3].


L’étiologie demeure inconnue, bien que le rôle d’une susceptibilité génétique et de certains facteurs environnementaux, en particulier infectieux, soit évoqué.


La répartition mondiale de la SEP n’est pas uniforme : la prévalence croît dans chaque hémisphère, de l’équateur vers les pôles [4, 5]. Cette variation en fonction de la latitude est même observée à l’échelle d’un pays comme la France [6, 7]. Des études épidémiologiques réalisées au sein de population migrantes ont montré que les adolescents migrant d’une zone de basse à une zone de haute prévalence avant l’âge de 15 ans acquièraient le risque élevé de la région d’accueil, alors que les migrants adultes conservaient le risque faible de la région d’origine [8, 9]. Ces éléments sont en faveur d’un ou de plusieurs facteurs étiologiques d’origine environnementale. Outre les hypothèses virales (Epstein-Barr virus en tête), l’exposition solaire et la vitamine D font partie des principaux facteurs actuellement discutés. En revanche, un possible rôle déclenchant des vaccinations, en particulier de la vaccination contre l’hépatite B, n’est pas étayé par les études épidémiologiques conduites jusqu’à présent.


D’autres arguments sont en faveur d’une participation génétique à la susceptibilité à la SEP [4, 5, 10]. La SEP touche au moins deux membres d’une même famille dans 10 à 15 % des cas, et le risque augmente au prorata de la concordance génétique : ainsi, la concordance de la survenue d’une SEP chez des jumeaux monozygotes est de 20 à 30 %, contre 2 à 3 % chez des hétérozygotes ou des frères et sœurs non jumeaux. Le risque pour un enfant d’avoir une SEP quand l’un de ses parents est atteint est de 2 à 3 %, soit 20 à 30 fois plus que dans la population générale. Pour autant, la SEP n’est pas une maladie monogénique et plusieurs dizaines de gènes de susceptibilité ont été rapportés.



PHYSIOPATHOLOGIE


La myéline du système nerveux central constitue la cible du processus pathologique, qui est marqué par une inflammation, focale et aléatoire, au sein de la substance blanche (formant ce qu’on appelle les plaques), puis une destruction, ou démyélinisation. Cette démyélinisation conduit à une altération de la conduction de l’influx nerveux le long de l’axone, entraînant une déformation puis une perte de l’information transmise. Dans un second temps, la conduction nerveuse peut cependant être restaurée grâce un mécanisme de remyé-linisation ou à l’apparition de canaux sodiques le long de l’axone démyélinisé. Cette restauration fonctionnelle permet d’expliquer les phases de rémission suivant les poussées. À plus long terme, une perte des oligodendrocytes, qui fabriquent la myéline du SNC, et une dégénérescence des axones entraînent un handicap neurologique irréversible.


La réaction initiale serait liée à une activité anormale de certaines sous-populations lymphocytaires impliquées dans la régulation des phénomènes inflammatoires. De manière simplifiée, il existerait un déséquilibre entre les lymphocytes TH1 (pro-inflammatoires) et les lymphocytes TH2 (antiinflammatoires) en faveur de la réponse type TH1. Après activation, des lymphocytes TH1 auto-réactifs traverseraient la barrière hémato-encéphalique et initieraient un processus inflammatoire au sein du SNC, qui s’auto-entretient ensuite par démasquage de nouveaux auto-antigènes. Les mécanismes physiopathologiques sont en fait beaucoup plus complexes et encore incomplètement élucidés [1, 1114].



ASPECTS CLINIQUE ET SÉMÉIOLOGIQUE



Symptômes


La symptomatologie de la SEP est très polymorphe, puisqu’elle peut toucher des endroits différents, à des moments différents, au sein de la substance blanche du SNC. On peut observer des atteintes motrices (diminution de la force, troubles de la coordination, spasticité, pouvant toucher une ou plusieurs membres), des atteintes sensitives (paresthésies ou fourmillements, engourdissements, diminution de la sensibilité, douleurs), des atteintes visuelles (névrite optique rétrobulbaire, diplopie, nystagmus), des troubles sphinctériens (mictions impérieuses, dysurie, infections urinaires, constipation, troubles sexuels), ou des troubles cognitifs et psychiatriques. La fatigue est également un symptôme très fréquent chez les patients atteints de SEP, souvent méconnu, invalidant, et qui est peu corrélé aux autres séquelles neurologiques. Tous ces symptômes peuvent survenir de manière isolée ou associés entre eux, ils peuvent être présents à l’occasion d’épisodes neurologiques régressifs en quelques jours à quelques mois (les poussées) ou persister de manière permanente. Deux types de symptômes, classiquement décrits chez les patients atteints de SEP, ont une évolution plus brève, de quelques secondes à quelques minutes : le phénomène de Uhthoff, qui correspond à la réapparition d’un symptôme déjà connu précédemment, sous l’effet d’une augmentation de la température corporelle (fièvre, bain chaud, effort physique …). Il correspond à une diminution transitoire de la conduction de l’influx nerveux dans les fibres mal myélinisées ; les phénomènes paroxystiques, comme le signe de Lhermitte, la névralgie du nerf trijumeau, sont des impressions de décharges électriques brutales, douloureuses ou non [1].


Deux événements de base permettent de décrire l’évolution globale de la SEP : la poussée et la progression du handicap. Leurs différentes associations permettent de décrire les différentes formes cliniques évolutives de la maladie.


Une poussée se définit comme l’apparition, la réapparition ou l’aggravation de signes ou symptômes neurologiques s’installant de manière subaiguë en quelques heures à quelques jours, durant au moins 24 heures, et récupérant de manière plus ou moins complète. Une fatigue seule ou des symptômes survenant dans un contexte de fièvre ne sont pas considérés comme une poussée. La poussée survient au moins un mois après la précédente et doit être distinguée des fluctuations fréquentes des signes et des manifestations paroxystiques. La rémission correspond à la régression ou à l’amélioration de ces signes ou symptômes.


La progression est définie comme l’aggravation continue, sur une période d’au moins 6 mois, de symptômes neurologiques. Une fois commencée, elle ne s’interrompt plus et est donc une cause majeure de handicap chez les patients atteints de SEP [15].




Diagnostic


Aucun test de diagnostic spécifique n’est disponible à l’heure actuelle. Ainsi, le diagnostic de la SEP est un diagnostic de probabilité, basé sur des critères diagnostiques évolutifs en fonction des connaissances médicales, et incluant toujours la notion d’exclusion d’une autre meilleure explication. Outre la clinique, trois examens complémentaires contribuent au diagnostic : l’imagerie par résonance magnétique (IRM), les potentiels évoqués (PE) et l’étude du liquide céphalorachidien (LCR).


En 2001, un groupe d’experts internationaux a établi de nouveaux critères diagnostiques pour la SEP, les critères de McDonald [17], révisés en 2005 puis plus récemment en 2010 [18].


Pour aboutir au diagnostic de SP, quatre critères fondamentaux sont utilisés :





MÉCANISME D’ACTION








CRITÈRES DE CHOIX THÉRAPEUTIQUE



Référentiels scientifiques


Une conférence de consensus sur la sclérose en plaques rassemblant un panel d’experts nationaux organisée par la Fédération Française de Neurologie, avec la participation de l’ANAES, s’est déroulée en juin 2001 [20]. Cette conférence, bien que datant de plusieurs années, n’a pour l’instant pas été reconduite.


La Haute Autorité de Santé (HAS) a publié deux guides :



La HAS a également publié une réévalution des interférons bêta et de l’acétate de glatiramère dans la sclérose en plaques en juillet 2010 [22, 23].


Les critères diagnostiques, dits critères de McDonald, ont été définis internationalement en 2001 [17], révisés en 2005 puis plus récemment en 2010 [18].


L’AFSSAPS a également publié plusieurs recommandations et mises au point :



En septembre 2010, le Comité Européen d’évaluation des médicaments à usage humain (CHMP) de l’Agence européenne des médicaments (EMEA) a émis un avis négatif sur la cladribine (médicament par voie orale développée dans le traitement de fond des SEP-RR) en raison d’un rapport bénéfices-risques jugé défavorable [28].




Objectifs thérapeutiques


La prise en charge thérapeutique de la SEP comprend :



Les médicaments utilisés en traitement de fond de la sclérose en plaques sont généralement développés dans les formes récurrentes-rémittentes, puis évalués dans les formes secondairement progressives et éventuellement progressives d’emblée.


En première intention, des immunomodulateurs sont utilisés, dans l’objectif de réguler l’inflammation en favorisant l’activité des lymphocytes régulateurs et des cytokines anti-inflammatoires. Ces traitements de première intention permettent de réduire de 30 à 40 % en moyenne la fréquence des poussées. En cas d’inefficacité, des immunosuppresseurs, tels que le natalizumab, plus efficaces mais plus toxiques, sont utilisés. Selon la HAS, la place dans la stratégie thérapeutique du fingolimod, traitement de seconde intention qui bénéficie d’un remboursement par la sécurité sociale depuis le 5 décembre 2011, n’est actuellement pas définie [23].






Un traitement de fond peut également être prescrit aux patients considérés comme étant à haut risque de développer une SEP cliniquement certaine, ayant présenté un seul événement démyélinisant. L’objectif est de traiter précocement pour éviter la constitution de lésions irréversibles précoces.


Actuellement, aucun médicament ne dispose d’une AMM dans le traitement de la SEP-PP.


May 4, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 39: TRAITEMENT DE LA SCLÉROSE EN PLAQUES

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