Chapitre 36
Doigt en maillet de type 1
Optimiser le traitement orthopédique – série prospective de 314 cas
Le doigt en maillet ou mallet finger traumatique de type 1 est une pathologie fréquente (figure 36.1).
Elle apparaît aussi bien en pratique sportive que lors des activités manuelles quotidiennes les plus simples (border un drap, se sécher avec une serviette…).
L’étude prospective que nous présentons nous permet de répondre à un certain nombre de questions :
• le traitement orthopédique permet-il un résultat identique selon le doigt lésé ?
• est-ce un traitement qui doit intervenir en urgence ?
• le délai de prise en charge a-t-il son importance ?
• le traitement orthopédique est-il encore approprié pour un doigt en maillet non traité datant de plusieurs mois ?
• quels sont les points communs aux échecs d’un traitement orthopédique ?
• quelle conduite adopter après échec d’un premier traitement orthopédique ?
Définition
Le doigt en maillet de type 1 est une rupture sous-cutanée de l’appareil extenseur terminal au niveau de la dernière phalange.
Nous ne nous intéresserons à travers cet article qu’au doigt en maillet de type 1, des doigts longs, excluant de notre étude toutes les fractures arrachement ou maillet dégénératif sur terrain rhumatismal.
Mécanisme lésionnel
Le mécanisme du doigt en maillet de type 1 associe une flexion forcée de l’IPD alors que l’IPP se trouve dans une position plus ou moins marquée d’extension et que l’appareil extenseur digital est en état de contraction.
Cette combinaison entraîne une mise en tension de l’appareil extenseur terminal et finit par provoquer sa rupture sous-cutanée en zone 1.
À la différence du système fléchisseur qui, sous l’effet de la contraction musculaire, subit une rétraction de son moignon proximal, l’appareil extenseur en zone 1, du fait de son intrication avec le système intrinsèque et rétinaculaire, ne subit pas de réelle rétraction.
Diagnostic
Cette pathologie généralement indolore passe souvent inaperçue les premiers jours.
L’absence de gêne fonctionnelle et douleur provoquée explique la fréquente négligence de la lésion.
Le diagnostic est avant tout clinique.
Le mécanisme lésionnel n’est pas toujours clairement identifié par le patient, qui se présente avec une flexion plus ou moins marquée de l’IPD et une impossibilité d’extension active.
Ce déficit est réductible passivement, mais parfois partiellement lors d’un traumatisme plus ancien.
La radiographie de face et surtout de profil permet de s’assurer de l’absence de fracture arrachement de l’appareil extenseur sur P3.
Il est surprenant de constater que cette déformation reste réductible très longtemps, même en l’absence de traitement.
En l’absence de traitement, on peut décrire la cascade dégénérative ainsi :
• il existe une solution de continuité de la partie distale de l’appareil extenseur ;
• il se constitue un cal tendineux d’interposition. Des études ont montré qu’à la longueur d’allongement correspondait une perte d’extension de l’interphalangienne distale ;
• l’action de l’extenseur se majore sur l’interphalangienne proximale, par l’action de la bandelette médiane, désormais seule active. On retrouve une hyperextension de l’IPP qui s’exprime essentiellement sur les sujets hyperlaxes :
– l’action du fléchisseur commun profond accentue la flexion de l’IPD,
– le ligament rétinaculaire oblique se rétracte en raison de sa détente par son passage en arrière de l’axe de flexion-extension de l’IPP (lors d’une hyperextension de l’IPP constituée) et de ses attaches terminales sur l’extenseur qui s’est « rétracté » (figure 36.2).
Contrairement à la rupture de la bandelette médiane qui évolue vers une déformation en boutonnière qui se fixe rapidement, cette déformation secondaire en col-de-cygne se retrouve presque exclusivement chez le sujet hyperlaxe présentant préalablement à la lésion une hyperextension de l’IPP.
Même si cette déformation en col-de-cygne est plus rare qu’une déformation en boutonnière, il ne faut pas la négliger compte tenu de la gêne fonctionnelle bien plus grande qu’elle entraîne.
Méthodologie du traitement orthopédique
Le traitement du doigt en maillet type 1 lors des premiers jours post-traumatiques est résolument orthopédique.
Seul le délai d’immobilisation varie de 6 à 8 semaines, la majorité des praticiens proposant 8 semaines.
Pour la communauté médicale, le traitement orthopédique semble trouver ses limites lorsque le délai entre le traumatisme et le début du traitement orthopédique est de quelques semaines.
Lors des différentes tables rondes sur le sujet, les auteurs se disputent la légitimité de tel ou tel type d’immobilisation, et le congrès de l’EFSHT de juin 2008 n’a pas permis d’obtenir un consensus sur le sujet. Il est vrai que les séries proposées mériteraient d’être étoffées en nombre de cas.
Pour notre part, nous avons opté pour la mise en place d’une orthèse thermo-moulée sur mesure de type Stack (figure 36.3), dont les caractéristiques sont les suivantes :
• positionnement en extension de l’IPD, au « maximum » des capacités du sujet (sans forçage, donc sans risque de nécrose cutanée) ;
• l’IPP est laissée libre et doit être mobilisée sur toute sa course de flexion-extension. Selon le descriptif du losange de Stack, la flexion de l’IPP permet de détendre l’appareil extenseur terminal ;
• « dégagement » de la zone dorsale, en regard de la terminaison de l’appareil extenseur, pour limiter le risque de macération cutanée et risque inflammatoire qui pourrait s’en suivre ;
• maintien de l’orthèse par un bandage type Elastoplaste®, le plus proximal afin d’obtenir un bras de levier optimal pour le maintien de l’extension de l’IPD et le moins large possible pour éviter toute macération en regard de la zone de cicatrisation.
• aucun retrait de l’orthèse ;
• aucun contact avec l’eau. Protection par un doigtier en plastique le temps de la douche ;
• changement quotidien de la bande de fixation en prenant soin de maintenir l’IPD en extension stricte.
À chaque patient nous remettons un feuillet explicatif indiquant les consignes à respecter lors du traitement, avec des photos documentant la procédure de changement de la bande de maintien.
Nous revoyons le patient à 8 jours pour contrôler le bon positionnement de l’orthèse et procéder à son remodelage si cela s’avérait nécessaire.
Puis nous contrôlons tous les 15 jours, avec un premier testing clinique de la cicatrisation tendineuse à la 5e semaine.
L’orthèse est généralement retirée après 8 semaines strictes et après contrôle d’une parfaite extension active.
Si le verrouillage s’avère insuffisant, nous n’hésitons pas à poursuivre l’immobilisation 2 à 3 semaines supplémentaires.
Nous demandons à ce que l’orthèse soit repositionnée pendant 1 mois lors de toute activité à risques (sport, bricolage…) et la nuit.
Un dernier contrôle est effectué avec un minimum de recul de 3 mois.
Nous insistons longuement sur l’absence impérative de macération, clé de la réussite du traitement comme nous le verrons par la suite.
L’orthèse de Stack peut parfaitement être remplacée par un autre appareillage à condition de respecter les consignes précédentes.
Nous avons opté pour ce type d’immobilisation en raison :
• de son principe d’appui 3 points qui offre un excellent contrôle du positionnement en extension souhaitée ;
• de sa fiabilité de maintien et de l’absence de risque de lâchage au contraire de l’orthèse collée sur la tablette unguéale ;
• de son absence d’appui en regard de la zone de cicatrisation et donc de la limitation du risque de macération, d’irritation et d’inflammation ;
• du changement facile de la bande de maintien, idéalement avec une autre personne ou bien seul avec appui sur le bord de la table.

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