3: Pyodermites bactériennes

Chapitre 3


Pyodermites bactériennes



PLAN DU CHAPITRE




Dermatite pyotraumatique (dermatite suintante aiguë, hot spot)




Caractéristiques


La dermatite pyotraumatique est une infection cutanée bactérienne de surface d’apparition aiguë et d’évolution rapide faisant suite à un traumatisme auto-infligé. En réponse à un stimulus prurigineux ou douloureux, d’importants léchages, mordillements, grattages et frottements entraînent la formation d’une lésion focale (encadré 3.1). Il s’agit généralement d’un processus saisonnier dont l’incidence augmente par temps chauds et humides. Les puces constituent l’agent déclencheur le plus fréquent. La dermatite pyotraumatique est fréquente chez le chien, en particulier chez les races à fourrure longue et épaisse. Elle est rarement rencontrée chez le chat.



La dermatite pyotraumatique se caractérise par la présence d’une zone cutanée très prurigineuse, érythémateuse, alopécique, suintante, érodée et à bords bien délimités qui s’élargit rapidement. Les lésions sont généralement isolées, mais elles peuvent être multiples et douloureuses. Elles sont généralement observées sur le tronc, la base de la queue, la face externe des cuisses, le cou et la face. Une pyodermite superficielle en expansion est généralement présente.





Traitement et pronostic




1. Identifier et traiter la cause sous-jacente (voir encadré 3.1).


2. Administrer un traitement antipuce draconien.


3. Tondre et nettoyer la lésion sous sédation si nécessaire.


4. Appliquer un agent séchant ou astringent (acétate d’aluminium 5 % par exemple) toutes les 8 à 12 heures pendant 2 à 7 jours. Éviter les produits à base d’alcool.


5. Si le prurit est modéré, appliquer un analgésique local (par exemple lidocaïne, chlorhydrate de pramoxine) ou une crème/solution à base de corticoïdes toutes les 8 à 12 heures pendant 5 à 10 jours.


6. Si le prurit est intense, il peut être utile d’administrer des corticoïdes à courte durée d’action, tels que le phosphate sodique de dexaméthasone injectable (jusqu’à 0,1 mg/kg SC ou IM) ou la prednisone (0,5–1,0 mg/kg PO une fois par jour pendant 5 à 10 jours).


7. Si la lésion centrale est entourée de papules ou de pustules, prescrire également une antibiothérapie par voie systémique pendant 3 à 4 semaines (encadré 3.2).



8. Le pronostic est bon s’il est possible de traiter et de contrôler la cause sous-jacente.





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Figure 3.2 Dermatite pyotraumatique. Vue rapprochée du chien de la figure 3.1. Mise en évidence de la surface suintante et érodée de la lésion. La présence de papules en périphérie est en faveur d’une pyodermite superficielle en expansion.








Impétigo (dermatite pustuleuse superficielle)







Traitement et pronostic







Pyodermite superficielle (folliculite bactérienne)




Caractéristiques


Une pyodermite superficielle est une infection bactérienne superficielle affectant les follicules pileux et l’épiderme adjacent. L’infection est pratiquement toujours secondaire à une cause sous-jacente ; les maladies allergiques et endocriniennes sont les causes les plus courantes. Une pyodermite superficielle se rencontre fréquemment chez le chien, mais rarement chez le chat.


Une pyodermite superficielle se caractérise par la présence focale, multifocale ou généralisée de papules, pustules, croûtes, squames, collerettes épidermiques ou de zones érythémateuses alopéciques circonscrites pouvant présenter un centre hyperpigmenté. Les races à poils courts présentent souvent une alopécie en plage d’aspect « mité », de petites touffes de poils dressés ou une décoloration brun rougeâtre des poils blancs. Chez les chiens à poils longs, les symptômes peuvent être insidieux et inclure un poil terne, des squames et une mue excessive. Chez les races à poils longs ou à poils courts, les lésions primaires sont généralement masquées par les poils restants, mais la tonte de la zone affectée peut permettre une bonne appréciation des lésions. Le prurit est variable, allant de l’absence de prurit à un prurit sévère. Les infections bactériennes secondaires aux maladies endocriniennes peuvent déclencher un prurit ressemblant à une maladie cutanée d’origine allergique.


Staphylococcus pseudintermedius (anciennement Staphylococcus intermedius) est la bactérie la plus fréquemment isolée dans les cas de pyodermite canine ; mais on ne la rencontre généralement que chez le chien. Staphylococcus schleiferi est une espèce de bactérie émergeante de plus en plus souvent isolée chez des chiens atteints d’infections chroniques ayant été exposés à une antibiothérapie préalable ; elle se rencontre chez le chien et chez l’homme. S. pseudintermedius et S. schleiferi peuvent toutes deux développer une résistance à la méthicilline, en particulier en cas d’antibiothérapie sous-dosée ou d’administration préalable de fluoroquinolones chez le patient. Par ailleurs, le Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM humain) est de plus en plus fréquemment mis en évidence chez les espèces animales suivies par des vétérinaires. Les trois types de Staphylococcus peuvent présenter un risque zoonotique, avec transmission de l’homme au chien ou du chien à l’homme ; les individus immunodéprimés sont une population à risque.





Principaux traitements et pronostics




1. Identifier et contrôler la cause sous-jacente.


2. Administrer une antibiothérapie systémique (au minimum 3 à 4 semaines) avec poursuite du traitement pendant 1 semaine après guérisons clinique et cytologique complètes (voir encadré 3.2).


3. En complément du traitement, il peut être utile de laver l’animal tous les 2 à 7 jours à l’aide d’un shampoing antibactérien à base de chlorhexidine ou de peroxyde de benzoyle.


4. Si les lésions réapparaissent dans les 7 jours suivant l’arrêt de l’antibiothérapie, c’est que la durée du traitement était inadaptée. Il convient de reprendre le traitement sur une période plus longue et d’approfondir l’identification et la gestion de la cause sous-jacente.


5. La guérison incomplète ou l’inefficacité totale du traitement antibiotique suggèrent l’existence d’une antibiorésistance nécessitant une soumission de l’agent causal à un antibiogramme.


6. Si une antibiorésistance est suspectée ou confirmée, les meilleurs résultats sont observés en lavant très souvent l’animal (quotidiennement si nécessaire), en appliquant fréquemment des solutions topiques à base de chlorhexidine et en administrant simultanément deux classes d’antibiotiques différentes à fortes doses. Il est important de monitorer l’évolution de l’infection par la réalisation régulière d’examens cytologiques, de bactériogrammes et d’antibiogrammes afin d’interrompre le traitement au moment adéquat. L’arrêt prématuré du traitement, l’incapacité de contrôler complètement la maladie primaire et l’utilisation d’une antibiothérapie à base de fluoroquinolones favorisent la perpétuation de l’infection résistante.


7. Le pronostic est bon si la cause sous-jacente peut être identifiée et corrigée ou contrôlée.



Note de l’auteur


Une pyodermite superficielle fait partie des dermatoses les plus fréquemment rencontrées chez le chien. Elle est pratiquement toujours secondaire à une cause sous-jacente (maladie allergique ou endocrinienne).


La cefpodoxime, l’association ormétoprime/sulfadiméthoxine et la céfovécine assurent une observance rigoureuse permettant de réduire le développement de résistances lors d’utilisations à fortes doses.


Les bactéries Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), S. schleiferi résistant à la méthicilline (SSRM), ainsi que S. pseudintermedius résistant à la méthicilline (SPRM) constituent des problèmes émergeants dans certaines régions des États-Unis.


Les facteurs de risque les plus probables sont l’utilisation de fluoroquinolones, d’une antibiothérapie sous-dosée et d’une antibiothérapie associée à l’administration de corticoïdes. L’application quotidienne de traitements topiques et de shampoings peut être extrêmement bénéfique dans la résolution de l’infection. Afin de prévenir l’apparition de résistances, maximiser les doses d’antibiotiques et envisager l’utilisation d’une double antibiothérapie simultanée.


Respecter les règles d’hygiène (se laver les mains) afin de prévenir les risques zoonotiques.


Envisager le dépistage des chiens qui rendent visite aux personnes âgées ou malades afin de prévenir le risque zoonotique. Les sites de prédilection pour les prélèvements de SMR sont le nez, les lèvres, les oreilles, les régions axillaires ou la région périnéale.









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Figure 3.14 Pyodermite superficielle. Vue rapprochée du chien de la figure 3.13. La dermatite érythémateuse avec formation de collerettes épidermiques est apparente.




















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Figure 3.31 Pyodermite superficielle. Vue rapprochée du chien de la figure 3.30. Mise en évidence de l’éruption cutanée croûteuse.







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Figure 3.35 Pyodermite superficielle. Même chien que celui de la figure 3.34. Mise en évidence des lésions érythémateuses et maculeuses sans éruption papuleuse.




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Figure 3.36 Pyodermite superficielle. Même chien que celui de la figure 3.34. Mise en évidence des lésions érythémateuses et maculeuses sans éruption papuleuse.









Pyodermite profonde




Caractéristiques


Une pyodermite profonde est une infection folliculaire de surface qui, par rupture de follicules pileux, provoque une furonculose et une cellulite. Son développement est souvent précédé d’un historique de dermatose superficielle chronique et est presque toujours associé à des facteurs prédisposants (voir encadré 3.3). Les pyodermites profondes sont fréquentes chez le chien mais rares chez le chat.



Staphylococcus pseudintermedius (anciennement Staphylococcus intermedius) est la bactérie la plus fréquemment isolée lors d’une pyodermite chez le chien. On ne la rencontre généralement que chez le chien. Staphylococcus schleiferi est une espèce de bactérie émergeante de plus en plus souvent isolée chez des chiens atteints d’infections chroniques ayant été exposés à une antibiothérapie préalable ; elle se rencontre chez le chien et chez l’homme. S. pseudintermedius et S. schleiferi peuvent tous deux développer une résistance à la méthicilline, en particulier en cas d’antibiothérapie sous-dosée ou d’administration préalable de fluoroquinolones chez le patient. Par ailleurs, le Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM humain) est de plus en plus fréquemment mis en évidence chez les espèces animales suivies par des vétérinaires. Les trois types de Staphylococcus peuvent présenter un risque zoonotique, avec transmission de l’homme au chien ou du chien à l’homme ; les individus immunodéprimés sont une population à risque.


Une pyodermite profonde se manifeste par des lésions focales, multifocales ou généralisées caractérisées par la présence de papules, de pustules, de cellulite, de décoloration tissulaire, d’alopécie, de bulles hémorragiques, d’érosions, d’ulcères et de croûtes ainsi que de trajets fistuleux sérohémorragiques à purulents. Les lésions sont généralement prurigineuses et douloureuses. Elles intéressent le plus souvent le tronc et les points de pression, mais toute région du corps peut être affectée. Une lymphadénomégalie est souvent observée. Si l’animal est également septique, d’autres symptômes tels que fièvre, anorexie et abattement peuvent survenir.





Traitement et pronostic




1. Identifier et corriger toute cause sous-jacente (voir encadré 3.3).


2. Retirer quotidiennement les croûtes et l’exsudat à l’aide de douches ou de bains d’eau chaude contenant une solution de chlorhexidine. Si les bains en baignoire sont impossibles, les shampoings peuvent être efficaces.


3. Administrer une antibiothérapie par voie systémique pendant une longue période (6 à 8 semaines au minimum) et poursuivre le traitement pendant 2 semaines après guérison clinique complète (voir encadré 3.2). Le choix de l’antibiotique devra reposer sur le résultat des tests de sensibilité in vitro car les résistances sont fréquentes.


4. Si les lésions ne guérissent pas complètement au terme de l’antibiothérapie, ou si aucune amélioration n’est constatée, une antibiorésistance est probable. Il est alors indiqué de réaliser un bactériogramme et un antibiogramme.


5. Si une antibiorésistance est suspectée ou confirmée, les meilleurs résultats sont observés en lavant très souvent l’animal (quotidiennement si nécessaire), en appliquant fréquemment des solutions topiques à base de chlorhexidine et en administrant simultanément deux classes d’antibiotiques différentes à forte dose. Il est important de suivre l’évolution de l’infection par la réalisation régulière d’examens cytologiques, de bactériogrammes et d’antibiogrammes, afin d’interrompre le traitement au moment adéquat. L’arrêt prématuré du traitement, l’incapacité de contrôler complètement la maladie primaire et l’utilisation d’une antibiothérapie à base de fluoroquinolones favorisent la perpétuation de l’infection résistante.


6. Le pronostic est bon, mais dans les cas sévères ou chroniques, la fibrose, les cicatrices et l’alopécie peuvent être des séquelles permanentes.









Pyodermite du menton (acné du chien)




Caractéristiques


La pyodermite du menton est une infection bactérienne. Il ne s’agit pas réellement d’acné, mais plutôt d’une furonculose traumatique. Les poils courts et rigides sont refoulés dans le follicule pileux, processus à l’origine d’une réaction stérile sur corps étranger pouvant ensuite s’infecter. La pyodermite du menton peut être induite par un traumatisme du menton (par exemple repos sur sol dur, frictions répétés par des jouets à mâcher). Elle est fréquente chez les races à poils courts, notamment chez les jeunes chiens (âgés de 3 à 12 mois).


La pyodermite du menton se manifeste par la présence non prurigineuse et non douloureuse de comédons, de papules, de pustules, de bulles ou de fistules avec écoulements sérohémorragiques sur le menton ou le museau. Les poils peuvent généralement être extraits des lésions par un léger pincement.





Traitement et pronostic




1. Minimiser les traumatismes et les pressions infligées au menton.


2. En cas de lésion légère, frictionner la zone dans le sens de la pousse du poil avec un shampoing à base de peroxyde de benzoyle ou de chlorhexidine. L’action mécanique permet de retirer les poils « incarnés », de prévenir ainsi l’apparition de nouvelles lésions et d’accélérer la guérison.


3. Appliquer quotidiennement une pommade à base de mupirocine ou un gel de peroxyde de benzoyle jusqu’à guérison des lésions, puis tous les 3 à 7 jours à la demande.


4. Pour des lésions modérées à sévères, en complément du traitement topique, administrer une antibiothérapie systémique (au minimum 4 à 6 semaines) et poursuivre le traitement pendant 2 semaines après guérisons clinique et cytologique complètes (voir encadré 3.2).


5. Un ruban adhésif peut être utilisé afin de collecter les « poils incarnés » et d’en assurer le retrait d’une façon aisée et amusante.


6. Le pronostic est bon. Chez la plupart des chiens, les lésions guérissent définitivement. Le contrôle de l’infection suppose cependant dans certains cas l’application d’un traitement topique de routine à vie.


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Apr 23, 2017 | Posted by in DERMATOLOGIE | Comments Off on 3: Pyodermites bactériennes

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