Chapitre 3 Les phénomènes de relaxation
Nous avons vu au chapitre précédent que lorsqu’un échantillon tissulaire est soumis à un champ magnétique , un état d’équilibre apparaît avec une composante longitudinale de l’aimantation tissulaire (fig. 3-1). Un apport d’énergie (excitation) par une onde RF (impulsion de 90°) dont la fréquence est égale à la fréquence de Larmor (condition de résonance) entraîne, par égalisation des protons sur les deux niveaux d’énergie et mise en phase des spins, respectivement une disparition de la composante longitudinale et une apparition d’une composante transversale de l’aimantation (maximale et égale à en fin d’impulsion). Cet état est instable et, dès la fin de l’excitation, il va y avoir retour à l’état d’équilibre (stable) au cours duquel les phénomènes inverses vont avoir lieu. D’une part, progressivement, par transitions inverses → (antiparallèles → parallèles), l’aimantation longitudinale repousse progressivement (relaxation ). D’autre part, par déphasage rapide des spins, l’aimantation transversale décroît rapidement (relaxation ).
Fig. 3-1 Interactions entre l’onde de radiofréquence et les protons placés dans le champ .
Pour bien comprendre les mécanismes de la relaxation et , il est nécessaire de bien «séparer dans votre esprit», comme nous venons de le voir au chapitre 2 (modèle quantique), les phénomènes concernant l’aimantation longitudinale et l’aimantation transversale .
C’est par la «relaxation» des protons que le phénomène de RMN devient observable.
Notion d’aimantation longitudinale et transversale
Il apparaît ainsi clairement deux «types» d’aimantation tissulaire : l’aimantation longitudinale (où parallèle à , concerne le ) et l’aimantation transversale (où perpendiculaire à , concerne le ) (fig. 3-2). L’apparition et la disparition de ces deux types d’aimantation font en fait intervenir des mécanismes très différents :
Relaxation longitudinale ou
L’aimantation longitudinale repousse ainsi progressivement (fig. 3-3; voir également figure 2-15 et chapitre 2) : c’est la relaxation longitudinale. On l’appelle également relaxation spin-réseau car ce phénomène s’accompagne, lors du retour des protons du niveau de haute énergie sur le niveau de basse énergie, d’une émission d’énergie (restitution de l’énergie absorbée lors de l’excitation) par interaction (échange thermique) avec le milieu moléculaire environnant ou réseau1. On l’appelle également relaxation car la repousse (récupération) de l’aimantation longitudinale se fait selon une exponentielle croissante où la constante de temps (exprimée en millisecondes) est caractéristique d’un tissu donné : elle correspond à 63 % de repousse. En 2 , la repousse est de 87 %, en 3 elle est presque totale : 95 % (en 4 repousse = 98 %) (voir annexes 7 et 8 et fig. 3-4). Le caractérise ainsi la relaxation longitudinale d’un tissu. Celle-ci est d’autant plus rapide que le est court (c’est-à-dire plus le est court, plus l’aimantation longitudinale repousse rapidement) ou, inversement, d’autant plus lente que le est long. L’ordre de grandeur pour le des tissus biologiques est de 500 ms à 1 000 ms. Le varie avec la structure moléculaire ainsi que l’état solide ou liquide de la matière. Il est plus long dans les liquides par rapport aux solides; il est court dans les tissus graisseux.
En effet, dans les milieux biologiques (réseaux), les molécules sont soumises, en permanence, à des mouvements de translation, rotation et collision (mouvements browniens) qui peuvent être caractérisés par la fréquence des collisions moléculaires νc. La relaxation spin-réseau (absorption d’énergie par le réseau) est d’autant plus efficace que la fréquence des collisions moléculaires νc est proche de la fréquence de résonance de Larmor ν0. Cela est somme toute logique : pour céder de l’énergie aux protons par l’onde RF (transitions sur), il faut être à la condition de résonance νr = ν0). Ainsi, pour que les protons cèdent leur énergie au milieu biologique environnant, il faut que la fréquence spontanée ν0 (fréquence de Larmor) des protons dans le champ soit proche de νc (fig. 3-5). Rappelez-vous l’exemple des cyclistes : repasser ou rendre la gourde (restitution de l’énergie) est plus facile si les deux coureurs sont à la même vitesse (fréquence). Lorsque cette condition est remplie, les protons qui changent de niveau d’énergie peuvent facilement céder de l’énergie (restitution de l’énergie absorbée lors de l’excitation) au milieu biologique environnant. Les tissus graisseux (grosses molécules dont les mouvements moléculaires sont assez lents) remplissent cette condition : le de la graisse est court. À l’inverse, pour les protons dans l’eau pure (petites molécules dont les mouvements moléculaires sont rapides = eau libre), νc n’est pas proche de ν0 (νc > ν0) : le des liquides est long. Il est d’autant plus long qu’il s’agit d’un liquide pur (LCR), alors que la présence de protéines (grosses molécules = eau liée) dans un liquide raccourcit le . De même, l’inflation hydrique au sein d’un tissu (tumeur, œdème, infarctus) allongera le . À l’autre extrême, dans la glace par exemple, en raison de sa structure cristalline, les mouvements moléculaires sont extrêmement lents (νc < ν0), ce qui provoque également un long (voir fig. 3-5).