28: TRAITEMENT DE L’HYPERTENSION ARTÉRIELLE PULMONAIRE

CHAPITRE 28 TRAITEMENT DE L’HYPERTENSION ARTÉRIELLE PULMONAIRE 








ÉPIDÉMIOLOGIE


L’hypertension pulmonaire (HTP) est un état hémodynamique et physiopathologique caractérisé par une élévation de la pression artérielle pulmonaire moyenne (PAPm) ≥ 25 mmHg au repos mesurée lors du cathété-risme cardiaque droit. L’HTP peut être présente dans des situations cliniques multiples, qui ont été classifiées dans cinq cadres nosologiques avec des caractéristiques spécifiques mises à jour lors du 4e congrès mondial sur l’HTP à Dana Point en 2008 (tableau 28.1) : hypertension artérielle pulmonaire (HTAP-groupe 1), maladie pulmonaire veino-occlusive et/ou hémangiomatose capillaire pulmonaire (groupe 1′), HTP due aux cardiopathies gauches (groupe 2), HTP due aux maladies respiratoires et/ou à une hypoxie (groupe 3), HTP thromboembolique chronique (groupe 4), HTP de mécanisme non clair ou multifactoriel (groupe 5). Dans ce chapitre, seules les HTAP de groupe 1 seront abordées car il s’agit du seul groupe clinique ayant un traitement spécifique et un algorithme de traitement fondé sur des preuves.



L’HTAP est une maladie vasculaire pulmonaire rare et grave, caractérisée par l’augmentation des résistances artérielles pulmonaires, aboutissant à une insuffisance cardiaque droite. Cette maladie peut survenir de façon sporadique (HTAP idiopathique), dans un contexte familial (HTAP héritable) ou compliquer l’évolution de certaines pathologies (connectivites, cardiopathie congénitale, hypertension portale, infection par le VIH) ou être induite par des médicaments et des toxiques (prise d’anorexigènes principalement).


Les données issues des récents registres proposent une épidémiologie de l’HTAP [1]. La prévalence de l’HTAP a été ainsi estimée à 15 cas/million d’habitant chez l’adulte. L’incidence de l’HTAP est estimée à 2,4 cas/million population adulte/an [3]. Des données récentes écossaises et d’autres pays ont confirmé que la prévalence de l’HTAP est de 15-50 sujets par million d’habitants en Europe [2]. Les premières données issues du registre français montraient un taux de 39,2 % de patients pour l’HTAP idiopathique et 3,9 % d’HTAP héritable [3]. Dans le sous-groupe des HTAP associées, 15,3 % présentaient une connectivite, 11,3 % avaient une cardiopathie congénitale, 10,4 % avaient une hypertension portale, 9,5 % avaient une HTAP induite par anorexigène et 6,2 % présentaient une infection par le VIH. Les données les plus récentes du registre national de l’HTAP (décembre 2011) rapportent un total de 4 864 patients atteints d’HTAP identifiés [4]. En France, le centre de référence des hypertensions pulmonaires sévères de l’adulte et de l’enfant (service de pneumologie, hôpital de Bicêtre) assure la coordination du réseau français de l’HTAP qui est composé de 23 centres de compétences en France métropolitaine et DOM-TOM 5, faisant de la France un leader dans ce domaine.



PHYSIOPATHOLOGIE EN LIEN AVEC LA THÉRAPEUTIQUE


La physiopathologie de l’HTAP est complexe et encore partiellement méconnue. Elle fait intervenir des anomalies fonctionnelles et structurales des artères pulmonaires, conduisant à une obstruction vasculaire elle-même à l’origine de l’augmentation des résistances vasculaires. Il en résulte une augmentation de la post-charge du ventricule droit qui, à terme, conduit à une insuffisance cardiaque droite.


Le remodelage vasculaire est marqué par la prolifération de cellules musculaires lisses et de fibroblastes au niveau de la média et de l’intima et la prolifération des cellules endothéliales. La physiopathologie de l’HTAP est également caractérisée par une prolifération des cellules endothéliales. La dysfonction endothéliale est au premier plan, avec un déséquilibre entre une production insuffisante de molécules vasodilatatrices (et notamment le monoxyde d’azote et la prostacycline) et une production excessive de vasoconstricteurs tels que l’endothéline ; les voies de ses médiateurs représentent aujourd’hui les principales cibles pharmacologiques des traitements spécifiques de l’HTAP (cf. infra Contre-indications).


Certaines HTAP peuvent être consécutives à la prise de médicaments. Les plus connus sont les anorexigènes amphétaminiques, à l’origine d’une véritable épidémie d’HTAP ayant conduit à leur retrait du marché en 1997 (i.e. : fenfluramine (Pondéral), dexfenfluramine (Isoméride)) et plus récemment en France pour le benfluorex (Médiator) [6]. Le mécanisme toxique met en jeu une interaction complexe et spécifique avec les actions de la sérotonine au niveau du tissu artériel pulmonaire. Ainsi, il sera nécessaire d’interroger le patient sur l’éventuelle prise antérieure de ces médicaments pour lesquels l’imputabilité a été prouvée. De même, les professionnels de santé, notamment le pharmacien, seront particulièrement attentifs à la prise de médicaments dont l’imputabilité est jugée probable (ex. : amphétamines, L-tryptophane, méthamphétamines…) ou possible (ex. : cocaïne, chimiothérapies anticancéreuses, inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, pergolide), voire d’autres médicaments ayant une action sur la régulation du système sérotoninergique. Récemment, un risque potentiel lié à la prise de dasatinib, un anticancéreux inhibiteur des tyrosines kinases, a été identifié [7].


Une classe médicamenteuse largement utilisée chez les patients atteints de pathologie cardiaque ou vasculaire est à éviter chez les patients HTAP, il s’agit des bêtabloquants. Une étude réalisée chez des patients atteints d’HTAP associée à une hypertension portale a montré une amélioration de la capacité fonctionnelle à l’arrêt des bêtabloquants [8]. Les effets vasculaires des bêtabloquants ne sont pas encore totalement élucidés. Il a été montré que l’activation des récepteurs bêta-adrénergiques chez l’animal était associée à une relaxation des artères pulmonaires médiée par le monoxyde d’azote endothélial. Ainsi, les bêtabloquants pourraient théoriquement s’opposer à un tel effet bénéfique dans l’HTAP. Des données contradictoires concernant l’utilisation des bêtablo-quants dans l’HTAP émergent mais, à ce jour, il reste recommandé de suspendre un traitement par bêtabloquants chez les patients atteints d’HTAP.



ASPECTS CLINIQUE ET SÉMÉIOLOGIQUE SUCCINCTS


L’HTAP étant une maladie rare, son diagnostic n’est pas aisé et doit être évoqué devant une dyspnée d’effort inexpliquée, une syncope, des douleurs angineuses et/ou une limitation progressive de la capacité d’exercice, en particulier chez les patients sans facteurs de risque apparents, sans symptômes ou signes de maladies cardiovasculaires et respiratoires communes. Une attention particulière doit être apportée chez les patients ayant des facteurs de risque et/ou des maladies listées dans le groupe HTAP.


La détection de l’HTAP repose sur la réalisation d’une écho-graphie cardiaque transthoracique couplée au Doppler (ETT) effectuée en cas de suspicion clinique d’HTAP, ou dans le cadre d’un dépistage chez les patients symptomatiques ou chez les patients asymptomatiques à risque (individus avec une mutation BMPR2 connue, parents au premier degré d’un patient atteint d’HTAP héritable, sclérodermie, cardiopathie congénitale avec shunt gauche-droit, hypertension portale). L’ETT permet l’estimation de la pression artérielle pulmonaire systolique (PAPs) à partir de la mesure de la vitesse du flux d’insuffisance tricuspide [9]. En cas de détection d’une HTAP par l’échographie cardiaque, il est nécessaire d’effectuer un cathé-térisme cardiaque droit qui est le seul examen permettant de confirmer le diagnostic et de déterminer son mécanisme (pré-ou post-capillaire).


Le diagnostic d’HTAP repose sur la mise en évidence d’une pression artérielle pulmonaire moyenne (PAPm) ≥ 25 mmHg avec une pression d’occlusion (PAPO) ≤ 15 mmHg (tableau 28.1).


L’évaluation de la sévérité des patients présentant une HTAP a lieu dans la démarche diagnostique et la prise de décision thérapeutique. Elle a pour but d’évaluer le retentissement fonctionnel de la maladie, mais également de collecter les éléments pronostiques. Elle se base donc sur les étapes suivantes.



–  L’interrogatoire (antécédents de malaises ou syncopes, de poussée d’insuffisance cardiaque droite).


–  L’évaluation de la tolérance à l’effort par la classe fonctionnelle de la New York Heart Association (NYHA) modifiée par l’Organisation mondiale de la santé et le test de marche de 6 minutes. La classification NYHA de la dyspnée, fondée sur des paramètres cliniques, est une donnée pronostique importante chez les patients ayant une HTAP (tableau 28.2). Des données plus objectives comme le test de marche de 6 minutes (TM6) permettent de mieux évaluer la réponse fonctionnelle au traitement. Le TM6 correspond à un exercice simple, dépourvu de risque, ne nécessitant pas d’équipement particulier et très reproductible. L’objectif fixé aux patients est de parcourir la plus grande distance en 6 minutes en gérant eux-mêmes leur effort. Il est clairement établi que dans l’HTAP idiopathique, la distance parcourue en 6 minutes constitue un facteur pronostique indépendant.


–  Les données hémodynamiques collectées lors du cathétérisme cardiaque droit (en particulier la pression auriculaire droite, l’index cardiaque, les résistances vasculaires pulmonaires, la saturation veineuse en oxygène). Lors de la première évaluation, il est indispensable de réaliser un test de vasodilatation en aigu (NO inhalé) pendant le cathétérisme cardiaque droit afin d’identifier les patients « répondeurs » qui peuvent bénéficier d’un traitement par inhibiteurs calciques (< 10 % des HTAP idiopathiques).


–  Certains paramètres échocardiographiques qui permettent d’évaluer la fonction ventriculaire droite et donnent des indices pronostiques.


–  Le dosage plasmatique du Brain Natriuretic Peptide (BNP) ou du NT-proBNP.


Tableau 28.2 Classification fonctionnelle de l’hypertension pulmonaire modifiée à partir de la classification fonctionnelle de la New York Heart Association/Organisation Mondiale de la Santé (NYHA/OMS) 1998 (d’après les recommandations ESC/ERS 2009) [1].















Classe I Patients ayant une hypertension pulmonaire ne présentant pas de limitation de l’activité physique. L’activité physique habituelle n’entraîne pas de dyspnée ou d’asthénie excessive, de douleur thoracique ou de sensations lipothymiques.
Classe II Patients ayant une hypertension pulmonaire entraînant une limitation légère de l’activité physique. Ils n’ont pas de symptômes au repos. L’activité physique habituelle entraîne une dyspnée ou une asthénie excessive, une douleur thoracique ou des sensations lipothymiques.
Classe III Patients ayant une hypertension pulmonaire entraînant une limitation marquée de l’activité physique. Ils n’ont pas de symptômes au repos. Une activité inférieure à l’activité habituelle entraîne une dyspnée ou une asthénie excessive, une douleur thoracique ou des sensations lipothymiques.
Classe IV Patients ayant une hypertension pulmonaire avec une incapacité à mener à bien une activité physique sans avoir de symptômes. Ces patients présentent des signes d’insuffisance cardiaque droite. Une dyspnée et/ou une asthénie peuvent même être présentes au repos. Le handicap est augmenté par n’importe quelle activité physique.

Le tableau 28.3 liste différents paramètres établis pour l’évaluation de la sévérité, de la stabilité et du pronostic de l’HTAP.



L’HTAP est une maladie grave, évoluant vers l’insuffisance cardiaque droite et le décès en l’absence de traitement. Dans une étude déjà ancienne, les taux de survie des patients non traités par des médicaments spécifiques de l’HTAP (i.e. : anticoagulants, diurétiques, oxygène) à 1, 2, 3 et 5 ans étaient de 58 %, 43 %, 33 % et 28 % respectivement [10]. Les objectifs du traitement vont être d’améliorer la survie, améliorer la qualité de vie, améliorer les symptômes et les capacités à l’effort et améliorer l’hémodynamique.




MÉCANISME D’ACTION



Anomalies de la vascularisation pulmonaire dans l’HTAP


L’HTAP est caractérisée par des anomalies fonctionnelles et structurales de la vascularisation pulmonaire. La réactivité vasculaire des artères pulmonaires résulte d’un équilibre entre substances vasodilatatrices, dont les principales sont le monoxyde d’azote (NO), la prostacycline ou l’endothelium-derived hyperpolarizing factor (EDHF), et vasoconstrictrices, avec notamment l’endothéline (ET-1) ou le thromboxane A2.


Une diminution de la production endothéliale de NO et une augmentation de l’expression et de l’activité de la phospho-diestérase de type 5 dans les cellules musculaires lisses artérielles pulmonaires ont été mises en évidence dans l’HTAP. En effet, le NO est produit par l’endothélium à partir de la L-arginine. Son action vasodilatatrice résulte de l’activation de la guanylate cyclase soluble, qui stimule la production de guanosine monophosphate cyclique (GMPc), lui-même responsable de la relaxation des muscles lisses périvasculaires. Le GMPc est hydrolysé en GMP par des phosphodiestérases, et notamment la phosphodiestérase de type 5 (PDE5). Les inhibiteurs de la PDE5 sont donc à l’origine d’une accumulation de GMPc responsable d’une vasodilatation accrue.


La prostacycline (ou prostaglandine I2, PGI2) est un éicosanoïde produit par l’endothélium, qui a un effet antiagrégant plaquettaire et vasodilatateur en activant les récepteurs IP plaquettaires et des cellules musculaires lisses, respectivement. Dans l’HTAP, un déséquilibre entre production de prostacycline (diminuée) et production de thromboxane A2 (augmentée) a été mis en évidence [11].


L’ET-1 est un peptide produit par les cellules endothéliales, qui agit comme un vasoconstricteur puissant en activant deux sous-types de récepteurs (ETA et ETB) présents au niveau des cellules musculaires lisses des artères pulmonaires. La présence de récepteur ETB au niveau endothélial est quant à elle responsable des effets vasodilatateur et antiprolifératif de l’endothéline, de par la libération de NO et de PGI2. L’ET-1, retrouvée en concentration importante au niveau des artères pulmonaires, semble être un acteur majeur de la physiopathologie de l’HTAP. Une augmentation des taux circulants d’ET-1 a été décrite chez les patients ayant une HTAP, et cette concentration semble être corrélée aux résistances vasculaires pulmonaires.


Les médicaments spécifiques de l’HTAP disponibles actuellement agissent au niveau de ces trois voies (figure 28.1).




Analogues de la prostacycline


Le chef de file des analogues de la prostacycline, l’époprosténol, fut le premier médicament dit « spécifique » de l’HTAP. On dispose aujourd’hui de trois molécules, qui diffèrent notamment par leur demi-vie et leur voie d’administration (tableau 28.4) [12].


L’époprosténol (Flolan ou génériques) est un analogue synthétique de la prostacycline endogène. Utilisé depuis plus de vingt ans dans l’HTAP, il demeure à ce jour le seul traitement ayant montré une diminution de la mortalité chez les patients traités. La demi-vie d’élimination très courte (de 3 à 6 minutes) du médicament est néanmoins un inconvénient majeur, qui impose une administration intraveineuse continue de l’époprosténol à l’aide d’une pompe via un cathéter central sous-clavier tunnélisé (cf. infra Administration intraveineuse de l’époprosténol). Une nouvelle formulation thermostable a récemment eu l’AMM aux États-Unis (Veletri) mais n’est pas, à ce jour, disponible en Europe.


Le tréprostinil (Remodulin) est un analogue de la prostacycline dont la demi-vie d’élimination est allongée (3 à 5 heures). Bien que de nombreuses voies d’administration aient été évaluées ou sont en cours d’évaluation, seule l’administration sous-cutanée continue est recommandée en France. Cette voie d’administration a pour principal inconvénient d’induire des douleurs au point d’injection (cf. infra Spécifiques des médicaments).


Enfin, l’iloprost utilisé par voie inhalée (Ventavis) a montré une amélioration fonctionnelle et des paramètres hémodynamiques. Néanmoins la durée d’action limitée du médicament (30 à 60 minutes) impose un schéma thérapeutique contraignant de 6 à 9 inhalations par jour. L’iloprost est également disponible en solution pour voie IV (Ilomédine), mais cette forme est réservée à d’autres indications, notamment le traitement curatif des ulcères digitaux évolutifs associés au phénomène de Raynaud.



Antagonistes des récepteurs de l’endothéline


Les antagonistes des récepteurs de l’endothéline sont les premiers traitements spécifiques oraux à avoir eu une AMM dans l’HTAP, avec la mise sur le marché au début des années 2000 du bosentan (Tracleer), également indiqué dans la prévention des récidives d’ulcérations digitales dans la sclérodermie systémique.


Le bosentan est un antagoniste compétitif qui se lie avec une forte affinité aux deux isoformes de récepteurs de l’endothéline. Après administration orale, le bosentan est modérément absorbé, avec une biodisponibilité chez le sujet sain d’environ 50 % [13]. Le métabolisme hépatique du bosentan et l’excrétion biliaire de ses métabolites représentent la principale voie d’élimination du médicament. Le bosentan est métabolisé au niveau du foie par le cytochrome P450 (CYP), pour conduire à la formation de trois métabolites, dont le principal (Ro 48-5033, métabolite actif) est issu de la biotransformation par les CYP2C9 et CYP3A4. Le bosentan est également un inducteur modéré de ces deux isoformes. Par ailleurs, il est inhibiteur de certains transporteurs hépatobiliaires situés au niveau de la membrane basolatérale (NTCP/SLC10A1 : Na+-taurocholate cotransporting polypeptide) et, d’autre part, de la membrane canaliculaire (BSEP/ABCB11 : BSEP : bile salt export pump) [14]. L’hépatotoxicité induite par le bosentan pourrait être due à l’accumulation d’acides biliaires dans l’hépatocyte résultant de l’inhibition de ces transporteurs.


L’ambrisentan (Volibris) est un antagoniste sélectif des récepteurs ETA, qui présente ainsi l’avantage théorique par rapport aux inhibiteurs mixtes de préserver l’effet vasodilatateur lié à l’activation des récepteurs ETB endothéliaux, qui augmente la libération de NO et de prostacycline. Bien que métabolisé principalement par le CYP3A4 (et dans une moindre mesure les CYP3A5 et 2C19), l’ambrisentan n’exerce pas d’effet inducteur ou inhibiteur sur ces isoformes. Par ailleurs, il n’inhibe pas les transporteurs NTCP ou BSEP. Ces propriétés pharmacocinétiques expliquent le nombre limité d’interactions médicamenteuses cliniquement significatives de l’ambrisentan, et une meillleure tolérance hépatique que celle du bosentan.


Notons enfin que le sitaxentan, un autre antagoniste ETA, a été retiré du marché fin 2010 suite à des effets indésirables hépatiques mortels.





CRITÈRES DE CHOIX THÉRAPEUTIQUE


Le traitement des patients présentant une HTAP ne peut être considéré comme une simple prescription de médicaments [17]. Il est caractérisé par une stratégie complexe, qui inclut une évaluation de la sévérité de la maladie, des mesures générales et des traitements symptomatiques, l’évaluation de la vasoréactivité, l’estimation de l’efficacité et l’association de différents médicaments ainsi que des interventions. L’expérience du prescripteur est essentielle. C’est une des raisons pour lesquelles la décision de traitement devra être prise au sein du centre de référence ou au sein des centres de compétence par des médecins experts. En effet, les médicaments spécifiques de l’HTAP ont le statut de médicament orphelin au sens du règlement (CE) nº 141/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1999. À ce titre, « la prise en charge de ces médicaments est subordonnée à la validation de la prescription initiale par le centre de référence de la maladie pour le traitement de laquelle la prescription est envisagée, lorsqu’il existe, ou par l’un des centres de compétence qui lui sont rattachés » . De plus, les médicaments spécifiques de l’HTAP font l’objet d’une prescription hospitalière réservée à certains spécialistes (pneumologie, cardiologie, médecine interne dans l’HTAP) et sont disponibles uniquement par le biais des pharmacies hospitalières dans le cadre de la rétrocession aux patients ambulatoires. Ces médicaments ont un coût important pouvant atteindre plusieurs dizaines de milliers d’euros par an et par malade pour les analogues de la prostacycline. La Haute Autorité de Santé a diffusé des recommandations en 2007, dont la version actualisée en 2010 [18] reprend les récentes recommandations pour le diagnostic et le traitement de l’HTAP définies de façon conjointe par les sociétés européennes de cardiologie et de pneumologie (ESC/ERS) [1].


La figure 28.2 résume l’algorithme de traitement proposé par les sociétés européennes de cardiologie et pneumologie.




Mesures générales






Contraception


La grossesse est formellement contre-indiquée du fait du risque vital pour la mère et l’enfant, justifiant une méthode efficace de contraception chez les femmes en âge de procréer. De plus, certains traitements médicamenteux de l’HTAP (antagoniste des récepteurs de l’endothéline, anti-vitamines K) sont tératogènes. La méthode contraceptive doit être discutée au cas par cas avec la patiente, l’équipe multidisciplinaire HTAP du centre de référence/compétence et un gynécologue-obstétricien [19]. Les contraceptifs oraux sont théoriquement contre-indiqués du fait de l’état pro-thrombotique qu’ils induisent et du risque d’interaction médicamenteuse observé avec certains médicaments spécifique de l’HTAP (e.g. : risque de diminution de l’efficacité du contraceptif). La contraception consiste classiquement en la mise en place d’un dispositif intra-utérin (DIU) à la progestérone, limitant le risque d’hémorragies par allongement de la durée des règles et augmentation de leur abondance observé avec le DIU au cuivre en cas de traitement anticoagulant. Cette méthode de contraception par DIU à la progestérone présente de nombreux avantages : efficacité, simplicité, compliance, peu de contre-indications et interactions, utilisation possible chez la femme nullipare, remboursement.



Traitements médicamenteux spécifiques


En l’absence de données comparant les différents traitements, le choix du traitement initial dépend autant de l’expérience des équipes que de l’état clinique du patient et de ses préférences. La plupart des experts recommandent pour les HTAP sévères en classe fonctionnelle IV de la NYHA un traitement par époprosténol en perfusion intraveineuse continue. Pour les patients en classe fonctionnelle II de la NYHA, il est recommandé d’initier un traitement par antagoniste des récepteurs de l’endothéline ou un inhibiteur de la phosphodiestérase 5. Il est important de préciser qu’il n’existe à ce jour aucune recommandation de traitement pour les patients en classe fonctionnelle I de la NYHA. Pour les patients en classe fonctionnelle III de la NYHA, il existe plusieurs alternatives pour l’initiation de traitement.


Une autre voie thérapeutique consiste en l’association de médicaments de mécanismes d’action différents dans le but de potentialiser leurs effets et ainsi d’augmenter leur bénéfice clinique, on parle alors de « traitement combiné ». L’initiation d’un traitement combiné d’emblée ou séquentiel (adjonction d’un nouveau traitement en cas d’échec du précédent) sont deux approches différentes du traitement combiné. Les données sont encore limitées, et il n’existe pas de consensus sur le traitement combiné. Il est actuellement discuté en deuxième ligne après échec d’un traitement de première ligne ou dans certains cas en première ligne chez les patients les plus sévères. Il associe habituellement les traitements oraux (bosentan et/ou sildénafil) avec un traitement par l’époprosténol ou un analogue de la prostacycline (inhalé ou sous-cutané).


L’utilisation des inhibiteurs calciques constitue un cas particulier. En effet, la vasoconstriction constitue la cause principale de l’HTAP seulement chez une minorité de patients (environ 7 à 10 %) qu’il est indispensable d’identifier car l’administration au long cours d’inhibiteurs calciques améliore significativement leur qualité de vie et leur survie (« répondeurs »). Les patients suivant ce traitement peuvent être identifiés par la réalisation d’un test de vasodilatation par inhalation de NO lors du cathétérisme droit. Ces patients répondeurs aux inhibiteurs calciques présentent une forme particulière de la maladie et il est essentiel de les identifier car leur réponse aux traitements spécifiques de l’HTAP est incertaine. Les inhibiteurs calciques utilisés au long cours chez les patients répondeurs sont le diltiazem, la nifédipine ou l’amlopidine à dose élevée (par exemple diltiazem, 360 à 720 mg/jour ; nifédipine, 80 à 180 mg/jour).



Traitements médicamenteux non spécifiques






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May 4, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 28: TRAITEMENT DE L’HYPERTENSION ARTÉRIELLE PULMONAIRE

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