17: Oreille externe

Chapitre 17 Oreille externe




Otites externes infectieuses


Seules les suspicions d’otite maligne externe (ou otite nécrosante progressive) nécessitent une prise en charge radiologique. L’imagerie a pour but d’établir un diagnostic positif, d’évaluer l’extension et d’établir une référence pour une surveillance ultérieure.




Otite maligne externe


L’otite maligne externe est décrite en 1959 par Meltzer et Kelemen comme une atteinte infectieuse sévère rapidement évolutive et parfois fatale. Elle peut s’étendre à l’oreille moyenne, à la mastoïde, à l’articulation temporomandibulaire et aux espaces profonds de la face. Les fissures de Santorini situées dans le plancher cartilagineux du conduit initial externe ont souvent un rôle dans l’extension du processus infectieux.


L’otite maligne externe survient chez des patients diabétiques ou immunodéprimés (VIH, chimiothérapie, sujet âgé). L’âge de survenue est en général avancé. Quelques rares cas ont cependant été rapportés chez l’enfant. Dans 98 % des cas, le germe en cause est Pseudomonas aeruginosa, rarement Klebsiella [2, 3]. Les co-infections avec Aspergillus fumigatus surviennent principalement dans un contexte d’immunosuppression VIH [4, 5]. Dans les années 90, le traitement par quinolones a révolutionné le pronostic et la prise en charge de cette pathologie [6].



Diagnostic positif


Cliniquement, l’otite maligne externe associe une otalgie sévère à une otorrhée purulente, verdâtre et nauséabonde. Le patient est le plus souvent apyrétique.


L’examen otoscopique retrouve un tissu de granulation au niveau du plancher du conduit auditif externe, sans perforation tympanique.


Dans les formes plus évoluées, l’examen retrouve des signes d’atteinte temporomandidulaire et/ou des déficits neurologiques concernant le nerf facial (20 % à 50 %), le nerf hypoglosse, les nerfs mixtes et le trijumeau.


Les complications sont rares mais de pronostic sombre : il peut s’agir de méningites secondaires, d’empyèmes sous-duraux, d’abcès cérébraux ou de thromboses des sinus veineux intracrâniens.


Le diagnostic est établi sur un faisceau d’arguments à la fois cliniques, radiologiques et biologiques (syndrome inflammatoire), bactériologiques (prélèvement et mise en cultures avec recherche de Pseudomonas aeruginosa).


Le pronostic de l’otite maligne externe est conditionné par l’extension à la base du crâne et par les atteintes nerveuses, survenant dans environ 20 % des cas. Sous antibiothérapie adaptée, la mortalité est de 3 % ; elle s’élève à 50 % en cas de paralysie faciale par atteinte de la VIIe paire crânienne et à 80 % en cas d’atteinte des autres paires crâniennes. Les récidives sont fréquentes (10 à 25 %), parfois tardives jusqu’à 12 mois après l’arrêt du traitement.


Le traitement repose sur une antibiothérapie par voie générale durant un minimum de 6 à 8 semaines. Il consiste en une monothérapie per os par fluoroquinolones ou par céphalosporines de troisième génération. Les formes graves justifient d’une bithérapie par voie intraveineuse pendant 4 à 6 semaines, éventuellement associée une oxygénothérapie hyperbare quotidienne afin de stimuler l’angiogenèse et la réaction leucocytaire. La chirurgie est réservée aux gestes de détersion. Dans tous les cas, l’équilibre glycémique des patients diabétiques doit être obtenu.



Imagerie des otites malignes externes


L’imagerie fait appel au scanner et à l’IRM. Le scanner doit être réalisé en coupes fines et les reconstructions avec un filtre osseux sont indispensables. L’injection de produit de contraste est utile si l’IRM n’est pas disponible. Des reconstructions en fenêtre parenchymateuse sont alors nécessaires, et l’examen doit comprendre l’étude des espaces profonds de la face et de l’ensemble de l’encéphale.


Le scanner objective un épaississement des parois du conduit auditif externe et une éventuelle diffusion du processus vers les cavités de l’oreille moyenne et de la mastoïde. Les signes d’ostéolyse doivent être recherchés (parois du MAE, mastoïde), ils peuvent témoigner d’une ostéomyélite (fig. 17-2).



L’IRM est nécessaire au diagnostic et surtout au bilan d’extension. Les parois du conduit acoustique externe sont épaissies et fortement rehaussées. Un hyposignal T1 spontané de la médullaire osseuse, avec prise de contraste sur les séquences en T1 en saturation de la graisse après injection de gadolinium [7] est en faveur d’une ostéomyélite (fig. 17-2). L’ostéolyse peut être parfois visible en IRM [8]. L’IRM doit s’attacher à rechercher des signes de cellulite avec des zones de rehaussement des tissus mous, des signes d’arthrite temporomandibulaire, des signes d’abcédation des espaces profonds de la face ou de thrombophlébite. L’infiltration de la graisse rétrocondylienne est un signe très précoce bien que peu sensible de l’affection [9].


L’IRM permet de rechercher également une extension aux trous de la base du crâne, matérialisée par une infiltration et un rehaussement du foramen stylomastoïdien (atteinte du VII), du canal condylien (atteinte du XII), du foramen jugulaire (nerfs mixtes IX, X, XI), du foramen lacerum, du foramen rond (V2) ou du foramen ovale (V3).

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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 17: Oreille externe

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