15: Expression cutanée des maladies internes

Chapitre 15 Expression cutanée des maladies internes



Maladies systémiques inflammatoires



Maladie de Behçet


Aphtose génitale. Maladie de Behçet (fig. 15-1). Les aphtes buccaux et génitaux («aphtose bipolaire ») ainsi les pustules sur fond érythémateux (fig. 15-2) et/ou purpurique sont les signes cutanés les plus évocateurs de cette maladie auto-inflammatoire systémique comportant notamment un risque de thrombophlébite, d’anévrysmes, d’uvéite et d’atteinte inflammatoire du système neurologique central. Les thrombophlébites superficielles (fig. 15-3) sont également plus fréquentes au cours de cette affection. La palpation permet de repérer le cordon veineux thrombosé.






Lupus érythémateux (LE)


Eruption malaire (érythème en vespertilio). Lupus érythémateux aigu, dans le cadre d’un lupus érythémateux systémique (fig. 15-4). Les signes cutanés sont fréquents au cours de cette connectivité pouvant toucher presque tous les organes, notamment les articulations, les reins, les séreuses, le cœur et le système nerveux central. Certains signes cutanés, appelés «lésions spécifiques», peuvent permettre le diagnostic de l’affection en l’absence d’autres signes de la maladie, car il existe un aspect histopathologique particulier, une dermite de l’interface. Leur terminologie est complexe et affaire de spécialiste ; seule la notion de spécificité est ici véritablement importante. D’autres signes permettent d’identifier un sous-groupe de malades particulièrement exposés aux complications thromboemboliques et vasculaires. Les principales lésions spécifiques sont l’érythème en vespertilio (fig. 15-4), les lésions de lupus érythémateux subaigu psoriasiforme (fig. 15-5) et/ou annulaire (fig. 15-6) et les lésions de lupus érythémateux chronique (fig. 15-7). La lésion élémentaire du LE aigu est un érythème congestif (fig. 15-4) qui peut devenir squameux. Au cours du lupus érythémateux aigu, l’exanthème peut être généralisé (fig. 15-8) ; les lésions des extrémités sont fréquentes (fig. 15-9). L’hyperhémie périunguéale est un signe fréquent (fig. 15-10), notamment chez les enfants. La lésion élémentaire du LE subaigu est un érythème à évolution leucodermique blanc gris et télangiectasique (fig. 15-6) qui peut être psoriasiforme (fig. 15-5) et/ou vésiculoroûteux, surtout en périphérie (fig. 15-11). Le LE chronique associe les signes élémentaires suivants : érythème, kératose, dyschromie et atrophie cutanée (fig. 15-7). Les lésions suivantes, survenant essentiellement chez des sujets atteints de lupus érythémateux systémiques, peuvent être révélatrices de processus thrombotiques : livédo ramifié à mailles larges non infiltrées, suspendu (fig. 15-12) ou au contraire livédo fin acral (fig. 15-13), atrophie blanche (fig. 15-14), papules blanches porcelainées type papule atrophiante de Degos (fig. 15-15), purpura non infiltré acral (fig. 15-16) et anétodermie (cf.fig. 6-12).
















Dermatomyosite


Erythème en regard des surfaces articulaires du dos de la main, notamment métacarpophalangiennes et interphalangiennes proximales (fig. 15-17). Les signes cutanés sont tellement caractéristiques de cette affection qu’ils en permettent le diagnostic. Il s’agit d’un érythème parfois papuleux (papules de Gottron), en regard des articulations métacarpophalangiennes (fig. 15-18) et des interphalangiennes proximales ; ces lésions peuvent évoluer vers des nécroses croûteuses (fig. 15-19). Il peut aussi s’agir d’un érythème linéaire du dos des mains (cf.fig. 1-1) ou flagellé du tronc (cf.fig. 9-23), ou d’un érythème avec une teinte violacée très particulière, à évolution poïkilodermique des genoux, des coudes et/ou des paupières (fig. 15-20). La présence de mégacapillaires (télangiectasies inframillimétriques) du pourtour des ongles (fig. 15-21, flèches) est fréquente ; un aspect proche peut se voir au cours de la sclérodermie. La couleur violacée des lésions, la présence de télangiectasies et l’évolution poïkilodermique sont des éléments sémiologiques en faveur de ce diagnostic. Le diagnostic de dermatomyosite doit être porté tôt, car cette affection comporte plusieurs modalités évolutives graves, parmi lesquelles une atteinte musculaire majeure (muscles de la déglutition, diaphragme, cœur, etc.), une pneumopathie interstitielle gravissime, un risque d’infections opportunistes (exemple, pneumocystose) et un cancer associé dans environ 15 % des cas.








Sclérodermie systémique


Sclérose de la main avec effacement de tous les plis digitaux et doigts rétractés (fig. 15-22). La sclérodermie systémique est une maladie de pathogénie complexe et de cause inconnue. Il en existe différentes formes cliniques qui se caractérisent par une induration plus ou moins diffuse de la peau qui perd sa souplesse (= sclérose), ce qui est extrêmement handicapant. L’atteinte prédomine aux extrémités et les doigts finissent par se rétracter (fig. 15-22) ; le faciès paraît figé, les rides effacées sauf sur le pourtour buccal (fig. 15-23); il est couvert de télangiectasies. Une dépression supraveineuse (groove sijyn) serait caractéristique (fig. 15-24). Les sujets sclérodermiques ont toujours (ou quasiment) un phénomène de Raynaud (fig. 15-25). Ils développent fréquemment des ulcérations digitales. La présence de télangiectasies rectangulaires faciales (fig. 15-26) et digitales (fig. 15-27) est typique. L’examen de la dernière phalange doit être attentif : il existe des mégacapillaires, une pâleur périun guéale et parfois des nécroses cuticulaires (fig. 15-28) ; la fusion de la tablette unguéale avec la peau périunguéale (pterygium) est caractéristique (fig. 15-28). Enfin, il existe un trouble pigmentaire avec notamment une hypopigmentation luisante particulièrement bien visible sur peau pigmentée (fig. 15-29).











Vasculite


Purpura palpable. Vasculite leucocytoclasique (fig. 15-30). Les vasculites peuvent avoir de multiples expressions dermatologiques dépassant le cadre de cet ouvrage. Il s’agit d’un groupe de maladies caractérisées par une atteinte inflammatoire de la paroi vasculaire, pouvant entraîner une thrombose secondairement. Tous les organes peuvent être touchés, le plus fréquemment la peau, le tube digestif et les reins. Il existe de nombreuses variétés de vasculites, classées en fonction de la taille du plus petit vaisseau atteint et de la présence de certains anticorps (ANCA : anticorps anticytoplasme des polynucléaires). L’expression dermatologique la plus fréquente de toutes les vasculites est une papule érythémateuse et/ou purpurique (fig. 15-30). Le siège le plus commun est la jambe et les lésions peuvent confluer. Une évolution nécrotique ou pustuleuse est possible. Des papules purpuriques millimétriques confluentes périunguéales et digitales sont caractéristiques de la vasculite rhumatoïde (fig. 15-31). Un livédo infiltré ou accompagné de papules ou de nodules est évocateur d’une vasculite des vaisseaux de moyen ou de grand calibre (fig. 15-32).






Sarcoïdose


Plaque érythémateuse lupoïde à la vitropression (fig. 15-33 et 15-35). La sarcoïdose est une maladie granulomateuse systémique de cause inconnue. Elle peut toucher quasiment tous les organes, notamment les poumons, les ganglions, l’œil et la peau. Il existe de nombreuses manifestations cutanées, dont certaines, comme l’érythème noueux (cf.fig. 5-21 et 5-22), ne sont pas spécifiques. D’autres sont spécifiques et caractérisées par un infiltrât granulomateux dermique et/ou hypodermique. Le diagnostic peut alors être posé par une biopsie cutanée. Les formes les plus classiques sont l’atteinte papuleuse (petite et grande papule) et l’atteinte en plaque. Une des caractéristiques de ces lésions est leur aspect lupoïde à la vitropression. Il s’agit d’une teinte jaune de la lésion qui devient apparente lorsqu’on exerce une pression avec un objet transparent qui la vide de son contenu sanguin (fig. 15-33 et 15-35). Les lésions sont rouges ou rouge brun ; elles peuvent être télangiectasiques (fig. 15-34, flèches et 15-36). L’atteinte érythémateuse en plaque du visage définit la forme clinique appelée «lupus pernio». L’atteinte sur la face latérale du nez est appelée angiolupoïde de Brocq et Pautrier (fig. 15-36, cf.fig. 35-7). L’atteinte cutanée narinaire impose de rechercher une atteinte endonasale qui peut devenir obstructive et justifier un traitement général. Enfin, l’infiltration d’une cicatrice ancienne (fig. 15-37) doit évoquer en priorité une sarcoïdose ; une telle infiltration se voit aussi en cas de récidive de cancer et de certaines parasitoses (coccidioïdomycose, sporotrichose).








Réticulohistiocytose multicentrique


Multiples papules couleur chair ou érythémateuses et violacées du dos de la main (fig. 15-38). La réticulohistiocytose multicentrique est un syndrome arthrocutané se manifestant par une polyarthrite destructrice symétrique proche de la polyarthrite rhumatoïde. L’aspect dermatologique est assez caractéristique : il s’agit d’une éruption papulonodulaire qui débute et qui prédomine sur la face dorsale des mains (fig. 15-38), notamment l’atteinte du repli sus-unguéal « en collier de perles » est caractéristique (fig. 15-39). Il s’agit de lésions fermes, dermiques, sans altération de la surface cutanée. La biopsie d’une telle lésion permet le diagnostic de l’affection, car l’aspect histopathologique est pathognomonique en montrant un infiltrât granulomateux avec des cellules multinucléées et un aspect en verre dépoli.



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Apr 23, 2017 | Posted by in DERMATOLOGIE | Comments Off on 15: Expression cutanée des maladies internes

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