14: Orbite

Chapitre 14 Orbite



Topographie



Paroi osseuse et tissus mous


Sept os forment les frontières de l’orbite (voir fig. 1-1 à 1-3 dans la Section 7 du BCSC, Orbit, Eyelids, and Lacrimal System [Orbite, paupières et système lacrymal]). Ces sept os sont le frontal, le zygomatique, le palatin, le sphénoïde, l’ethmoïde et le maxillaire.


La cavité orbitaire a la forme d’une poire et un volume de 30 ml. Les structures et les tissus occupant la cavité sont le globe oculaire, la glande lacrymale, les muscles, les tendons, la graisse, la capsule de Tenon, les vaisseaux, les nerfs, les ganglions sympathiques et la trochlée cartilagineuse (poulie du grand oblique*). Les processus inflammatoires et néoplasiques qui augmentent le volume de l’orbite aboutissent à une exophtalmie (protrusion) du globe et/ou à un déplacement (déviation) par rapport à la position horizontale ou verticale. L’importance et la direction de ce déplacement permettent de localiser la position de la masse.


*NdT


La glande lacrymale est située à la partie antérieure du quadrant supérotemporal de l’orbite. La glande est divisée en lobe orbitaire et lobe palpébral par l’aponévrose du muscle releveur de la paupière. Les acinus glandulaires sont composés d’un épithélium cuboïde. Les canaux, qui sont dans un stroma fibrovasculaire, sont délimités par un épithélium cuboïde mince, avec une seconde couche externe de cellules myoépithéliales plates en couche mince. Voir la Section 2 du BCSC : Fundamentals and Principles of Ophthalmology (Principes et fondements de l’ophtalmologie), et la Section 7, Orbit, Eyelids, and Lacrimal System (Orbite, paupières et système lacrymal) du BCSC.



Anomalies congénitales



Kyste dermoïde et autres kystes épithéliaux


Les plus importantes catégories de kystes orbitaires de l’enfance comprennent les kystes de l’épithélium de surface, les kystes tératomateux, les kystes neuraux, les kystes secondaires (mucocèle), les kystes inflammatoires (parasitaires) et les lésions non kystiques mais avec une composante kystique. Les kystes congénitaux de l’épithélium de surface sont divisés en kystes dermoïdes et kystes épithéliaux (épidermoïdes) simples. Les kystes dermoïdes sont les plus fréquents. On pense qu’ils se développent à partir d’un amas de cellules épithéliales embryonnaires qui ne migre pas normalement durant l’embryogenèse. Ils peuvent saillir à travers les sutures frontozygomatique et frontomaxillaire et prendre une forme d’haltère. La plupart se manifestent dans l’enfance comme une masse du quadrant supérotemporal de l’orbite. La rupture du kyste peut produire une réaction inflammatoire granulomateuse marquée. Histologiquement, un kyste dermoïde est encapsulé et délimité par un épithélium pavimenteux kératinisé stratifié. Le kyste contient de la kératine et des cheveux, et sa paroi est entourée d’annexes cutanées et de structures annexielles, comportant des glandes sébacées, des follicules pileux et des glandes sudorales (fig. 14-1). Si la paroi du kyste n’a pas de structures annexielles, le kyste contient de la kératine et le terme kyste épithélial (épidermoïde) simple est utilisé. Un kyste épithélial simple peut aussi être entouré par un épithélium de type respiratoire, conjonctival ou apocrine.




Inflammations


Le terme maladies inflammatoires de l’orbite (MIO) décrit une grande variété de processus pathologiques et de présentations cliniques en rapport avec l’inflammation des tissus orbitaires. Les MIO peuvent être idiopathiques ou secondaires à une maladie inflammatoire systémique (comme la maladie de Basedow), à un corps étranger, ou à une maladie infectieuse. Les MIO incluent le spectre des infections bactériennes ou fongiques, des inflammations diffuses de multiples tissus (par exemple inflammation orbitaire sclérosante, MIO antérieures diffuses), et des atteintes prédominant au niveau de structures spécifiques de l’orbite (par exemple myosites, périnévrites optiques). Les affections simulant une MIO incluent les masses orbitaires congénitales et les lésions néoplasiques comme le lymphome ou le rhabdomyosarcome. Il faut les éliminer avant de porter le diagnostic de MIO.



Inflammations non infectieuses



Inflammation orbitaire non spécifique


L’inflammation orbitaire non spécifique (IONS), aussi appelée inflammation orbitaire idiopathique et syndrome d’inflammation orbitaire [inflammation orbitaire sclérosante], correspond à une masse qui simule une néoplasie (elle est donc parfois appelée pseudotumeur) mais n’a pas de cause reconnaissable. Cette maladie est en cause dans environ 5 % des lésions orbitaires. Cliniquement, les patients ont un début brutal et se plaignent habituellement de douleurs. Les enfants peuvent être atteints aussi bien que les adultes. La réponse inflammatoire peut être diffuse ou compartimentée. Quand elle est localisée à un muscle oculomoteur, on parle de myosite orbitaire (fig. 14-2) ; quand elle est localisée à la glande lacrymale, elle est fréquemment appelée dacryoadénite.



Dans les phases initiales, l’inflammation prédomine, avec une réponse inflammatoire polymorphe (éosinophiles, neutrophiles, plasmocytes, lymphocytes et macrophages) qui est souvent périvasculaire et qui infiltre fréquemment les muscles et la graisse, produisant une nécrose de la graisse. Dans les phases plus tardives, la fibrose est la composante prédominante, souvent avec des follicules lymphoïdes disséminés ayant des centres germinaux. La fibrose peut remplacer inexorablement la graisse orbitaire et entourer les muscles et le nerf optique (fig. 14-3). Le marquage immunophénotypique et les analyses génétiques moléculaires peuvent différencier une IONS d’une tumeur lymphoïde à partir du caractère polyclonal (IONS) ou monoclonal (lymphome) de la prolifération lymphocytaire. Des récepteurs CD20 et CD25 ont été identifiés et pourraient constituer la base de futurs traitements. Les infiltrats plasmocytaires exprimant l’immunoglobuline G4 (IgG4) sont récemment devenus un marqueur pour la variante sclérosante des maladies fibro-inflammatoires. La nature des résultats anatomopathologiques doit dicter les recommandations thérapeutiques. Voir aussi la Section 7 du BCSC, Orbit, Eyelids, and Lacrimal System (Orbite, paupières et système lacrymal).




Orbitopathies dysthyroïdiennes


L’orbitopathie dysthyroïdienne (OD), aussi appelée maladie de Basedow, est associée à un dysfonctionnement de la thyroïde et est la cause la plus fréquente d’exophtalmie unilatérale ou bilatérale chez les adultes. Les signes et les symptômes de l’OD sont dus à l’inflammation du tissu conjonctif orbitaire, à l’inflammation et à la fibrose des muscles oculomoteurs et à l’adipogenèse. Les muscles sont fermes et blancs, et les tendons ne sont habituellement pas atteints. Un infiltrat de cellules mononucléées, de lymphocytes, de plasmocytes, de mastocytes et de fibroblastes est présent dans le tissu interstitiel des muscles oculomoteurs, le plus souvent au niveau des muscles droit inférieur et droit médial (fig. 14-4). Chez des patients avec ou sans OD, les fibroblastes orbitaires sont distincts sur le plan phénotypique car ils expriment les récepteurs CD40 retrouvés généralement sur les cellules B et d’autres récepteurs de surface qui jouent habituellement un rôle dans la modulation de la réponse inflammatoire. Quand le récepteur de cellules B est attaché par le CD154 lié à une cellule T, les gènes d’inflammation des fibroblastes sont régulés positivement (ou up-régulés), y compris l’interleukine-6 (IL6), l’IL8 et la prostaglandine E2 (PGE2). De ce fait, la synthèse de hyaluronane et de glycosaminoglycanes (GAG) est augmentée. Cette régulation positive des fibroblastes orbitaires est 100 fois plus grande que celle que l’on observe dans les fibroblastes non orbitaires en réponse au même stimulus. En raison de l’augmentation de volume, le nerf optique peut être comprimé au niveau de l’apex orbitaire, et il peut y avoir un œdème de la papille. Les stades tardifs de l’OD sont associés à une fibrose progressive qui entraîne une restriction des mouvements oculaires et une rétraction sévère des paupières, avec comme conséquence une kératite d’exposition.



De plus, les fibroblastes orbitaires qui expriment le récepteur à la thyrotropine (TSH-R) sont retrouvés dans l’OD. Le nombre de cellules colorées en immunohistochimie est élevé dans la phase précoce de la maladie, diminue avec le temps, et est corrélé positivement avec le niveau sérique de l’anticorps anti-TSH-R au début de l’OD. La stimulation du TSH-R aboutit à une régulation positive du TSH-R ARNm. Étant donné que les fibroblastes sont issus de la crête neurale et sont pluripotents, l’augmentation de ce signal provoque une différenciation des adipocytes et une adipogenèse.


Finalement, des études ont identifié des IgG circulantes chez des patients atteints d’OD. Ces IgG reconnaissent et activent le récepteur du facteur de croissance de l’insuline (IGF-1) exprimé à la surface de nombreuses cellules, y compris les fibroblastes. La stimulation de ce facteur de croissance par les IgG circulantes pourrait contribuer au développement de l’OD en poussant les fibroblastes orbitaires à sécréter des glycosaminoglycanes, des cytokines et des chimioattractants.


Voir aussi la Section 1 du BCSC, Update on General Medicine (Actualités en médecine générale), et la Section 7, Orbit, Eyelids, and Lacrimal System (Orbite, paupières et système lacrymal).


Bahn RS. Understanding the immunology of Graves’ ophthalmopathy. Is it an autoimmune disease ? Endocrinol Metab Clin North Am. 2000 ; 29(2) : 287–296.


Gerding MN, van der Meer JWC, Broenink M, Bakker O, Wiersinga WM, Prummel MF. Association of thyrotropin receptor antibodies with the clinical features of Graves’ ophthalmopathy. Clin Endocrinol. 2000 ; 52(3) : 267–271.


Kazim M, Goldberg RA, Smith TJ. Insights into the pathogenesis of thyroid-associated orbitopathy : evolving rationale for therapy. Arch Ophthalmol. 2002 ; 120(3) : 380–386.


Wiersinga WM, Prummel MF. Pathogenesis of Graves’ ophthalmopathy—current understanding [editorial]. J Clin Endocrinol Metab. 2001 ; 86(2) : 501–503



Inflammations infectieuses




Infections fongiques et parasitaires


La zygomycose (mucormycose) rhinocérébrale ou rhino-orbito-cérébrale survient habituellement chez des patients ayant un diabète sucré mal contrôlé (surtout ceux qui ont une acidocétose), une tumeur maligne ou des brûlures étendues ; chez les patients sous traitement corticoïde ; ou chez les patients qui ont une neutropénie en rapport avec une hémopathie maligne. L’infection fongique de l’orbite est provoquée par une infection du sinus adjacent. Histologiquement, une inflammation (aiguë et chronique) est présente dans un contexte de nécrose et est souvent granulomateuse. Les histiocytes sont souvent présents. Des filaments mycéliens peuvent être identifiés avec des colorations H&E, periodic acid-Schiff (PAS), et Gomori méthénamine argent (GMA ou GMS). Le diagnostic repose sur la découverte de tissu paraissant nécrotique dans le nasopharynx. Ces mycoses peuvent disséminer par voie sanguine et provoquer des vasculites thrombosantes.


L’aspergillose sino-orbitaire est causée par une infection à Aspergillus de l’orbite à partir des sinus adjacents et peut survenir chez des individus par ailleurs sains ou sans immunodépression. Étant donné le caractère lentement progressif et insidieux, l’aspergillose sino-orbitaire est souvent méconnue, produisant une infection granulomateuse sclérosante. L’Aspergillus est souvent difficile à mettre en culture, mais peut être observé dans les tissus sous forme de filaments mycéliens avec un angle de 45° (fig. 14-5). Malgré un traitement chirurgical agressif et un traitement adjuvant avec des antifongiques, l’infection orbitaire à Aspergillus peut être mortelle si une extension au cerveau se produit.



La sinusite fongique allergique est une forme non invasive d’infection fongique résultant d’une réaction d’hypersensibilité avec sécrétion d’IgE chez des sujets atopiques ; elle est causée par différentes sortes de mycoses. La maladie peut s’étendre à l’orbite et en intracrânien dans certains cas.


Les infections parasitaires de l’orbite sont rares et peuvent être produites par l’Echinococcus (kyste hydatique orbitaire), le Taenia (cysticercose), et la filariose oculaire Loa loa (loaïase). Ces infections sont le plus souvent rencontrées chez des patients qui viennent de, ou ont voyagé dans les zones d’endémies. Le test enzymatique immunologique à la recherche d’anticorps sériques peut être utile au diagnostic. Voir la Section 7 du BCSC, Orbit, Eyelids, and Lacrimal System (Orbite, paupières et système lacrymal).

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May 3, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 14: Orbite

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