13 Caryotype humain
Le caryotype permet l’analyse numérique et structurale des chromosomes humains. Depuis la découverte du nombre exact de chromosomes dans l’espèce humaine par Tjio et Levan en 1956, la cytogénétique s’est développée dans de nombreux domaines de la médecine pour l’étude des anomalies chromosomiques. Les méthodes de cytogénétique se sont considérablement développées incluant les techniques de cytogénétique conventionnelle et les techniques de cytogénétique moléculaire. Ces techniques permettent d’analyser actuellement les chromosomes avec une grande résolution et peuvent être appliquées à tous les tissus quel que soit le stade du cycle cellulaire.
I Structure des chromosomes humains et nomenclature
Le caryotype correspond au classement de l’ensemble des chromosomes contenu dans le génome d’un individu. Le caryotype humain normal comporte 46 chromosomes. Dans l’espèce humaine, il existe 22 paires d’autosomes (1 à 22), et une paire de gonosomes ou chromosomes sexuels (XY). La formule chromosomique normale est 46,XX chez la femme et 46,XY chez l’homme. Les 24 chromosomes du génome sont caractérisés par leur taille, la position de leur centromère et leur profil de bandes. Un chromosome comporte de part et d’autre du centromère deux bras : le bras court appelé p, placé en haut sur un caryotype, et le bras long appelé q placé en dessous du centromère. Si le bras court est presque aussi long que le bras long, le chromosome est dit métacentrique. S’il est nettement plus court, le chromosome est dit submétacentrique. Enfin, si ce bras p est très petit, le chromosome est dit acrocentrique. Les chromosomes acrocentriques humains sont les chromosomes 13, 14, 15, 21 et 22. Les chromosomes acrocentriques portent sur leurs bras courts de l’hétérochromatine et des régions impliquées dans l’organisation nucléolaire (NOR) et codant pour l’ARN ribosomal. Chaque extrémité des chromosomes au niveau des bras courts (p) et des bras longs (q) se termine par un télomère. Chaque bras d’un chromosome est arbitrairement divisé en régions, notées de 1 jusqu’à 4 (pour certains chromosomes) en partant du centromère. Chaque région est divisée en bandes, entités visibles pâles ou foncées après usage des techniques de dénaturation. En fonction de la résolution de l’analyse chromosomique, chaque bande peut être divisée en sous-bandes. Une localisation sur un chromosome sera ainsi déterminée par le numéro du chromosome où se trouve cette localisation, suivi de la lettre indiquant le bras impliqué (p ou q), suivie des numéros de région, de bande, voire de sous-bande.
II Techniques cytogénétiques
Les chromosomes sont visibles en microscopie optique lorsqu’ils sont condensés au stade de la métaphase (fig. 13.1). Un caryotype conventionnel nécessite donc l’obtention de cellules en division.
A Cytogénétique conventionnelle
1 Cellules utilisées
• Lymphocytes : les lymphocytes provenant d’un prélèvement de sang sont mis en culture en présence d’un mitogène permettant leur division cellulaire. La durée de la culture est de 48 à 72 heures à 37 °C.
• Cellules de la moelle osseuse : les cellules provenant d’un prélèvement de la moelle osseuse sont mises en culture de la même façon que les lymphocytes mais sans utilisation de mitogènes.
• Cellules amniotiques : les cellules du liquide amniotique récupérées après une amniocentèse sont mises en culture sur des supports solides à 37 °C sous atmosphère contrôlée (5 % CO2). Les cellules se divisent en adhérant au support et se multiplient en formant des clones cellulaires.
• Cellules trophoblastiques : les cellules trophoblastiques, obtenues à partir des villosités choriales prélevées par choriocentèse, sont des cellules qui se divisent activement. Il est donc possible d’obtenir des métaphases en réalisant un examen direct sans culture cellulaire le jour même de la choriocentèse.
• Fibroblastes : les fibroblastes obtenus après biopsie de tissu le plus souvent cutané sont mis en culture sur des supports solides à 37 °C sous atmosphère contrôlée (5 % CO2).
• Gamètes : les chromosomes des ovocytes et des spermatozoïdes peuvent être analysés par les techniques de cytogénétique classique et moléculaire en fonction du stade de la gamétogenèse.
• Cellules embryonnaires : les cellules embryonnaires (blastomères) peuvent être obtenues après biopsie sur un embryon au stade préimplantatoire. La recherche d’anomalies chromosomiques est réalisée en utilisant les techniques de cytogénétique moléculaire.
2 Obtention des préparations chromosomiques (fig. 13.2)
Les cellules cultivées sont bloquées au stade de la métaphase en utilisant un poison du fuseau mitotique, la colchicine. Un choc hypotonique est ensuite réalisé pour permettre une dispersion des chromosomes et éviter leur chevauchement. Après des fixations à l’alcool/acide acétique, les chromosomes sont étalés sur des lames de verre.
3 Marquages en bandes des chromosomes
Les principaux types de marquage de bandes sont :
• le marquage en bandes G est obtenu par digestion enzymatique (trypsine) des chromosomes et suivi d’une coloration au Giemsa ;
• le marquage en bandes R est obtenu par dénaturation thermique des chromosomes et suivi d’une coloration au Giemsa.
B Caryotype haute résolution
Les chromosomes sont analysés au stade de la prophase permettant d’obtenir des caryotypes avec une résolution de 800 à 1000 bandes et sous-bandes par lot haploïde. La taille d’une sous-bande pouvant être observée par les techniques de haute résolution est de l’ordre de 5 mégabases.
C Hybridation in situ fluorescente (FISH)
La FISH est une technique fondée sur le principe de la complémentarité des nucléotides. Cette technique permet de visualiser et de localiser un fragment d’ADN sur les chromosomes par hybridation de la séquence d’ADN complémentaire appelée sonde (fig. 13.3A). Ces sondes sont marquées par l’incorporation de nucléotides couplés à un fluorochrome. L’hybridation ADN cible/sonde est effectuée à 37 °C. Les signaux d’hybridation sont observés en microscopie à épifluorescence. Différents types de sondes correspondant à des régions chromosomiques précises peuvent être utilisés (fig. 13.3B) :
• les sondes centromériques reconnaissent les séquences d’ADN satellite α et β localisées dans les régions centromériques ou péricentromériques des chromosomes. L’utilisation de ce type de sonde permet de dénombrer facilement les chromosomes dans les noyaux en interphase ;
• les sondes spécifiques d’un locus donné permettent de détecter des petites délétions, insertions ou inversions ;
• les sondes subtélomériques sont spécifiques des extrémités terminales des bras court et long des chromosomes. Elles permettent de mettre en évidence des anomalies chromosomiques impliquant les extrémités des chromosomes ;
• les sondes de peinture chromosomique sont spécifiques d’un chromosome entier ou d’une région chromosomique. Elles correspondent à l’association de sondes spécifiques d’un même chromosome et permettent de visualiser une partie ou la totalité du chromosome.