Chapitre 12 Techniques de suppression tissulaire et de modification du contraste
Suppression de graisse
Si la présence de graisse est souvent intéressante pour le contraste en IRM, elle peut néanmoins compliquer la visualisation de lésions pathologiques de signal élevé au sein ou au contact de structures graisseuses. Cette délimitation peut encore devenir plus difficile pour de telles lésions lorsqu’elles sont hyperintenses après injection de gadolinium.
De plus, la graisse est responsable d’artéfacts de déplacement chimique ou d’artéfacts de mouvements lorsqu’il s’agit de structures mobiles (voirChapitre 11). L’utilisation d’antennes de surface peut la rendre gênante, l’hypersignal de la graisse sous-cutanée se produisant à proximité de l’antenne.
Les principales techniques de suppression de graisse sont les suivantes :
Séquence STIR
Dans certains cas, il peut être intéressant de modifier le contraste naturel obtenu par les différences en des tissus. Pour ce faire, on peut utiliser une particularité de la séquence d’inversion récupération (IR).
En effet, dans cette séquence, tous les tissus passent par 0 lors de la repousse (pour un temps d’inversion TI = 0,69 du tissu concerné, voirAnnexe 11) : cette annulation du contraste peut être mise à profit pour supprimer de l’image une structure donnée, comme par exemple la graisse. Il suffit pour cela de choisir un temps d’inversion tel que TI = 0,69graisse1 (fig. 12-1). Ce TI est relativement court par rapport à celui d’une séquence d’IR «classique», d’où l’appellation STIR (Short Tau Inversion Recovery)2. Il est important de noter que la majorité des appareils ne tient pas compte de la portion négative de : le signal est recueilli en module, c’est-à-dire uniquement en valeurs positives (voirfig. 12-1). Elle permet, par déduction, d’identifier un hypersignal graisseux ou de mettre en évidence une structure noyée dans la graisse (fig. 12-2).
Une autre conséquence de la réduction du TI est l’effet cumulatif d’un long et d’un long sur le contraste des tissus. En effet, lorsque les courbes de relaxation sont situées dans la portion négative de (en pratique supérieur à celui de la graisse), le contraste dû à la différence de entre deux structures est encore accentué si le tissu à le plus long possède également le le plus long (effet cumulatif) (fig. 12-3). C’est ce dernier tissu qui aura, en pratique, le signal le plus intense (l’effet étant d’autant plus marqué lorsque le TE augmente). En revanche, lorsque les courbes de relaxation parviennent dans la portion positive de (en pratique lorsqu’on allonge le TI), l’effet du long s’oppose à celui du long, ce qui diminue plutôt le contraste entre les tissus (voirfig. 12-3).
Fig. 12-3 Principe de l’effet cumulatif d’un long et d’un long en séquence STIR.
Adapté et modifié d’après Dwyer et al.
Malheureusement, la séquence STIR standard présente des temps d’acquisition longs (liés au long TR nécessaire à la repousse des aimantations longitudinales tissulaires – double parcours !) qui limitent l’utilisation de ce type de séquence. Ces temps d’acquisition peuvent être considérablement réduits en utilisant une séquence d’inversion récupération rapide, reposant sur une séquence d’écho de spin rapide, précédée d’une impulsion de 180° (voirChapitre 9). Cette séquence de type STIR ESR (Fast STIR ou Turbo STIR) présente les mêmes avantages que la séquence STIR, c’est-à-dire la suppression du signal de la graisse et l’addition des effets et des tissus permettant d’obtenir un hypersignal de certaines structures pathologiques. De plus, dans les séquences SE rapide, la graisse est plus intense qu’en SE conventionnel, ce qui augmente encore l’intérêt de réduire son signal. Le contraste graisse/lésion ou muscle/lésion est alors augmenté.
Ainsi, le contraste de ce type de séquence est comparable à celui d’une séquence STIR conventionnelle : lorsque le TE est court, il s’apparente à une «véritable» pondération en densité protonique (sauf pour la graisse évidemment) en raison du TR utilisé en IR rapide, ce dernier étant beaucoup plus long qu’en IR conventionnelle. L’augmentation du TE ajoute une composante , comme en écho de spin rapide (fig. 12-4).
Fig. 12-4 Contraste en séquence STIR «rapide».
(a) Séquence d’écho de spin rapide, TR = 3 500 ms, TE = 20 ms.
(b) Séquence Turbo STIR, TR = 3 500 ms, TE = 22 ms, TI = 150 ms
En ce qui concerne les applications de la séquence STIR, il s’agit, d’abord, en supprimant la graisse, de mettre en évidence des lésions à proximité ou au sein de structures graisseuses, ou d’identifier avec certitude une composante graisseuse au sein d’une lésion (fig. 12-5).
Fig. 12-5 Exemple d’application de la séquence STIR.
L’un des intérêts essentiels de cette séquence est l’effet cumulatif du long et du long des tissus, associé à la suppression du signal des tissus à court. Ainsi, les lésions tumorales apparaissent particulièrement hyperintenses par rapport aux tissus environnants et peuvent ainsi être bien délimitées. Le contraste tumeur/graisse et tumeur/muscle est particulièrement intéressant. Il permet, par exemple, de mieux délimiter les tumeurs du foie par contraste avec le tissu hépatique dont le signal est fortement diminué (fig. 12-6).
Néanmoins, cet effet n’est pas spécifique : il sera le même pour d’autres structures (tissu inflammatoire, œdème, hémangiomes, etc.) qui ont, comme les tissus néoplasiques, un et un longs. On peut noter aussi la meilleure visualisation, en séquence STIR, des lésions démyélinisantes médullaires par rapport aux séquences d’ESR pondérées utilisées habituellement dans cette région (fig. 12-7).
D’autre part, en raison du TI court de cette séquence, l’aimantation longitudinale des tissus (autres que la graisse qui est égale à 0) est relativement faible. La séquence STIR est, par conséquent, relativement «bruitée» par rapport aux autres séquences. Cet inconvénient est moindre à haut champ où la différence graisse/ eau est plus importante (d’où un meilleur rapport signal sur bruit), mais également en séquence d’ESR rapide. Dans ce cas, la suppression de graisse est encore plus appropriée pour réduire l’artéfact de déplacement chimique, ce dernier augmentant avec l’intensité du champ magnétique (voirChapitre 11).