CHAPITRE 11 TRAITEMENT DU REFLUX GASTRO-ŒSOPHAGIEN
PHYSIOPATHOLOGIE
– Une incompétence du sphincter inférieur de l’œsophage (SIO) : le SIO constitue la barrière antireflux en fermant normalement la communication œsophage-estomac. Dans le RGO pathologique, il existe une hypotonie ou une atonie permanente de la pression de repos, des relâchements spontanés trop fréquents et/ou une augmentation du gradient de pression gastro-œsophagien.
– Une anomalie de la motricité œsophagienne, responsable d’un trouble de la clairance, entraîne, en particulier, une diminution de la clairance acide œsophagienne qui correspond à la capacité de l’œsophage à se débarrasser rapidement du contenu acide qu’il a reçu, par son péristaltisme. La motricité œsophagienne et les contractions péristaltiques secondaires permettent donc d’évacuer le contenu gastrique. Ainsi, en cas de troubles de la motricité (troubles du péristaltisme œsophagien) associés à une hypersensibilité de la muqueuse œsophagienne par diminution de la résistance épithéliale à l’acide, la clairance acide œsophagienne diminue et la durée d’exposition de la muqueuse à l’acide augmente, entraînant les douleurs et à terme la formation des lésions.
– La hernie hiatale intervient dans la constitution d’un RGO par altération de la clairance œsophagienne : une partie du liquide de reflux acide contenu dans le sac herniaire remonte dans l’œsophage au moment de sa contraction. On observe alors un va-et-vient de ce contenu entre l’œsophage et l’hernie hiatale.
ASPECTS CLINIQUE ET SÉMIOLOGIQUE
Signes digestifs
Les signes digestifs typiques sont caractérisés par :
– un pyrosis correspondant à une sensation de brûlure traçante ascendante, à point de départ épigastrique et remontant derrière le sternum ;
– des régurgitations correspondant à la remontée dans l’œsophage, puis dans la gorge, sans effort de vomissement, du contenu gastrique acide ou alimentaire ;
– un syndrome postural avec pyrosis et/ou régurgitations survenant lorsque le sujet se penche en avant (travaux ménagers, jardinage, prière musulmane) ou qu’il est en décubitus dorsal au cours de la nuit. Ce syndrome réveille brutalement le sujet, l’obligeant à s’asseoir, à prendre un topique antiacide, ou tout simplement un verre d’eau ou de lait. D’autres signes digestifs moins typiques peuvent s’observer à titre de brûlures épigastriques simples, troubles dyspeptiques classiques avec flatulence, sensation de digestion lente et éructations.
En cas de RGO compliqué, d’autres signes d’alarme peuvent se manifester, en particulier une dysphagie, une odynophagie (douleur rétrosternale perçue au cours de la déglutition), une hémorragie digestive, une anémie, un amaigrissement. La présence de ces signes doit faire penser à l’existence d’une forme sévère de RGO ou d’une œsophagite ou encore d’une affection néoplasique.
Signes extradigestifs
Ils peuvent s’observer à différents niveaux :
– respiratoire : épisodes de toux nocturnes, dyspnée paroxystique de type asthmatiforme ;
– ORL : gêne pharyngée à type de sensation de corps étranger, maux de gorge répétés, dysphonie accompagnée d’enrouement, laryngite postérieure ;
– cardiaque : douleurs thoraciques pseudo-angineuses, simulant une insuffisance coronarienne, survenant au repos ou en décubitus, parfois à l’effort.
CLASSIFICATION DES MÉDICAMENTS UTILISABLES
Les principaux médicaments employés dans le traitement du RGO sans ou avec œsophagite et commercialisés en France sont répertoriés dans le tableau 11.1. Certaines de ces présentations peuvent être maintenant délivrées sans ordonnance.
CRITÈRES DE CHOIX THÉRAPEUTIQUE
Référentiels scientifiques
La conférence de consensus franco-belge en 1999 (Reflux gastro-œsophagien de l’adulte) avait permis de poser les bases des recommandations de la prise en charge du RGO mais depuis certaines conclusions ont été remises en cause. L’AFSSAPS en 2007 a émis des recommandations de bonne pratique chez l’adulte et en 2008 chez l’enfant : les antisécrétoires gastriques. Une réévaluation de la commission de transparence à la HAS a été faite en 2009.
Objectifs thérapeutiques
– de symptômes invalidants ou résistants au traitement symptomatique ou récidivant à l’arrêt du traitement ;
– de signes d’alarme (dysphagie, hémorragie digestive, anémie ferriprive, amaigrissement) ;
Les objectifs thérapeutiques sont :
– le soulagement des symptômes, accompagné d’un retour à une qualité de vie normale ;
– la cicatrisation des lésions dans les œsophagites sévères ou compliquées ;
– la prévention des récidives dans les formes symptomatiques à rechutes fréquentes et les œsophagites sévères ou compliquées.
Traitement d’attaque du reflux
Devant des symptômes typiques espacés et en l’absence de symptômes d’alarme, ils seront traités à la demande. En première intention, il est possible d’avoir recours aux topiques antiacides, avec ou sans alginates, dont l’efficacité sur la douleur est équivalente. Les topiques antiacides alginates ont l’avantage de réduire l’acidité des reflux tout en protégeant la muqueuse œsophagienne. En première intention, les antiacides alginates peuvent être utilisés seuls. De même, dans cette situation, l’emploi des anti-H2 faiblement dosés est possible tels que la ranitidine à 75 mg (Raniplex, Azantac, etc.), la cimétidine à 200 mg (Tagamet, Stomédine, etc.) ou la famotidine à 10 mg (Pepcidac). Les formes d’action rapide (comprimés effervescents, formes sublinguales, gommes à mâcher) sont bien adaptées au traitement à la demande.