Chapitre 1 Quelques définitions utiles pour aborder l’étude de la topographie cornéenne
Surface cornéenne
La cornée comporte deux surfaces, l’une antérieure, l’autre postérieure. Ces surfaces sont circonscrites par le périmètre naturel formé par le limbe cornéo-conjonctival. Elles délimitent un « volume » cornéen, dont la distribution est représentée sur les cartes pachymétriques.
La surface cornéenne antérieure est recouverte du film lacrymal, dont l’épaisseur (quelques microns) est négligeable vis-à-vis de celle de l’épithélium cornéen dont elle épouse la surface. Ce film permet à la lumière d’être réfléchie de manière spéculaire, du moins en l’absence de sécheresse oculaire sévère. La réflexion lumineuse naît en partie de la différence d’indice de réfraction entre les milieux ; environ 5 % de la lumière incidente sur la cornée est réfléchie par le film lacrymal [1, 2]. La réflexion est dite « spéculaire » quand la direction des rayons réfléchis dépend de l’incidence des rayons incidents. Ces propriétés de réflexion lumineuse sont utilisées en topographie spéculaire. Une altération de la qualité du film lacrymal, ou l’interposition de cils peuvent réduire la qualité de l’image réfléchie et donc de l’examen topographique.
La surface postérieure est tapissée par l’endothélio-descemet. Sa mesure n’est pas possible par réflexion spéculaire, car la différence d’indice entre le stroma cornéen et l’humeur aqueuse est trop faible ; elle fait appel à des techniques de balayage par fente lumineuse, ou d’analyse Scheimpflug.
La courbure d’une surface lisse et continue peut être mesurée en tout point de celle-ci. La manière dont elle est mesurée définit le type de carte topographique spéculaire (axiale, tangentielle, moyenne).
Méridien cornéen
Un méridien est défini comme une ligne joignant les points alignés de part et d’autre du vertex cornéen (ex : 0-180° pour le méridien horizontal, 90–270° pour le méridien vertical). Les méridiens se distribuent sur 360° et sont repérés par un axe variant entre 0 et 180°. Comme leur nom le suggère, les hémiméridiens sont définis comme une moitié de méridien, et sont repérés par un axe variant entre 0 et 360° (Fig. 1.1). Les cartes topographiques sont généralement munies d’un repère azimutal gradué en degrés qui permet de repérer de manière précise l’orientation (axe) des méridiens remarquables. La courbure tangentielle explore la courbure le long des méridiens cornéens.
Centre géométrique de la cornée
Le centre géométrique de la cornée (ou centroïde) est le repère topographique le plus évident, puisqu’il s’agit du point équidistant aux points situés sur le pourtour limbique. C’est un point qui peut servir d’origine (x = 0 – y = 0) pour définir un repère destiné à identifier par un couple de coordonnées l’ensemble des points de la surface cornéenne.
Centre de visée cornéen (corneal sighting center)
Parmi l’ensemble des rayons lumineux émis par la source lumineuse ponctuelle fixée par le patient, on peut isoler le faisceau de rayons lumineux réfracté par la cornée qui est délimité par l’ouverture pupillaire (c’est le faisceau lumineux utile pour la formation de l’image fovéale). Le rayon central de ce faisceau incident définit la ligne de visée (line of sight). Le centre de visée cornéenne (corneal sighting center) correspond à l’intersection entre cet axe et la surface cornéenne (Fig. 1.2).
Fig. 1.2 Représentation schématique de la ligne de visée (line of sight).
La pupille d’entrée est l’image virtuelle formée par la cornée de la pupille anatomique : c’est la pupille apparente, telle qu’on la perçoit quand on examine le segment antérieur d’un patient. Elle apparaît légèrement plus large et antérieure que la pupille anatomique. L’axe reliant le point de fixation F au centre de la pupille d’entrée E est la ligne de visée – line of sight : il est représenté en bleu et coupe la cornée au centre de visée cornéen (corneal sighting center). Un repérage aisé de ce point n’est pas possible en pratique clinique.
Vertex cornéen
Le vertex est une notion qui dépend de la technique de mesure et d’observation. En topographie cornéenne, il correspond à l’intersection entre l’axe kératométrique (ou vidéotopographique) et la face antérieure de la cornée. En topographie spéculaire de Placido, cet axe relie le centre des mires utilisées pour la réflexion avec le centre de courbure local de la cornée. Le reflet de ce centre est situé le long de cet axe (Fig. 1.3). On peut donc définir le vertex comme le siège apparent de la réflexion du centre des mires de Placido.
Fig. 1.3 Représentation schématique de l’axe kératométrique (en rouge).
Il relie le centre de courbure cornéen C au point de fixation F. Du fait de l’absence de centre commun des surfaces réfractives de l’œil, et de l’excentricité de la fovéa, cet axe ne passe pas par le centre de la pupille d’entrée de l’œil. Si F est le centre des mires de Placido, alors la position du vertex est équivalente à celle de la position apparente du reflet de F sur la cornée. Habituellement, la projection du vertex est légèrement nasale vis-à-vis du centre géométrique de la pupille.
Par construction géométrique, la ligne tangente à la surface cornéenne en ce point est perpendiculaire (ou normale) à l’axe kératométrique. De fait, le terme anglo-saxon exact correspondant à ce point est « vertex normal ».
La localisation du vertex vis-à-vis de la pupille traduit de manière indirecte le degré de rotation du globe oculaire lors de la fixation (cf. sur axes oculaires remarquables et angle kappa chapitre 3).
On peut aussi définir le vertex comme le point d’élévation maximale sur une carte d’élévation. Là encore, la localisation de ce point est loin d’être absolue ; en plus de l’orientation de la cornée avec le système de détection, la localisation d’un vertex est tributaire de certaines contraintes utilisées pour représenter l’élévation de la surface cornéenne (par exemple, le choix et l’alignement de la surface de référence).