1. Les concepts
Cet état d’équilibre ou « homéostasie » correspond à la capacité de notre organisme à maintenir un fonctionnement idéal malgré les variations environnementales.
Notre organisme, gouverné par nos rythmes, est totalement dépendant du métabolisme cellulaire. L’alimentation va être le moteur de ce métabolisme en apportant les nutriments nécessaires au bon fonctionnement cellulaire et au bon déroulement de la croissance.
De même, notre température corporelle va être régulée afin de pouvoir maintenir le bon fonctionnement des cellules.
Rythmes biologiques et chronobiologie
Les activités biologiques et physiologiques varient dans le temps. Ces variations, loin d’être aléatoires, s’ordonnent de façon régulière, suivant des rythmes bien précis. L’étude de ces rythmes biologiques est définie sous le terme de « chronobiologie ».
L’une des premières applications de la chronobiologie est l’administration d’un médicament à un moment précis de la journée, permettant un effet optimal de la molécule pour un dosage le plus faible possible.
Les rythmes biologiques vont s’étendre dans le temps. Un rythme est reconnu comme tel, dès lors que l’on observe un phénomène reproductible dont la valeur biologique ne varie pas ou peu.
La période représente la durée d’un cycle complet.
Le cycle menstruel va donc, par exemple, avoir une période de vingt-huit jours. L’amplitude représente la variation moyenne de la valeur biologique et on définit, en général, une valeur maximale et minimale.
Ainsi, la température corporelle est en moyenne de 37,2 °C et va avoir une amplitude d’environ 1 °C pour chaque individu, avec un minimum de 36,4 °C et un maximum de 37,8 °C.
Les rythmes sont classés en fonction de leur période. On distingue :
– le rythme circadien, ou rythme nycthéméral qui va durer environ vingt-quatre heures et comporter un jour et une nuit ;
– le rythme ultradien, ou rapide, va durer moins de vingt-quatre heures ;
– le rythme infradien, ou lent, qui va durer plus de vingt-quatre heures.
Rythmes ultradiens Période inférieure à vingt-quatre heures | Fréquence cardiaque. | La fréquence cardiaque est en moyenne de soixante battements par minute, au repos. Le minimum se situe de cinquante battements par minute (chez un grand sportif) à quatre-vingts battements par minute. |
Fréquence respiratoire. | La fréquence respiratoire se situe entre douze et vingt respirations par minute chez l’adulte. | |
Sommeil. | Alternance entre le sommeil profond d’environ soixante minutes et le sommeil paradoxal d’environ vingt minutes. | |
Rythmes circadiens Période de vingtquatre heures | Alternance veille/sommeil. | Le rythme circadien comprend un état de veille (jour) et de sommeil (nuit). |
Courbes de températures. | La température moyenne est de 37,2 °C et varie entre 36,4 °C et 37,8 °C. | |
Sécrétion de certaines hormones. | Sécrétion de cortisol : faible la nuit et élevée le jour ; sécrétion de mélatonine : élevée la nuit et faible le jour. | |
Rythmes infradiens Période supérieure à vingt-quatre heures | Cycle menstruel. | Le cycle menstruel est d’environ vingt-huit jours, mais peut se réduire à vingt-trois jours et s’étendre jusqu’à trente-neuf jours sans que cela soit pathologique. |
Courbe de température suivant le cycle menstruel. | La température corporelle des femmes varie au cours du cycle menstruel. Sa moyenne est plus élevée après l’ovulation et jusqu’aux menstruations. | |
Sécrétion de certaines hormones. | La FSH (hormone folliculaire) et la LH (hormone lutéale) varient au cours du cycle menstruel. |
Par exemple, on va déterminer la fréquence cardiaque qui est de soixante battements par minute. La période définirait un battement par seconde.
Dès 1965, des spéléologues placés dans des grottes aménagées avaient pu prouver que nos rythmes biologiques sont endogènes et donc soumis à ce que l’on appelle communément l’horloge interne. Néanmoins, des facteurs extérieurs et environnementaux peuvent intervenir et engendrer des dérèglements biologiques :
– le rythme circadien persiste en l’absence de lumière solaire mais peut se décaler progressivement d’un peu moins ou d’un peu plus de vingt-quatre heures ;
– une désynchronisation du rythme circadien s’accompagne de troubles atypiques tels que fatigue, mauvaise qualité du sommeil et de l’appétit, troubles de la concentration et des performances.
Ces troubles sont fréquemment rencontrés chez les personnes vivant autour du cercle polaire, où l’alternance jour/nuit est inexistante.
À l’heure actuelle, on sait que l’organisme dispose non pas d’une horloge interne mais de plusieurs, et que ces horloges sont sous le contrôle de gènes spécifiques appelés gènes clock pour gènes « horloges ». Ces gènes vont orchestrer la production d’enzymes et d’hormones permettant le maintien de nos rythmes biologiques.
Nos horloges internes permettent la sécrétion d’hormones qui vont permettre d’établir le rythme circadien :
– le cortisol agit ainsi comme une hormone majeure dans l’établissement du rythme jour/nuit ;
– la mélatonine est un facteur de synchronisation important.
Le rythme circadien est maintenu même en l’absence chronique de lumière solaire, sans laquelle il se décalera progressivement à un peu moins ou un peu plus de vingt-quatre heures. La lumière permet donc une « remise à l’heure » de notre horloge interne. Nos activités quotidiennes participent également au recalage du rythme circadien, tels les repas ou le travail.
Les pilotes d’avion sur de longues distances, par exemple, peuvent être désynchronisés.
Inversement, certaines pathologies vont entraîner des dérégulations des rythmes hormonaux, qui vont perturber le rythme circadien en modifiant nos horloges internes.
En effet, le sommeil est un besoin fondamental et des troubles de celui-ci, que ce soit de sa durée ou même la modification des alternances de sommeil profond et de sommeil paradoxal, vont engendrer de graves perturbations tant métaboliques que psychologiques.
Sécrétion de cortisol et de mélatonine et rythme circadien
Le cortisol est une hormone sécrétée par la zone corticale des glandes surrénales, glandes qui coiffent le pôle supérieur des reins.
Le cortisol est synthétisé à partir du cholestérol et sa synthèse est sous la dépendance de l’axe hypothalamo-hypophysaire. Le cortisol va en retour inhiber l’axe hypothalamo-hypophysaire et moduler ainsi sa propre production (figure 1.1).
Fig. 1.1 |
Le cortisol est une hormone de « veille ». Il monopolise les réserves afin de fournir l’énergie nécessaire à une activité diurne. Il a donc un effet hyperglycémiant en favorisant la production hépatique de glucose (gluconéogenèse), et il permet également la dégradation protéique et lipidique dans la plupart des tissus.
La production de cortisol présente un pic en début de matinée vers 8 heures, accompagné d’une augmentation de la température corporelle, puis va lentement diminuer jusqu’au soir. Le minimum de sécrétion se situe vers minuit et on observe ensuite une production de cortisol en fin de nuit pour atteindre le pic de 8 heures (figure 1.2).
Fig. 1.2 (d’après Touitou et coll. 1994). |
Fig. 1.3 |
La glande pinéale est une petite glande endocrine située dans le cerveau, en arrière du troisième ventricule. Elle est surtout importante chez l’animal.
La glande pinéale assure, durant la nuit, la production de mélatonine à partir de la sérotonine qui dérive elle-même d’un acide aminé essentiel : le tryptophane.
Inversement au cortisol, la production de mélatonine est basse durant toute la journée et va augmenter dès la phase de sommeil pour être produite durant la nuit (figure 1.2).
La sécrétion nocturne de mélatonine permet le déclenchement de la phase de sommeil. La sécrétion de mélatonine apparaît ici comme un facteur de synchronisation qui est indirectement sous le contrôle de la lumière solaire. En effet, la lumière va atteindre les neurones des noyaux suprachiasmatiques (NSC), juste derrière le chiasma optique et propager l’information jusqu’à la glande pinéale.
La mélatonine est ainsi utilisée dans certains pays pour traiter les troubles du sommeil chez les personnes âgées ou bien encore chez les personnes soumises à des décalages horaires fréquents, comme les pilotes d’avion.
Les rythmes du sommeil et les perturbations du rythme circadien
Le sommeil se déroule en plusieurs cycles, allant de quatre à sept cycles selon les individus (figure 1.4).
Fig. 1.4 |
Avant tout cycle, on observe une période d’endormissement qui est une étape de transition entre l’état de veille et le sommeil.
– La vigilance diminue,
– le rythme cardiaque est ralenti
– les muscles se relâchent.
Chaque cycle est ensuite d’environ quatre-vingt dix minutes et contient :
– une phase de sommeil profond ou lent,
– une période de sommeil paradoxal dit rapide,
– une phase intermédiaire.
La phase intermédiaire est une phase brève durant laquelle des réveils brefs vont soit engendrer un nouveau cycle de sommeil, soit permettre le déclenchement de la phase de réveil.
LE SOMMEIL LENT
– Stade 1 : c’est un stade d’endormissement où l’on observe d’abord un état de somnolence, puis vient l’assoupissement.
– Stade 2 : c’est un sommeil léger qui va représenter environ 50 % du temps de sommeil total. Durant ce stade, le dormeur reste sensible à ce qui l’entoure comme le bruit, l’éclairage ou des mouvements.
– Stade 3 : c’est un sommeil établi dit profond. Durant cette phase, le pouls est ralenti et devient plus régulier.
– Stade 4 : cette phase consiste en un sommeil très profond. Durant ce stade, le dormeur est coupé du monde extérieur et très difficile à réveiller. C’est à ce stade que peuvent se produire les terreurs nocturnes ou le somnambulisme.
C’est durant la phase de sommeil lent que l’hypophyse produit l’hormone somatotrope ou hormone de croissance. Cette hormone est essentielle à la croissance chez l’enfant, mais elle a également un rôle dans la récupération suite à la fatigue physique chez l’adulte, ce qui rend cette phase essentielle.
Lorsque surviennent des réveils inopinés, le sujet doit recommencer le cycle depuis le stade 1, puis 2, puis 3 et 4.
Les personnes souffrant d’apnée du sommeil dépassent rarement le stade 2 du fait des réveils fréquents induits par l’hypoxie. Le sommeil est donc de mauvaise qualité, puisque le stade 4, récupérateur, n’est quasiment jamais atteint, et cela explique l’installation d’une fatigue chronique chez ces individus.
LE SOMMEIL PARADOXAL
La phase de sommeil paradoxal dure entre quinze et vingt minutes par cycle et représente 25 % du temps de sommeil total. Durant cette phase, les muscles sont complètement relâchés, mais le cerveau conserve une activité très intense, accompagnée de mouvements oculaires rapides, d’une respiration et d’un rythme cardiaque irréguliers. Malgré cet état « activé », le dormeur est profondément endormi.
80 % des rêves se produisent durant le sommeil paradoxal, qui favorise la récupération psychique et nerveuse de la personne.
Les dormeurs réveillés au cours du sommeil paradoxal se souviennent avec beaucoup plus de précision de leurs rêves que si on les réveille au cours du sommeil lent.
La durée des périodes de sommeil paradoxal, avec rêves, s’allonge progressivement au cours de la nuit. Ainsi, la première partie de la nuit voit prédominer le sommeil lent, profond, physiquement réparateur, tandis que la seconde partie est plus favorable à la récupération psychique et nerveuse.