du pied tumoral

Séquelles du pied tumoral




Introduction


Les tumeurs malignes de la cheville et du pied, sarcomes des tissus mous ou du squelette, sont particulièrement rares et la littérature est assez pauvre à ce sujet [1,2]. Le principe du traitement de ces tumeurs est le même que pour le reste de l’appareil locomoteur. La première étape est diagnostique. Les symptômes de ces tumeurs sont trompeurs au pied ; il s’agit souvent d’une douleur qui est mise sur le compte d’une cause mécanique, plus tardivement d’une tuméfaction. En cas de lésion plantaire, on peut penser à une lésion réactionnelle voire à une fibromatose. En cas de lésion dorsale, un kyste synovial est habituellement évoqué de prime abord.


Un premier geste chirurgical sans diagnostic histologique préalable ni imagerie a souvent déjà été réalisé quand le patient est référé au spécialiste en pathologie tumorale. Avant tout geste chirurgical, une imagerie comprenant au moins des radiographies standard et une imagerie par résonance magnétique (IRM) est indispensable. Le diagnostic de toute lésion atypique repose sur l’anatomopathologie, soit par ponction éventuellement guidée par l’échographie, soit par biopsie chirurgicale. Ce n’est qu’une fois ce diagnostic établi avec certitude, le bilan d’extension à distance effectué (dépendant de l’histologie : scanner thoracique ou scanner thoraco-lombo-abdominal, tomographie par émission de positrons, échographie des chaînes ganglionnaires, scintigraphie osseuse) et l’ensemble du dossier discuté en réunion de concertation pluridisciplinaire, que le traitement sera envisagé.


Une chimiothérapie néoadjuvante est systématiquement instituée dans les ostéosarcomes et les tumeurs d’Ewing et dans certaines tumeurs des tissus mous. Dans d’autres cas – tumeurs de bas grade, chondrosarcomes et petites tumeurs des tissus mous – le traitement est chirurgical d’emblée, mais doit répondre aux règles de la chirurgie oncologique. La résection doit emporter toute la tumeur sans l’ouvrir, avec une marge de tissus sains en périphérie. On parle alors de résection large, la seule adaptée au traitement des tumeurs malignes de l’appareil locomoteur. Cette résection large est difficile à réaliser au pied dont les compartiments sont de taille limitée, car il existe de nombreuses espaces de glissement. On peut compléter le traitement local des sarcomes des tissus mous et des tumeurs d’Ewing par une irradiation postopératoire. Cette radiothérapie est difficile au pied, laissant des troubles trophiques mal tolérés souvent pires que les séquelles d’une chirurgie large. Du fait de ces difficultés et des résultats fonctionnels aléatoires de certains traitements conservateurs, le traitement classiquement préconisé est l’amputation transtibiale. Les résultats fonctionnels en sont excellents à condition que l’appareillage soit adapté. Dans certains cas de tumeurs de l’avant-pied ou du médio-pied, les amputations conservant l’arrière-pied sont également classiques. Les amputations de type Pirogoff, Boyd ou Camillieri [3], qui consistent en une amputation de Chopart avec ablation du talus et fixation du calcaneus au pilon tibial avec résection des deux malléoles, permettent la conservation de la peau calcanéenne. Cette amputation a l’avantage de donner un moignon à la peau résistante et sensible, avec un appui stable et indolore. Son appareillage est plus difficile que pour l’amputation de jambe. L’amputation de Syme classique, qui coupe le tibia distal avec conservation de la peau calcanéenne, a l’inconvénient de donner un moignon à la peau instable. L’amputation de Chopart aboutit souvent à une déformation progressive du moignon en équin avec appui de la partie antérieure du calcaneus au sol responsable de conflits douloureux.


Dans certains cas, le traitement conservateur des tumeurs du pied ne fait pas courir de risque carcinologique et permet d’espérer une marche sans appareillage ou avec des orthèses de confort. On peut donc privilégier ce traitement conservateur dans certains cas de tumeurs de l’arrière-pied ou du médio-pied. Les publications à ce sujet sont rares et sont le plus souvent des case reports ou de très courtes séries [4]. Des travaux récents montrent bien qu’actuellement, la qualité de vie des patients amputés est inférieure à celle de ceux ayant eu un traitement conservateur [5].



Tibia distal


C’est une localisation non exceptionnelle d’ostéosarcome et plus rarement de tumeur d’Ewing. Ces tumeurs malignes du tibia distal peuvent envahir l’interligne talocrural. Les structures anatomiques tendineuses et neurovasculaires sont proches de l’os et le revêtement cutané est fragile. Dès que les tumeurs sont développées dans les parties molles, il est donc souvent préférable de recourir à l’amputation haute de jambe plutôt que de prendre des risques carcinologiques. Il est néanmoins possible, en cas d’extension limitée de la tumeur et de bonne réponse apparente à la chimiothérapie néoadjuvante, de réaliser des traitements conservateurs. Si le pilon tibial n’est pas envahi, la situation est celle d’une résection diaphysaire et ne présente pas de particularité.


En cas d’envahissement du pilon tibial ou de l’interligne talocrural, la reconstruction peut faire appel à une prothèse massive de cheville, dont nous n’avons pas l’expérience [6]. La technique la plus souvent utilisée est l’arthrodèse tibiotalienne. Notre technique habituelle consistait en un enclouage tibiotalien antérograde, associé à un vissage de la malléole fibulaire au talus après avivement et un comblement par des greffons corticospongieux iliaques et des baguettes corticales prélevées sur le tibia homo- ou controlatéral [7]. De nombreux cas d’infection, dus à la précarité de la couverture cutanée et au risque de contamination de l’ensemble du tibia représenté par l’enclouage (en cas de récidive locale), nous ont amenés à proposer une reconstruction avec un transfert de fibula vascularisée à l’aide d’un lambeau fasciocutané de couverture et une ostéosynthèse par plaque à vis verrouillées de type locking compression plate (LCP). Les résultats fonctionnels sont souvent excellents, comparables à ceux d’une arthrodèse de cheville [8]. Chez le sujet jeune, nous avons constaté le développement d’une hypermobilité compensatrice dans les articulations du médio-pied qui permet la marche sur les talons et sur les pointes. Quelques patients dont l’arthrodèse n’était pas parfaitement axée ont été repris par ostéotomie supramalléolaire. Notre plus long recul est de 25 ans sans détérioration arthrosique des interlignes restants, l’avenir à très long terme restant néanmoins inconnu.



Aug 10, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on du pied tumoral

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