Chirurgie des lésions bénignes

10 Chirurgie des lésions bénignes





Introduction


Les lésions bénignes sont extrêmement diverses, tant par leur type clinique que par leur situation topographique et anatomique. Leur prise en charge chirurgicale est peu explicitée malgré une demande très fréquente en dermatologie. Elles peuvent occuper toute la hauteur cutanée, de l’épiderme à l’espace sous-aponévrotique. Elles concernent tous les âges, un bon nombre d’entre elles étant congénitales. L’enjeu est essentiellement la rançon cicatricielle qui doit être la plus discrète possible. Le résultat doit impérativement être satisfaisant sur le plan esthétique ou améliorer le confort du patient. Contrairement à l’indication d’exérèse d’une tumeur maligne qui ne se discute pas, l’indication d’exérèse chirurgicale d’une lésion bénigne doit être bien évaluée et posée avec le patient en lui expliquant la balance bénéfice/risque. Il faut mettre en perspective objectivement la gêne occasionnée par la lésion ou sa disgrâce et les séquelles cicatricielles attendues compte tenu de la situation topographique, du geste envisagé et du patient. Le risque réside essentiellement dans la visibilité cicatricielle ou dans ses complications soit par dystrophie, ectropion, bride, ou élargissement.


La dermoscopie a révolutionné la prise en charge de certaines lésions bénignes, permettant à la fois leur identification précise ainsi que le geste technique le plus adapté. L’anesthésie locale est indispensable même pour les gestes minimes, en dehors de la cryothérapie. L’analyse histologique doit être systématique.


Le patient doit aussi être informé qu’une partie des actes portant sur les lésions bénignes, dont l’indication est uniquement esthétique, ne peut prétendre à un remboursement par l’assurance-maladie.


Nous envisagerons les techniques chirurgicales, plan par plan, en fonction de la situation anatomique de la lésion, en commençant par les plus superficielles, épidermiques pouvant bénéficier d’une simple abrasion, jusqu’aux plus profondes sus, et sous-fasciales. Nous n’aborderons que les lésions courantes et accessibles à une chirurgie au cabinet, en excluant de notre propos la prise en charge tout à fait spécifique et spécialisée des grands nævus congénitaux et des hémangiomes.



Lésions épidermiques les plus superficielles


Le shaving est une technique simple et rapide particulièrement adaptée à la prise en charge des lésions bénignes car elle ne génère pratiquement pas de cicatrice. Par ailleurs, elle permet un contrôle histologique de la lésion, et est donc préférée à l’application aveugle d’azote liquide au moindre doute diagnostique, ou dès lors qu’une vérification anatomopathologique s’impose. Le shaving s’effectue classiquement avec une lame de bistouri stérile n° 11 ou 15, orientée tangentiellement à la lésion. Le geste est facilité par l’infiltration intradermique d’anesthésique local, le biseau de l’aiguille orienté vers le haut. On injecte d’autant plus en quantité, sous la lésion, que l’on souhaite un shaving plus profond. Le geste est généralement suivi d’une électrocoagulation (EC) qui, même effectuée très finement et précisément, peut carboniser inutilement la tranche de section augmentant les phénomènes inflammatoires et la profondeur de la destruction, donc la rançon cicatricielle. Nous préconisons une simple lame de rasoir [1] qui a l’avantage de s’incurver et permet donc d’ajuster parfaitement la profondeur du shaving. Le geste est plus sûr, sans cisaillement ni effilochage. Il peut s’agir d’une lame type Gillette (Figure 10.1) coupée en deux, stérilisable, mais aussi d’une lame sous emballage stérile, à usage unique, protégée par une coque plastique souple, permettant l’incurvation de la lame dans les deux sens sans risque de se blesser. Il nous semble préférable de remplacer l’EC par l’utilisation d’un hémostatique de contact [1]. Le chlorure d’aluminium est peu efficace, un alginate type Coalgan s’avère difficile à gérer du fait de la constitution d’une croûte saignant de nouveau à l’ablation du pansement. L’acide trichloracétique à 33 % apparaît trop caustique, source d’achromie potentielle, et ne se neutralise pas. Il est cependant souvent utilisé. Le chlorure ferrique en cristaux dilués à 20 % dans de l’eau, appliqué au coton-tige sur champ exsangue, ne laisse pas de pigmentation résiduelle, contrairement au chlorure ferreux, et a notre préférence (Figure 10.2). Cette préparation se périme rapidement, en 2 mois environ, et doit donc être conditionnée en petites quantités. Le chlorure ferrique est efficace chez les sujets sous anticoagulants. La cicatrisation est très rapide, en une semaine, favorisée par des pansements hydrocolloïdes.












Nævus verruqueux ou hamartome verruqueux


Sa disposition est le plus souvent linéaire ou métamérique, suivant une ligne de Blaschko, notamment dans le cuir chevelu (Figure 10.8). Les récidives ne sont pas exceptionnelles car il existe un véritable réservoir annexiel. Un geste chirurgical n’est raisonnablement envisageable que pour des lésions de petite taille ou linéaires. On préconise donc souvent une vaporisation au laser CO2.




Lésions dermoépidermiques plus profondes




Nævus pigmentaire


L’ablation d’un nævus est motivée par un problème diagnostique, ou pour une demande esthétique ou fonctionnelle. L’histologie est systématique, et un examen dermoscopique préalable est souhaitable, ce qui permet de réduire considérablement le nombre d’exérèses inutiles à visée diagnostique. L’aspect sous lequel se présente le nævus peut être très variable et conditionne le geste chirurgical en fonction de son caractère pédiculé ou non, achromique ou pigmenté, pileux, congénital ou acquis. Il s’agit dans la plupart des cas de lésions acquises, dont le développement a été lent et progressif.



Exérèse suture fusiforme


C’est la méthode la plus couramment utilisée. Un plan profond sera toujours réalisé, la suture superficielle la plus adaptée sur les membres et le thorax étant représentée par le surjet intradermique. L’absence de plan profond est une source systématique d’élargissement cicatriciel, et les points séparés laissent des marques en échelle de perroquet très inesthétiques. Sur le visage, des points séparés ou un surjet simple sont possibles compte tenu du délai d’ablation des fils qui est très court. La marge habituellement prise est de 2 mm [5], une incision trop au ras de la lésion exposant au risque de résurgence pigmentaire. On mettra à profit les différents raffinements utilisés pour la réalisation du fuseau et de ses variantes, développés dans le chapitre « Exérèses fusiformes » (page 43), pour assurer le meilleur résultat. Ainsi, les artifices de réduction de la longueur cicatricielle sont les bienvenus, de même que la correction des excès tissulaires [5] (Figure 10.9).



Quelques cas particuliers sont à souligner :



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Apr 23, 2017 | Posted by in DERMATOLOGIE | Comments Off on Chirurgie des lésions bénignes

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