23. Alcoolisme
Définition
La définition de l’alcoolisme ne fait l’objet d’aucun consensus. Selon l’OMS : « les alcooliques sont des buveurs excessifs, dont la dépendance à l’égard de l’alcool conduit à une consommation responsable d’un trouble, mental ou physique décelable et affectant le comportement, les relations sociales et familiales et le statut économique du sujet ».
Actuellement, on distingue : la dépendance à l’alcool et l’abus d’alcool.
Dépendance à l’alcool
L’alcoolisation se fait en dehors des habitudes sociales et culturelles (par exemple boire le matin), elle est incoercible (impossible de s’arrêter de boire) et entraîne un syndrome de sevrage (symptômes physiques tels les tremblements) qui nécessite une prise d’alcool de plus en plus importante (phénomène de tolérance).
Abus d’alcool
L’alcoolisation conduit à une altération du fonctionnement ou à une souffrance, mais il n’y a pas de dépendance. Les critères sont les mêmes pour l’utilisation de drogues.
L’abus d’alcool a un meilleur pronostic si la prise en charge est précoce.
Épidémiologie
L’alcool serait responsable de plus de 37 000 décès par an (troisième place), il est également responsable de près de 40 % des accidents de la voie publique.
On estime en France qu’il y aurait plus de 2 millions d’alcooliques dépendants.
Étiologie
Pourquoi certaines personnes consommeront de l’alcool tout au long de leur vie sans complication et d’autres deviendront alcooliques est une question complexe. Plusieurs facteurs entrent en jeu : la dimension sociale (dans certains milieux il est « anormal » de ne pas boire), l’effet anxiolytique de l’alcool (qui peut aider des « timides » à se sentir plus à l’aise) et des facteurs biologiques (il y aurait une prédisposition à la dépendance).
Diagnostic
On distingue plusieurs types de manifestation clinique de l’alcoolisme. L’ivresse peut survenir chez un patient alcoolique ou non. En revanche, le syndrome de sevrage, les encéphalopathies, les complications métaboliques, psychiatriques et autres ne surviennent qu’en cas d’intoxication alcoolique chronique.
Ivresse aiguë simple
Selon le degré d’alcoolémie (taux d’alcool dans le sang en grammes par litre), on va observer d’abord une phase d’excitation psychomotrice (euphorie, désinhibition, agressivité), puis une phase d’incoordination (syndrome cérébelleux : perte de l’équilibre, troubles de l’attention) et enfin une phase de coma.
Ivresse aiguë pathologique
Il en existe plusieurs types :
– excito-motrice : crise clastique avec risque de passage à l’acte hétéro-agressif ;
– hallucinatoire : hallucinations auditives ou visuelles ; le sujet se sent persécuté d’où le risque de passage à l’acte hétéro-agressif ;
– délirante : syndrome délirant variable : thèmes de jalousie, mégalomanie… ;
– convulsive : crise convulsive chez des sujets prédisposés ou ayant une épilepsie connue.
Syndrome de sevrage
Le syndrome de sevrage survient chez des patients alcooliques chroniques qui arrêtent brutalement leur consommation d’alcool (par exemple lors d’une hospitalisation pour un autre motif).
Les patients alcooliques ont le plus souvent des signes d’imprégnation alcoolique : visage rouge, congestionné, télangiectasies sur le visage (dilatation de vaisseaux sous-cutanés), œdème des paupières inférieures, conjonctives jaunes, tremblements des extrémités, brûlures d’estomac, pituites (remontées acides dans la bouche le matin), etc. Par ailleurs, leur bilan biologique est perturbé : élévation des gamma GT, augmentation du VGM (volume globulaire moyen) de la GLDH (glutamate déshydrogénase), des transaminases (ALAT, ASAT), de l’uricémie et diminution de l’urée.
Le syndrome de sevrage se manifeste quelques heures après la dernière ingestion d’alcool par un tremblement des extrémités, des sueurs abondantes, une anxiété, une agitation, des vomissements et des troubles du sommeil.
Il peut se compliquer de crise convulsive et de syndrome délirant appelé delirium tremens.
☛ Le delirium tremens
C’est une des complications du sevrage alcoolique. Il survient chez des patients alcooliques chroniques qui arrêtent brutalement leur consommation d’alcool.
Cliniquement, on trouve des tremblements, une fièvre, des sueurs, des signes de déshydratation, des crises convulsives et un syndrome délirant composé essentiellement d’hallucinations visuelles (bêtes rampantes…).
Le risque vital est engagé. C’est une urgence médicale.
Encéphalopathies alcooliques
◗ Encéphalopathie de Gayet-Wernicke
Elle est due à une carence en vitamine B1 (thiamine). Il s’agit d’un syndrome confusionnel d’installation progressive, associé à des troubles oculomoteurs (diplopie, strabisme), des troubles de la marche (syndrome cérébelleux) et une hypertonie avec opposition. L’évolution se fait dans plus de 80 % des cas vers un syndrome de Korsakoff.
◗ Syndrome de Korsakoff
Il est dû à la lésion du circuit hippocampo-mamillo-thalamo-cingulaire (impliqué dans la mémoire). Il associe un trouble de la mémoire avec impossibilité de se souvenir de tout ce qui est survenu après l’installation du syndrome, une fabulation et des fausses reconnaissances (typiquement on rentre plusieurs fois dans la chambre du patient au cours de la même journée et il ne nous reconnaît pas, voire il nous prend pour quelqu’un d’autre). Le syndrome de Korsakoff est irréversible.
◗ Démence par atrophie cortico-sous-corticale
Elle est secondaire à la carence en vitamines B et PP et à l’action de l’éthanol. Le tableau clinique est celui de la démence : troubles de l’attention et de la mémoire, troubles du caractère, du jugement et de la critique.
◗ Maladie de Marchiafava-Bignami
Elle est due à l’atteinte du corps calleux. Elle associe une encéphalopathie, des troubles moteurs (hypertonie des membres) et des crises convulsives. L’évolution est mortelle assez rapidement (quelques mois).