Chapitre 7 Prise en charge chirurgicale des torsions d’annexes
L’apport diagnostique considérable de la cœlioscopie a révolutionné cette pathologie à la fin des années 1970 [12, 21, 23]. Mais surtout cette voie d’abord a permis de réactualiser le traitement conservateur des torsions d’annexe, rapporté par Way en 1946 [34]. Comme Way, Manhès a tenté le traitement conservateur d’une annexe unique porteuse de lésions ischémiques sévères chez une patiente jeune [23]. Comme en 1946, la récupération complète de l’annexe a permis la naissance d’un enfant. Ce traitement conservateur n’était pas utilisé, en raison d’un risque théorique de migration des caillots de la veine lombo-ovarienne avec embolie pulmonaire [19]. Une revue de la littérature montre que cette complication, décrite au début du XXe siècle après un diagnostic très tardif, n’est pas plus fréquente après détorsion qu’après annexectomie [19].
Bilan préopératoire
Chez les patientes en période d’activité génitale, un dosage de HCG préopératoire est utile pour distinguer l’hématosalpinx, induit par la torsion de trompe normale, d’une torsion de GEU [23].
Formes cliniques
Il existe deux formes cliniques :
• les formes aiguës, véritable urgence chirurgicale, de diagnostic préopératoire difficile, et qui sont associées à des lésions ischémiques plus ou moins sévères ;
• les formes chroniques sans ischémie, découvertes fortuitement lors d’interventions réalisées pour le traitement de masses annexielles.
Mise en place de la cœlioscopie
La technique est celle qui est décrite par ailleurs dans ce livre. Les seules précautions particulières peuvent tenir au volume de l’annexe comme décrit dans le chapitre 6.
La fréquence des lésions malignes est plus faible parmi les masses annexielles tordues [31], mais il faut, comme dans la prise en charge de toute masse annexielle, débuter la cœlioscopie par une cytologie péritonéale et une inspection de l’ensemble de la cavité abdominale à la recherche de signe de malignité.
Diagnostic
Diagnostic positif
Le diagnostic cœlioscopique est le plus souvent évident devant une annexe augmentée de volume, dont l’inspection des pédicules permet d’affirmer la torsion (fig. 7.1).
Ce diagnostic peut être difficile si le kyste très volumineux gêne l’inspection du pédicule (fig. 7.2 et 7.3), ou parce que la torsion évolue depuis plusieurs jours ou semaines et que l’annexe ischémiée est recouverte par les adhérences qu’elle a contractée avec les organes de voisinage.
Technique opératoire
Détorsion (fig. 7.1, 7.4 et 7.5)
Ce geste simple est réalisé avec un palpateur mousse ou une pince atraumatique. Il faut :
• reconnaître le sens de la rotation ; selon Kustner, la torsion se fait en direction de l’utérus, dans le sens horaire à gauche et anti-horaire à droite [14]. Cette règle est logique ; l’annexe tourne dans la direction où il existe de l’espace, elle ne peut se faire en direction de la paroi pelvienne ;
• préférer la mobilisation de l’annexe à la préhension qui est traumatique pour ces tissus fragiles ;
• revenir progressivement, à la situation anatomique normale, grâce à des rotations successives de 90° à 180° ;
• utiliser un deuxième instrument pour stabiliser le résultat intermédiaire obtenu ;
• s’aider de gestes complémentaires, tels que la ponction d’un kyste ou la section d’une bride autour de laquelle serait organisée la torsion.
Lésions ischémiques
L’étude des patientes opérées dans notre service a permis de distinguer trois stades de lésions ischémiques [21, 23].
Difficultés du diagnostic
Cette difficulté du diagnostic de gravité des lésions ischémiques a conduit un groupe israélien à proposer une attitude différente [5, 28, 30]. Pour ces auteurs, la détorsion est systématique, mais aucun autre geste opératoire n’est réalisé en urgence, l’annexe est systématiquement préservée, et le traitement de l’étiologie n’est réalisé que lors d’une cœlioscopie de contrôle.
Par la suite, la récupération des lésions ischémiques doit être confirmée. La cœlioscopie de contrôle que nous avons utilisée au début de notre expérience n’est pas utile si l’étiologie a été traitée. À l’inverse, le suivi échographique paraît important [28, 32].
Diagnostic et traitement de l’étiologie (fig. 7.10 à 7.16)
Chaque étiologie relève d’un traitement spécifique [3, 4, 6, 7, 11, 13, 15, 16, 31] (tableau 7.1). Les techniques ne sont pas spécifiques de la torsion d’annexe et ont été décrites par ailleurs.
Fig. 7.11 Image de détorsion. La canule de lavage maintient le résultat, le palpateur poursuit le geste.
Fig. 7.12 Fin de détorsion. Noter la récupération quasi complète de l’annexe et de la couleur de la trompe.
Résultats
Les lésions ischémiques étaient légères dans 40 cas (55,6 %), sévères dans 17 cas (23,6 %). L’annexe était nécrosée dans 15 cas (20,8 %). Le traitement en fonction de la sévérité des lésions ischémiques est présenté dans le tableau 7.2. Soixante-quatre patientes ont été traitées par cœlioscopie (88,9 %) et 8 par laparotomie (11,1 %). Mais ce résultat qui inclut les années 1970 et 1980 n’est pas représentatif de notre pratique actuelle où les laparotomies sont exceptionelles. Les suites opératoires immédiates ont toujours été simples. Nous n’avons observé aucune complication thrombo-embolique. Le diagnostic étiologique des torsions est présenté dans le tableau 7.1.