Chapitre 7 Anomalies de la surface cutanée
Presque toutes lésions définies jusqu’à présent peuvent aussi comporter une altération de la surface et elles réalisent alors des lésions intriquées (ex. : une papule peut devenir nécrotique = papule nécrotique). Certaines lésions dites « primaires » dont la surface était initialement normale vont évoluer vers une altération de la surface cutanée. Cette observation explique qu’historiquement les altérations de la surface cutanée aient été dénommées « lésions secondaires ». Cependant, il s’agit d’un terme inexact, car au cours de nombreuses pathologies, ces lésions sont d’emblée présentes, sans être une étape évolutive d’une « lésion primaire ». Pour des raisons didactiques, ces lésions ont déjà été définies et rapidement abordées dans le chapitre 2. Une description plus complète est présentée ici, mais le lecteur est invité à consulter également les illustrations du chapitre 2.
La terminologie consacrée aux altérations de la surface cutanée est la suivante.
La surface de la peau est trop fine
La peau devient transparente et fripée et cette anomalie est dénommée atrophie (cf.fig. 2-4, 3-16 et cf. aussi chapitre 6). L’atrophie, lorsqu’elle touche surtout l’épiderme, est en réalité plus souvent visible que palpable.
La surface de la peau est épaissie
Elle devient alors jaune, dure, rugueuse.
Une kératose se définit comme un épaississement corné plus large qu’épais (cf. fig. 2-3, fig. 7-1). Elle se caractérise sur le plan clinique par des lésions circonscrites ou diffuses très adhérentes et dures à la palpation. La sensation à la palpation est tout à fait particulière, car la kératose donne à la peau une impression de dureté rigide qui s’avère irréductible à la pression du doigt. Au frottement s’ajoute une impression de rugosité. L’exploration à la curette confirme l’impression de dureté ; c’est tout juste si l’on parvient à détacher quelques squames.
Fig. 7-1 Kératose. Durillon. La kératose correspond à un épaississement de la couche cornée, plus étendu dans le plan horizontal (en surface) que vertical (en hauteur), alors que la corne (cf.fig. 7-2) est une kératose plus étendue en hauteur que dans le plan horizontal. Kératose et corne sont des lésions rugueuses et adhérentes, qui ne se laissent pas détacher, ou alors en provoquant un saignement, à la différence des squames et des croûtes. Dans l’exemple du durillon, il s’agit d’un épaississement de la couche cornée réalisant un aspect de peau jaune, épaissie et rugueuse. Noter que le microrelief cutané avec les crêtes et sillons dermatoglyphiques est parfaitement respecté, à la différence d’autres lésions kératosiques, comme les verrues plantaires par exemple (cf. fig. 12-55).
Une corne est une kératose plus épaisse ou plus haute que large (fig. 7-2).
Fig. 7-2 Corne cutanée. Verrues. Kératose actinique. a : lésion exophytique (poussant vers le dehors) cornée ; il s’agit d’une verrue. b : la corne siège sur une lésion rouge à peine surélevée que l’on voit aux bords, correspondant à une kératose actinique, un carcinome épidermoïde très superficiel (cf. chapitre 13). Noter par ailleurs la peau du crâne qui est rouge et brune et couverte d’innombrables kératoses actiniques illustrant le concept de la cancérisation en champ.
Une kératose millimétrique, ponctuée, couvrant et s’insinuant dans les orifices pileux est appelée bouchon corné (fig. 7-3).
Enfin, certaines lésions appelées porokératoses sont bordées par une fine collerette kératosique très caractéristique, surélevée et adhérente, les délimitant nettement (fig. 7-4).
La surface de la peau est absente
Elle est alors humide, suintante, sérosanglante ou fibrineuse. Ces lésions sont séparées selon leur profondeur. Une érosion est une perte de la partie superficielle de la peau, l’épiderme, qui guérit sans laisser de cicatrice (cf.fig. 5-8,fig. 7-5). Il s’agit d’une lésion humide, suintante, se recouvrant secondairement d’une croûte, et dont le plancher est recouvert de multiples petits points rouges (0,1 à 0,2 mm) correspondant aux papilles dermiques.
Le terme d’excoriation est parfois employé pour désigner une érosion secondaire à un traumatisme, le plus souvent le grattage (cf.fig. 4-16).
Une fissure est une perte de substance fine, linéaire et superficielle, qui n’érode pas le derme (fig. 7-6).