Chapitre 25 Imagerie des malformations du rocher
Généralités
La connaissance et la compréhension des malformations de l’os temporal ont largement bénéficié des progrès de l’imagerie et en particulier du scanner [1, 2]. Les techniques d’imagerie IRM en haute résolution apportent quant à elles des éléments particulièrement intéressants sur les anomalies du labyrinthe.
L’os temporal résulte de deux précurseurs pendant le développement embryologique (DE).
Malformations de l’oreille externe
Malformations du pavillon
On en distingue différents types : l’anotie (absence de pavillon), la microtie (fig. 25.1), la polyotie secondaire à l’évolution indépendante d’un ou plusieurs bourgeons auriculaires, l’ectopie du pavillon. Il s’agit de malformations parfois isolées, le plus souvent unilatérales (plus fréquemment à droite). Elles concernent 1/3 300 à 1/10 000 naissances [3].
Malformations du méat acoustique externe
Elles sont secondaires à une anomalie du creusement du bourgeon comblant la poche d’invagination constituée, issue de la première fente branchiale. Elles associent aux anomalies du conduit lui-même (sténose, imperforation, anomalies de trajet, duplications…) des anomalies de la membrane tympanique qui peut être absente et de l’os tympanal (fig. 25-2).
Malformations de l’oreille moyenne
Anomalies ossiculaires
Elles peuvent être isolées, ne concerner qu’un seul, deux, voire les trois osselets. Elles peuvent aller de l’absence totale de chaîne ossiculaire à des anomalies morphologiques sur l’un des osselets (anomalies de taille, non-ossification d’une portion d’un osselet, duplication, etc.). Il peut s’agir aussi de blocs ossiculaires (fig. 25-5) correspondant à la fusion totale ou partielle des osselets.
Fig. 25-5 Aplasie de l’oreille externe : bloc incudo-malléaire.
Scanner du rocher droit en coupe transversale. Présence d’un bloc incudo-malléaire complet (flèche).
Anomalies du marteau (malleus)
Les anomalies du marteau, isolées ou associées, sont observées dans 50 % des anomalies de la chaîne ossiculaires. Les aplasies totales sont observées en cas d’absence de membrane tympanique et sont donc plus fréquemment associées aux anomalies de l’oreille externe (fig. 25-6). L’absence de manche ou de tête du marteau traduit une aplasie partielle. La tête du marteau et le corps de l’enclume peuvent être fusionnés et remplacés par un bloc ossiculaire unique.
Anomalies de l’enclume (incus)
Ce sont les anomalies les plus fréquentes de la chaîne ossiculaire. Elles sont observées dans 80 % des cas qu’elles soient isolées ou associées à des anomalies des autres osselets. L’enclume peut être totalement absente ou réduite à l’état d’ébauche fusionnée ou non à la tête du marteau. L’anomalie peut ne concerner qu’une portion de l’enclume ; les hypoplasies du corps ou de la courte apophyse (processus court de l’incus) sont moins fréquentes que les hypoplasies de la longue apophyse (processus long) qui est alors très courte, incurvée vers le dedans, voire absente et remplacée par un tractus fibreux à peine visible sur les reconstructions en UHR (fig. 25-6 et 25-7). Ces anomalies du processus long de l’enclume, lorsqu’elles sont isolées, peuvent être responsables de surdités de transmission à tympan normal et justifient la réalisation d’un scanner.
La fusion de l’enclume aux structures adjacentes est possible, il peut s’agir de fusion à la tête du marteau avec formation d’un bloc incudo-malléaire articulé ou non au bouton de l’étrier, de fusion du corps de l’enclume au bouton de l’étrier ou de fusion de l’enclume aux parois de la caisse et en particulier à la paroi du canal semicirculaire latéral.
Anomalies de l’étrier (stapes)
Là encore, tous les types d’anomalie de l’étrier peuvent être observés depuis l’aplasie associée à une fosse ovale plus ou moins hypoplasique, à l’absence d’une portion de l’étrier (absence de bouton avec absence d’articulation incudo-stapédienne, absence d’une branche ou branches incomplètes) (fig. 25-8).
Les dysplasies stapédiennes sont de différents types. La déformation « en sabre », avec incurvation à concavité antérieure des deux branches est l’anomalie le plus fréquemment observée. Ces anomalies sont souvent associées aux procidences de la seconde portion du nerf facial (fig. 25-9). Elles n’ont pas obligatoirement de traduction clinique.
Il peut exister des étriers multiples plus ou moins complets, doubles, voire triples.
Toutes ces anomalies doivent être analysées en scanner ultrahaute définition avec des reconstructions dans l’axe de la fenêtre ovale et des reconstructions transversales-obliques dans l’axe de l’étrier afin de mieux comprendre la morphologie de celui-ci.
Les anomalies associées doivent, là encore, être soigneusement recherchées, en particulier les anomalies de trajet de la 2e portion du nerf facial. Il peut s’agir de trajets aberrants qui impactent sur le développement de l’étrier pendant le développement embryonnaire. Le nerf facial peut être très saillant dans la fosse ovale et être responsable d’une sténose au niveau de son ouverture dans l’oreille moyenne (fig. 25-10). L’étrier est alors volontiers abaissé ou déformé en sabre. Plus rarement, le nerf peut obturer complètement la fosse ovale et cheminer dans le fond de celle-ci (fig. 25-11). Dans les formes plus avancées, le nerf facial peut traverser la cavité tympanique à distance de sa paroi médiale, la corde du tympan peut être hypertrophiée, le nerf facial peut être double, voire triple avec un contingent traversant la cavité tympanique ou barrant la fenêtre ovale.
Toutes ces anomalies peuvent s’associer à des anomalies de la platine. En effet, les anomalies de la platine isolées (dysplasies platinaires) sont relativement rares. Elles sont plus fréquemment associées ou secondaires à des anomalies de trajet du nerf facial qui ont empêché l’induction de la formation de la platine (aplasie complète) et du creusement de la fosse ovale par perte du contact de l’étrier avec la capsule otique.
Les anomalies associées de la fosse sont donc fréquentes, elles doivent être précisées, il peut s’agir d’atrésie avec une importante procidence du nerf facial, une absence totale de fosse ovale avec, dans ces cas, un nerf facial obturant complètement la fosse ovale et entraînant une absence de platine (fig. 25-12)…