18: Oreille moyenne

Chapitre 18 Oreille moyenne



Les pathologies de l’oreille moyenne sont variées, dominées par les surdités de transmission à tympan normal (dont l’otospongiose représente l’étiologie de loin la plus fréquente), la pathologie inflammatoire et infectieuse, et enfin la pathologie tumorale ou pseudotumorale. L’imagerie a une place capitale dans la prise en charge diagnostique ou préopératoire des lésions.



Imagerie des surdités de transmission à tympan normal : otospongiose



Otospongiose : généralités et présentation clinique


Anatomopathologiquement, l’otospongiose correspond à une dystrophie osseuse primitive se manifestant par une reconstruction osseuse désorganisée anormale au sein de la couche endochondrale de la capsule otique.


L’otospongiose est la première cause de surdité de transmission à tympan normal. Elle est souvent bilatérale (60 % des cas) et asymétrique.


L’âge de découverte varie entre 15 et 45 ans.


La surdité est due à une ankylose stapédovestibulaire, en général liée à l’atteinte du ligament annulaire par un foyer de dysplasie préstapédienne dans les formes initiales. La surdité est de type transmissionnelle, parfois l’atteinte est mixte, notamment en cas d’atteinte endocochléaire, et prédomine toujours sur le versant transmissionnel. La surdité est évolutive, parfois accompagnée d’acouphènes.


Plusieurs facteurs de risque sont reconnus :






Comment évoquer le diagnostic ?







Diagnostic en imagerie


Trois notions importantes sont à retenir : un scanner peut être normal au cours des otospongioses ; les signes cliniques et radiologiques sont souvent bilatéraux, et enfin il n’existe pas de corrélation entre l’importance de la surdité et la taille du foyer en imagerie.


En scanner, les foyers de dysplasie osseuse se manifestent par une hypodensité de la capsule labyrinthique, circonscrite, à limites floues.


Les localisations préférentielles et les plus caractéristiques sont :




L’atteinte de la fenêtre ronde est à rechercher systématiquement. Elle est présente dans 30 % des cas.


L’atteinte cochléaire (18 %) prend l’aspect de double anneau péricochléaire, en général continu, mais il peut se présenter sous forme de petits foyers discontinus. L’atteinte cochléaire isolée est rarissime et se manifeste par une surdité neurosensorielle liée à l’extension des foyers de dysplasie à l’endoste de la capsule otique.


L’atteinte du conduit auditif interne (CAI), à sa partie antérieure, est exceptionnellement isolée (en général liée à une extension ultime d’un foyer péricochléaire).



Classification de Veillon


La classification établie par F. Veillon [1] permet de distinguer différentes formes radiologiques.



Un scanner normal (type 0) n’exclut pas la présence d’une otospongiose. Dans son étude, Min retrouve 27 % d’oreille atteintes d’otospongiose avec scanner normal [2].








La perte audiométrique n’est pas corrélée à la taille du foyer otospongieux ni au type scanographique.


L’IRM ne présente pas d’intérêt majeur dans le bilan initial de l’otospongiose et reste moins performante que la TDM pour détecter les foyers d’otospongiose. Toutefois, les foyers péricochléaires présentent classiquement un rehaussement modéré après injection de gadolinium.




Autres causes de surdité de transmission à tympan normal


Leur diagnostic est orienté par l’histoire clinique du patient et affirmé par le scanner. Par ailleurs, l’association d’une otospongiose à d’autres pathologies de l’oreille moyenne reste possible. Cette association lésionnelle peut être responsable de l’échec du traitement chirurgical de l’otospongiose.



Malformations


Les formes d’otospongiose juvénile sont rares et doivent être différenciées des principales malformations de l’oreille moyenne, qui peuvent être responsables d’une surdité de transmission.


Les dysplasies et aplasies mineures de la chaîne ossiculaire sont une des causes de surdité de transmission congénitale, non évolutive (fig. 18-7). Dans un tiers des cas, il s’agit d’une surdité isolée à tympan fermé. La présence d’antécédents familiaux, une sténose du conduit ou une paralysie faciale orientent le diagnostic. La fixation de la platine de l’étrier (fig. 18-7) est la malformation le plus fréquemment rencontrée [3]. Le spectre des malformations ossiculaires s’accompagne également des anomalies de trajet du nerf facial qui se rencontrent surtout dans les atteintes du 2e arc (longue apophyse de l’enclume, de l’étrier). L’analyse de l’oreille interne, et en particulier du modiolus, doit être rigoureuse en raison du risque accru d’oreille Geyser. Le traitement chirurgical des ankyloses stapédiennes congénitales permet un bon résultat fonctionnel sur l’audition [4].


Les fixations atticales, décrites par House en 1956, sont des fixations de la chaîne ossiculaire aux parois de la cavité tympanique, responsables d’une ankylose de la chaîne (fig. 18-8). Elles peuvent être d’origine inflammatoire (tympanosclérose), posttraumatique ou congénitale [5]. Lorsqu’elle est congénitale, la forme la plus classique est la fixation de la tête du marteau ; son traitement repose sur l’ossiculoplastie [5].



L’oreille de Minor peut cliniquement simuler dans certains cas une otospongiose [6]. Il s’agit d’une déhiscence de la coque d’un canal semicirculaire, en général le supérieur réalisant un phénomène de troisième fenêtre [7]. Ce mécanisme de « fenêtre de trop », entraînant une perte d’énergie acoustique, a été décrit par Tullio. Le diagnostic repose sur des critères cliniques (surdité de transmission ou mixte avec signe de la fistule, vertiges induits par le Valsalva ou par des bruits intenses) et paracliniques (réflexe stapédien présent et tympanogramme normal, VNS sous Valsalva, PEO).






Imagerie de l’otospongiose opérée





Imagerie TDM dans les échecs de traitement



Échecs liés à un déplacement de prothèse


Un déplacement de prothèse peut entraîner le même handicap fonctionnel sur l’audition qu’une luxation ossiculaire (fig. 18-11). Un barotraumatisme même minime (éternuement à glotte fermée) en est parfois la cause. Le déplacement peut intéresser l’extrémité médiale du pied du piston, au niveau de la fenêtre ovale. Un piston trop court, avec diastasis entre la prothèse et la fenêtre ovale, est une cause d’échec immédiat de la chirurgie. Le déplacement peut également intéresser la partie latérale de la prothèse, souvent en rapport avec une désinsertion du « crochet », au niveau de la branche descendante de l’enclume (BDE). Ce type de déplacement peut être dû à un crochet trop serré, responsable d’une érosion focale de la BDE. Tout déplacement peut aboutir à une luxation du piston dans la caisse.







Imagerie des complications postopératoires









Imagerie de la pathologie inflammatoire de l’oreille moyenne



Otite moyenne aiguë


L’otite moyenne aiguë (OMA) purulente se présente sous forme d’une otalgie intense pulsatile et fébrile. Elle est parfois accompagnée d’une otorrhée purulente en cas de perforation de la membrane tympanique.


Le traitement de première intention s’appuie sur une antibiothérapie probabiliste à large spectre actif contre les souches bactériennes communautaires d’Haemophilus influenzae, de Streptococcus pneumoniae, et de Branhamella catarrhalis.


Le bilan d’une OMA non compliquée ne requiert pas d’imagerie. La suspicion de complications intra- ou extracrâniennes justifie la réalisation d’un examen d’imagerie adapté (TDM ou IRM).



Complications des OMA


(tableau 18-1) (fig. 18-15)


Tableau 18-1 Complications des OMA. (fig. 18-15)

































Mastoïdite et abcès postauriculaire
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Rare chez l’adulte
Bilan : prélèvements à visée bactériologique, TDM injectée à la recherche d’autres complications
Traitement : antibiothérapie IV et traitement chirurgical
Abcès rétro-auriculaire (fig. 18-16)
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Complication fréquente lorsque l’infection s’étend à l’espace sous-périosté par destruction corticale ou phlébite des veines mastoïdiennes
Sémiologie : OMA + décollement du pavillon de l’oreille et comblement inflammatoire du sillon rétro-auriculaire
Bilan TDM : recherche des complications endocrâniennes
Traitement : drainage de l’abcès et antibiothérapie
Abcès des espaces profonds du cou et de la face
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Abcès de Bezold : abcès cervical secondaire à une OMA, développé à partir de la pointe mastoïdienne via l’insertion du muscle sterno-cléido-mastoïdien
Abcès temporo-zygomatique : extension de l’infection en avant vers la loge zygomatique
Imagerie : TDM injectée pour le diagnostic et le bilan d’extension
Traitement : traitement de la porte d’entrée (OMA) et drainage chirurgical
Pétrosite (ou apicite) apicale bactérienne
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Mastoïdite étendue à l’apex pétreux en cas de pneumatisation de l’apex (supra-, infra-ou rétromastoïdienne)
Syndrome de Gradenigo
Définition clinique : otalgie, fièvre, douleur clinique associées à une paralysie de la VIe (parfois VIIe et VIIIe) paire crânienne
Imagerie : TDM + IRM pour bilan d’extension
Paralysie faciale
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Pathogénie : atteinte infectieuse soit par insuffisance de recouvrement osseux du canal facial soit par destruction de ce dernier par du tissu de granulation
Labyrinthite aiguë
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Sémiologie : syndrome vestibulaire aigu au cours d’une OMA
Imagerie : l’IRM confirme l’atteinte inflammatoire du labyrinthe (prise de contraste en T1)
Traitement : antibiothérapie et paracentèse
Évolution : toujours vers la cophose
Méningite
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Les méningites otogènes sont moins fréquentes depuis les campagnes de vaccinations
Sémiologie : syndrome méningé fébrile au cours d’une OMA
Bilan : prélèvement et ponction lombaire + IRM + TDM (recherche d’une brèche ostéoméningée)
Traitement : antibiothérapie IV prolongée et adaptée ± mastoïdectomie
Abcès cérébral
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L’OMA est la troisième cause d’abcès cérébral
Localisation : cervelet ou lobe temporal
Pathogénie : extension rétrograde par thrombophlébite suppurée des veines diploïques
Sémiologie : OMA compliquée de fièvre et de signes neurologiques
Traitement : drainage d’abcès, paracentèse et antibiothérapie
Empyème sous- ou extradural
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Sémiologie : OMA + fièvre, malaise général et céphalées localisées, puis syndrome d’hypertension intracrânienne et déficit neurologique
TDM : hypodensité en croissant le long de la table interne
IRM : croissant en hyposignal T1, hypersignal T2
Traitement : neurochirurgical et antibiothérapie adaptée
Thrombophlébite du sinus latéral
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Sémiologie : septicémie et syndrome d’hypertension intracrânienne (par insuffisance du retour veineux cérébral)
Bilan TDM et IRM avec angio-IRM + hémocultures et prélèvements + recherche de coagulopathie
Traitement : anticoagulation, antibiothérapie et traitement de la porte d’entrée

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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 18: Oreille moyenne

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